JOURNAL D'YPRES ET DE L'ARRONDISSEMENT.
H- 1,27» Année.
Dimanche, 10 Juillet 1053.
Vues acquirit eundo.
LA FAMILLE HOLLANDAISE.
Chronique locale.
Chronique politique.
9 M
f ABONNEMENTS r Ypres (franco), par trimestre, 5 francs 50c. Provinces,4 francs. I
INSERTIONS Annonces, la ligne 15 centimes. Réclames, la ligne 50 centimes.
Le Progrès paraît le Jeudi et le Dimanche. Tout ce qui concerne le journal doit
être adressé l'éditeur, Marché au Beurre. On ne reçoit que les lettres affranchies.
ai,
Iphf.s, 9 Juillet.
Chacun sait que la presse catholique s'évertue
dépeindre le parti libéral comme un ramassis
Je va-nus-pieds, de gens sans aveu, dé pertur
bateurs du repos public, de révolutionnaires,
etc.
Les associations politiques, fondées par le parti
u progrès, sont, au dire des feuilles du clergé,
es espèces de cavernes de brigands où d'hor
ribles clubisles conspirent dans l'ombre, ces
saintes feuilles n'oseut plus soutenir que dans
clubs on boit du sang humaiu, elles n'en
insinuent pas moins qu'il s'y passe d'abomina
bles choses.
Le Congrès libéral de 1846, ce congrès qui,
en hâtant la chûte du ministère de la S1 Ignace,
a puissamment contribué sauver la Belgique
en 1848; ce congrès, s'il fallait en croire les
journaux cléricaux, était composé de tout ce
que la Belgique d'alors possédait de gens sans
aveu, aussi ce congrès, dit-on, a inscrit dans son
programme qui est aujourd'hui encore la charte
do libéralisme les principes les plus subversifs
et les moins compatibles avec l'ordre public.
Ce qui se passe en ce moment Bruxelles, est
bien de nature prouver, aux plus aveugles, que
ces assertions sont de pures ou plutôt d'impures
calomnies.
En effet, deux places de sénateur sont va
cantes pour l'arrondissement de Bruxelles, l'As
sociation libérale se réunitnon pas dans
l'ombre, mais au vu et au su de tous, elle ne
cache personne les résolutions qu'elle prend,
car le compte-rendu de ses séances est publié
par tous les journaux de la capitale; enfin les
candidats provisoires qui sont présentés, loin
d'être, comme le prétendent les feuilles des
évêques, des gens sans aveu, sont au contraire
des citoyens des plus honorables, et parmi eux
se trouvent des hommes dont le nom est une
des gloires de la Belgique.
Ainsien tête de la liste des candidats admis
par l'Association libérale figure le nom du doc
teur baron Seutin;ce nom est connu de l'Europe
entière, le baron Seutin fait partie d'une foule
d'académies où par ses talents il honore la Bel
gique et fait faire chaque jour la science de
nouveaux progrès.
Le soleil se levait, non pas brillant et radieux comme
le soleil d'Espagne ou d'Italie, lorsque son ardente clarté,
embrasant l'horizon, rappelle brusquement la vie tout
ce qui respire, lorsque, ses rayons d'or se mêlant au bleu
foncé d'un ciel méridional, tout semble plein de sève et
de vigueur, comme si la lumière donnait la vie; le soleil
se levait sur la froide terre de Hollande. Les nuages
s'entr'ouvraient pour laisser tomber une pâle lumière,
sans chaleur et sans éclat. Un fleuve aux flots jaunâtres,
chargé du limon de ses rives, coule paisiblement, sans
ardeur, sans amour, vers la mer qui l'attend. De loin,
ses eaux et son rivage paraissent de même couleur, et ne
présentent que l'aspect d'une plaine sablonneuse, moins
qu'un rayon de lumière se brisant sur l'onde, quelques
sillages argentés ne révèlent le cours du fleuve. Des
bateaux pesamment chargés voguent traînés par un
attelage de chevaux qui enfoncent leurs pieds robustes
dans le sable, les relèvent, les enfoncent, et avancent
sans hâte vers le but, sans souci de la fatigue. Derrière I
eux, un paysan marche le fouet sur l'épaule; il ne presse
pas ses chevaux; il ne regarde ni le fleuve qui coule, ni
les bêtes qui tirent, ni le bateau qui suit; il marche, et,
pour arriver, il n'emploie que la persévérance.
Le second candidat de l'Association libérale
est M. le notaire Coppyn, un des premiers no
taires de Bruxelles, et qui jouit de la confiance
des familles les plus riches et les plus notables
de la capitale.
M. le colonel Goethals, aide-de-camp de S.
A. R. le Duc de Brabant, a été également pro
posé aux suffrages de l'Association libérale, et
si ce citoyen si haut placé n'a pas cru pouvoir
accepter la candidature qui lui était offerte,
c'est uniquement pareeque, d'après la loi sur
les incompatibilités, avant d'accepter un siège
au sénat, il devrait déposer ses épaulelles de
colonel.
Les divers candidats dont nous venons de
parler ont, avant d'être proclamés, déclaré pu
bliquement que les principes politiques de l'As
sociation libérale étaient leurs principes et qu'ils
adhéraient, de grand cœur, au programme du
Congrès libéral de 1846.
Quand on voit des hommes de cette impor
tance pactiser avec le libéralisme le plus pur,
le plus immaculé, représenté par l'Association
libérale de Bruxelles, quand on les voit adhérer
au programme du Congrès de 1846, ne doit-on
pas reconnaître que le parti libéral Belge est
un grand parti politique, un parti plein d'ave
nir et que son programme eg£ «ine lumineuse
bannière sous laquelle sont fiers de se ranger
les hommes les plus considérables du pays.
Que deviennent, en présence de ces faits, les
déclamations de la presse catholique F Néant.
La capitale, ce foyer de lumières, donnera,
espérons-le, une leçon nouvelle au parti de la
réaction.
Bruxelles ne se laissera pas Dindaliser!
On nous assure que la marque de confiance
et de sympathie donnée, par le conseil provin
cial, M. Ernest Merghelyucknommé secré
taire du Conseil, empêche nos catho de dormir;
toute l'armée catholique, depuis le général
jusqu'au dernier coadjuteur, est en émoi
Bon Dieu, se dit-on, voilà le Conseil provincial
qui nous échappe;..... il élève aux honneurs
un citoyen ferme dans ses principes libéraux et
que nous détestons bien cordialement.
Avouons que la leçon donnée aux réaction
naires est un peu forte, mais elle est bien mé
ritéeNous serions curieux de connaître sur
cette affaire l'opinion de M. Pollet, curé Locre.
Tel n'est pas l'aspect général de la Hollande, mais tel
est un des coins du tableau qui frappe les regards fatigués
du voyageur lorsqu'il parcourt le nord de ce pays, qui
semble, plus que tout autre, chargé de faire respecter le
décret de Dieu qui dit la mer Tu n'iras pas plus loin!
Ce silence, ce calme des êtres et des choses, ce jour
adouci, ces nuances partout affaiblies, ces grandes plaines
sans mouvement, tout cet ensemble a sa poésie. Partout
où il y a silence et espace, la poésie trouve sa place; elle
aime un peu toutes choses, les rians paysages, les tristes
déserts: oiseau léger,tout lui est bon pour s'arrêter,tout le
porte, tout le soutient, un brin d'herbe souvent lui suffit.
La Hollande, que le poëte Butler appelait un grand
vaisseau toujours l'ancrea sa beauté pour quiconque
réfléchit en regardant. On admire lentement, mais on
admire enfin cette terre en guerre avec la mer, luttant
chaque jour pour défendre son existence, ces hommes
patiens et courageux qui derrière un rempart brisé élèvent
un autre rempart, ces villes qui forcent les flots couler
au pied de leurs murailles, suivre la route tracée, se
contenir dans le lit creusé; puis ces jours de révolte où
l'eau, comme si elle se souvenait de sa nature première,
veut reconquérir son indépendance, déborde, inonde,
détruit, et enfin, par la force de la main de l'homme, se
calme et obéit de nouveau. Là, la vie ressemble au soir
L'administration communale, parait-il, mal
gré la triste situation où se trouve la ville
privée de garnison, cherchera donner, cette
année, l'occasion de la kermesse, quelques
fêtes qui attireront, sans doute, beaucoup de
monde en ville.
On parle d'un grand tir la cible qui serait
offert aux gardes citoyennes et aux corps de
Sapeurs-Pompiers du royaume et de l'étranger
D'un bal monstre
D'un festival
D'un carrousel
De joutes sur l'eau
D'un tir l'arc, etc.
Diverses commissions s'occupent de l'orga
nisation de ces fêtes et se réunissent chaque
jour l'Hôtel-de-ville.
Nous ne pouvons qu'approuver la résolution
prise par l'autorité communale. La bourgeoisie
voit ces fêtes avec plaisir, car le séjour des
étrangers en ville procure d'incontestables bé
néfices qui dépassent de beaucoup les sacrifices
que fait la caisse communale, sacrifices qui, du
reste, ne peuvent excéder le crédit voté au
budget de 1853.
Les travaux du chemin de fer et delà station
avancent rapidement; on nous assure que d'ici
un mois, la section de Comines Hollebeke
sera exploitée. Ypres ne sera alors qu'à 6 ou 7
kilomètres de la voie ferrée. Ce trajet sera par
couru par un omnibus en trois quarts d'heure.
Du 7 Juillet au 9 inclus.
L'Indépendance a publié avant-hier une de'pêche
télégraphiquede Londres, annonçant que le Times du
jour en contenait une de Vienne, d'après laquelle,
le i5 juin, 12,000 Russes seraient entrés Jassy,
capitale de la Moldavie. En parlant de ce fait hier
matin, nous l'avons révoqué en doute. Nous avions
raison. La dépêche en question ne se trouve même
pas dans le Time*.
Ce journal dit seulement avoir reçu de Saint-Pé
tersbourg, par le bateau vapeur qui a quitté cette
d'une bataille; il y a fatigue, orgueil, triomphe. L'impas
sible habitant de ces contrées possède ce mobile de toutes
choses, la volonté. Il est sûr du succès, parce qu'il veut;
il est calme, parce qu'il est fort il agit lentement, parce
qu'il réfléchit. Il y a dans le silence des choses sérieuses
une beauté que notre âme doit s'étudier entendre,
comme elle entend l'harmonie de ce qui chante, comme
elle voit la couleur de ce qui brille.
Au moment où le soleil se levait, une petite barque
glissait rapidement le long du fleuve. Deux rames ma
niées avec force frappaient l'eau et la faisaient jaillir en
écume. Une seule personne était dans la barque, c'était
un jeune homme, grand, souple, plein d'adresse et de
force; il dirigeait son embarcation le long des sinuosités
du rivage, évitant de prendre le fleuve au large, quoique
sa course dût en être plus rapide, et pourtant il se hâtait
comme s'il eût craint d'être en retard. Mais, cette
heure matinale, la campagne était déserte, et les oiseaux
seuls dans leur réveil avaient devancé le jeune homme.
II avait déposé auprès de lui son grand chapeau de feutre
gris, et ses cheveux d'un blond foncé, rejetés en arrière
par le vent qui frappait son visage, laissaient voir ses
traits réguliers, son large front et ses yeux un peu rêveurs,
comme ceux des hommes du Nord. 11 portait lé costume
d'un étudiant des universités d'Allemagne. On voyait