Trois généraux de brigade les commandaient; ils étaient placés derrière l'échafaud, entourés de nombreux officiers d"état-major. L'échafaud était placé près de la barrière, de façon que les patients pussent apercevoir le lieu où le général avait été fusillé. A 6 heures 50 minutes, un escadron de lanciers dé boucha sur la place, il précédait deux voitures renfermant chacune un des condamnés, la voilure de l'exécuteur les suivait, un escadron de dragons fermait la marche. Ce convoi venant du fort de Vannes, en était parti un peu avant 5 heures. Ce lugubre cortège s'arrêta aux pieds de la guillotine, l'exécuteur y monta et fit l'examen de la fatale machine; sur un signe de lui, Daix s'avança le premier, accompa gné et soutenu par son confesseur; il gravit les escaliers avec fermeté, et, arrivé sur la plate forme, il dit en se tour nant vers la foule Je meurs pour avoir voulu sauver la vie au général Bréa... Je meurs innocent, ayez soin de ma femme et de mes enfants. Quelques minutes après, c'était fini... Lahr le suivit: Sainte Vierge Marie, disait-il, ayez pitié de mon âme Ce furent les seules paroles qu'il prononça. Une heure après, tout avait disparu, l'instrument de mort avait été enlevé, la troupe rentrait Paris, et la foule s'agitait en tous sens sur cette place. La peine des trois autres condamnés a été commuée en celles des travaux forcés perpétuité. Le Moniteur du soir ajoute les détails suivants Ce malin, cinq heures et demie, on ouvrait la porte de la casematte où se trouvaient Daix, Lahr, Chopart et Nourry; ces deux derniers en sont extraits. M. le com missaire du gouvernement près le 2" conseil de guerre, assisté du greffier, est introduit; il annonce aux deux premiers le rejet de leur pourvoi en grâce. Daix devient pâle Je disais bien hier, mon am< Chopart, ce sera pour demain... Je ne me suis pàs trompé... Je suis inno cent il y en a d'autres bien coupab|qs,*. Puis on l'en tend murmurer entre ses dents: Le marchand de vins... Ah celui-là... M. le commissaire du gouvernement lui ayant demandé s'il voulait faire des révélations, qu'il était prêt les rece voir et en référer qui de droit, Daix répondit Non... je ne veux rien dire. Lahr parait calme et silencieux. L'exécuteur des hautes œuvres, ainsi que ses aides, sont introduits. Ils s'emparent des deux condamnés. Daix avec effroi: Eh quoi pas fusillés!,,, l'échafaud!... Pre nant sa tête deux mains Ah! s'écrie-t-il en faisant un mouvement convulsii", guillotinés Puis il se livra aux mains de l'exécuteur. Lahr conserve son impassi bilité. La loi électorale a été votée hier et elle sera propablc- ment promulguée demain ou après-demain dans le Moniteur. On peut donc maintenant apprécier l'ensemble de cette nouvelle charte de suffrage universel. Pour ceux qui examinent le fond des choses et qui savent déduire les conséquences des principales dispositions de cette loi, il est évident que la majorité de la chambre s'est laissée égarer sur deux points importants 1° lorsqu'elle a admis voter tous les citoyens indistinctement et même ceux qui ne savent ni lire ni écrire; 2° lorsqu'elle a multiplié outre mesure les incompatibilités. Nous ne sommes pas étonnés cependant que ces deux principes de la loi aient été appuyés par une forte majorité. La Montagne n'y a vu que la mise exécution rigoureuse des principes qu'elle a toujours soutenus et elle ne s'est aperçu qu'elle prépa rait pour l'avenir de nouvelles forces au parti légitimiste. Aussi les représentants de la droite se sont bien gardés de voter contre des clauses qui ne pouvaient qu'être favorables leur parti. Au moyen des incompatibilités multipliées l'infini, la grande majorité des futurs re présentants devra se composer de propriétaires, indus triels, des médecins et des avocats. Or, qui ne sait que le plus grand nombre des propriétaires des départements appartiennent au parti légitimiste. Ilsont obtenu de faire voter toute la classe des paysans qui ne savent ni lire, ni voila du nouveau si on ne peut plus tomber sur l'ennemi a présent, il faudra donc nous battre et nous dépouiller entre nous. Puis, passant peu peu du grondement sourd une rumeur éclatante, ils crièrent dans un chœur infernal A bas le chapeau galonné, le manteau brodé, les aiguillettes d'or! c'est nous le butin c'est nous l'offi cier avec la bonne paie du roi qui ^o'nne dans sa poche, et sa vie aussi par-dessus le marché El les plus hardis portaient déjà la main au collet du jeune homme. Arrière donc, quand je l'ordonne, répéta Mandrin, en brandissant son sabre étincelant d éclairs entre David et les assaillants. Les bandits se retirèrent, en rugissant de rage. Après avoir vu dans de rudes combats leur sang couler flots sous les armes de troupes royales, la protection que leur chef accordait un officier de ce corps éleva en eux d'af freux soupçons et le mot de trahison circula dans leurs rangs. Arrière soit, dit un des plus audacieux, mais voici qui peut abattre l'habit bleu de loin comme de près. Et il éleva son pistolet. Misérable, dit Mandrin en pâlissant de colère, viens écrire, et qui sont encore leur entière dévotion dans beaucoup de cantons, en sorte que l'on verra arriver la future assemblée tous les propriétaires des départements de l'Ouest, contre lesquels ne pourront lutter 1» s candi dats républicains, qui n'auront en leur faveur qu'une partie des électeurs plus éclairés des vilies. Ce n'est pro bablement pas là le résultat que désiraient les députés de la Montagne et c'est pourlant ce qu'aura produit leur système exagéré des incompatibilités joint celui du suffrage universel sans aucune exception. Quelques journaux ont annoncé hier et aujourd'hui l'invasion du choléra Paris. La maladie s'est montrée en effet, mais dans des proportions très-minimes. On signale dix cas depuis trois jours, et sur ces dix cas, seu lement trois décès. Les débats de l'affaire de Limoges, dont l'importance n'est pas de beaucoup inférieure celle du procès de Bourges, sont en ce moment ouverts devant la cour d'as sises de Poitiers. Nous y voyons Ggurer 36 accusés, les uns, c'est le plus grand nombre, présents, les autres con tumaces. Tous les rangs de la société y sont peu de choses près représentés. On y remarque des artistes, des négociants, des journalistes, des avocats, des avoués, un ex-substitut du procureur-général près la cour de Li mogesun ingénieur des pouts-et-chaussécs; ensuite viennent des artisans, un charretier, un carrossier, un cordonnier, un charpentier, un ébéniste, un simple jour nalier. Le mouvement de Limoges on ne l'a pas oublié, était tout socialiste. On annonce le mariage de l'empereur actuel d'Autriche François-Joseph, avec la grande-duchesse Anne, nièce de l'empereur de Russie. Les négociations relatives cette union, qui aura lieu, dit-on, au commencement du mois de mai prochain, ont été jusqu'ici tenues secrètes par les deux cours. ITALIE.—On écrit de Turin, 14 mars: Le roi est parti aujourd'hui pour Alexandrie; hier, il avait reçu la visite de lord d'Abercrombyministre d'Angleterre, qui a cherché arrêter le roi dans la voie où il s'engageait. Le roi s'est levé fort animé et lui a ré pondu peu près en ces termes: Monsieur l'ambassadeur, pour vous complaire, j'ai souscritl'an dernier, l'armistice de Salasco c'était une honte pour moi. Je me suis arrêté l'Adigc, et j'ai subi une médiation qui s'est changée pour moi en tra- bison. Depuis le 7 mai, notre situation est intolérable; les sacrifices que nous supportonssont plus onéreux que la guerre, et cependant j'ai fermé les oreilles aux souf- franccs des Lombards et des Vénitiens. Qu'avez-vous fait pour moi? Rien, car vous n'avez même pas voulu élever la voix lorsque l'Autriche a violé l'armistice. Par votre silence, vous avez approuvé ces violations du droit des gens. Maintenant que nous sommes plon- gés dans un abime, devons-nous nous résignerà y rester. Non, Monsieur l'ambassadeur; non. Je préfère voir ma couronne ébranlée coups de canon, plutôt que de suc- comber sous les sifflets de la rue. Au moins, si je dois succomber, ma chute sera honorable pour moi et pour mon peuple Lord Abercromby se retira tout troublé. M. Bois-lc- Comtc s étant présenté trois fois au palais, trois fois il hé sita. Enfin le soir il se rendit au ministère des affaires étrangères; il parla seulement au premier secrétaireM. Battaglionc, le ministre étant absent: Il est trop tard Monsieur l'ambassadeur, lui dit ce dernier, c'est un fait accompli, les hostilités sont dénoncées le major Codorna, frère du ministreest parti pour Milan pour dénoncer 1 armistice... M. Bois-le-Comte parut fort ému, et se re lira en disant u Quel malheur Au reste, Radctzki parait fort inquiet. Une partie de la garnison de Milan a quitté la ville; on ignore si elle s est dirigée sur Lodi ou sur Novarre. Radetzky envoyé sa femme et ses enfants Vérone. ÏVAPLES. Le roi de Naples a dénoncé la cessation de l'armistice sicilien, le 5 mars. Les hostilités seront dès-lors reprises en Sicile, le 15 mars. ici te mettre genoux devant moi, et pose ton arme terre. Le brigand eut l'air d'obéir et vjnt se blottir sur le sable de la route aux pieds de Mandrin; mais cette place il était assez près de David pour ne pas le manquer: il lira son coup la poitrine du jeune homme. La balle cependant passa par-dessus l'épaule. Mandrin fit rouler la tête du bandit sur la poussière. Et montrant son corps sanglant aux soldats. Quand j'ordonne de poser les armes et qu'on ose me résister, dit-il, voilà un moyen d'obtenir l'obéissance. Les contrebandiers ne firent pas un mouvement, mais ils restèrent toujours rangés en cercle autour de celui qu'ils prenaient pour un capitaine du régiment royal: ce qui était encore une menace muette contre lui, et une intention manifestée de s'opposer sa retraite. Mandrin avait repris son sang-froidet son front haut rayonnait de cette puissance souveraine qui eût im posé une armée plus fière que la sienne. Il rangea son cheval près de celûi de David, et, élevant son sabre au- dessus de la tète du jeune homme. Maintenant, monsieur, dit-il, retirez-vous. Et il le fit passer ainsi sous l'abri de son glaive au mi lieu de la foule des contrebandiers, qui s'ouvrit silencieu- riÉMOXT. Trniv, 12 mars. L'Opinione dit que le bruit court que les ambassadeurs d'Angleterre et de France, ont déclaré au ministère que si une nouvelle guerre était entreprise contre l'Autricheils demande raient leurs passeports. L'ambassadeur Turin aurait présenté au roi un ultimatum, d'après lequel les duchés de Parme, Plaisance et Modène seraient cédés aux états de Sardaigne; la Lombardic au duc de Lcuchtenberg. Venise serait indépendante. -Ces nouvelles sont données par la Gazette du Tessin, du 12 mars courant. Nous trouvons ce qui suit dang l'Alba du 8 Au nom de Dieu et du peuple, le comité exécutif de la république ordonne que le ministre des finances pourvoie immédiatement l'administration des biens des jésuites et de la Sainte-Inquisition, jusqu'à ce que l'ad ministration du domaine soit organisée. Rome, 2 mars 1849. ARMELLIXI, SALICETI, MONTECCIH. On mande de Rome5 mars, qu'un ordre du comité exécutif destitue tous les fonctionnaires de la république et tous les militaires, tant en activité de service qu'en disponibilité, qui, dans le délai voulu, n'auraient ni fait acte d'adhésion ni prêté serment. Tout traitement ces sera de leur être payé. Rome, 6 mars. L'assemblée constituante romaine, par délibération solennellea invité le peuple toscan envoyer ses députés la constituante Rome. Du 7 mars: Il Nazionalecité par la concordia de Turin du 12 mars, annonce qu'une crise ministérielle a éclaté Rome Sturbinetti a remplacé Mazzarelli Man- zoni a remplacé Giuccioli, et Montecchi est la place de Stcrbini. Voici la composition actuelle du ministère romain finances, Manzoni intérieur, Safli étranger, Rusconi grâce et justice, Lazzaroni travaux publics, Montecchi instruction, Sturbinetti; guerre, RillctConstant, Calan- drelli, intérieur jusqu'à l'arrivée de ILillctConstant. Acte de la république Romaine. Considérant que tous les citoyens sont égaux devant la loi et que tout privilège viole ouvertement cette égalité Le comité exécutif dé clare que l'assemblée constituante a provisoirement dé crété ce qui suit: Art. lr. Tout privilège du clergé séculier et régulier, tant pour la juridiction ecclésiastique que pour l'applica tion (les lois exceptionnelles, est aboli. Art. 2. Rien n'est innové en ce qui concerne les ques tions purement spirituelles. XI \s:< in dTpbes, du 17 Mars. Les prix du froment ont subi une baisse de 50 centimes l'hcctolitrcau marché de ce jour. 582 hectolitres se sont assez rapidement écoulés aux prix defr. 15-60 17-60; en moyenne 16-60 l'hectolitre. 11 y a eu également une légère baisse de 20 centimes l'hectolitre sur les prix dn seigle. 59 hectolitres se sont vendus defr. 9-60 10 l'r. prix moyen fr. 9-80 l'hcct. Une hausse de 50 centimes l'hectolitre s'est produite sur les prix de l'avoine. 35 hectolitres ont été vendus de 6 fr. 7-50; prix moyen fr. 6-75 l'hectolitre. Les fèves se sont vendues avec une hausse de 40 cen times l'hectolitre. 194 hectolitres ont éxposés en vente et so sont écoulés au prix de fr. 10-80 l'hectolitre en moyenne. 11 n'est survenu aucun changement dans les prix des pommes de terre. 1,700 kilogrammes ont été vendus raison de 9 fr. les 100 kilogr. ét vr-rmi, d'vpm.s, du 11 Mars au 17 inclus. Naissances: sexe masculin6.Sexe féminin6. Total 12. Un mort-né du sexe masculin. Décès. Kerné, Marie-Cornélie-Constance, âgée de 76 ans, veuve de Bernard Bonté, rue de l'Hôpital S1 Jean. VanHang, Jeanne-Thérèse-Constance, âgée de 84 ans, dentellière, célibataire, rue de l'Hôpital S' Jean. Enfants au-dessous de 7 ans. Sexe masculin 4. Sexe féminin 2. Total 6. sèment devant lui. Puis il accompagna David sur la route jusqu'à ce que celui-ci fût hors de toute atteinte. Le jeune homme, pendant tout le temps qu'il s'était trouvé assailli par cette horde barbare, n'avait pas un instant tremblé pour sa vie; il était heureux d'échapper l'acte infâme qu'un mouvement de vengeance lui avait fait concevoir, et la mort avait peu de terreur pour lui devant les remords de la trahison. Exalté par la scène violente qui venait de se passer élevé par le courage de Mandrin un courage moral qui dominait en ce moment l'iniluence de son éducation et les croyances de toute sa vie, il dit son généreux en nemi, d'une voix profonde: Tu m'as sauvé deux fois la vie, et je t'en remercie; car il me semble maintenant qu'avant de mourir je ferai encore plus pour toi peut-être... Et il partit au galop. Mandrin le regarda quelques instants s'éloigner; puis rêveur, absorbé par mille impressions diverses, il reprit le défilé au fond duquel il avait laissé sa troupe. Il pensait maintenant la présence du régiment royal dans la gorge des montagnes, et sentait qu'il y aurait là un rude combat soutenir. (La suite au prochain w.)

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Le Progrès (1841-1914) | 1849 | | pagina 3