JOURNAL D'APRES ET DE L'ARRONDISSEMENT.
.V 785. 8" Année
Dimanche, 12Noveiiil>rc 1848.
Vires acqumt eundo.
INTÉRIEUR.
La Victorieuse.
ABONNEMENTS Ypres (franco), par trimestre, 3 francs 50 c. Provinces, 4 francs.
INSERTIONS Annonces, la ligne 15 centimes. Réclames la ligne 50 centimes.
Le Progrès paraît le Jeudi et le Dimanche. Tout ce qui concerne le journal doit
être adressé l'éditeur, Marché au Beurre. On ne reçoit que les lettres affranchies.
YPRES, le 11 Novembre.
L'OCTROI SLR LES BIÈRES.
Nous avons promis de revenir sur cet objet essentiel
au bien-être financier de la ville et nous le faisons d'au
tant plus volontiers, que nous voulons réfuter certains
sophismescertaines allégations erronées qu'avance avec
beaucoup d'aplomb, l'auteur des Quelques mots sur la
pétition des brasseurs, que tout le monde connaît pour
un personnage d'un désintéressement sans égal. Ainsi
donc, nous ne voulons plus dire qu'il a prêché pour sa
chapelle, bien au contraire. C'est l'intérêt de la ville seul
qui l'a guidé dans ses démarches, son intérêt privé n'y
est pour rien.
Dans un précédent articlenous avons exposé avec
détail, les dispositions légales sur la matière; prouvé que
ce malheureux règlement est daté de Mars 1827, et par
conséquent postérieur l'arrêté de 1826 invoqué par le
défenseur du système des retenues; démontré ceux qui
ne sont pas aveuglés par l'intérêt privé, que rien n'est
plus équitable, plus sensé que le système en vigueur et
que l'injustice, outre la perturbation jetée dans les re
venus de la villene dateraient que de l'introduction du
système de retenues qui favoriserait tel brasseur et par
conséquent aggraverait la position de tel autre.
L'auteur des Quelques mots s'étonne que nous nous in
téressions tellement aux brasseurs. Mais c'est que nous
n'aimons pas de voir exploiter la bonne foi, et ici des
brasseurs ont évidemment signé cette pétition au mépris
de leurs intérêts. Car, par le système des retenues, celui
qui exporterait beaucoup, ou celui qui, par suite de cer
tain mode de fabrication, retirerait du malt plusde liquide
que d'autresrecevrait indirectement une prime au dé
pens de la ville et au grand dommage de ses confrères
qui il pourrait, par suite de sa position privilégiée, faire
une plus rude concurrence.
C'est pour ce motif que nous ne pouvons admettre le
raisonnement de l'auteur de l'écrit dont nous nous occu
pons, qui, se fondant sur le chiffre des exportations et
des déclarations supplémentaires, croit pouvoir évaluer
la retenue opérer sur la restitution du droit l'expor
tation 25 p. et au maximum 30. Mais cet argu
ment pèche par sa base, car tous les brasseurs n'ont pas
fait de déclarations supplémentaires, et par conséquent le
chiffre exact n est pas connu, et si sous ce nouveau ré
gime qu'on désire imposer l'autorité communale, il leur
plaisait d'exporter, la ville serait forcée de rendre plus
qu'elle n'a perçu.
Pour en finir avec les sophismes de l'auteur des Quel
ques mots, nous voulons en relever un qui ne prouve pas
une grande reclitudede jugement chez lui. Ou ce règlement,
dit-il, a fait déclarer toutes les quantités supplémentaires,
ce qui n'est pas, puisque ceux qui ne demandaient pas de
compte courant ne devaient pas le faireet alors 25 p. °/0
de retenue suffit, ou ce règlement n'a pas fait produire
toutes les déclarations supplémentaires sur lesquelles on
aurait pu compter, et alors il est mauvais et il faut l'abo
lir. La conclusion qu'on doit tirer de ce raisonnement est,
parce qu'une mesure ne répond pas votre légitime
attente, qu'il faut en introduire une que vous jugez plus
détestable encore, le tout pour être agréable certains
industriels, dont l'intérêt privé se trouve en lutte avec
l'intérêt général. En d'autres mots, parce que le règlc-
mentactucl n'empêche pas entièrement la fraude, il serait
sage d'en adopter un qui diminuerait le produit de l'oc
troi d'un tiers, si pas davantage.
Il faut croire que l'auteur des Quelques mots croit que
la fabrication de la bière est un mythe, car il a lâché des
arguments qui sont ridicules, cl entre autres, nous vou
lons relever celui qui tend prouver que l'observation
des prescriptions du règlement est impossible, notamment
pour les déclarations d'entonnement. Quand on connait
la capacité de la chaudière, on sait combien on aura
entonner de bière, l'opération faite, et nous avons lieu
d'être étonné de In parfaite absurdité de l'ignorance allé
guée, qui ferait croire que l'homme du métier s'est oublié
en celte circonstance.
Quand on veut faire des comparaisons et raisonner par
analogie, il est important de frapper juste. Or, l'auteur
des Quelques mots ne s'est nullement inquiété de la jus
tesse de ses raisonnements, quand il a comparé le système
d'octroi une recherche dans les coffre-forts et les ar
moires, pour vérifier les déclarations d'hérédité, soi-disant
pour exécuter la loi sur les successions. Mais si au départ
du déclarant de lu ville, elle était tenue de rendre les
droits perçus, force lui serait bien de stipuler de façon
ou d'autre, qu'elle no rendrait pas plus qu'elle n'aurait
reçu ce qui est le cas pour l'octroi sur les bières par
suite de la mauvaise assiette de l'impôt des accises, elle
se trouverait par le système des retenues, dans la sin
gulière position de rendre plus qu'elle n'a reçu.
D'ailleurs, les brasseurs peuvent-ils bien se plaindre de
l'octroi qui leur garantit dix-sept mille consommateurs
quand même, car aucun brasseur du dehors ne peut ve
nir leur faire concurrence sur le territoire de la ville. Au
contraire, ce sont ceux de la ville qui vont livrer l'ex
térieur, et il faut le croire, avec bénéfice, puisquejusqu'ici
(Suite et fin
Les deux navires étant ainsi acerochés, on vit alors une
horrible mêlée. La mousqueterie succéda l'artillerieet
l'on aperçut, travers la fumée, des ombres menaçantes
courir sur les morts, sur les haubansdans les cordages,
et s élancer sur le navire ennemi. Le beaupré de la cor
vette formait un pont naturel pour sauter sur le bricket
le plus fort de l'action se concentra sur cette partie. Les
coups de pistolets se tiraient bout-portantet assaillis
et assaillants se portaient de meurtriers coups de sabre,
de piques ou de haches, dans cette lutte corps corps où
vainqueurs et vaincus tombaient souvent la mer en
poussant des rugissements sauvages et des cris de dou
leur.
Le chevalier était au plus fort de la mêlée, renversant
tout sur son passage l'aide d'une hache dont il s'était
emparé après avoir brisé son épée. Chacun de ses coups
était mortel. On eût dit que l'odeur de la poudre et la
vue du sangau milieu de cette épouvantable scène de
carnage, redoublaient sa fureur. Il voulait franchir l'ob
stacle qui lui interdisait l'entrée du brick, et la résistance
l'exaspérait. Pour la vingtième fois au moins déjà, il re
levait sa hache et la brandissait, toute dégoûtante de sang,
au-dessus de la tête des rares ennemis qui restaient
combattre, quand un objet l'arrêta court dans son œuvre
de destruction. Un craquement s'était fait entendre; le
grand mât du brick avait chancelé un instant et était
venu tomber avec fracas en travers du gaillard d'avant
de la corvetteen écrasant tout sur son passage. Gaston
dut se rejeter en arrière pour ne pas être broyé par cette
chute inattendue. Après ce premier mouvement, qui lui
fut en partie imprimé par un jeune aspirant qui combat
tait ses côtés, le chevalier se précipita sur cette nouvelle
voie de communication, la tête de quelques matelots de
la Victorieuse, et fit tout coup un soubresaut, qui faillit
lui faire perdre l'équilibre, avec l'air effaré d'un homme
qui voit se dresser devant lui la tête hideuse d'un serpent.
Ses yeux flamboyèrent, ses lèvres se couvrirent d'une
écume blanchâtre, et un rugissement rauque, féroce,
s'échappa de sa poitrine.
Les hunes ayant discontinué leur feu de mousqueterie,
pour ne pas atteindre indistinctement amis et ennemis
toute fumée était dissipéeet le chevalier venait de voir
surgir devant lui le capitaine d'Anglade, sombre et mena
çant, qui faisait des efforts désespérés pour empêcher
ils l'ont toujours fait et qu'ils continuent faire rude
guerre aux brasseurs de l'extérieur. Mais puisque 1 octroi
conserve si précieusement ces consommateurs aux bras
seurs de la ville, n'est-il pas juste que ce service soit payé
et que pour le récompenser, ils avancent le droit d octroi
sans trop regimber. 11 est hors de doute que leur situa
tion est infiniment préférable celle de leurs confrères
des campagnes, qui sont loin d'avoir un débit sans concur
rence. Mais la protection donnée l'industrie en
ville, il est attaché une condition, c'est de la payer par
un droit d'octroi sur la consommation et il est de prin-
cipcquc toute la bière qui se consomme dans l'enceinte des
villes est passible du droit. Or, cela n'est pas, car tous les
brasseurs retirent d'un brassin plus que la contenance de
leur cuve-matière l'indiqueet cependant qu'ils fassent
une déclaration supplémentaire ou non, ils ne payent que
d'après cette contenance. Il arrive ainsi que peut-être
deux mille hectolitres consommés en ville échappent au
payement du droit.
Qu'on ne croie, pas que l'abolition du règlement de
1827 donne lieu une diminution sur le prix de la bière,
ce serait un profond mécompte. Le fabricant, le trafiquant
empocheraient le droit aboli ou diminué et il y aurait
perte sèche pour la ville qui verrait diminuer ses revenus
et pour le consommateur qui payerait sa bière tout autant
et se verrait tenu de combler d'une autre manière le dé-
ficitdc la caisse communale .Si les taxes municipales étaient
abolies, les prix des objets de consommation ne diminue
raient pas d'un centime et la ville serait ruinée. Qu'on
nous permette des exemples le droit sur les charbons a
été diminué de quatre centimes, en sont-ils moins chers?
La taxe sur la morue de neuf centimes est tombée sept,
se vend-elle moins? Le droit sur l'huile d'œillcttc a été ré
duit de sept francs par hectolitre, s'en aperçoit-on dans la
vente en détail?
Ce sont des faits et nous croyons qu'on ne peut les
contester. Nous le répétons encore, l'homme impartial ne
découvre rien d'hostile dans la mesure du conseil qui a
repoussé la demande des brasseurs. Nous trouvons au
contraire que l'hostilité, s'il en existe, vient de la part de
quelques brasseurs l'endroit de la caisse communale.
Nous n'avons jamais douté que le conseil n'eût refusé de
prendre la pétition en considération et c'est une résolu
tion qui mérite l'assentiment et la reconnaissance de la
généralité des habitants.
A peine les projets des budgets ont-ils été connus, que
quelques journaux mécontents ont jeté de hauts cris,
trouvant que ce n'est pas assez, que les réformes ne sont
pas assez radicales, que les économies ne sont pas assez
l'assaut. Le même éclair de haine illumina ces deux phy
sionomies d'une lumière fulgurante quand leurs regards
flamboyants se rencontrèrent, et le même élan spontané,
irrésistible, les porta l'un vers l'autre. Aucune langue
humaine ne pourrait rendre ce qui se passa dans l'âme
de ces deux hommes en cet instant suprême.
Le capitaine était armé d'un énorme sabre d'abordage
dont chaque coup, porté par cet homme, aux formes
athlétiques, devait donner la mort, et c'en était fait de la
vie de Gaston si ses forces n'eussent été décuplées par la
fièvre qui le dominait. Le premier choc fut si terrible que
les armes de ces deux champions volèrent en éclatset
une lutte corps corps s'ensuivit, lutte qui se termina
par la chute des deux corps dans la mer. A plusieurs re
prises, ces deux hommes disparurent sous les vagues et
reparurent leur surface, se tenant étroitement em
brassés. La figure du chevalier était livide, et sur celle
du capitaine oû brillait une suave énergie on pouvait
surprendre les traces d'une joie infernale. Une pensée
sinistre, féroce, éclatait dans son regard fauve. A défaut
d'armes, il comptait sur la puissance de ses bras muscu-
leux pour étouffer le chevalier. Mais ce dernierpar une
dépression de force extraordinaire, put dégager un de ses
bras,-saisir son poignard et le plonger dans le cœur du