La Démocratiequi n'est pas aussi pacifique que son
titre prétend le faire croire, dit aujourd'hui, en parlant
de la représentation nationale ce n'est pas une assemblée,
c'est une foire.
On assure que quelques représentants se seraient dé
cidés proposer l'assemblée d'aviser aux moyens de se
faire respecter un peu mieux par certains organes de la
presse.
Mme George Sand écrit aujourd'hui la Réforme,
pour déclarer qne sa collaboration aux Bulletins de la
République a été entièrement désintéressée.
Que signifie donc la délibération prise en conseil du
gouvernement provisoire, pour autoriser M. Ledru-Rollin
s'entendre avec Mme Dudevant pour sa participation la
rédaction des Bulletins
La commission de Constitution est convoquée ex-
traordinairement pour demain dimanche, afin de discuter
fond la question de savoir si la nomination du président
aura lieu par l'assemblée, ou si elle sera faite par le pays,
convoqué cet effet. La commission prendra une décision
sur ce point importantqui viendra probablement en
discussion dans les premiers jours de la semaine pro
chaine.
Six avocats la cour d'appel de Paris, ont été ad
joints la commission chargée de réviser les décisions
des commissions militaires relatives aux transportés.
La commission de constitution s'est réunieen ce
moment, pour statuer sur les amendemens relatifs au
titre: Présidence de la République.
Cette question délicate de la constitution du pouvoir
sera très-probablement attaquée au commencement de la
semaine prochaine; des systèmes très-différens sont en
présence.
D'un côté, on demande que, soit définitivement, soit
temporairement, le droit d'élire le président de la Répu
blique soit réservé l'assemblée nationale. Les craintes
soulevées par la candidature probable de M. Louis Bona
parte ont inspiré cette proposition soutenue par les amis
de M. le général Cavaignac et que le général lui-même
paraît n'accepter qu'à moitié.
De l'autreon propose que l'organisation du pouvoir
soit votée dès présent, mais qu'il y ait de fait un ajour
nement au vote pour la nomination du président pendant
un an ou dix-huit mois.
Pendant ce tempsl'assemblée resterait saisie du gou
vernement, et le provisoire actuel serait maintenu.
Une autre proposition tend supprimer tout fait la
présidence de la Républiqueet conférer l'assemblée
législative unique, les pouvoirs gouvernementaux non plus
temporairement, mais d'une manière définitive.
On assure que cette dernière opinionqui serait une
organisation complémentaire de la dictature déjà votée
dit-on, par le fait d'une chambre unique, gagne du terrain
dans l'assemblée.
La séance de samedi a été fort orageuse, les inter
pellations de M. Denjoy, sur les banquets du Châlct et
de Toulouse, avaient provoqué une horrible tempête. A
deux heures nous avons vu passer par la salle des Pas-
Perdus M. Marrast, qui venait chercher M. Degousée,
questeur, et M. Duponceau, chef des huissiers. M. Cor-
bon, qui présidait était impuissant contenir le tumulte.
La Montagne était descendue et entourait la tribune:
tous ses représentants menaçaient l'orateur et peu s'en est
fallu qu'il n'ait été arraché et précipité violemment de sa
place. Protégé par les huissiers, les choses ne sont pas
allés plus loin M. Denjoy a expliqué ses paroles et a
continué son discours avec le sangfroid le plus intrépide.
De grandes précautions militairesontétéprises samedi
autour de l'Assemblée, mais sans être ostensibles. Le ma
tin, plusieurs pièces de canon sont entrées dans l'enceinte
du palais. Le nombre des troupes pied et cheval est
augmenté. Il paraîtrait que ces précautions sont prises en
vue de la pétition signée dans les faubourgs pour la mise
en liberté de M. Raspail.
Ce n'est pas seulement au Châlct de Paris, au Bou
lingrin de Toulouse, Louhans (Saône-et-Loirc), Bour
ges qu'ont eu lieu le 22 septembre des banquets commé-
inoratifs de la fondation de la république. Lyon aussi a
Prenez garde, dit alors Maurice, vous courez grand
risque de coucher ici.
Nonnon quand ma fortune devrait y passer
s'écria le banquier avec rageje ne souffrirai pas que
Maurice l'emporte en rien sur moien rien... je l'ai juré,
Et moi, j'ai fait le même serment, répondit Maurice
en lui lançant un regard menaçant.
- Eh bien donc, jouons jouons dit le banquier en
mêlant les cartes. Nous jouons vingt-cinq mille francs...
quitte ou double.
Ouivingt-cinq mille francs d'un seul coup mais
quoi qu'il arrivece sera le dernier.
C'est dit, c'est dit! Voyons d'abord qui donnera...
C'est moic'est moi Premier succès
D'Havrccourt donna et retourna le roi. Alfred, qui était
derrière Mauricepâlit.
Le roi et le point! s'écria le baron d'un air triom
phant.
Un murmure sourd parcourut l'assemblée. Le coup sui
vant il fit la vole. Tout le monde gardait le silence et
respirait peine. Alfred sentit battre son cœur avec vio
lence. Quant Maurice, il était calme et impassibleet
tout le monde admirait son sang-froid. On avait tort il
n'était pas son jeu malgré luidans ce moment encore,
son cœur et sa pensée étaient près d'Amélie.
Quant au baronson insolence était déjà revenue avec
la victoire: il avait repris sa voix haute, son regard do-
eu le sien et les développements les plus violents ont été
donnés là, comme dans les autres villes, aux toasts portés
au droit au travail, l'égalité, etc.
On assurait aujourd'hui qu'en présence de l'opposi
tion qui se manifeste de toutes parts contre la nomina
tion du président de la république par l'Assembléele
gouvernement avait reculé, et se serait arrêté au parti
suivant
Le choix du président de la république serait laissé au
suffrage universel; mais il serait introduit dans la consti
tution un amendement portant que l'élection n'aurait lieu
qu'après le vote des lois organiques.
En attendant, le pouvoir exécutif resterait tel qu'il est
constitué. (Presse.)
Voici en quels termes le Moniteur du soir rend
compte des scènes inqualifiables dont l'Assemblée natio
nale a été le théâtre dans la séance d'hier
Il s'est passé aujourd'hui l'Assemblée une scène
déplorable.
De pareils spectacles, s'ils se renouvelaient souvent,
compromettraient infailliblement le respect qu'inspire la
représentation nationale, le grand, l'unique pouvoir sur
lequel repose en ce moment le salut de la France.
On se souvient qu'un représentant, M. Denjoy, avait
dans la séance d'hier, annoncé qu'il se proposait d'inter
peller le gouvernement sur les discours prononcés et les
faits accomplis au banquet de Toulouse.
M. Denjoy, après avoir Iules récits faits par différents
journaux, s'occupait de les commenter.
Cet honorable orateur a eu le tort de proférer une
phrase malheureuse qui tendait faire supposer chez les
hommes qui professent le culte de la république de 93
l'intention d'user des mêmes moyens de gouvernement
il a prononcé le mot de guillotine.
n A peine ce mot a-t-il été proféré, et au moment où
l'orateur demandait expliquer sa pensée, des cris furieux
sont partis des bancs de la Montagne, un certain nombre
de membres siégeant sur ces bancs se sont rassemblés
autour de l'orateur en le menaçant du geste et de la voix.
D'autres membres se sont alors levés précipitam
ment des bancs opposés et sont venus se ranger égale
ment au pied de la tribune, pour protéger M. Denjoy.
h L'hémicycle est alors devenu le théâtre d'une vérita
ble mêlée, qui ressemblait presque une lutte.
Vainement M. le vice-président Corbon qui occupait
le fauteuil, s'est couvert le désordre a duré longtemps,
trop longtemps pour la dignité de l'Assemblée nationale.
11 a fallu que les huissiers vinssent se ranger sur les
deux escalieçs de la tribune, pour défendre l'orateur con
tre des tentatives d'invasion.
Nous venons de dire que nous n'approuvions pas les
paroles échappées M. Denjoy, paroles qu'il a, du reste,
expliquées et rectifiées aussitôt qu'il a pu parler; mais
nous devons ajouter, pour être justes, que l'attitude de
l'honorable orateur, en présence de cet assaut que lui
livraient quelques hommes furieux, a été admirable de
dignité, de courage et de fermeté.
Les bras croisés sur la poitrine, il semblait assister
en observateur au spectacle des violences qui le mena
çaient de si près, et quand il a pu enfin recouvrer la pa
role, il a continué son discours, et dit tout ce qu'il avait
dire avec une énergie et un sang-froid contre lequel
venaient se briser toutes les interruptions.
Les hommes de l'extrême gauche, qui sont des hom
mes de cœur, regrettent déjà, nous en sommes persuadés,
ce mouvement impétueux qui les a poussés vouloir sub
stituer l'autorité de la violence l'autorité du président,
l'autorité du rappel l'ordreet dans le fond de leur
conscience, tout en protestant avec raison, nous en con
venons, contre les paroles de l'orateur, ils rendent hom
mage sa fermeté.
L'incident soulevé par M. Denjoy a amené successi
vement la tribune M. Sénard, M. Germain Sarrut, M.
Matthieu (de la Drôme), il a été clos par quelques paroles
nettes et vigoureuses du général Lamoricièrc.
n M. le ministre de la guerre a déclaré que le gouver
nement instruisait sur les faits qui se sont passés Tou-
minatcur, son rire saccadé. A ce bruit, Maurice sortit de
sa rêverierevint luiregarda son jeuet voyant les
quatre points de son adversaire: Ah! se dit-il en lui-
même cette femme-là est née pour ma perte son image,
même en rêve, me porte malheur Chassons-la détour-
nons-cn ma pensée reportons-la sur cette jeune fille, sur
Athénaïs, qui m'aurait aimé, qui m'aime peut-être encore.
C'est la passion qu'il me faut, le seul amour qui m'inspire,
la seule déesse que j'invoque.
Je marque le point! s'écria-t-il voix haute.
Piqué sur quatre dit Alfred avec joieet un vif
sentiment de curiosité se manifesta dans l'assemblée.
Maurice gagna le second point, Alfred commença re
trouver la confiance et la parole le banquier cessa de
rire et devint silencieux. Enfin au dernier coupla for
tune, si longtemps incertaine,se déclara hautement pour
son nouveau favorila victoire ne fut pas même disputée.
Le roi et la vole s'écria Maurice en se levant. Mon
sieur d'Ilavrecourtdit-il froidement, vous me devez
cinquante mille francs vous me les enverrez quand vous
voudrez. Alfred, je prends ton cabriolet, et je retourne
Paris.
Le banquier, qui était resté attéré et muet sous le coup
qui l'avait accablé, releva la tête ce dernier motet, en
proie toutes les angoisses du joueur, obligé de renoncer
définitivement son argent et, ce qui est bien plus ter
rible, l'espoir de jouer encore, il s'écria Vous ne pouvez
Iouse, que s'il y avait des actes coupables, ils seraient
punis, et que le gouvernement saurait défendre la répu
blique contre ses adversaires de toutes les couleurs.
Les banquets démocratiques continuent être un
sujet d'émotion. On a supprimé les clubs et la liberté de
la presse. Proscrira-t-on aussi les banquets démocrati
ques dont est sorti la révolution de février?
VARIÉTÉ».
Le physicien anglais Wheatstonc vient de soumettre
aux savants de tous les pays; réunis en ce moment
Swansea, pour l'association britannique, un appareil
excessivement ingénieux de son inventionqu'il désigne
sous le nom d'horloge polaire. Cet appareil, qui fait
connaître l'heure vraie au moyen d'un rayon lumineux
émané de l'atmosphèrequelle que soit la position du
soleil par rapport la partie éclairante d'où part le rayon
est, sans contreditune des inventions les plus remar
quables de notre époque, et, si la découverte de
Daguerre et de Niepce ne nous avait déjà familiarisés
avec les merveilleuses propriétés de la lumière, ce ne
serait peut-être pas sans éprouver un sentiment d'incré
dulité qu'on apprendrait qu'un simple rayon de lumière
diffuse peut indiquer sur un cercle gradué la marche du
soleil avec autant d'exactitude qu'un rayon direct de cet
astre le fait sur un cadran solaire. L'instrument a de
plus le mérite d'une admirable simplicitécar dès qu'il
est orienté chacun peut s'en servir immédiatement sans
études préalables et sans aucun calcul faire.
L'horloge polaire de M. Whcatstone se compose d'un
tube conique, mobile autour de son axe, lequel doit
coïncider avec l'axe du monde. La plus grande ouverture,
tournée du côté du pôle, est fermée par un dique en verre
portant son centre une étoile formée de lames très-
minces do chaux sulfatéeet sur lequel une ligne droite
terminée en llèchc, est tracée dans la direction do l'une
des sections principales de l'une des lames. C'est cette
flèche qui indique l'heurecomme nous allons le voir
l'instant. A la plus petite ouverture de tube, se trouve
placé un prisme de Nicol, dont une diagonale fait un
angle de 45 degrésavec la section principale de lames
minces de chaux sulfatée.
Au-devant de la plus grande ouverture du tube est un
anneau métalliquerenfermant un disque de verreet
portant sur sa partie inférieure un limbedivisé en douze
parties principalescorrespondant chacune une heure
du jour, depuis six heures du matin jusqu'à six heures du
soir, et subdivisées en dix, pour donner l'heure de six
en six minutes. Cet anneau est fixé l'extrémité d'un
support vertial et disposé de manière que son plan soit
perpendiculaire l'axe du monde.
Maintenant voici le phénomène qui se présente lorsqu'on
place l'œil contre le prisme pour regarder dans la direc
tion du dôle: les lames minces de chaux sulfatée parais
sent, en généralrevêtues des plus riches couleurs; mais
si l'on fait tourner le tube autour de son axe, on voit
successivement ces couleurs changer d'intensité, puis
s'évanouir dans deux positions particulières.
Dans l'une de ces positions, un petit disque circulaire
ornant le centre de l'étoile, prend une teinte déterminée,
et dans l'autre la teinte complémentaire c'est-à-dire que
si la première teinte est rouge, la seconde sera verte.
C'est la couleur primitive qu'on doit s'arrêter ainsi
lorsqu'on faisant tourner le tubeon est arrivé au point
où l'étoile colorée disparaît entièrement, et où le disque
central apparaît rouge, il ne s'agit plus que de regarder
sur le limbe gradué quelle division correspond la pointe
de la flèche dont nous avons parlé plus haut; cette
division donne l'heure vraie du moment de l'observation.
Les personnes qui la physique n'est pas étrangère
reconnaîtront facilement par cette description incomplète
que l'instrument de M. Weatstonc est une application des
phénomènes de polarisation de la lumière, phénomènes
dont la découverte est due entièrement des savants
français. Mais cette application est si brillante et si
ingénieuse que le nom du physicien anglais devient
désormais inséparable de ceux des Malus et des Arago.
me refuser un dernier coup
C'est impossible répondit Alfred.
Un dernier coup... fût-ce double contre simple. Je
jouerai plutôt cent mille francs contre les cinquante que
je vous dois c'est juste, c'est loyal; n'est-ce pas, messieurs
Non, c'est assez jouer, répondit Maurice en le regar
dant froidement; vous qui vous dites si heureux, j'ai voulu
vous faire connaître un instant le malheur... et un mal
heur d'argent... une douleur de billets de banque...
qu'est-ce donc? Moins que rien, pour moi; plus forte
raison pour vous.
Eli bien si vous n'y tenez pas, pourquoi me refuser?
Justement parce que je n'y tiens paset qu'ayant
déjà trop d'argentje n'en veux pas davantage.
Eh que voulez-vous donc
Ce que je veux s'écria Maurice dont les yeux bril
lèrent en ce moment l'idée d'une nouvelle vengeance
je veux la clé que vous avez là.
Quoi dit le banquier en le regardant d'un air de
doute et comme pour s'assurer qu'il ne plaisantait pasla
clé de la maison d'Atliénaïs?
Oui, je vous la joue contre vos cinquante mille francs
Un cri d'admiration et de surprise retentit dans le
salon tous les jeunes gens battirent des mains et entou
rèrent Maurice que cette idée seule rendait un grand
homme leurs yeux, et plaçait la tète de toute la coterie
lionne et fasliiouablcdc Paris. (Lu suite au prochain w.)