JOURNAL D'YPRES ET DE L'ARRONDISSEMENT.
]V 1,105. 11' Année.
Jeudf9 4 Décembre 1851.
Vires acquint eundo.
INTÉRIEUR.
Coup d'état Bonapartiste.
MADAME DE MIREMONT.
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être adressé l'éditeur, Marché au Beurre. On ne reçoit que les lettres affranchies.
Ypres, 3 Décembre.
LE PRIME LOUIS-MPOLÉOX DICTATEUR.
Ce qui était attendu depuis quelque temps
vient d'arriver en France. Le prince Louis-Na
poléon qui a fait deux tentatives pour s'emparer
du pouvoir, quand il n'avait aucune chance, ne
pouvait guère avoir envie de quitter les fonc
tions présidentielles, sans tenter un nouvel essai
pour les conserver. Il a donc dissous l'Assemblée
nationale, fait arrêter quelques députés et sur
tout les généraux qui pouvaient exercer de
l'influence sur l'armée. Il a adressé un appel au
peuple, en rétablissant le suffrage universel
illimité. Il est impossible de prévoir quelles peu
vent être les conséquences du coup d'étal que
vient dç tenter le président. Tout ce qu'on peut
dire, c'est que la France'est de nouveau re
plongée dans les expériences révolutionnaires
et qu'elle est derechef eu marche vers l'in
connu.
Paris, 2 Décembre8 heures du matin.
Le Minitire de Vintérieur MM. les Préfets
Le repos de la France était menacé par l'As
semblée: elle est dissoute.
Le Président de la République fait un appel
la nation, il maintient la République et remet
loyalement au pays le droit de décider de son
sort.
La population de Paris a accueilli avec en
thousiasme cet événement devenu nécessaire.
Paris, Mardi11 heures du matinpar voie télégraphique.
L'assemblée nationale a été occupée militai
rement.
Sa dissolution est décrétée.
Le suffrage universel est rétabli.
XXI.
(suite).
En ce moment la mère Milord entra dans la petite salle;
ellç portait tous les ustensiles qui servent mettre un
couvert, et elle procéda sans retard cette importante
opération, pendant que son coq achevait de se racornir
la broche, et que sa gibelotte bouillotait dans un chau
dron de cuivre au milieu d'un nuage de fuinée.
Combien faut-il de temps pour monter au vieux
château de Courcenay demanda Corneillan la mère
Milord.
Demain, répondit celle-ci, les sentiers seront glis
sants, il faudra bien vingt-cinq minutes; est-ce que ces
Messieurs sont déjà les entrepreneurs.
Comment les entrepreneurs fit Malard avec une
surprise qui n'était pas sans mélange d'inquiétude.
C'est qu'il y a joliment de Ta nouveauté là-haut
reprit la mère Milord d'un ton d'importance. M. Joliot,
l'architecte, a déjeuné ici, ce matin, et il a dit qu'on allait
dépenser plus de trois cent mille francs pour réparer le
vieux château, preuve qu'il a déjà fait prix avec moi
pour que je nourrisse ses ouvriers.
Et qui va payer toute celte dépense demanda
son tour Corneillan.
Eh pardieu M. le marquis de Brantigny, le ci-devant
propriétaire, comme disent les anciens du pays. Il parait
qn'il a racheté, ou...
Le nommé Sirvan ne demeure donc plus là-haut
interrompit Malard.
Le peuple est convoqué dans les comices du
14 au 11 décembre.
La République est maintenue.
Paris est en état de siège.
Un grand nombre de membres de l'Assemblée
sont arrêtés.
Les généraux Changarnier Lamoricière
Bedeau, Lcflô, etc., sont arrêtés
M. Baze, questeur, est arrêté.
M. de Morny, est ministre de l'intérieur.
Dépêche électrique.Paris, 2 Décembre, midi.
Le président a fait son coup d'état. MM.
Changarnier, De Lamoricière et Charras, ainsi
que plusieurs députés sont arrêtés.
L'Assemblée législative est dissoute et occupée
militairement.
Paris est en état de siège.
M. de Morny est nommé ministre de l'inté
rieur.
Le peuple est convoqué dans les comices du
14 au 21 Décembre, sous l'empire du suffrage
universel qui est rétabli.
La République sera maintenue.
A 1 heure.
Le Président de la République vient de pas
ser en revue divers régiments qui se trouvaient
échelonnés de l'Elysée-Nalional jusqu'aux Tui
leries.
Partout sur son passage le prince a été ac
cueilli par les cris de: vive Napoléon! vive le
Président! vive la République honnête et le
suffrage universel.
Le plus grand calme règne partout.
Paris, Mardi, 1 heure.
Un sénat est nommé
Ses membres sont choisis parmi les capacités
législatives de l'époque.
Uue assemblée constituante sera nommée par
le peuple et par le suffrage universel.
Louis-Bonaparte est maintenu président de
la République pour dix ans;
Il est responsable.
Mais c'est bien sûr qu'il n'y demeure plus, puisqu'il
a cédé il est revenu dans sa petite maison du village qui
est trois portcsd'ici, que même ses enfants lui en veu
lent beaucoup. Ils ont eu de la compagnie ce malin.
Quelle compagnie
Malard et Corneillan firent en même temps cette ques
tion qui les intéressait tous deux, on sait pourquoi.
Quelle compagnie? répéta la mère Milord; mais
des beaux Messieurs et des belles dames le marquis de
Brantigny et son fils, un joli jeune homme, ma foi
madame la vicomtesse de Miremont avec une demoiselle
qui est chez elle; on dit que cette demoiselle va épouser le
fils du marquis: ça fera un couple comme on en voit guère.
Et la mère Milord ayant épuisé tout ce qu'elle savait de
nouvelles dignes d'être racontées des étrangers de dis
tinction, retourna dans sa cuisine pour dresser son souper.
Malard et Corneillan se regardèrent en silence pendant
quelques instants; ils paraissaient consternés.
Nous sommes arrivés trop tard, dit le premier avec
accablement le marquis de Brantigny aura pris l'avance.
Corneillan, il n'y a rien de fait entre nous.
C'est ce que nous verrons; je ne lâche pas aussi
facilement ce que je liens. Si nous venons trop tard pour
empêcher le jeune Brantigny d'épouser une autre que
votre demoiselle, peut-être est-il'éneore temps d'obliger
le père reconnaître le eul-dc-jatte pour son héritier.
Pardieu, voilà un beau résultat s'écria Malard en
frappantdu poing avec colère. Êtes-vous fou, Corneillan?
Laissez-moi faire, papa Malard; et soupons de bon
appétit puisque voilà la soupe. Demain sept heures du
matin, je me mcttraiAen campagne, et puisse le général
Les ministres sont responsables vis-à-vis du
président.
M. le général Charras est arrêté ainsi que M.
Tbiers.
A 2 heures.
Paris est toujours très-tranquille et l'acte du
Président de la république est approuvé géné
ralement.
Dépêche tsaxsmise be Lille. 2 heures.
Une autre dépêche que nous recevons l'in
stant nous confirme les importantes nouvelles
qui précèdent
Le conseil d'état est également dissous:
Le Président constitue, par sa proclamation",
un pouvoir exécutif responsable pendant dix ans.
Le ministère sera responsable envers le Pré
sident.
11 y aura deux assemblées, l'une nommée par
les électeurs, l'autre renfermant les grandes
capacités du pays.
C'est la première division militaire toute en
tière. et non Paris seulement, qui est mise «a
état de siège.
Tout est tranquille Paris.
Bruxelles, Mardi, 3 heures du scir.
La première dépêche transmise par le télé
graphe électrique était l'adresse du gouverne
ment autrichien.
Ce fait est significatif.
L. Bonaparte fait son coup d'État appuyé par
les gouvernemenls absolutistes du Nord et par
celui de lord PalmerslOn.
A 1 heure, quatre estafettes sont parties de
l'hôtel du ministre de la guerre. Il est question
d armer les places fortes île la Belgique.
Des crédits vont être demaudés, dit-on, la
chambre, dans la séance de demain.
La chambre est très-agitée l'ouverture de
la séance.
Lafayette ne jamais remonter sur son cheval blanc, si
midi je ne vous apprends pas du nouveau
Le lendemain l'heure indiquée par Corneillan, celui-ci
entrait dans la chambre de Sirvan qu'il trouva seul, car
Marguerite et ses enfants venaient de partir pour la messe
XXII.
Eh bien Sirvan, lui dit-il en prenant familièrement
un siège qu'on ne lui avait pas offert, vous avez donc
quitté votre château qui diable a pu vous déterminer
prendre cette résolution
Sirvan posa côté de lui un gros livre qu'il tenait la
main, et se redressant autant que son infirmité le lui
permettait, il répondit:
Qui êtes-vous, Monsieur, de quel droit me ques
tionnez-vous sur une affaire qui ne regarde que moi
Quoi vous ne me reconnaissez pas, moD brave je
suis Corneillan... Brulus Corneillan, le fils de l'ancien
municipal de cette commune qui a marié votre mère dans
le temps, vous savez bien...
Je ne vous connais pas, Monsieur, interrompit Sir
van avec hauteur, et je suis fort étonné que vous vous
«oyez permis de pénétrer chez moi sans ma permission.
D'abord, la porte était ouverte, riposta Corneillan
sans se troubler; et d'ailleurs, ajouta-t-il, on peut tou
jours entrer chez lesgens quand on vient pour leur rendre
un service d'importance.
Ce dernier mot fut prononcé avec une emphase qui
trahissait l'intention d'en faire sentir toute la portée.
Je n'ai besoin des services de personne, Monsieur;
et s'il en est autrement, je n'accepterais pas en tous cas
ceux d'un inconnu.