JOURNAL D YPIÎES ET DE I/AltRO\DISSEJIEi\;T. m° 1,071. Année. Dimanche, 10 Août 1851. Vires acquint tonde. UNE CHAMBRE A COUCHER. ABONNEMENTS: Ypres (franco), par trimestre, 5 francs 50 c. Provinces,4francs. INSERTIONS: Annonces, la ligne 45 centimes. Réclamés, la ligne: 50 centimes. Le Progrès paraît le Jeudi et le Dimanche. Tout ce qui concerne le journal doit être adressé l'éditeur, Marché au Beurre. On ne reçoit que les lettres affranchies. li\TËlUËlIR. ïrnES, 9 Août. Hier déjà la Chambre doit avoir commencé la discussion des travaux publics que le minis tère se propose dë faire exécuter, soit directe ment, soit par l'intermédiaire de compagnies concessionnaires moyennant garantie d'un mi nimum d'intérêt de quatre pour cent Bien que les feuilles catholiques lâchent de présenter les projets du cabinet libéral comme le gaspillage otganisédu Irésor public, des adversaires moins systématiques de l'opinion libérale conviennent toutefois que le programme des travaux publics exécuter, a été inspiré par une pensée de haute prévoyance. Un pays ne se ruine pas en dépensant beau coup de capitaux en travaux d'utilité générale car ils produiront leur tour et augmenteront la richesse publique. Une autre considération qu'on doit faire valoir, cest que nul ne peut prévoir ce qui arrivera en 1852; peut-être y aura-t-il des nouvelles tempêtes politiques. Si l'aide de dépenses faites avec prévoyance et utilité, on parvient maintenir en activité les principales industries de la Belgique, n augmentons-nous pas les chances que nous possédons, d échapper un mouvement, de quelque façou qu'il vienne se produire Que le parti catholique voie, de mauvais œil, le cabinet libéral payer les dettes délaissées par le précédent ministère; que les députés épisco- paux se trouvent dans une situation singulière et quoique disposés voter contre le projet de loi sur les travaux publics, n'osent toutefois s'aliéner ouvertement leurs commettants et s'abandonner aux exigences des passions politiques qui les animent, nous le comprenons, nous compatissons même celle triste posi tion en laquelle se trouvent ces députés cléri caux placés entre le marteau et l'enclume, entre levéqne et le clergé d'un côté, et de l'autre les intérêts matériels de leurs commet tants. SNous voyons même sans étonneraient que lès plus madrés d'enlr'eux, fidèles aux princi pes de leur parti, de dépenser sans créer les ressources, tâchent de s'esquiver au moment du vote des impôts, mais nous espérons bien qu'ils resteront pour sanctionner la loi des travaux exéculer, afin de pouvoir s'envelop per d'une auréole de populaiilésans nuage, car ils auront voté le bienfait, sans avoir participé la création de la charge, dont le refus rendait toute entreprise d'amélioration matérielle im- i possible. Distribution des prix aux élèves de l'Acadé mie royale de dessin et d'architecture. Tous les deux ans,, au jeudi de la semaine consacrée la kermesse communale est fixée celte solennité artistique. Bien que cette insli- lulion ait produit les meilleurs résultats et formé d'excellents élèves, nous croyons nous aperce voir que de la part de certaines personnes, elle n'a pu conquérir cette sympathie qui est due tout établissement destiné instruire gratuite ment la jeunesse et faciliter plus tard le choix d'une carrière aux ouvriers et aux artisans. Le public attiré par celte fête n'était pas aussi nom breux qu'on aurait pu le désirer, et c'est encore une marque d'intérêt que de venir assister la distribution des récompenses décernées la jeunesse qui aime s'instruire. Les autorités civiles et militaires avaient fait acte de présence, et vers trois heures et demie M. Carton, au nom des directeurs de l'Acadé mie. a prononcé un discours, par lequel il a fait connaître les succès qu ont obtenu les élè ves de l'Académie aux divers concours auxquels ils ont pris part. Il a rappelé qu'un travail persistant el sans relâche est un des éléments les plus essentiels pour conquérir les palmes et que l'orgueilleux, celui qui croit savoir sans avoir appris, toujours échoue, el finit par prendre son art en dégoût, tandis que souvent, mieux conseillé, il aurait pu Faire l'honneur et la gloire de sa famille. M. Carton finit en rap pelant aux élèves, que le zèle et lardeûr l'étude sont des gages assurés de réussite, et que la direction de l'Académie espère qu'ils continueront être animés du même esprit, en poursuivant leur carrière artistique. Ce discours fini, le secrétaire-directeur a fait l'appel des élèves qui ont obtenu des médailles au concours, biles leur ont été décernées par lesautorités civiles et militaires. Cette cérémonie I Frédéric de Marvilliers se promenait Tan passé, un beau matin du mois de juin, dans le bois de Boulogne, au voisinage d'Auteuil; il montait un beau cheval anglais qui trottait fièrement sous les feuilles, tout enivré des p3rfurasdc l'herbe humide de rosée. Le bois était presque désert; l'heure de la promenade n'avait pas encore sonné, du moins pour le beau monde; car on sait que le meilleur temps de la journée est réservé la promenade des jockeys; les maîtres ne viennent au bois que quand les domestiques ont fait lever la poussière des ailées. Un très-élégant coupé vint passer près de Frédéric de Marvilliers. Le cocher prit un détour et s'arrêta tout- à-coup, peu près entre Auteuil et Boulogne. Frédéric se mit au galop pour voir qui pouvait venir au bois si matin. Le valet de pied ouvrit la portière, en demandant s'il fallait arrêter là. C'est bien... dit une petite voix douce et claire. Au même instant, une jeune femme descendit du coupé. Frédéric fut frappé de sa pâleur, de sa beauté et de sa grâce nobleetfière. Elleportaitunesimple robe de barègeblanc, un châle de dentelle noire et une capote de crêpe lilas. Elle ouvrit une petite ombrelle rose et s'éloigna. Guillaume,dit-elle en se retournant, je vais marcher un peu. AU«idez-moi. Est-ce que ce ne sont pas là les chevaux de M. le comte de Verneuil se demanda Frédéricaidé par ses souvenirs et par les armoiries de la voiture. Il n'avait d'ailleurs jamais été présenté ni au comte, ni la comtesse, qu'il connaissait seulement comme on con naît le monde Paris. Il s'était passé quelques minutes; la jeune femme, qui ne perdait pas de temps, se trouvait déjà presque au bout de l'allée; Frédéric laissa son cheval son jockey et la suivit pied el dislance. Si je ne me trompe, dit-il, j'ai rencontré un roman. Je ne perdrai pas ma journée. Frédéric de Marvilliers était un homme de trente-cinq ans, qui avait traversé avec ardeur le momie des folies et des belles passious; mais une expérience précoce l'avait rendu sceptique. Aussi n'élait-il plus célèbre l'Opéra pour ses aventures, mais pour son goût étudier celles des autres. 11 était du petit nombre de ceux qui vivent par curiosité; il trouvait tout autant de plaisir épier dans ses phases diverses la passion d'un ami ou méine d'un étranger, qu'à en suivre une pour son propre compte. Ii lui arrivait presque de ne pas dormir pour un rendez-vous accordé un autre. Il est bien entendu que c'était la cu riosité intelligente d'un homme qui a du goût pour la philosophie'curiosité sérieuse jusque dans ses frivolités. La vie élait pour lui un livre toujours ouvert, toujours nouveau, où il ne se fatiguait jamais de lire. terminée, chaque élève couronné accompagné d'une personne notable de la ville, est monté eu voilure et en cortège, et est alléchez ses parens afin de pouvoir leur offrir le résultat de sa bonne conduite et de son zèle. Vers six heures, les lauréats sont revenus I hôlel-de»ville et se sont séparés, après avoir adressé leurs remercîmeuls la direction de l'Académie royale d'Ypres. Voici la liste des élèves qui ont obtenu des prix dans les diverses classes de cette institution Prix d'honneur: Dessin. De Coninck, Pierre. Classe de dessind'après le modèle vivant. 1" De Zultere, Charles; 2*, Speybrouck, Jean. classe de dessind'après la bosse. 1" Henriacit, Edouard; 2", Vuylstckc, Désiré, 2* classe de dessind'après la bosse. 4" Coffyn, Richard; 2e, Verdoene, Léopold. 4* dusse de figure, dessin d'après l'estampe. 1" Ceriez, Théodore 2*, Mahieu, Charles. 2" classe de figuredessin d'après l'estampe. I" Fiers, Léopold; 2", Gillioen, Désiré. Classe de dessin d'ornements. 4" Bruteyn, Prosper; 2*, Vandelannoite, Jules. 4" classe de dessin linéaire. 4" Vlaemynck. François; 2", Kerrinckx, Théodore. 2e classe de dessin linéaire. 1" Gillioen, Léopold; 2e, Drolez, Pierre. Architecture. Ie classe. Composition selon programme. A."Schollaert, Désiré; 2', Daele, Auguste. 2' classe. Copie. 1" Desmaizière, Gustave, 2% Rabau, Louis. 3" classe. 4" Thiderick, Étienne; 2«, Borry, Théophile. 4* classe. 4" Podevin, Auguste1, 2«, Doolaeghe, Léonard. Classe de peinture. Prix unique: De Thoor, Edouard. Classe d anatomie. Prix unique: Leroy, Auguste. .Perspective, premier cours. Prix unique De Thoor, Edouard. Perspective, deuxième cours. Prix unique: Coffyn, Richard. Proportions. Premier cours. Prix unique: Hennaert, Edouard. Proportions. Deuxième cour*. Prix unique Coffyn, Richard. Géométrie; Premier cours. Prix unique: Borry, Théophile. Géométrie. Deuxième cours. Prix unique: Mahieu, Amand. Il ne se contentait pas de chercher lever le voile des intriguesamoureuses, il se tenait au courant des intrigues politiques et des intrigues littéraires. Tantôt il étudiait un homme de lettres dans sa course au clocher vers l'Académie, tantôt un député dans un steeplechase de- scrutin pour une des dignités de la chambre, appréciant l'habileté et l'adresse, mais.s'amusant beaucoup des coups imprévus du sort, qui -vient si souvent abattre nos châ teaux de cartes, changer les r^Ies et même l'esprit et la morale de la pièce. Il en élait arrivé au point de vue d'Erasme, qui voyait partout le spectacle de la folie, et qui voulait rester sage en dehors de la scène. Maître d'une fortune de quarante mille francs de reve nus, très-répandu dans le faubourg Saint-Germain el dans le faubourg Saint-Houoré, très son aise l'Opéra ctdaDS les parages de l'Opéra, Frédéric de Marvillcrs était de cette classe de gens qui sont1 sûrs de se réunir et de se rencontrer, dès qu'il y a donner vingt francs et se montrer pour une bonne œuvre ou pour une belle repré sentation; club de hasard, académie de circonstance, dont les séances se tiennent partout, l'église comme au thé âtre. Dans ces conditions, Frédéric de Marvillers était certainemenl bien placé pour se donner presque chaque jour l'émotion d'une page de roman plus ou moins inté ressante. Frédéric était d'ailleurs né avec l'instinct de tout ce qui

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