un étranger attiré ici par le bourgmestrelequel ne se
trouvant pas beaucoup près dans les mêmes conditions
de fortune que son prédécesseurdevait nécessairement
dépendre davantage de l'administration, et se conformer
aveuglement aux exigences des protecteurs qui lui avaient
procuré cette place. Le comité libéral.
(La suite au prochain n°.)
Court rai, 15 Octobre 1848.
Monsieur le rédacteur,
J'ai vous entretenir d'une affaire qui, je crois, ne sera
pas encore sorti de la mémoire de nos compatriotescar
dans le temps, elle a assez bien tenue nos populations des
frontières sur le qui-vive je veux parler de l'affaire de
Risquons-tout et des services qu'ont rendus cette époque,
les employés des douanes de service sur cette partie des
limites de la Belgique et surtout de la conduite active
courageuse et adroite du lieutenant Muset.
Je ne l'ignore pas, il a été donné des récompenses aux
hommes qui se sont distingués, mais nous devons le dire
regreton a oublié de reconnaître les services rendus
cette occasion par M. Muset. C'est de l'ingratitudenous
devons le proclamercar cette époque, si un homme a
payé de sa personne, nul ne contestera, qu'aucun ne
s'est conduit plus brillamment que le lieutenant Muset.
Le général Fleury-Duray a rendu hommage h son mérite
et son activité. Les autorités communales de Dottignies
ont adressé une requête au roi pour le prier de récom
penser la belle conduite de ce fonctionnaire, dans la nuit
des 21 et 26 mars et dans les journées des 2829 et 50
mars dernier. Quoique père de familleil n'a pas hésité
voler aux avant-postes l'heure du combat, avec une
poignée d'hommes sous ses ordres.
Comment se fait-il, lorsque des récompenses ont été
données, que le lieutenant Muset a été oublié, et cepen
dant ce n'est pas la première fois qu'il se distingue. Déjà
plusieurs reprises, il a mérité d'être récompensé pour
des actes de dévouement et entre autres, pour avoir sauvé
la vie un enfant Arlon en 1841. C'est le même M.
Muset qui a pris le drapeau de la bande des Tornaeo dans
le Luxembourg, quand une tentative de révolte a eu lieu
dans cette province contre le régime nouveau issu des
journées de septembre. Vraiment c'est un fait inexpli
cable et qui doit faire supposer ou qu'il n'a pas été fait
mention de la belle conduite de cet officier ou que le mi
nistère a perdu de vue les rapports qui lui ont été faits et
par les chefs militaires et par l'autorité communale de
Dottignies. C'est avec regret que nous voyons cet oubli
du gouvernement l'égard d'un homme qui méritait
d'être honorépourson courage, et son activité dans les cir
constances épineuses où se trouvait alors placée la Belgique.
Agréez, etc.
A l'exposition nationale des tableaux de 1848, des
jeunes artistes Yprois se sont distingués. Tous les jour
naux qui ont rendu compte du salon sont unanimes
pour rendre une éclatante justice aux mérites de leurs
productions. Nous nous empressons de reproduire les
opinions des divers organes de la presse, elles doivent
intéresser nos lecteurs.
Nous lisons dans le Précurseur, d'Anvers, du 3
octobre
Bossuet se distingue toujours par le relief et la force
qu'il donne ses monuments sa porte de YAlhambra
semble jaillir du cadre.
Il y a des qualités de composition et de couleur,
mais des fautes de dessin visibles, dans la prise de voile
l'abbaye de Marchiennes, par M. Delbeke.
Le chalet au lac de Prient, par M. Roffiaen, est
délicieux d'effet. Les deux autres tableaux exposés par
le même artiste, une vallée de l'Oberland bernois et une
chute de l'Aar dans les Hautes-Alpes, sont plus travail
lés peut-être, mais sont moins bien réussis. Ces œuvres
annoncent chez M. Roffiaen un talent formé par de soli
des études.
Dans le Journal des Arts, nous trouvons l'appréciation
suivante du talent de M. Aug. Bohm
M. Bohm est, selon nous, un de nos paysagistes qui
se distinguent le plus au salon de cette année. Ses petites
toiles sont de vrais bijoux. L'effet de la lumière dans le
ciel et sur le feuillage est bien rendu; ses prairies émail-
lées de fleurs sont d'une fraîcheur et d'une vérité extrê
mes. La nature est prise sur le fait et rendue avec une
poésie pleine de charme. Dans la petite toile exposée
dans une des salles qui précèdent la galerie, il a prodigué
surtout toutes les richesses de sa palette, l'élégance de
son dessin et une grâce d'exécution qui ajoute encore aux
qualités de la peinture.
Enfin, nous croyons devoir reproduire le jugement du
critique de l'Observateur, sur cet artiste
Les paysages de M. Bohm méritent encore d'être
cités parmi les meilleurs. On voit que M. Bohm étudie la
nature, il cherche le bord d'un étang, d'un ruisseauet
quand il l'a trouvé, il s'assied et se met peindre. C'est
toujours une eau limpide et reflétant le ciel, des joues,
des saules, des arbres qui se mirent dans l'eau, des ber
ges couvertes de gazon, de petits sentiers les plus pitto
resques du monde, une ornière pleine de pluie dans
quelque chemin creux poétiquement effondré. Le ciel,
l'eau, le feuillage, voilà ses seuls conseillers, qu'il doit
toujours écouter, il s'en trouve bien. M. Bohm a une
toucha adroite et non mesquine, il ne peint pas tout de
la même manière, il ne pointillé pas l'excès, il masse
son feuillage. Sa couleur est harmonieuse et en même
temps varié, ce qui est un grand mérite. Tant d'autres
croient d'être harmonieux qui ne sont que monotones. i>
\OMn iTIOA DES BOURGMESTRES ET ÉCHETI1VS
DES COMME.TES DE L'IRHO A DISK F M F\T D'ïPRES.
Par suite du renouvellement intégral des eonseils
communaux, le Roi, par arrêté du 13 Octobre 1848, a
nommé Bourgmestres et Échevins des communes de l'ar
rondissement d'Ypres les personnes désignées ci-après
Bas-Warnêton. Bourgm. M. Verstraete, C. échev.
MM. Vandermeerscli, J.-B., Lepoutre, C.
Becelaere. Bourgm. M. Bayart, F.; échev. MM.
Delfortrie, Ives, Yuylsteke, C.
Bixschote. Bourgm. M. Delaux, G. échev. MM.
Peene, J.-B., Ghyselen, F.
Boesinghe. Bourgm. M. De Thibault de Boesinghe,
Léopold échev., MM. De Haene, P., De Segher, F.
Brielen. Bourgrti. M. Blootacker. J. échev. MM.
Struyve, Ange, Cailliau, P.
Comines. Bourgm. M. Demade, J.; échev. MM.
Courtens, II., Yan Elslande, Auguste.
Crombeke. Bourgm. M. Kinget, P.; échev. MM.
Pareyn, I.; Peellacrt, F.
Dickebusch. Bourgm. M. De Cat, Ch.; échev. MM.
Snick, Ch. CoeneI.
Dranootre. Bourgm. M. VandenBussche, A.; échev.
MM. Picavet, A.; De lîerdt, C.
Elverdinghe. Bourgm. M. le comte d'Ennetières
d'Hust, C. échev. MM. VanderGhote, E. De Cal, A.
de base aux nouvelles constructions. II en est de même
pour tout autre ouvrage de maçonnerie, tels que murs
parapets, etc., dont l'entretien est toujours négligé
dessein, et que très-souvent on a été obligé de reconstruire
neuf, faute d'avoir fait en temps utile les réparations
nécessaires.
Ce n'est pas seulement en ce qui concerne cette partie
des travaux publics que les contribuables voient dilapider
les finances de la ville; mais l'architecte de la ville,
chargé des plans et devis des ouvrages confiés ses
soins, est en outre employé lui-même l'exécution de
tous les travaux qui se rapportent son état de menuisier
et fait lui seul toutes les fournitures nécessaires la
charpente des diverses constructions donten sa qualité
d'architecte, il ne devrait évidemment conserver que la
surveillance et la direction. Nous ne voulons pas nous
attaquer ici spécialement cet homme, qui profite tout
bonnement de la position qu'on lui a faite mais tout le
monde doit rester convaincu quelorsque le même indi
vidu se trouve ainsi chargé, sans le moindre contrôle, de
l'exécution et de l'approbation des ouvrages dont il a dû
lui-même régler les dépenses et, qu'en outre, il exécute
la tâcheses intérêts particuliers auront naturellement
toujours le {«s sur les intérêts généraux. D'un autre
coté, ce déplorable étatdes choses ne nuit pas uniquement
aux habitants de la ville en général, mais porte surtout
un préjudice notable tous les maîtres charpentiers qui,
par cela même que jamais rien ne se fait ici par voie d'ad
judication, se trouvent ainsi exclus de toute participation
aux travaux publics. Aussi les plaintes de ee chef sont
elles généraleset cependant il n'y a pas lieu d'espérer
que les abus que nous venons de signaler disparaissent
de sitôt, parce que leur maintien répond trop parfaite
ment aux avides spéculations du susdit personnage in
fluent
En effet, l'on sait que l'intérêt personnel a toujours été
chez ce dernier l'unique mobile de sa conduite. C'est
pourquoi, dès son entrée dans l'administration, il a tou
jours cherché s'entourer d'hommes nuls ou complète
ment dépendants, et a su adroitement éloigner tous ceux
dont l'indépendance de caractère et de position pouvait
gêner la libre exécution de ses cupides desseins. S'il n'en
était pas ainsi, comment, dans le cas qui nous occupe,
s'expliquer la destitution brusque et arbitraire du ci-
devant architecte M. Dr., qui, pendant plus de quinze
ans, a rempli ses fonctions avec autant de zèle que d'in
telligence la satisfaction générale des habitants, moy
ennant la modique rétribution de 300 francs par an?
Certes, M. Dr. Jouissant d'une certaine indépendance par
sa fortune personnelle et se dévouant exclusivement aux
devoirs de sa placedevait rester toujourspar son inté
grité et son incorruptible probitéun obstacle pour qui
conque n'envisageait les fonctions administratives que
comme un [moyen de s'enrichir au dépens du public.
Aussi les plus viles intrigues et les plus basses manœu
vres ne furent-elles pas épargnées par ceux que nous
n'avons jusqu'ici que trop bien désignés, pour provoquer
la destitution d'un homme dont la présence aux travaux
publics eût contrarié trop ouvertement leur cupidité. En
effetM. Dr. fut bientôt démissionné sans motif plau
sible, et ne tarda pas être remplacé dans son emploi par
compense. On a vu comment il avait renoncé au luxe,
aux folles dépenses et ses brillants amis de la Chaussée
d'Antin pour reprendre sa robe d'avoeat et le chemin du
Palais. De temps en temps seulement, mais bien rare
ment, il allait encore voir son ami d'IIavrecourt, qui
presque toujours était sorti. Mais il y avait là une per
sonne qui l'accueillait le sourire sur les lèvres, et Maurice
était content. Le jour où il gagna sa première cause il
courut chez elle. Elle lui tendit la main en lui disant
Courage et Maurice était heureux.
Athénaïs Tricot, mariée Mathieu, avait été richement
établie par les soins de madame d'IIavrecourt, qui de peur
de rechute, ne perdait pas de vue et surveillait toujours
sa protégée. Le jour du mariage, Mathieu avait reçu pour
cadeau de noce, et d'un ami inconnu, 1a somme de vingt-
cinq mille francs. Amélie n'avait pas voulu que Maurice
donnât davantage. Quant au banquier, les secousses qu'il
avait éprouvées et qui ne valaient rien pour sa santé ne
l'empêchaient pas de continuer sa vie ordinaire; se mo
quant des prédictions de la Faculté qui le menaçaient
d'un coup de sang s'il ne renonçait pas au Champagne et
aux amours, il sortait un soir d'un diner de garçons où
il avait tenu tête avec succès Horace de Nanteuil. Eni
vré encore de ses prouesses, qu'il lui tardait de raconter,
il fit arrêter sa voiture chez Fœdora, Fœdora l'infidèle,
dont il avait repris les chaînes après la conversion
d'Athénaïs.
Ce qui s'était dit, ce qui s'était passé dans cet entre
tien, on ne l'a jamais su au juste mais les différentes ver
sions qui ont circulé ee sujet rappelaient toutes plus ou
moins l'accident arrivé un guerrier fameux un ma
réchal de France dont la vie avait été glorieuse et dont
bien des gens avaient envié la mort.
Ce qui parait positif, c'est que Fœdora, effrayée, avait
appelé les gens du baron pour le transporter dans sa voi
ture et de là son hôtel, où l'on s'empressa de le saigner.
Il était trop tard, il ne retrouva sa connaissance que pour
quelques minutes, et mourut comme il avait vécu il s'é
teignit en disant: L'Opéra s'en va... et moi aussi!
Quelques jours après, Maurice reçut une lettre qui
contenait ces mots: Ne venez plus et attendez mes or
dres 11 attendit, ne pensant plus qu'à ses travaux, ses
cliens et elle. Il attendit plus d'une année!
C'est là, si j'ai bonne mémoire, que Maurice termina
son récit; récit que je me suis efforcé, en rappelant tous
mes souvenirs, de vous donner peu près en entier,
moins l'esprit et la vivacité du jeune homme, et surtout
la chaleur de l'amant.
Alors le docteur et moi, regardant tour tour et Mau
rice et le salon coquet et doré où nous étions assis en ce
moment, nous lui dîmes en même temps
Eh bien
Eh bien, reprit Mauricedont les yeux brillaient
d'une singulière expression de modestie et de bonheur...
Il y a dix jours... dix jours seulement qu'enfin je reçus
dans ma mansarde un billet où je trouvai ce mot Venez
Vous jugez si ma visite se fit attendre. Elle me donna
des ordres sur lesquels elle m'ordonna un silence absolu,
et, comme tout ce qu'elle me prescrivait, j'obéis.
Mais hier elle me dit: Prévenez vos deux meilleurs
amis, et mon tour, continua-t-il en nous serrant les
mains, je vous ai dit: Venez... venez pour être mes
témoins
Ses témoins s'écria le docteur, que la joie rendait
incrédule et qui craignait de se tromper dans ses espé
rances... Ses témoins, et pourquoi?
Sans nous répondre, Maurice étendit la main vers une
porte qui venait de s'ouvrir, et tout ce qu'il avait souffert
depuis trois ans, sa fortune perdue, sa vie exposée, sa
raison presque égarée, tout ce moment fut nos yeux
expliqué et justifié. Nous vîmes s'avancer, belle et gra
cieuse, la plus adorable de toutes les mariées. Elle nous
salua et nous accueillit comme d'anciens amis... puis, se
tournant vers son fiancé avec le sourice des angesce
sourire qui semble vous ouvrir les cieux, venez, lui dit-
elle, tout est prêt.
Sa voiture nous attendait... Nous arrivâmes en quel
ques minutes rue Grange-Batelière, la mairie du 2"
arrondissement, et un quart après notre jeune camarade
barbiste, le pauvre Maurice, était maître d'une immense
fortune, et, mieux encore, d'une femme charmante.
Eh bien, lui dit le docteur, te voilà enfin heureux.
Pas encore, répondit demi-voix Maurice avec un
soupir et en regardant sa femme mais dans deux jours...
l'église Vous y serez, n'est-ce pas, mes amis?
En attendant, s'écria le docteur, cest aujourd'hui
4 décembre, le diner de la Sainte-Barbe.
Et Maurice, après avoir levé les yeux vers ceux de sa
femme comme pour y chercher une permission, repondit
en nous serrant la main J'irai
Eugène Scribe.