JV 1,104. 11e Année.
Dimanche, 30 Novembre 1831
JOliMAL DYPBES ET BE L AHUOVDISSEHEYT.
Vires acquirit eundo.
Société de l'Union libérale
INTÉRIEUR.
THÉÂTRE D'TPRES.
ABONNEMENTS: Ypres (franco), par trimestre, 3 francs 50c. Provinces,4francs.
INSERTIONS: Annonces, la ligne 15 centimes. Réclames, la ligne: 30 centimes.
Le Progrès parait le Jeudi et le Dimanche. Tout ce qui concerne le journal doit
être adressé l'éditeur, Marché au Beurre. On ne reçoit que les lettres affranchies*
DE L'ARRONDISSEMENT D'YPRES.
Messieurs les membres de la société sont informés que
la seconde réunion mensuelle aura lieu Mardi prochain,
2 Décembre 1851, six heures du soiriestaminet de
f Aigle d'or, Grand'Place. Ils sont priés de vouloir con
sidérer le présent avis tomme tenant lieu de billet de
convocation.
Ypres, 29 Novembre.
Si jamais polémique est devenue méprisable,
c'est bien celle des journaux cléricaux. Ils
disent le pour et le contre avec une effronterie
qui ne peut résulter que de la certitude qu'ils
ont que leurs lecteurs ne lisent jamais d'autres
feuilles. L'organe principal du parti catholique,
deux jours de distance, a jugé la proposition
de M. le sénateur Spitaels, tendant modifier
le projet de loi sur le» successions en ligne
directe, déloyaleobliquepire que le projet
primitif et ensuite améliorée et meilleure, après
qu'elfe avait été adoptée. Tous les journaux
épiscopatix onlsuivi la même tactique De détes
table qu'il était, l'amendement de.M Spitaels
est devenu excellent, ce n'est plus une loi de
larmes et de deuil, c est une loi de salut public
Les événements qui peuvent surgir en France
ont engagé le Sénat voter l'impôt de M. Frère,
disent les feuilles cléricales et, en alléguant ce
motif, elles condamnent l'opposition du Sénat,
car les éventualités politiques étaient, il y a trois
mois, aussi craindre que maintenant.
Quand le ministère, soutenu par le parti li
béral, a insisté pour obtenir cette aggravation
de charges, ce n'était pas pour le plaisir de faire
payer de nouvelles contributions. On ne paie
pas les impôts par amour, mais on les paie par
nécessité. C'est une charge laquelle on ne peut
se soustraire, quand on vit en société. On dirait
vraiment, entendre les journaux catholiques,
que ceux qui ont soutenu la nécessité de créer
de nouvelles charges, n'étaient pas atteints et
que le parti clérical seul avait tout payer.
Mais qu'on veuille remarquer encore le mo
bile ignoble auquel est attribué le vote du Sénat.
Les journaux catholiques qui accusent les feuil
les libérales de déverser le ridicule sur le Sénat
et de lui lancer le sarcasmesont bien aulre-
MADAME DE MIREMONT.
(«CIT.).
XXI.
ment injurieuses l'égard de celte assemblée,
mais, il est vrai, par pure bêlise et «ans le savoir
Si le Sénat immole les principes cléricauxc'est
la peur qu'il faut l'attribuer. Cette haute as
semblée a été agitee par la crainte de continuer
le çonflit-et nous ajouterons, par la conscience
de son impopularité. On a beau crier que I op
position a obtenu plus de suffrages que le parti
libéral, nous disons, nous, que le choix n'est
pas libre et que le Sénat ne représente qu'une
fraction des intérêts généraux de la nation- En
outre, la pression que le clergé a ouvertement
et audacieusement exercée sur les électeurs des
campagnes, est un autre motif pour ne pas ad-
mellre l'opposition du Sénat comme l'expression
des sentiments et des vœux du pays.
Que dire cependant des feuilles cléricales
qui. dans leur dépit, représentent les sénateurs
qu'elles ont fait élire, comme des peureux, des
trembleurs.
Jusqu'ici cependant la presse libérale n'a pas
donné, au vole du Sénat, un motif aussi igno
ble. Mais nous prendrons la défense dit Sénat
contre le» imputations insultantes de ces jour
naux, en rappelant qu en lf!48. la peur talonnait
joliment les feuilles des évèques. qui ne se gê
nent pas pour taxer té» autres de couardise,
quand, cette époque, elles s'abritaient trem-
bloltantes sous la bannière libérale.
Pour conclure, le parti clérical a subi un
mécompte et, dans son dépit, il ne sait qui
s'en prendre, car ouvertement il n ose blâmer
le Sénat, qui il veut cependant faire sentir
son désappointement par les reproches aigres-
doux que la presse cléricale lance l'adresse de
MM. les sénateurs.
ce que l'on a tenté d'exécuter mais qu'on en
soit convaincu la sociélé laïque est exposée
journellement aux empiétements et aux entre
prises du parti clérical qui veut lui imposer son
joug. M. le ministre de la justice l'a dit en pleine
Chambre par le monopole de lenseignement
vous voulez dominer les intelligences par les
fondations charitables et les main-mortes
vous voulez accaparer les richesses et exercer
la domination sur les intérêts matériels.
A peu près au moment où la vicomtesse sortit de la
ehambre de Valérie, deux messieurs enveloppés de grands
manteaux, car le temps était humide, et froid, descen
daient d'une carriole de louage la porte de la Croix-
Blanche, l'un des cabarets les plus achalandés du petit
village de Courcenay.
Après avoir annoncé qu'ils coucheraient, et retenu la
meilleure chambre de la maissn, ils demandèrent
madame Milord, qui était la maitresse de l'établissement,
de vouloir bien leur faire servir n souper dans une petite
salle voisine de celle où se réunissaient les buveurs vul
gaires, et de veiller ce qu'ils ne fussent pas dérangés
par le bruit ou par les importuas, attendu qu'ils avaient
parler d'affaires sérieuses.
Madame Milord, que nous appellerons désormais la
mère Milord, pour nous conformer l'usage généralement
adopté dans le pays, avait trop rarement l'honneur de
recevoir chez elle des gens en carriole, pour ne pas s'em-
Pendant longtemps les feuilles des évèques
ont agréablement plaisanté sur la main-morte,
traitant cette institution de fantôme qu'on ne
pouvait plus faire revivre. Aujourd'hui cepen
dant on ose faire l'éloge de la main-morte et
elle est citée comme un grand bienfait MM les
sénateurs du parti catholique ont jugé même
qu'il fallait l'encourager et la faciliter, en l'ex
onérant de tout droit de mutation. C'est par
fait, mais cela démontre une fois de plus que le
rêve du parti clérical est la reconstitution «Je
l'ancien régime dans les limites du possible. On
essaieon fait des tentatives quelquefois on
réussit, d'autres fois, on échoue, et alors on nie
presser de satisfaire aux demandes de ceux que le hasard
lui envoyait. Elle se hâta donc de leur dire que toute la
maison était leur service pour aussi longtemps qu'ils le
voudraient, puis elle se laissa rouler jusqu'à une espèce de
cloaque qui lui tenait lieu de bisse-cour, et elle revint
bientôt portant d'une main un lapin de choux qu'elle
avait assommé pour le faire voyager plus facilement, et de
l'autre un vieux coq, qu'elle se mit saigner avec le sang-
froid superbe et dédaigneux d'un magistrat blasé sur les
jouissances de sa profession.
Pendant qu'elle s'agitait dans sa cuisine, ses deux hôtes
s'établissaient, dans la petite salle qu'ils avaient retenue,
aux deux coins d'une large cheminée où pétillait un feu
réjouissant, alimenté par des fagots de l'année précédente.
Eh bien papa Malard, dit le plus jeune des deux
voyageurs l'autre, nous allons donc frapper les grands
coups; c'est dommage qu'il soit si tard et qu'il faille re
mettre l'affaire demain.
A ce ton familier, cette brusque entrée en matière,
nos lecteurs ont sans doute déjà reconnu l'intègre libéral
Corneillan, depuis peu usufruitier du domaine de la Ge-
netois, ce qui l'a fait électeur.
Qui aurait cru qu'au sein du Sénat, ceux-là
même en qui leur caractère indépendant et
des antipathies manifestes l'endroit du
n cabinet ne permettent pas de soupçonner une
condescendance coupable, que ceux-là même
qui leur opposition antérieure au projet
de loi a valu, sinon leur mandat, au moins
une majorité plus imposante devant le corps
électoral, que ceux-là même, disons-nous,
eussent voté l'impôt Spitaels?
Ainsi s'exprime le Propagateur l'encontre
des sénateurs qui ont adopté le droit de muta-
lion ap lieu du droit de succession, et il nous
semble que Gros-Jean en remontre son curé,
car cette feuille a l'air de blâmer le père de
l évêque, le sénateur Malou, qui a voté en fa
veur de la proposition Spitaels, il n'ose le qua
lifier de servile et de complaisant, comme les
représentants, mais on sent que si ce n'était le
père de l'évêque. il le traiterait plus cavalière
ment. Que c'est heureux d'avoir un filsévêque,
c'est un paratonnerre qui vous abrite des in
jures et des insultes des journaux du clergé!
M. Ponnet a tenu sa parole sa troupe ou
pour mieux dire une partie de sa troupe, nous
est venue, précédée de la bonne réputation que
lui ont faite les journaux de Bruges. Disons
qu'eUe est méritée. Si M. Ponnet ne nous a
envoyé qu'une partie de ses sujets, il a eu le
bon esprit de nous en donner l'élite, et nous ne
croyons rien exagérer, en avançant q«ie nous
avons eu sur notre scène chose bien rare
Y près des acteurs la hauteur de leurs rôies,
par leur talentleur tenue et leurs costumes,
en un mot, des artistes dramatiques.
Les acteurs qui se sont particulièrement et
mériloiremenl fait applaudi! ont été VI. Potlier
et M11' Le Blanc. Nous ne sachions pas qu'à Ypres
Pensez-vous que nous réussissions? répondit Malard
sèchement, car il avait été choqué du sans-façon de son
interlocuteur.
Et qui nous en empêcherait? ce pauvre diable,-
auqueTnous apportons une situation magnifique, fera tout
ce que nous voudrons.
D'accord; mais vous n'avez pas réfléchi une chose.
Qu'en savez-vous cependant, voyons, de quoi
s'agit-il
Si nous faisons reconnaître les droits de l'un, nous
diminuerons nécessairement de moitié les avantages de
l'autre...
Qui restera néanmoins encore un très-beau parti pour
mademoiselle Clémence Malard, dont les ancêtres n'ont
pas, que je sache, roulé carrosse, interrompit Corneillan
qui ne laissait jamais échapper une occasion d'humilier
celui qu'il appelait son meilleur ami.
Vous avez raison, Corneillan mais il est toujours
désagréable de voir échapper la moitié d'une chose dont
on espérait avoir la totalité.
Eh bien voyez, papa Malard, comme je suis plus
philosophe que vous moi je me contenterais volontiers