JOURNAL D'YPRES ET DE L'Ali RO.VDISSEMENT.
M0 896. 9* Année
Jeudi, 6 Décembre 1819.
Vires acqumt eundo.
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INTÉRIEUR.
Une grave question occupera la Chambre
des représentants dans quelques jours. Le bud
get de la guerre est présenté, et bien que le
ministre Chazal y ait introduit la plus stricte
économieil s'élève encore la somme de
26,000,000 de francs, eu nombres ronds. Ce
budget aura supporter de rudes assauts, car
ceux qui ruminent économie, ne seront nulle
ment satisfaits de la minime diminution qu'il
présente. On s'en souvient, l'année dernière, on
voulait une diminution de 10,000.000, d'au
tres de 14,000,000 aucuns qui avaient des
motifs pour désirer la suppression de l'armée,
ne voulaieut qu'un corps de gendarmerie pour
maintenir la police intérieure, et pour le reste
on se fiait aux traités qui avaient proclamé la
neutralité de la Belgique.
Nous avons vu dans le Timesce que les
puissances étrangères entendent par la neutra
lité belge, et nous pouvons être convaincus
que si nous ne savons pas résister par nous-
mêmes une attaque inopinée, nous risquerons
fort de devenir la proie du premier venu.
Nous sommes pour les économies, en ce sens
que les dépenses nécessairesindispensables
soient sévèrement surveillées et que le service
public se fasse avec ordre et prévoyance. Mais,
nous croyons qu'il y a des dépenses auxquelles
line nation indépendante ne peut se soustraire,
et dans cette catégorie nous rangeons l'armée.
Sous aucun prétexte, nous ne voulons sa dés
organisation et si la Chambre se laisse pas
sionner par' la soi-disant économie qui doit en
résulter, nous ne saurions trouver des termes
assez forts pour qualifier l'imprévoyance dont
elle aurait fait preuve Qu'on examine la si
tuation des divers peuples de l'Europe et quel
sera l'homme d'état qui oserait, avec un ho
rizon politique aussi rembruni, souscrire la
désorganisation de la force publique? En
France, l'armée a sauvé l'ordre social, et sans
elle, une anarchie épouvantable déchirerait ce
pays.
Venise et l'Archipel.
En cette époque de péripéties imprévues,
nous serions curieux de savoir si l'oubli des
enseignements de l'expérience sera poussé au
point, qu'un pouvoir oserait assumer la res
ponsabilité de se dépouiller d'une force non-
seulement matérielle, mais morale, qu'il pour
rait se voir réduit invoquer l'improviste.
M. le secrétaire donne lecture du procès-
verîial de la séance du 25 octobre 1849. La
rédaction en est approuvée.
Communication est faite au Conseil d'une
invitation qui lui est adressée de la part des
chefs de la demi-batlerie d'artillerie de la garde
civique, de vouloir honorer de sa présence le
tir de l'oiseau d'artifice et le bal qui sera donné
l'occasion de la Sainte-Barbe, patronne des
artilleurs. Accueillie avec reconnaissance par le
Conseil, celte invitation est prise pour notifi
cation.
La commission du Mont-de-piété adresse au
Conseil la réponse aux observations qui ont été
faites sur divers articles du projet de règlement
organique de cet établissement. Elle sera com
muniquée MM les conseillers domicile.
Le Conseilsans discussion et après lecture
des pièces, émet un avis favorable: 1° sur le
cahier des charges pour la vente des bois taillis
(coupe 1850), sur les propriétés boisées des
Hospices 2° la fondation de deux lits l'Hos
pice des vieillards dit Nazareth, par M. Al
phonse Vanden Peereboom; 3U sur le cahier
des charges d'une vente d'arbres sur les pro
priétés du Bureau de bienfaisance.
L'ordre du jour appelle la délibération sur
le projet de créer un atelier-modèle. Le rap
port lu en-séance du 8 Novembre 1849, ne
donne lieu aucune discussion, et ses conclu
sions sont admises l'unanimité.
Un conseiller propose au Conseil, de désigner
dans son seinun comité de commerce et d'in
dustrie. Il étaie cette motion de plusieurs con
sidérations graves et importantes. Ses attribu
tions seraient limitées l'examen de toutes les
questions qui pourraient présenter un intérêt
au commerce et l'industrie de notre ville, et
cette commission prendrait l'initiative de toutes
les améliorations dont ces deux branches de la
richesse publique seraient susceptibles. Cette
proposition sera discutée une prochaine
séance.
Au nom du collège, M. l'échevin Vanden
Peereboom annonce que, sous peu de temps,
il sera présenté un rapport au Conseil, touchant
la création d'une école-modèle de dentelles qui,
ajoute—t—iIsera unanimement approuvé.
L'assemblée s'occupe de la restauration de
l 'église de S' Martin et de la demande d'un sub
side adresser au gouvernement pour les tra
vaux exécuter ce monument grandiose.
D'après des renseignements qui ont été fournis,
l'état ne serait pas éloigné d'intervenir pour
un subside de 8,000 francs, si la province, la
commune et la fabrique de l'église contri
buaient pour 2,000 francs chacun. Une
convention serait faite, en ce sens, avec le
gouvernement, pour un certain nombre d'an
nées. bur le budget pour 11850 figurent deux
subsides de 2,000 francs chaque. Mais une
allocation de 2,000 francs doit être considérée
comme une régularisation d'un subside qui
n'a pas été payé pendant l'exercice auquel il
devait appartenir. Le Conseil est d'avis de s'en
gager pour un certain nombre d'années por
ter tous les ans au budget un subside de 2,000
francs.
Sur le rapport de M. le conseiller Beke, et
sur les conclusions du comité de comptabilité,
sont approuvés le compte pour l'exercice 1848
et le budget pour l'exercice 1849 de l'établisse
ment du Monl-de-piélé.
Le même membre du Conseil présente le
rapport favorable sur le budget de l'admi
nistration des Hospices civils pour 1849, re-
ABONNEMENTS: Ypres (franco), par trimestre, 3 francs 50 c. Provinces, 4 francs.
INSERTIONS: Annonces, la ligne 15 centimes. Réclames, la ligne: 50 centimes
1 Le Progrès partît le Jeudi et le Dimanche. Tout ce qui concerne le journal doit
être adressé l'éditeur, Marché au Beurre. On ne reçoit que les lettres affranchies.
YPRES, le 5 Décembre.
Suite
Que cette nuit de bal fut douce et brillante pour moi
quel souvenir profond j'en conservai! Le jour suivant se
passa dans l'oubli total du monde et de ses peines, dans
une délicieuse rêverie; je me rappelais toutes les cir
constances de cette nuit. Le soir je me levai sans avoir
veillé, sans avoir dormisachant peine si la magie de
l'imagination m'avait déçu et si tout cela n'était qu'un
songe. Je ne manquai pas de me trouver l'heure ordi
naire dans les salons de la comtesse; mais Alceste n'y
était pas. Le lendemain matin je rendis ma visite au
comte Delfîni, Alceste ne se montra point; cette dispari
tion in'étonna et m'effraya: quelle pouvait en être la
cause?
Alceste serait-elle malade? demandais-jelesoir même
la comtesse Albrizzi.
Non, je l'ai vue ce matin. Je présume qu'un accès
de jalousie du comte Grimani nous prive de sa présence.
Eh quoi pensai-je, est-ce là que nous en sommes
venus? Présente, je ne pouvais l'aimer avec tranquillité
absente, elle me jette dans le délire. Elle me tue. Non,
cela ne peut durer. Je mourrai si cet état se prolonge.
Si j'invitais le comte Grimani me suivre sur l'une des
terrasses de son palais si deux balles terminaient cette
ffairemais non, ce plan n'était pas le meilleur. J'y
YILEE D'YPRES. Conseil commuxal.
Séance publique du Lundi5 Décembre 1849,
Présents MM.- le Baron Vanderstichele de Maubus,
Bourgmestre président; Alphonse Vanden Peereboom,
Iweins-Fonteyne, Échevins Théodore Vanden Bogaerde,
Pierre Beke Gérard Vandermeersch Charles Vande
Brouke, Legraverand, Martin Sbaelen, Édouard Cardi-
nael, Auguste De Ghelcke, Ernest Merguelynck, Boedt,
avocat, Louis Annoot, Conseillers.
rêvai quelques instants: puis appelant mes gondoliers, je
leur dis do me conduire au palais Delfîni. La gondole
glissa légèrement sous les vieux murs de ce palais som
bre. Tout y était obscur, l'exception d'une seule fe
nêtre d'où s'échappaient la fois une lumière douce et
un chant suave je crus reconnaître cette voix. J'ordonnai
aux gondoliers de s'arrêter.
C'est la signora Contarinime dit le ..gondolier
Tita,, qui connaissait sa famille.
Elle chantait une de ces ballades en dialecte vénitien,
qui n'expriment que d'enfantines et douces pensées, où
toutes les consonnes disparaissent, où la fréquence des
voyelles et la mélodie naïve des sons, concourent re
produire les images les plus gracieuses et les plus simples;
ce ne sont que diminutifs, mots caressans, rimes nom
breuses et plus suaves que sonores tous les gens du
peuple connaissent ces chants. Alceste avait répété, en
s'accompagnant de la guitare, le premier et le second
couplet. Je dis Tita de chanter le troisième couplet, et
sa voix mâle continua l'hymne populaire que la voix de
la jeune fille avait commencée. Je vis une ombre se des
siner sur les draperies. Bientôt elle parut la fenêtre:
elle me vit, me reconnut et poussa un cri. Le balcon était
peu élevé. Je gagne la proue de la gondole, et m'élançant
vers les sculptures gothiques du balcon, je parvins bientôt
en atteindre la rampeque je franchis sans peine, et
j'entrai. Elle était près de s'évanouir.
Vous êtes étonnée, Aleeste courroucée, peut-être.
Hélas? ils veulent nous séparer, et je ne puis vivre sans
vous.
Elle joignit ses mains qu'elle pressa sur sa poitrine,
convulsivement serrées puis elle jeta vers le ciel un re
gard d'angoisse.
Oui, Alceste, m'écriai-je en m'avançant, je vous
aime, je vous aime d'une passion aussi puissante qu'elle
est pure; passion que je ne puis vaincre, et que rien ne
peut vaincre. Elle détourna la tête, et, de ses bras éten
dus, elle me fit signe de m'éloigner.
Aleeste, je sais tout; je sais quelle cérémonie men
songère fausseimpie..doit vous unir un homme que
vous n'aimez pas... Non, Alceste, vous n'êtes pas heu
reuse; vous ne le serez pas avec lui. J'ai lu la mélancolie
sur votre beauvisage, je l'ai retrouvée dansvos paroles.
Sa main que ma main saisit et qu'elle ne retira pas,
fut pressée sur mes lèvres. Elle s'appuya sur une table
de marbre, en détournant la tête puis lentement elle
retira sa main, et me dit d'une voix faible, mais accentuée
et distincte
Contarini, tout ceci doit finir.
Oui, Alceste; et pour notre bonheur Je vous aime...
vous m'aimez... ne le niez pas, notre volonté n'est pas
nous, c'est la destinée qui Ta crée.
Contarini, le Ciel me défend d'être vous Dieu ne
le veut pas.