Faiti» divers.
PRUSSE. Berlin 22 septembre. On a pla
cardé sur les murs de la capitale la déclaration suivante
émanée évidemment de l'assemblée nationale:
Citoyens habitants de Berlin
Il s'élève un nuage menaçant qui peut-être remettra
en question l'existence de l'assemblée nationale qui re
présente tout le peuple, vous-mcme, la cause de la liberté,
la cause du peuple. Concitoyens, en présence de ces dan
gers, c'estun devoir sacré pour quiconque est franchement
dévoué la cause du peuple, la cause de la liberté de
ne pas fournir l'arbitraire le prétextemême le plus
léger, de recourir l'emploi de sa force.
Le peuple de Berlinattendra dans une attention calme
et silencieuse, dans la plus rigoureuse observation de
l'ordre légal, la marche des choses, pour agir ensuite
d'une manière digne de lui. Mais nous le déclarons,
l'assemblée nationale reconnaîtra sa mission dans une
confiance inébranlable, et elle saura repousser en toute
circonstance, tout empiétement, n'importe quand et d'où
il vient.
Les journaux prussiens franchement monarchiques
constitutionnels déplorent amèrement que le ministère
soit pris en dehors de l'assemblée nationale. Ils voient
dans la formation d'un cabinet non parlementaire un évé
nement qui aggrave encore les immenses dangers de la
situation.
Frxmcfo3T, 22 septembre. On dit que les sieurs
Reinauchet Esselen,dontlesignalement avaitété transmis
aux autorités des environs, ont été arrêtés Balcnhaussen
et que M. Metternich est parvenu s'échapper en aban-
bonnant son bâton et son chapeau.
ESPAGNE. Madrid, 17 septembre. S. A. R.
l'infante, duchesse de Montpensier, a éprouvé le 11 des
douleurs qui peuvent faire regarder sa délivrance comme
prochaine.
11 doit être payé au elergé, avant la fin du mois,
un trimestre de sa dotation.
La prétendue invasion des provinces basques et de la
Navarre par les factions montémolinistes et républicaines
n'a pas encore eu lieu. Les trabucaires de Catalogne sont
poursuivis et traqués avec une extrême activité par les
troupes qui secondent les populations.
Le duc de Valence s'occupe en ce moment de réunir
tous les éléments indispensables pour la prompte destruc
tion des factions de Catalogne et du Maertrazgo, il a
envoyé dans la province de la Mancheun général et
quelques officiers qui connaissent parfaitement le terrain
et les habitudes des factieux.
ITALIE. A aidai: 12 septembre. Hier, vers 8
heures du soir, s'est approchée de ce port l'escadre royale
sarde sous les ordres du contre-amiral Albani. Le com
missaire de santé s'est rendu aussitôt auprès de la frégate
Saint-Michel pour remplir les formalités ordonnées, et
la libre pratique a été concédée l'escadre entière. Une
corvette portugaise est partie pour Fernambouc, par suite
des dernières insultes qui ont été faites des sujets por
tugais.
On lit dans l'Echo des Alpes maritimesdu 14 sep
tembre
L'ordre a été envoyé l'armée des Alpes pour con-
tremander les nouveaux préparatifs de guerre qui avaient
été donnés mais on croit que l'armée d'observation res
tera réunie sur la frontière jusqu'à ce que la question
austro-italienne soit entièrement terminée. L'armée des
Alpes qui allait être portée 70,000 hommes, sera main
tenant réduite un effectif de 35 40,000 hommes.
On va sans doute renoncer aussi aux divisions qui de
vaient être formées Dijon et Strasbourg.
La Palria de Florence annonce qu'il est sortide
Milan et de Pavie, un grand nombre d'Autrichiens, qui
se fortifient sur l'Adda. Elle ajoute qu'un diplomate russe
est arrivé Milan où il est en communication continuelle
avec Radetzki.
Venise est défendue par 20,000 hommes1,000
canons et une escadre de sept bâtimens. L'entretien de
qu elles ne s'en iraient probablement pas sans avoir ob
tenu satisfaction. Le banquier, malgré son génie inventif
ne voyait guère moyen de se soutrairc aux dangers im
menses qui le menaçaient de toutes partslorsque sa
femme elle-même vint son secours.
Amélie n'avait point oublié l'excellente tante dont elle
devait, le soir même, célébrer la fête, et qui, sans doute,
serait inquiète de son absence; privée de la voir, elle
voulait du moins lui écrire et lui annoncer sa visite pour
le lendemain. Son mari approuva fort cette idée: un do
mestique monterait cheval et porterait sur le champ
cette lettre.
Il y avait dans le petit boudoir côtédu salon tout ce
qu'il fallait pour écrire, et Amélie demanda ses hôtes
la permission de les quitter un instant, proposition
qui comblait dans ce moment tous les vœux du baron.
Il s'empressa d'ouvrir la porte du boudoir, tandis que
Maurice, prenant la lampe sur la cheminée, éclairait M.
et Mme d'Havrecourt.
Tous les jeunes gens s'élancèrent l'instant hors du
salon, Horace et quelques-uns pour prévenir l'arrivée de
ces demoiselles et donner contre-ordre, Alfred et les
autres pour fumer l'indispensable cigare. Maurice, M.
d'Havrecourt et sa femme venaient d'entrer dans un bou
doir Pompadour du dernier goût; asile enchanté et mys
térieux dont les panneaux offraient les dessins les plus
bizarres ou des tableaux d'un pinceau un peu hardi, mais
délicieux. Dans un enfoncement, un divan moelleux,
entouré de glaces; en face, une cheminée de marbre
carrare, où une main habile avait sculpté des amours un
ces forces dépasse une somme de 3 millions par moiset
les revenus de la ville ne vont pas au-delà de 200,000
livres.
On hésite entre Bâle et Genève pour le lieu où se
tiendront les conférences sur les affaires d'Italie.
Le prince Schwartzenbcrg est, dit-on, chargé de re
présenter l'Autriche ces conférences.
On songerait choisir pour représenter la France
M. Drouyn de Lhuys, actuellement président du comité
diplomatique de l'assemblée.
La France avait demandé que les négociations eussent
lieu Grenoble ou Valence.
11 est officiel que l'armistice est pi-olongé la de
mande de Radetzki, et l'on assure que l'indépendance de
l'Italie est reconnue comme base des négociations.
On peut regarder comme dénuée de fondement la
nouvelle que les habitants de Messine auraient fait sauter
leur ville. Ce bruit est complètement démenti par les
dernières nouvelles.
On écrit de Nîmes, au Constitutionnel
Le commissaire extraordinaire envoyé Nîmes est
l'ancien secrétaire de M. Caussidière. Aussitôt après son
arrivée, il s'est mis en relation avec les hommes du parti
très-exalté cette conduite a causé une vive agitation dans
notre pays, n
Les troubles d'Elbcuf n'ont pas eu, beaucoup près,
la gravité qu'on leur avait prêtée. Une partie des teintu
riers en draps et d'un autre corps d'ouvriers dits ouvriers
de fabrique, s'est mise en grève par suite de l'applica
tion du décret sur les heures du travail. Ils ont- voulu
empêcher de travailler les ouvriers restés dans les ate
liers ils se sont en conséquence portés vers diverses
fabriques dont ils ont cassé les vitres coups de pierres.
Mais la présence de la garde nationale a suffi pour dissi
per les perturbateurs. L'ordre est complètement rétabli.
M. le général Pfuelqui vient d'être placé la tête
du nouveau ministère prussienétait officier au service
du roi de Westphalie la bataille de Dresde, et c'est lui
qui a pointé la pièce quiau commencement de la
bataillea tué le général Moreau.
Nous apprenons de bonne source que tous les bijoux
volés chez M. De Potter-Socnens, l'exception de quatre,
viennent d etre découverts dans la maison du serrurier
De Meyer. Ils étaient cachés dans la cheminéeet c'est
sur les indications du prévenu, qui est en aveu, qu'on
les a trouvés.
Interrogé sur la manière dont il avait pu contrefaire
la clef de la maison de M. De Potter, De Meyer a répondu
que passant un jour devant la maisonil y vit le
domestique causant avec une autre personne et tenant
ostensiblement la clef en main; qu'un coup d'oeil lui
suffit pour remarquer la clef qu'il a contrefaite.
On a découvert aussi chez De Meyer quelques objets
qu'on croit prévenir de vols commis chez MM. Goetge-
beur, le chanoine Raepsaet, Bodson etc.
Chose remarquableDe Meyer jouissait en général de
l'estime publique. Il passait pour un honnête homme, et
les faits que nous venons de rapporter semblent néan
moins fournir la preuve que cet individu n'en est pas
son coup d'essai.
VARIÉTÉS.
Voici une assez bonne charge, que nous trouvons dans
un feuilletonde YOpinion publiqueayant pour titre
Chronique de province:
On est si cancanier en province, qu'on se raconte
demi-voix une épisode, qui peut donner une idée de la
culture intellectuelle et littéraire de quelques-uns de nos
fonctionnaires républicains. Dans une ville languedo
cienne ou provençale (je laisse dessein le plus grand
vague dans mes indications), Mademoiselle llaehel fut
appelée donner une représentation. Comme elle a l'ha-
peu nus, mais que réchauffait en ce moment la flamme
brillante du foyer. Cette petite pièce était du reste éclairée
par une seule fenêtre, donnant sur le jardin. Amélie
venait de s'asseoir devant une table et une écritoire de
boule ornées de ciselures et d'incrustations en or, et
Maurice posait sur cette table la lampe qu'il tenait la
main, lorsqu'un bruit lointain de voiture se fit entendre
bruit imperceptible encore, mais non pas pour l'oreille
effrayée dubaron,quise dit eului-raêmc Ce sont elles
c'est l'Opéra qui arrive il était temps Et, sans réfléchir
au mauvais effet que pouvait produire une sortie aussi
brusque, il s'élança hors du boudoir, laissant en tête
tête sa femme et Maurice.
Maurice, depuis l'arrivée de Mm" d'Havrecourt, avait
été tour tour en proie aux sentiments les plus opposés
la surprise, la joie... et l'indignation, en voyant la manière
audacieuse dont le baron se jouait de sa femme et la trom
pait sans respect et sans crainte aux yeux de tous. Il
s'était contenu pour ne pas démentir les mensonges im
pudents qu'il entendait; mais c'était surtout l'arrivée
d'Athénaïs qu'il lui avait fallu toute sa modération pour
ne pas éclater, et lorsque M"10 d'Havrecourt avait souri
et tendu la main cette fille, maîtresse de son mari, il
s'était levé et avait fait un pas dans le salon pour empê
cher ce qui lui semblait un sacrilège Et maintenant il
se trouvait seul avec cette femme, que depuis un an il
n'avait pas revueet quitravers les mers et sous un
ciel étranger, ne l'avait pas quitté un instant. Il était là
le cœur plein d'amour de désespoir et de regretdevant
elle... qui écrivait sans lever les yeux sur lui... sans
qitude et le droit de ne jamais penser qu'à son rôle, et
du'elle était lasse, d'ailleursdes fureurs d'Iîermione et
des plaintes de Phèdre, elle choisit Cinna, où elle dit,
d'une façon si admirable, le fameux Allons! Fulvie,
allons! mais, hélas! elle n'avait pas songe a la grande
scène du second acte, et voilà qu'au milieu du plus reli
gieux silence, devant quatre drapeaux tricolores la
hampe coiffés d'un bonnet rouge, en face d un public re
cruté parmi tous les montagnards de la contréele malen
contreux Cinna s'est mis déclamer les vers suivants, ces
vers de l'homme sublime, de qui Napoléon a dit que, s'il
avait vécu de son temps, il l'aurait nommé premier
ministre.
Quand le peuple est maître, on agit en tumulte;
La voix de la raison jamais ne se consulte,
Les hommes sont vendus au plus ambitieux
L'autorité livrée aux plus séditieux,
Ces petits souverains qu'il fait pour une année,
Voyant d'un temps si court leur puissance bornée.
Des plus heureux desseins font avorter le fruit;
De peur de le laisser celui qui le suit...
Le pire des états, c'est l'état populaire.
Jugez mon ami, quel scandale Rentré chez lui après
la représentation, le préfet a, dit-on, écrit, ab irato, la
lettre suivante au ministre de l'intérieur
Citoyen ministre,
M"0 Rachel vient de donner une représentation sur
notre théâtre. Elle a chanté l'hymne admirable de la
Marseillaise, au milieu de l'enthousiasme unanime, mais
on a joué auparavant une pièce d'un nommé Corneille,
que je vous dénonce comme un réactionnaire achevé.
Cette pièce est remplie de maximes infâmes contre notre
sainte et immortelle république. Peut-êtrecitoyen-
ministre, blàmerez-vous monzèle;maisjevous avertis que
si le sieur Corneille passe dans mon département, je le
ferai appréhender au corps et conduire sous bonne es
corte en prison car, nous ne saurions trop le répéter
la réaction lève la tète.
Salut et fraternité.
M. Sénard, qui est un homme d'esprit, lui a répondu,
toujours ce qu'assurent les mauvaises langues:
Mon cher monsieur,
Il y a plusieurs Corneilles. Je vois avec peine que
mes préfets ne connaissent guère que les corneilles qui
abattent des noix.
Tout vous.
Et moi, mon ami, je vous laisse sur ce bon mot qui
est un peu léger pour un ministre de l'intérieur, mais
qu'on peut pardonner un chroniqueur de province.
Michel Hubertier se présente devant la police correc
tionnelle de Paris, pour y former opposition un jugement
du 5 de ce mois, qui l'a condamné, par défaut, trois
mois d'emprisonnement pour outrages un agent de la
force publique dans l'exercice de ses fonctions.
si. le président. Hubertier quels sont vos nom et pré
noms
hubertier, avecun gros rire. Tiens vous le savez bien,
Monsieur le président; vous devez me reconnaître Michel
Hubertiertisserand, abonné la sixième.
h. le président. Certainement, nous vous reconnaissons;
car nous avons été bien des fois dans la nécessité de vous
condamner.
le prévenu. Onze foisMonsieur le président, mais je
ne vous en veux pas pour ça.
m. le président. C'est très-heureux... Mais vous n'en
devez pas moins donner vos nomprénoms et profession.
le prévenu. Je vous le dis: Michel Hubertier, 49 ans,
tisserand.
m. le président. Vous avez adressé des injures des
agents qui voulaient vous arrêter.
le prévenu. Toujours la même chose; histoire d'avoir
levé le coude avec trop d'enthousiasme.
m. le président. Les nombreuses condamnations que
vous avez subies auraient dû cependant vous corriger.
penser même qu'il existât au monde quelqu'un qui se
mourait pour elle Et depuis qu'il la connaissait et l'ado
rait, il en avait toujours été ainsi. Cet amour malheureux
et secret, qu'il avait cru cacher au fond de son cœur, tout
le monde le connaissait maintenant... excepté elle! et se
rappelant alors, avec rage, la scène du dîner, les railleries
dont il avait été l'objet, le défi... et plus encore la per
mission insolante du baron...
Eh bien! se dit-il en lui-même, puisque ce mari,
aux mœurs si pures et si vertueusesme permet d'aimer
sa femme, puisque le ciel, qui le protège en tout, le rend
si sûr de lui et de son étoile..qu'est-ce que je risque?
Je revenais en France pour me tuer... Eh bien avant ma
mort elle saura du moins combien je l'ai aimée Sa haine est
pour moi si grande, que, grâce au ciel, elle ne peut pas
s'en augmenter
En ce moment Amélie leva les yeux et fut effrayée de
sa pâleur.
Les fatigues du voyage vous ont bien changé, mon
sieur, lui dit-elle avec intérêt.
Non, madame, non, l'absence ne m'a point changé;
je suis toujours le même, malheureux pour vous et par vous.
Que voulez-vous dire! s'écria-t-elle en se levant vi
vement.
Que je ne puis vivre ainsi, et ce sera, envers vous,
ma première et ma dernière offense.
Puis, sans savoir ce qu'il faisait, hors de lui, en délire,
il tomba ses genoux et s'écria en sanglotant Maudissez-
moi, madame, car je vous aime.
(La suite au prochain n°.)