LE
JOURNAL D'APRES ET DE L'ARRONDISSEMENT.
IV 757. 8e innée.
Dimanche, 6 Août 1818.
Vires acquint eundo.
INTERIEUR.
Maurice.
iwm-— a.
ABONNEMENTS A"près (franco), par trimestre, 3 francs 30 c. Provinces, 4 francs.
INSERTIONS Annonces, la ligne la centimes. Réclames, la ligne 50 centimes.
Le Pbot.rès parait le Jeudi et le Dimanche,
être adressé l'éditeur, Marché au Beurre. -
Tout oc qui concerne le journal doit
On ne reçoit que les lettres affranchies.
VPRF.Sle 5 Août.
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Defmis l'avènement d'un ministère libéral au pouvoir
aucune question n'a aussi vivement préoccupé le gou
vernement que la question des Flandres. Elle a absorbé
toute l'attention du cabinet et non sans de graves motifs,
carie paupérisme que nous avons vu naître, grandir, et
la findéborder, est arrivé ce point qu'il faut néces
sairement mettre une digue, ses envahissements. Tout
homme de bonne foi doit avouer maintenant, que les re
mèdes sont devenus d'une application plus difficile, depuis
que les événements extérieurs ont réagi sur nos rela
tions commerciales existantes et arrêté depuis quelque
temps la production.
Cependant cette complication malheureuse pour nos
compatriotes n'a pas arrêté le ministère dans ses efforts,
et bien que la plaie fut devenue plus envenimée, il l'a
sondée hardiment sans reculer devant les difficultés. A
son avènement au ministère, M. Rogier a dit que la solu
tion de la question des Flandres était une question d'hon
neur pour le pays. A ce point de vue, tous les hommes les
plus compétents dans les questions économiques, ont été
consultés et, sans perdre du temps, le ministère, en dis
posant des ressources que lui allouait le budget, a donné
un grand développement aux travaux publics et commu
naux. Des ateliers modèles ont été institués pour rendre
populaire les améliorations introduites dans les modes de
tissage et apprendre aux tisserands confectionner d'au
tres étoffes. On a taché de régulariser les opérations de
l'ancienne industrie linière et de rendre les fabricats
d'un débit plus recherché. Mais tous les moyens qu'on a
employés ne peuvent produire un effet instantané, ni
assez efficace pour conjurer immédiatement une situa
tion des plus pénibles.
Des publieistes de l'espèce mécontenteont pris pour
thème d'opposition au ministère, la question des Flandres.
Ils s'étonnent que tous les maux ne soient guérisque la
prospérité ne soit revenue au sein de ces localités que
l'industrie a longtemps maintenu dans des conditions heu
reuses. Mais ces critiques d'une bonne foi douteuse, on
pourrait répondre qu'un mal qui date de longtemps
ne peut être guéri du jour au lendemain les moyens hé
roïques ne sont pas de saison dans des cures de ce genre.
Vouloir changer 1a situation économique de ces contrées
instantanément, après une crise occasionnée par un chan
gement radical dans le mode de fabrication de l'industrie
toilière, c'est se mettre la recherche de la pierre philoso-
phale, et les journaux qui insinuent qu'on ne fait rien,
parce que la position des habitants de la Flandre centrale
n'a pas éprouvé un changement vuesont dans le faux.
Les maux qu'entraîne avec elle une fausse mesure écono
mique ou douanière, ne sont pas de ceux qu'on peut cica
triser du jour au lendemain.
La session ordinaire des conseils provinciaux a fourni
l'occasion au ministère de faire connaître son plan pour
venir au secours des Flandres et soumettre l'apprécia
tion des assemblées représentant ces provinces, les remè
des qu'il veut appliquer une situation déplorable. Cette
communication a fourni un texte pour critiquer amère
ment le cabinet et a donné naissance des insinuations
malveillantes. Quoi de plus simple cependant, pour le
ministère, que de faire connaître ses projets aux conseil
lers provinciaux des deux Flandres, et d'appeler son
aide les connaissances pratiques et la parfaite entente des
intérêts de la Flandre centrale que possèdent les repré
sentants directs des cantons rongés par le paupérisme.
Mais si le ministère eut tenu une conduite autre, il eut
été blamable, la question est trop palpitante pour qu'on
n'appelle pas le concours de toutes les lumières, pour
qu'on ne consulte même pas toutes les autorités des
provinces où se trouve le siège du mal.
Nul plus que M. le gouverneur ne serait plus apte
traiter cette question, et si un remède efficace et d'un ef
fet instantané pouvait être appliqué, il le trouverait, nous
en sommes convaincus, car c'est sous son administration,
nous dirons presque sous son règne, que les germes de
cette maladie sociale-se sont développés, ont grandi et en
vahi enfin de proche en proche des contrées jusqu'ici en
dehors de l'action démoralisante du paupérisme. On s'at
taque toujours au ministère, mais que ne s'étonne-t-on de
la placidité de M. De Muelcnaere, qui voit que tout le
monde se remue pour trouver une issue la question des
Flandres et qui reste impassible, bien que cependant dans
cette cure nul plus que lui ne pourrait être le médecin
d'une expérience plus consomméeattendu qu'il a vu
cette plaie commencer poindre, s'étendre, infecter les
parties saines et enfin menacer l'existence d'une popula
tion jadis prospère et riche.
Du reste, nous n'ajoutons aucune importance aux in
sinuations des journaux, qui veulent faire croire qu'en
envoyant son plan l'appréciation des conseils provin
ciaux le ministère a voulu rejeter le fardeau sur d'au
tres. La responsabilité du pouvoir restera entière et
M. le ministre de l'intérieur a dit lui-même, qu'il ne veut
pas décliner le poids de cette question.
Aux termes d'un article inédit du Code de procédure
tout plaideur qui perd son procès, a, durant vingt quatre
heures, le droit de maudire ses juges. Si M. Lambin-
Mortier, éditeur du journal le Propagateur ci candidat
malheureux au grade de capitainelors des dernières
élections de la Garde civique, s'était contenté d'user de ce
droit, nous nous serions empressés de lui adresser nos
compliments de condoléancede mêler nos larmes aux
siennesmais il en a abusé il a cherché mordre tort
et travers. Un mot de réponse peut être utile.
Il fallait tout prix une bataille politique, dit-il. Voyez-
vous percer l'oreille du guerrier, une bataille! Ventre
Saint-gris tel est le rêve argenté de Téditeur-soldat
dont l'imagination a été frappée par l'éclat d'une paire
d'épaulettes d'argent en perspective. L'affaire était toute
personnelle, c'est votre avis aujourd'hui, mais si votre
nom, confrère, était sorti victorieux de l'urne, oh alors
il n'en eût plus été ainsiles serpents et chantres des
quatre paroisses eussent entonné par ordre supérieur, de
toute la force de leurs poumonsdes chants de victoire
sur l'air de l'Alleluia mis en variations les échos d'alen
tour se fussent chargés de répéter les cantiques joyeux et
discordants et les autans déchaînésque vous invoquez
poétiquement, eussent porté au loin, la nouvelle de votre
triomphe orageux En tète de votre journal, on eut lu
mercredi dernier, un article commençant peu près
ainsi: le Dieu des armées qui, du haut de son trône céleste
apperçut les efforts intrigaillants d'une clique remuante, le
Dieu qui créa le inonde en six jours a voulu que M.
I.ambin-Mortier, notre éditeur, fut créé, en moins d'une
heure, capitaine de la 2e compagnie de la Garde civique
de la villed'A'pres. Le parti libérâtreconsterné et abattu,
gît dans la poussière, la clique est réduite en poudrela
coterie est foudroyéecar la morale publique est vengée
et ainsi de suite.
Mais quittons un instant les hautes régions où la tem
pête politique rugit, siffle, bruit et tonne.
La question était personnelle, elle était destinée se
vider paisiblement, dites-vous; n'a-t-clle pas été résolue
contre vous, confrère, d'une manière toute pacifique, et
les gardes, ainsi que tous les citoyens, n'avaient-ils donc
pas le droit de préférer votre concurrent vous? d'ex
primer leur conviction cet égard avec d'autant plus
i. la sa1nt£-1ab11!.
(suite.)
Tous ces toasts, arroses de vin de Champagne, sont
suivis de longues acclamationsle dernier surtoutcar
une députation de la jeune Sainte-Barbe est là vis-à-vis
le président. lous ceux qui ont été les premiers dans
leur classe sont invités celte fête de famille, et l'on ne
peut voir sans émotion ces petites figures riantes et fraî
ches, 1 air curieux et étonné, aux cheveux abondants et
bouclés au milieu des tètes grisonnantes et des fronts
brunis qui les entourent. C est le présent et l'avenirce
sont toutes les générations comme toutes les opinions qui
se confondent et trinquent ensemble... le député de l'op
position le légitimiste et le conservateur. Dans ce mo
ment-là, il n y a plus de partis, il n'y a que des barbistes.
Le dessert arrive, et tout finit, connue autrefois, par des
chansons. Il y a là quelques vieux auteurs de vaudevilles
qui apportent leur contingent, lequel, quoiqu'il advienne,
est toujours trouvé délicieux et applaudi avec transport.
0 amitié de collègetu es capable de tout Enfin sonne
1 heure de la retraite on se donne une dernière poignée
de main, on se sépare, et l'on va reprendre, l'un ses opi
nions, l'autre sa fortune, celui-ci ses chagrins, et l'on at
tend une aimée de plus, la Sainte-Barbe prochaine, pour
rajeunir encore.
J étais arrive en même temps que Jules C..., et nous
avions gardé entre nous deux une place "notre ami
Maurice, qui était un peu en retard. Nous le trouvâmes
maigri et changé; mais ce qui redoubla notre étonnement,
c'est que luid'ordinaire si expansif, était triste et silen
cieux. Ni la vue de ses anciens camarades, ni le spectacle
joyeux qui nous entouraitni les éclats de cette gaité
turbulente ne pouvaient dissiper sa tristesse. Quelquefois,
il faisait des efforts pour s'animer et s'étourdirmais ce
rire contraint expirait bientôt sur ses lèvres et il retom
bait dans sa préoccupation nous l'interrogeâmes vaine
ment. Il n'avait rien. Il était bien. Il était heureux
de nous voiret en parlant ainsi un sombre accablement
se peignait sur tous ses traits. C'est nerveux, me dit
le docteur en sortant, c'est une fatigue de cerveau, il
travaille trop; j'irai demain le voir.
En effet, sa première visite, le docteur passa chez
lui. Maurice était sorti de grand matin cheval pour le
bois de Boulogne.
Le docteur y retourna dans la matinée. Il y avait un
déjeuner de garçons chez Tortoni
Il y passa le soir-très tard. Il était aux Italiens. Une
maladie qui s'annonçait par de pareils symptômes in
quiéta beaucoup l'excellent docteuril hésita cependant
toute une semaine encore m'en parler; mais le mal
s'aggravaitje le vis arriver un matin ému et agitélui
qui ne se troublait guère.
Cela va mal, me dit-il, Maurice est en danger.
Tu l'as vu
Oui, chez moi, ce matin; car chez lui impossible
de le trouver... Il est venu m'annonccr qu'il renonçait
l'importante affaire qu'on lui avait confiée ma recom
mandation et par laquelle il devait débuter au palais. Il
se délie, dit-il, de ses forees et de son talent.
C'est de la modestie.
Tu n'y es pas; ce jeune homme va perdre son état,
il est ianeé il se dérange.
Ce n'est pas possible Lui sage depuis si longtemps
Raison de plus pour que l'explosion soit terrible.
L'équilibre tend toujours se rétablir, et je crains qu'il
ne devienne maintenant aussi extravagant qu'il a été rai
sonnable. Aussi effrayé que le docteur, je courus aux
informations, elles n'étaient rien moins que rassurantes
le modeste et timide Maurice fréquentait les roués de nos
jours, la jeunesse dorée, les héros de la mode. Il avait
pris leur ton, leurs manières, leur eigarre et surtout leurs
folles dépenses. 11 avait deux chevaux et un groom. Et
puis, il jouait, au cluble wisth 50 francs la fiche, et
perdait parfois dans sa soirée le billet de 1000 francs.
Mais ce n'était rien encore lié avec un banquier, il jouait,
d après ses conseils et son exemplela Bourseoù la
fiche est est encore plus chère. Je tremblais pour les
quatre mille livres de rente de son père, et je me deman
dais en voyant une métamorphose si prompte et si in
vraisemblable
Comment en un plomb vil l'or pur s'est-il changé-
Je me persuadais qu'on l'avait calomnié ou que l'on se
trompait et que tous ces rapports étaient infidèles il prit
soin de m'en attester lui-même la vérité. Je le vis arr.ver