JOCMÀL D YPRES F/F DE L'AlUtOXDlSSEMEiYT.
M-1,835. 13* Année.
Jeudi, 16 Février 1654.
Vires acquint euûdo.
lTi\E SUIT ES BATEAU A VAPEUR.
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Tracs, 15 Février.
Le ministère de conciliation dnpé par le
clergé, eu vertu de l'art. 8 de la loi sur
renseignement moyen.
En 1842, lorsque la discussion sur la loi de!
l'instruction primairea eu lieu au parlement, sous
le ministère mixte de M. Nothomb, legouverne- i
ment a alors légalement autorisé l'immixtion du
clergé, litre d'autorité, dans l'enseignement
de l'Etat A cette époque, nous avons critiqué
cette faiblesse, repoussé cette concession, car
on disait hautement que celle mesure ne pouvait
être tolérée que pour l'instruction primaire et
que d'autres dispositions devaient être prises,
quand il serait question d'organiser I enseigne
ment moyen. Les véritables principes de la
matière sont, suivant nous, la complète sépara
tion de l'enseignement scientifique et philologi
que de l'enseignement religieux. Nous n'ajoutons
pas moralcar il existe une morale inJépendan-
tedetoules lesreligions, affirmée de tous les temps
et sanctionnée par les lois de toutes les nations.
Celle séparation est une conséquence directe
et logique de notre pacte fondamental, réclamée
cor et cris par le clergé lui-même en 1830,
qui voulait n'avoir rien de commun avec l Ëlat
et se mouvoir dans un cercle d'action entière
ment en dehors de toutes relations officielles
avec le gouvernement. Cette prétention pour le
moins extraordinaire celle époque, lui fut
concédée. Mais aujourd'hui le haut clergé com
prend qu'il a fait fausse roule, et tout en vou
lant conserver sa liberté pleine et entière, il
essaie de confisquer celle de l Etat, Telles sont
les conséquences directes de ses prétentions en
matière d'enseignement 11 veut censurer les
institutions gouvernementales, mais repousse
toute surveillance sur les établissements qui
relèvent de lui.
L'Etat, d'un autre côté, n'est pas apte faire
donner l'instruction religieuse, c'est au clergé
des diverses religions accomplir ce devoir.
Mais le droit cl le devoir du gouvernement sont
déformer, dans ses institutions, des citoyens in-
(suIte).
A cette déclaration, Charlotte de La Marck se releva
de nouveau de sa sinistre atonie.
Qu'en avez-vous donc fait denaanda-t-ellc en se
dressant sur son séant.
u Écoutez, madame, reprit le duc, le comte vous
aime, et vous l'aimez...
Eh bien oui, interrompit Charlotte indignée,
puisque vous ne craignez pas de me faire injure, monsieur,
en vous chargeant de inc donner le mot d'un intérêt que
je ne me serais jamais avoué avec si peu de déguisement
moi-même, oui, j'aime le comte niais depuis l'heure
fatale seulement où j'ai compris que vous en faisiez votre
victime cause de moi
L'aveu est franc, et je vous en sais gré, madame;
mais reprenons, continua flegmatiqucinent le duc, bien
autrement préoccupé cette heure que par des pensées
d'amour; ma juste jalousie m'aurait assez donné le droit
de tuer le comte, l'homme indiscret ce point de demeu
rer vos genoux en ma présence, et j'aurais pu l'entendre
sans danger pour moi-même, ainsi que vous l'avez vu
mais je savais une vengeance plus douce, car elle était
plus lente je l'ai choisie...
Mais achevez donc vite Qu'avcz-vous fait de lui?
redemanda avec plus d'anxiété la princesse.
Demain, et pas plus tôt, répondit-il sur une note
pn peu plus élevée, quoique avec le même sang-froid,
demain je vous montrerai ce que j'en ai fait, madame;
demain, je ferai plus; demain, je vous le rendrai; usais
slruits, aptes toutes les carrières qui peuvent
être utiles la société. L'instruction laïque doit
être donnée dans les écoles,.l'instruction religieu
se dans les églises, les temples et les synagogues.
De celle façon, les conflits sciaient plus rares et
on obtempère an vœu du clergé catholique qui
ne veut avoir aucun point de contact avec l'au
torité laïque, moins que ce ne soit pour en
être salarié ou pour la dominer.
Ces principes si logiques, si simples n'ont pas
été suivis dans la loi sur l'enseignement moyen.
On a invité le clergé venir donner ou sur
veiller Venseignement religieuxbien qu'il fut
presque certain que celte prescription eut été
d'une exécution impossible, par suite des exi
gences exorbitantes de lepiscopat. Des négo
ciations furent entamées, comme si une loi
n'obligeait pas tous les Belges, prêtres et laïcs,
comme si en demandant au ministre du culte
l'enseignement religieux pour les élèves des
institutions de l'Étal, on eut commis un abus
de pouvoir tandis qu'on n'invitait le ministre
du culte qu'à remplir un devoir, qui lui est
imposé en vertu de sa mission religieuse.
Après une campagne diplomatique labo
rieuse, le ministère libéral de 1847, organisa
les établissements de l'Etui sans la coopération
du clergé, mais 1a faction ftéricale chanta sur
tous les tons qu'un ministère de modération et
de conciliation obtiendrait sans coup férir, le
concours du clergé. Voilà depuis deux ans, que
ce cabinet, selon le vœu des catholiques, a en
mains les rênes du pouvoir, et pas plus que le
précédent ministère, il n'a pu tomber d'accord
avec l'intraitable épiscopal belge.
Cependant un essai a été fait, essai bien mal
heureux suivant nous et dû l'initiative du
bureau administratif de l Athenée d'Anvers. Un
chapitre sur l'instruction religieuse a été ajouté
au règlement général d'ordre intérieur de tous
les Alhenées (voir plus loin), et c'est cette espèce
de convention arrêtée entre le cardinal arche
vêque de Malines et ce bureau administratif,
que le ministre de l'intérieur vient de commu
ccla, continua-t-il, je pose une condition unique, irrévo
cable Écoutez, Charlotte, vous ne sauriez vous le dissi
muler, je ne dis rien qui ne soit connu de vous il ne
reste plus d'aliments votre sauté, votre existence n'est
plus qu'un souffle.
Charlotte essuya une grosse larme qui, ce cynique
avis, roula le long de sa joue cave et flétrie car il y a
des choses qu'il est moins cruel de savoir en soi que de
se les entendre dire.
Le due n'y prit garde; il ajouta sans s'interrompre
Or, nous n'avons point d'enfants, et la succession
des comtes de La Marck se trouvera, par celle mort pro
chaine, le sujet de bien des discordes, de bien du sang
verse. Le duc de Monlpensier, s'appuyanl sur de préten
dues substitutions de mon prédécesseur Guillaume-Ro
bert; le comte de Maulevrier, qui se dit hautement votre
présomptif héritier, me la disputeront, et je ne la céderai
qu'avec ma vie. Charlotte de La Marck, un testament de
vous, en m'assurant celle succession sur laquelle j'avais
certes bien le droit de compter en vous épousant et en
me revêlant de ces nobles litres qu'il me faudrait honteu
sement dépouiller; un testament de vous, fait l'instant
même, préviendrait ces calamités, qui retomberont sur
vos pauvres Sédaiiais. Faites-le doue, Charlotte, et de
main je vous rendrai le comte.
Le due. avait parlé Charlotte en habile intriguant,
de ses pauvres Sédaiiais, du comte, dont le sort la préoc
cupait si cruellement. Le vieux général avait emporté la
place de Sédan plus sûrement par le cœur qu'il ne l'eût
fait par un siège. Charlotte était inondée de pleurs; clic
n« trouva qu'un geste affirmatif pour réponse. Il ft
niquer la Chambre, comme le seul et unique
résultat des interminables négociations pour
suivies avec tant de persévérance par le pouvoir
laïc, pour faire comprendre aux évêques, qu'il
est de I intérêt de la religion que ces hauts
dignitaires ecclésiastiques ne refusent pas le
moyen de propager la parole divine.
Nous disons que c'est un essai malheureux,
car enfin, cette convention vague, enveloppant
la plupart des difficultés qui peuvent surgir
dans une obscurité nuageuse, n'est applicable
qu deux établissements, l'École moyenne et
l'Alhenée d'Anvers. On aura donc tles institu
tions de I État favorisées du concours du clergé
et d autres mis en interdit, au gré des caprices
des évêques, ou d après le plus ou moins de
chances que présentera la concurrence des éta
blissements cléricaux. Là où les collèges, sous
le patronage des évêques, pourront lutter avec
avantage, le prêtre sera refusé. Dans les villes
où les institutions du clergé doivent disparaître
pour abandonner la place renseignement laïc,
un ministre du culte sera chargé de l'instruc
tion religieuse, car, calculera-l-on, si l'on ne peut
avoir le monopole, il est plus adroit d'avoir l'air
d'intervenir; il est possible de faire croire aux
crédules, que c'est pour ce motif que l'établis
sement prospère.
Au point de vue du droit constitutionnel, il
n'est pas un article de ce règlement qui soit
irréprochable et le moindre tort qu'il présente,
cesl de donner ouverture des conflits, qui
finiront par un esclandre pire que le refus de
concours actuellement de mode. Nous revien
drons sur quelques termes de ce règlement et il
nous sera facile de démontrer le parti que le
clergé pourra en tirer dans l'intérêt de soa
influence et de ses visées de domination.
Mais M. le minisire a fait connaître qu'une
autre condition est exigée pour obtenir l'appro
bation de cette convention celle qu'un prêtre
catholique fasse partie du bureau administratif.
Il est impossible qu'une pareille concession soit
faite, car le membre qui peut retirer son gré
accueilli avec un joyeux froncement de lèvres que le
duc, malgré la puissance qu'il avait sur lui-inémc de
coutume, ne put retenir dans cette circonstance décisive
de sa vie. Ce geste lui suffisait. En ce moment, on an
nonça l'homme de loi.
Quoique abasourdie, anéantie plus que jamais par
la brusquerie de telles démarches, qui équivalaient de»
ordres, la princesse, en entendant annoncer si soudaine
ment cet homme, fut saisie d'un frisson involontaire, et
dit toute tremblante son époux
Mais, monsieur le duc, vous croyez donc que je
n'ai plus qu'un quart d'heure vivre, que vous vous
bâtez tant
Le duc s'approcha de l'oreille de Charlotte, et avec
un capricieux regard
Vous savez, lui répondit-il voix basse, que je
n'ai pas dû songer qu'à moi seul.... Les heures pèsent
qui souffreLe comte!Demain, vous m'entendez,
dès le lever du jour Allons, je savais bien....
u Et se retournant vers la porte de l'appartement
k Qu'on fasse entrer le conseiller de madame la
duchesse de Bouillon s'écria-t-il.
Puis s'adressant encore voix basse celle-ci:
Essuyez donc ces larmes, Charlotte, lui dit-il, on
croirait que je vous contrains....
j Un testament fut bientôt dressé qui léguait au pré-
tendu descendant des La Tour d'Auvergne pour en jouir,
lui et sa postérité, en toute propriété, la principauté do
Sédan et ses dépendances, et, de plus, le titre conservé
l'héritier des La Marck, de duc de Bouillon, et le retour,
au cas échéant, la propriété même de ce duché, que Ice