JOURNAL DYPRES ET DE L'ARRONDISSEMENT.
S41,294. 13e Année.
Dimanche, 25 Septembre 1953.
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ïpres, 94 Septembre.
Pression exercée par le clergé
•nr les familles en matière d'enseignement.
Depuis quelque temps, les journaux de l'é-
piscopat s'appitoyent amèrement sur le sort des
pauvres pères de famille, tyrannisés par ces
mécréants de libéraux, sur le choix de l'ensei
gnement donner leurs enfants. A les en
croire, tous les jeunes gens qui fréquentent les
établissements laïcs, n'y suivent les cours, que
forcés et contraints par les menaces et la pres
sion des autorités libérales.
C'est, comme on voit, toujours l'histoire du
filou qui. pris la maiu dans le sac, crie plus fort
que sa victime, au voleur! dans le but de dé
router les recherches. Ces feuilles si pieuses, si
morales, cherchent ainsi dérouter l'opinion
publique. A force de crier la tyrannie des
autorités laïques, elles espèrent détourner l'at
tention des intrigues et fourberies des autorités
ecclésiastiques. Le calcul n'est pas mauvais,
mais le tour est trop vieux pour avoir ericoré
du succès.
Et comment peut-il encore réussir, quand il
est connu du public que tel père de famille,
que nous pourrions nommer si on conteste le
fait, se plaint amèrement de devoir donner une
mauvaise instruction son enfant, parceque
«on beau-frère, prêtre, menace de le déshériter
s'il s'avise de placer son fils dans un établisse
ment laïc. Ce brave père de famille, sous le
poidsde celte contrainte, envoie son enfant dans
une institution cléricale et sacrifie lavenir de
celui-ci, parceque le clergé laisse la liberté aux
ses parentséloigné de sa familleparceque le
clergé laisse toute liberté aux pères de famille,
quand il s'agit du choix de l'enseignement
donner aux enfants.
Voici un autre fait qui ne laisse pas que de
démontrer que les journaux du clergé, en criant
contre une pression imaginaire, le font de peur
que les autorités laïques ne suivent I exemple
de leurs patrons. Un pèrede famille des environs
d'Ypres avait un oncle chanoine, et le moment
venu de placer son fils dans une institution d in
struction moyenne, le chanoine, dont il doit
hériter, signifia au père de famille qu'il eut
placer son fils au collège d'Ypres
ricale. Eu confiant aux institutions soi-disaat
religieuses, les jeunes gens francs, d'un caractère
ouvert et ayant des sentiments d'honneur, on
risque de les voir revenir sournois, cachés et
d'une fourberie devenue proverbiale pour qu'il
soit nécessaire de la qualifier.
Enfin le premier coup de pelle est donné
aux ouvrages en terrassement des fortifications
d'Ypres. C'est avec tristesse que nous voyons
procéder la démolition des travaux de dé
fense de notre place, et quoique ce ne soit
pas la première fois qu'Yprès ait été condamnée
être ville ouverte, nous devons hautement
Malheureusement il ne désigna point quel j protestér coutre la faute que, dans notre opi-
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collège d'Ypres il lui étaiteojoint de confier son
fils, et le père de famille, libre dans son choix,
le plaça au collège communal, où le jeune
homme, intelligent et travailleur, obtint des
succès. Mais le chanoine apprit un jour que le
jeune homme en question fréquentait les cours
du collège communal; et se montra fort mécon
tent de la façon dont il avait été compris. Le
jeune homme dut quitter et on le fourra dans
un pensionnat de prêtres où, mécontent et dé
couragé, il ne réussit plus rien faire de boa et
sa carrière fut manquée.
Nous le répétons, ces faits sont authentiques,
et, si on veut du scandale, nous en ferons, en
nommant les masques. Car enfin il devient
odieux de calomnier des personnes sans motifs,
tandis que soi-même, on est coupable des méfaits
qu'on reproche gratuitement autrui.
Mais doit-on s'étonner de celle tactique, et
pères de famille de choisir l'enseignement qui toute la boutique cléricale n'est-ce pas un
leur convient.
Tel autre père de famille avait placé son en
fant dans un établissement laïc. Son frère,
prêtre, l'apprend, accourt chez lui, la menace
la bouche, crie, tempête, enfin lui dit qu'il
ne doit pas compter sur son héritage s'il ne
place son enfant dans un collège de prêtres. Ce
père de famille, dont un membre du clergé res
pecte la liberté comme on voit, résiste, ne veut
pas, enfin on compose et l'enfant se trouve placé
dans le pensionnat d'un collège clérical, loin de
assemblage de fourberies élevé la dixième
puissance? A cet égard, nous pouvons citer
l'opinion d'un père de famille qui, engagé
placer son fils dans tin collège cléricalrefusa
en disant quand on confie ses fils des
établissements ecclésiastiques, on risque de véir
inculquer ses enfants des germes d'opposition
l'autorité paternelle et peut-être essaye-t-on
d'amoindrir la confiance qu'un enfant doit avoir
dans l'auteur de ses jours. Rien n'est plus op
posé l'esprit de famille que l'éducation clé-
nion, on commet, en laissant dix huit lieues de
frontières sans défense. C'est une iniquité qui
est injustifiable, que de laisser notre contrée
pour ainsi dire abandonnée aux incursions du
premier ennemi qui aurait envie de nous piller.
Au moins la place d'Ypres était un lieu de re
fuge et sa garnison pouvait tenir en respect
les maraudeurs qui auraient voulu rauçouner
nos localités.
La commission de la Garde civique, qui saisit
toutes les circonstances pouf ressecrer-toujours
davantage les liens d'anïitié et de bienveillance
qui doivent unir les gardes entr'eux, vient de
décider de fêter dignement l'anniversaire de
l'indépendance nationale, par un beau tir la
cible qu'elle offre ses sociétaires. Ainsi, immé
diatement après la revue, la musique de la
Garde civique conduira les sociétaires la plaine
où le tir aura lieu, la fête se terminera par un
banquet présidé par le président d'honneur dé
la société, le chef de la garde.
Ceci nous fait rappeler toutes les fêtes que
déjà, en maintes circonstances, la société 3
données, et qui ont toujours eu un cachet par
ticulier par l'entrain et la galle qui régnent
habituellement parmi ses membres, et notam
ment la dernière fête qu'elle a donnée lors de
la kermesse et qui a laissé des souvenirs bien
agréables, tant dans le sein de la société, que
parmi les nombreuses personnes étrangères la
Là FAMILLE HOLLANDAISE.
(SUITE.)
On laissa la sœur Van Amberg pendant quelque temps
livrée elle-même, lui demandant seulement d'assister
aux prières. Christine passa ces jours-là dans une horrible
angoisse. Aucun regard ne s'arrêta sur elle sans que ce
regard ne trouvât son visage baigné de larmes. Ce n'est
pas au couvent comme dans le monde, où mille soins
empressés, où mille questions entourent la douleur.
Christine pleurait sans se cacher; on la voyait et on la
plaignait sans bruit. Au couvent l'ami, le consolateur,
e'est Dieu. On laissait le silence être grand, afin que sa
voix se fit mieux entendre.
Les jours succédaient aux jours, et Christine ne cessait
de pleurer des larmes amères. Elle murmurait contre le
ciel et contre les hommes; son cœur était révolté, tout la
froissait, tout la faisait souffrir. Elle s'asseyait près des
portes, près de cefe portes éternellement fermées; mais il
lui semblait que là l'air libre lui arrivait mieux qu'au
milieu du couvent. Quand la maîtresse des postulantes
s'arrêtait près d'elle et cherchait par quelques douces
paroles la calmer, Christine ne répondait pas, baissait
la tête sur sa poitrine et pleurait encore.
La supérieuretémoin silencieux et éclairé de toute
eelte douleur, s'émut dans sa conscience. Après avoir
longtemps regardé Christine, etie prit une plume et
écrivit ce qui suit
A MONSIEUR KARL VAN AMBERG.
Mon très-cber parent,
Vous m'avez envoyé votre fille en me témoignant
le désir qu'elle se fît religieuse. Je viens vous dire qu'après
de mûres réflexions et un attentif examen il ne me parait
pas qu'il en doive être ainsi. Dieu appelle parfois des
âmes pieuses et heureuses, qui viennent lui au com
mencement de leur vie avec allégresse et confiance
d'autres fois il appelle des âmes brisées par le malheur,
qui viennent lui comme au grand consolateur de toutes
souffrances; mais il n'ouvre pas sa sainte demeure ceux
qui n'y viennent que par obéissance la volonté d'autrui,
et dont le cœur se déchire du sacrifice. Ceux-là aussi
sont ses enfants pourtant, mais il leur dit Allez me
servir ailleurs. Il y aura place dans le ciel pour tous les
serviteurs de Dieu, quel que soit la vignë laquelle
ils auront travaillé. Je vous adjure, mon cher parent,
d'envoyer chercher voire fille Christine, d'étendre sur
elle votre indulgence et de la laisser vivre dans la maison
paternelle, qui est aussi une des maisons de Dieu. Ici
votre fille ne saurait être heureuse, et ici nous sommes
toutes heureuses. Que Dieu soit avec vous, mon très-
cher parent
Soeur Louise-Marie,
Supérieure du couvent de la Visitation
Puis la supérieure attendit, entourant Christine dé
repos et de silence, et demandant Dieu de venir ait
secours de cette enfant désolée. Mais c'étaient ce silence
et ce repos qui tuaient Christine. Elle eût voulu pouvoir
éclater en reproches, pouvoir troubler tout ce qui l'en
tourait par le trouble de son cœur. Les lois du couvent
pesaient sur elle comme un joug de fer.
La règle et l'habitude, qui font l'ordre et l'harmonie,
n'apparaissaient cette âme malade que comme la tyran-'
nie d'une volonté autre que la sienne. Quand de hautes
pensées n'ont pas amené le sacrifice volontaire de soj-
même, les chosesqui l'exigent matériellement, soumettant
les actions sans soumettre l'esprit, ne nous atteignent
qu'en nous faisant cruellement souffrir. Si Christine
marchait, il fallait qu'elle marchât lentement; si elle
parlait, il fallait que sa voix fûtbasse; si la cloche sonnait,
il fallait s'agenouiller avec un cœur aride; si l'horloge
marquait dix heures, il fallait se coucher sans sommeil;
si le jour commençait poindre, il fallait se lever avec
des yeux alourdis par le besoin du repos. Neuf fois par
jour, la cloche disait d'aller prier. Pour les religieuses,
cette cloche, voix amie descendant du ciel, semblait, en
le divisant, rendre le temps plus facile passer; mais,
pour Christine, e'était un supplice d'obéissance qui brisait
cette âme, toute aux passions de la terre.
Quand, la nuit, elle était seule dans sa cellule, elle se
levait et venait, près de sa petite fenêtre, essayer de dé
couvrir un coin du ciel. La lune, les nuages, lui re
laient celte dernière nuit d'espérance et d'amour, p-3 da t
laquelle elle voguâ quelques Hetll'ês, assise âupre: 'VfiTer-
bertcroyant une éternelle union de leurs âmes