Chronique politique.
A la fin de la séance, M. le ministre de l'inté
rieur a annoncé qu il était parvenu conclure
un arrangement avec Mgr larcheveque de Ma
tines. pour l'enseignement religieux l'Atbeoée
royal d'Anvers.
Jeudi, la Chambre des représentants a con
tinué la discussion des articles du budget de
l'intérieur.
Elle a ajourné mardi prochain, celle du
chapitre relatif l'enseignement moyen.
Du 9 Février an 11 Inclus.
Le Journal de* Débat* reproduit, sans la con
tredire, la nouvelle de la destitution du prince
Goiiscliakoff. Cette nouvelle, si elle se confirme,
prouvera que les bulletins russes qui ont constaté
les avantages obtenus par l'armée du Tzar dans
les provinces Danubiennes, n'étaient rien moins
que véridiques. Le général Gorschakoff ne serait
certainement pas destitué, s'il aurait ele vainqueur.
Comme signe de l'exaltation où sont arrivés les
esprits en Angleterre, contre la Russie, il suffit de
dire que quelques sifflets se sont fait entendre sur le
passage de la Reine et du prince Albert. Ces sifflets
ont été couverts par des applaudissements, il est
vrai, mais c'est la première fois qu'une démonstra
tion de cette espèce se produit contre Ja Reine. Il y
a quelques jours, au grand dîner annuel de la cor
poration des tailleurs, l'une des plus riches et des
plus importantes de Londres, la proposition de
porter un toast au prince Albert fut rejelée. Et pour
tant, les bruits répandus sur son compte ont été
cent fois dans ces derniers temps, déclarés faux et
calomnieux. Lord Westmoreland, ambassadeur
Vienne, avait lui-même écrit aux journaux, pour
démentir ceux auxquels on avait mêlé son nom, et
d'après lesquels le prince lui aurait écrit en faveur
de la Russie. Lord Westmoreland a affirmé que
jamais le prince ne l'avait entretenu de politique,
et que ses lettres ne concernaient que des affaires
privées ou des actes de bienfaisance.
Nonobstant ces démentis, uue partie du public
demeure hostile au prince et il ne faudra l ien
moins, sans doute, que des explications données en
plein Parlement, pour ramener l'opinion.
Ces explications ont commencé dès la séance du
31la Chambre des lords,où lord Aberdeen a traité
de monstrueuses, les accusation» dirigées contre le
mari de la Reine, en ajoutant que jamais, le prince
ne s'est immiscé dans la direction des affaires de
l'armée. Lord Hardinge a confirmé le fait; lord Derby
(Stanley) a décliné, au nom du parti conservateur,
toute responsabilité concernant les calomnies qui
ont »u le jour dans le Daily-New* et le Morning-
Adverliter. Il a rendu hommage l'habileté et la
discrétion du prince. Lord Campbell est allé plus
loin encore il a soutenu qu'au point de vue légal
et constitutionnel, le prince Albert avait le droit
d'être consulté sur les affaires de l'étal, non-seule
ment comme conseiller privé, mais comme époux
de la Reine.
La discussion aux deux Chambres du Parlement
anglais, après la séance royale, a eu plus d'intérêt
que nous ne l'avions pensé,"d'àprès la dépêche télé
graphique qui avait annoncé l'adoption de l'adresse.
On l'a vu déjà par ce que nous venons de dire rela
tivement au prince Albert. Sur la question d'Orient,
recouvrait sous de larges plaques de sang déjà figé. Tout
auprès de ces cadavres, le prince de Sedan, duc de
Bouillonfaisait proclamer incessammentson de
trompe, qu'ici étaient les corps de quatre de ses plus
fidèles gentilshommes et celui de son très-illustre allié le
comte de Monthcrmé, qui s'était imprudemment écarté,
en si faible compagnie, de la troupe des chasseurs dans
les forêts d'Ardenncs, pour l'heure infestées de brigands
venus du pays de Liège; engageant tous ses loyaux sujets
et ceux des étals voisins courir sus aux assassins, et
promettant de grandes récompenses qui les pourrait
joindre, disant en outre, par la voix de son hérault, qu'il
demandait aux passants de faire ici balle et prière Dieu
jusqu'à ce que le corps du comte fût rendu sa famille
avec les honneurs qui conviennent entre puissants sei
gneurs.
On n'entendit plus parler des quatre gentilshommes
du duc; on a peine s'imaginer qu'il ait ajouté sa tra
hison la barbarie de s'assurer par la mort du silence de
ses propres complices; il est plus simple de penser, sur
tout d'après les suites, qu'il avait expédié prix d'or, vers
quelque lointaine partie de l'Allemagne ou de la France,
ces quatre individus de peu de marque, qui malgré leur
titre de gentilhomme étaient toujours prêts, comme tant
d'autres nobles vagabonds d'alors, se mettre avec leurs
bras au service du dernier et plus rémunérant le due
il y a eu aussi dans les deux Chambres quelques ex
plications préliinaires qui fout prévoir uiitt grande
unanimité d'opinion contre la Russie.
A la Chaiiilne des pairs, le marquis deClanri-
carde et le marquis de Miliresbury ont soutenu que
la.marche du gouvernement avait été hésitante, et
qu'en prenant une autre attitude dès le début, on
aurait évité la guerre.
Lord Chuendun et lord Aberdeen ont répondu
qu'ils ne se lépeulaieut point d'avoir fait tous leurs
efTorls pour conserver la paix, et ils oui donné
entendre qu'aujourd'hui que la Russie a été mise
complètement dans sou tort, on agira contre elle
avec la plus grande énergie.
Lord John Ru&sell a fait la Chambre des com
munes une déclaration analogue. 1! a ajouté ceci,
qui est important
En ce qui louche la position relative des puissance»,
nous avons pensé qu'il y aurait u:i avantage immense
ce que la Prusse et l'Autriche s'anissen t nous pour em
pêcher que l'agression de la Russie ne conduise la
guerre, et quoique nos démarches n'aient pas réussi jus
qu'à présent, j'ai beaucoup d'espoir que le gouvernement
d'Autriche comprendra combien son intérêt (plus grand
que celui de l'Angleterre et de la France) de mêiue que
ceux de l'Europe sont engagés dans la solution de la
question.
Si la Prusse et l'Autriche finissent par consentir
agir avec l'Angleterre et la France, le résultat ne saurait
être douteux. Le temps n'a donc pas été perdu en s'effor-
çant de persuader le gouvernement d'Autriche d'envi
sager la question un point de vue plus éclairé.
Aucune voix dans les deux Chambres n'a fait en
tendre une parole favorable la Russie. Sir Robert
Peel a traité de basse et subtile la politique du Tzar.
Lord John Rnssell a pris aussi la défense du prince
Albert et lévélé cette circonstance que le feu duc
de Wellington avait désiré que le prince lui succédât
dans le commandement en chef de l'armée, mais que
le prince avait refusé, déclarant que sa place était
toujours auprès de la Reine et qu'il se départirait
de cette position s'il acceptait un poste de cette
importance. Le doc exprima alors le désir que le
prince s'occupât de l'état et de la bonne organisation
de l'armée, niais il n'est jamais intervenu que dans
les questions de patronage ou dans l'administration
ordinaire.
D'après une letlredeParis, la guerre serait décidée,
et M. de Kisseleff ayant reçu la réponse que l'on
prévoyait, devait prendre ses passeports avaul-liier
au soir.
Il semble avéré aujourd'hui que M. de Kisseleff
Paris, et AL de dodiiow Londres, ont reçu la
réponse des cabinets de France et d'Angleterre, et
qu'ils vont demander leurs passeports, si ce n'est
déjà fait. t
On donne des détails sur les préparatifs de départ
de M. de Kisseleff; la Pre**e et le Siècle présentent
ce départ comme positif et prochain. Mais le Time*
dit de son côté que pour n'avoir pas l'-air de taire
les choses ab iralo, iesdeuxambassadeurs attendront
leur poste que le Tzar leur envoie des lettres de
rappel.
l^e Morning-Po*t du 2 assure que le baron Bru-
novv devait partir le lendemain pour La Haye. On
suppose que M. de Kisseleff viendra Bruxelles,
niais qu'il n'y lera qu'un très-court séjour.
Nous devons faire remarquer que les journaux
officiels et semi-officiels du gouvernement français,
ne disent rien encore de la rupture définitive.
Une dépêche de Constaiilinople annonce un fait
assez iuat tendu c'est que les deux Hottes combinées
aurait donc simplement fait vêtir leur manière des
cadavres de criminels, qu'il aurait aussi pris soin de faire
mutiler pour les rendre méconnaissables.
Toutefois sa véracité ne fut point acceptée par tous
ceux qui d'abord n'avaient pas cru pouvoir mettre en
doute sa loyauté. Plus d'un le soupçonna du meurtre qu'il
faisait publier avec tant d'empressement et d'emphase;
niais comme c'était au roi de France de venger un des
plus hauts et illustres seigneurs de son empire, victime
d'un puissant suzerain qui relevait de son trône, et que
d'ailleurs la force déjà réputée de la citadelle de Sédan
rendait le duc Inattaquable chez lui, on s'en tint une
certitude injurieuse pour sa personne, mais qui ne fut pas
même de longue durée, lorsqu'on eut vu les collatéraux
du comte de Monthcrmé,' disparu sans postérité directe,
étaler sans pudeur la joie que leur donnait un si riche
héritage. Le traître sut profiter adroitement de la circon
stance pour rejeter, dans l'ombre et par des mots cou
verts, sur ces héritiers rapaces, les soupçons qui avaient
plané sur lui. Du reste, un chariot attelé de six mules
pompeusement harnachées par les soins du coupableavait
conduit la chapelle du château des comtes de Monlhcrmé
le cinquième, le plus défiguré des cadavres.
Quelques mois après cet étrange événement, con
tinua le docteur, qui avait repris baleine, les allants et
venants de la ville au château, par une soirée bien ob-
avaient repris dès le î3, leur ancrage Beïcos, dans
le Bosphore. La Mer-Noire resterait donc libre de
nouveau aux évolutions de la flotte russe. Il y a lieu
de croire la nouvelle douteuse en tout cas elle a
besoin d'être expliquée.
En relisant le long compte-rendu de la séance du
3i janvier dans les journaux anglais, on y trouve
encore quelques passages bous signaler. En voici
un notamment
Lord John Russell parlant de la note de Vienne,
celle qui, on se le rappelle, avait été acceptée par
la Russie et ensuite refusée par la Forte, lord John
Russell a dit que celle note avait été rédigée par
l'empereur des Français, amendée par le cabinet
autrichien et acceptée par le gouvernement anglais;
que par la suite, h-commentaire fait de cette note
par M. de Nesselrode avait montré que l'empereur
de Russie, au lieu de se relâcher de ses prétentions,
était prêt ajouter son injustifiable agression
quelque chose, a dit lord John Russel, que je
n'hésite pas qualifier de frauduleux. Cette
expression a élé accueillie avec des applaudisse-
meule.
Le gouvernement français vient d'ajourner du 27
février au 1 mars, la réunion du Corps-Législatif et
du Sénat. Le Moniteur universel se borne men
tionner le décret d'ajournement, sans dire sur quels
motifs il repose. L'ajournement n'a rien de politique,
c'est une simple question de carnaval.
La guerre est probable; jamais depuis un an elle
n'a paru si imineiite; c'est juste ce moment que
la Bourse de Paris choisit pour se mettre la hausse.
Cela veut-il dire que les financiers préfèrent la guerre
la paix? Non. Cela veut dire seulement que les
chances de guerre ont élé escomptées par avance, et
c'est là une nouvelle preuve du danger auquel s'ex
posent les petits spéculateurs, en fondant par lejeti,
des espérances de bénéfice sur tel ou tel événement
prévu.
Du reste, la confiance des haussiers reposait sur
ce singulier motif, que le prince Napoléon avait
rapporté de Bruxelles un traité d'alliance offensive
et défensive entre la France et la Belgique.
M. de Kisseleff est toujours Paris et il a eu encore
avant-hier, au dire de notre correspondant, une
entrevue avec M. Droiiyn de Lluiys.
Les journaux anglais publient quelques-unes des
pièces diplomatiques communiquées au Parlement
par le ministère, sur la question d'Orient. Les pièces
sont très-nombreuseset forment deux gros volumes.
La partie la plus intéressante de celte publication
est celle relative au guet-apens de Siuopt. Les com
munications laites A la Russie ce propos, ont dù lui
être peu agréables. Il n'est question dans les notes y
relatives que de l'horreur que celte scène de carnage
a causée. O11 y déclare que la France et l'Angleterre
vont faire proléger le pavillon comme le territoire
ottoman, par les flottes combinées, et exiger le re
tour Sébastopol, de tous les navires russes, autres
que navires marchands, que les flottes rencontre
raient dans la Mer-Noire.
Sir G.-H. Seytnour, ministre de Russie Saint-
Pétersbourg, raconte dans une note lord Clarendon
du i3 janvier, l'entrevue qu'il a eue avec le comte
de Nesselrode
J'entrai, dit-il, dans quelques détails sur les horreurs
de Sinojicet parlai de l'effet que le récit de ce désastre
avait dû produire sur l'esprit public en Angleterre. Il
avait donné, dis-jc, au gouvernement de S. M. la convic
tion que des mesures plus énergiques étaient nécessaires;
on n'avait pas tenu assez compte des dispositions conci-
scurc, aperçurent encore travers les vitraux illumines
de cette même galerie de bois, leur jeune souveraine qui,
cette fois, s'appuyait chancelante et plus qu'à demi morte
sur le bras de son époux. Avec l'idée que l'on avait des
égards du duc pour elle, on trouvait quelque chose de plus
sinistre, encore que dans ses mauvais traitements le voir
soutenir ainsi sur son bras, robuste malgré les ans, cette
pauvre et souffrante image de la vie qui s'éteint. On
comprenait que sans doute il lui sentait ua pied dans le
cercueil, et qu'il avait un grave intérêt la ménager dans
ces heures dernières. Tout coup, on crut remarquer que
le visage défait de Charlotte s'anima elle saisit, avec une
force toute nerveuse, une des mains du duc, et des
paroles furent échangées qui firent rentrer I un et l'autre
dans leur appartement. 11 appela un de ses serviteurs, et,
au rapport de celui-ci, la duchesse étant présente et
étendue sur une chaise longue comme un corps tout a
l'heure ressuscité, mais qui retourne son néant, il or
donna qu'on lui allât chercher sur-le-champ îles parche
mins et un homme de loi. La duchesse parut insensible
toutes ces démarches.
Eh bien oui, madame, dit le duc dès qu'il crut
n'être plus entendu que de Charlotte, vous avez deviné
juste et que ne révèle pas le sentiment aux femmes 1
ajouta-t-il avec ironie; il n'est pas mort,
[La suite au proeltain