Chronique poïijlquc.
5" Quelques réductions sur la chaux, les pierres,
les glaces, etc.
Mu 2 Mars an 4 iocIiiM.
A l'exemple de l'Angleterre, le gouvernement
français vient de prohiber l'exportation des armes
et des munitions de guerre.
Le Moniteur fronçai* publie une lettre du prince
Napoléon l'Empereur, pour lui demander du ser
vice dans l'armée expéditionnaire.
Les nouvelles de France et d'Angleterre repré
sentent comme de plus en plus vraisemblable la
rupture de l'Autriche et de la Prusse, avec la Russie.
Nous ne sommes pas les seuls qui ayions consi
déré la lettre de Louis-Napoléon au Tzar comme un
obstacle de plus la conclusion de la paix. Une
lettre deVienne publiée par le Journal de Francfort
contient le passage suivant
L'impression désagréable qu'a causée Saint-
Pétersbourg la lettre autographe de l'empereur
Napoléon, a détruit aussi tout l'effet qui aurait pu
y être produit par les propositions de médiation
emportées par le comte Ôrloff.
L'impartialité nous commande pourtant une ré
flexion c'est que le Tzar aurait bien pu concéder
l'empereur d'Autriche, ce qu'il refusait l'empe
reur des Français.
Dans son discours sur la motion de lord Beau-
mont, dont nous avons dit quelques mots, lord
Clarendon a dit ceci de l'Autriche et de la Prusse
Ces deux puissances, reconnaissantes de la déférence
que nous avons montrée pour leur manière de voir, et
tout aussi pénétrées que nous du caractère agressif et mal
faisant de la politique de la Russie, sont maintenant avec
nous.
J'ai appris aujourd'hui même, que 25.000 hommes
de nouvcllee troupes ont été envoyées par l'Autriche aux
frontières de son territoire. Nous aurons donc préparé
sur nos côtes une flotte plus unissante qu'aucune autre
qui ait jamais quitté les i'iyes de l'Angleterre; le gouver
nement français s'occupe exactement des mêmes prépa
ratifs; tout cela indique une conviction que la guerre est
inévitable. Nous avons épuisé tous les efforts qui parais
saient propres prévenir le mal; nous avons réuni contre
la Russie une somme de forces morales et matérielles
plus grandes que celles qu'il ait jamais été donné au
cune autre nation d'Europe de réunir. Tout cela, Mylors,
est le résultat de six mois de patience cl de modération.
Le Time* annonce le prochain départ pour Paris
de lord Raglan, et d'un autre officier distingué de
l'année anglaise, chargés par le gouvernement, de
s'entendre avec les autorités militaires françaises
sur les détails du plan des opérai ions entreprendre
en Orient.
Le gouvernement anglais vient de nommer sir
Charles Napier, dont l'énergie est bien connue, au
commandement de la flotte de la Baltique. On
peut être sûr, dit le Times h ce propos, que le pu
blic verradanscettenomiuation une nouvelle preuve
du désir sincère qu'a le gouvernement de faire la
guerre avec vigueur.
La Gazette des Postes dément le bruit qui avait
couru de l'ajournement du mariage de l'empereur
d'Autriche, et assure que ce souverain partira pro
chainement pour Munich.
Une dépêche télégraphique nous était parvenue
avant-hier, avec la côte de Vienne. Il y était question
d'une opération financière. Cette dépêche nous avait
paru fort obscure, même après avoir été élucidée
par quelques-uns de nos confrères. Aujourd'hui,
nous en savons un peu plus sur ce point. La Banque
de Vienne se chargerait d'amortir tout le papier
monnaiedel'F.tat,s'élevant i5o millions de florins,
contre une dotation annuelle de i o millions, garan
tie sur le produit des impôts. L'Etat abandonnerait
tous ses droits sur le papier monnaie. On suppose
que le gouvernement autrichien acceptera cette
proposition.
Par suite du pronunciamento de Saragosse, le
cabinet de Madrid vient de déclarer l'Espagne
entière en état de siège, et de faire opérer Madrid
même, de nombreuses arrestations.
Le gouvernement français arme une troisième
escadre, destinée probablement opérer dans la
Baltique avec celle de l'amiral Corry, décidément
rappeléede Lisbonne dans la Manche. Cette troisième
escadre, dont le commandement est confié au vice-
amiral Parseval-Deschênes, est composée de io vais
seaux de ligne, 14 frégates et 15 corvettes voiles ou
h vapeur.
Unecirculaire de M. Drouyn deLhuys, aux agents
diplomatiques et consulaires, leur recommande de
proléger partout où besoin sera, les bâtiments et les
sujets anglais, dans la guerre qui va s'ouvrir contre
ia Russie.
Le point capital de la situation, c'est l'adhésion de
l'Autriche la politique de la France et de l'Angle
terre. Cette adhésion paraît de plus en plus certaine,
du moins dans une certaine mesure.
Le Times parle de celle adhésion en des termes
très-positifs, trop positifs, notre sens, et dont il
est prudent de rahatti e quelque chose
L'empereur d'Autriche n'a pas trompé notre attente,
dit-il. A Ollriiiitz, il a résisté la Russie; il s'est associé
avec la France cl l'Angleterre aux engagements de Vienne;
il a déclaré que si elles ne réussissaient pas rétablir la
paix, il ne reculerait pas même devant la guerre; et lors
que le comte Orloff l'a invité se soumettre une dégra
dante neutralité, il a répondu avec une juste et noble
fierté, et s'est joint aux puissances occidentales.
La Prusse n'a pas été moins résolue clic a même
quelques égards devancé l'Autriche dans cette voie. Le
résultat est justement ce que nous désirions, non-seule
ment pour la Turquie et pour nous-mêmes, mais pour
l'Allemagne. Nous nous félicitons de voir que la cause que
nous avons si longtemps soutenue triomphe des refus dé
daigneux de ses adversaires et des craintes de ses amis
au moment où son succès importe au bien public.
Le Murning Herald rapporteque le navire Hamps-
hire ayant été amené par le gros temps dans le port
de Portsmoulh, et les aulorilés ayant appris qu'il
était chargé d'armes et de machines, il a été visité.
On a reconnu qu'il allait .1 Odessa, chargé de pièces,
de machines, de boulets, de câbles-chaînes. Les
employés des douanes ont mis le Hampshire sous
séquestre.
Les armateurs et capitaines russes qui ont des na-
viresdans les portsàcharbon d'Angleterre, semblent
très-alarmés de la perspective d'une guerre. Ceux
qui ne peuvent les faire partir les vendent.
Le Morning-Hérald dément la nouvelle de la no
mination de sir Charles Na pier en qualité de com
mandant de la flotte de la Baltique.
Nous avons omis de parler d'un fait qui vient de
se passer Berlin, et dont la signification mérite
d'être notée. Le gouvernement avait présenté la
seconde Chambre un projet de loi augmentant l'im
pôt sur la fabrication des eaux-de-vie. La droite et
la gauche étaient hostiles au projet, qui eût proba--
blemeut été rejeté dans les ciiconstances ordinaires.
Il a suffi au ministère, pour le taire adopter, de
déclarer que cette augmentation était nécessaire au
trésor, cause des besoins créés par l'état de guerre
où l'Europe est sur le point d'entrer.
Le bruit circule Berlin, depuis quelques jours,
que les plans de mobilisation de l'armée prussienne
en cas de guerre, auraient été livrés la Russie par
l'indiscrélion d'un fonctionnaire, et qu'une enquête
est ouverte ce sujet.
D'après une lettre deCarlsruhe, du a4 février, il
se confirme que M. le comte Leiningeu, catholique
zélé, sera envoyé Rome, en qualité de comrtiis-
sairedu gouvernement, pour réclamer l'intervention
du Pape dans le conflit ecclésiastique bien connu. M.
l'assesseur Turban lui a été adjoint pour le seconder
dans les questions du droit canon.
Les nouvelles d'Espagne priment aujourd'hui
toutes les autres. Tout s'est borné la révolte d'un
régiment Saragosse. Elle a été promptement et
énergiquement réprimée.
A Madrid même de nombreuses arrestations ont
été opérées. On cite des noms considérables. Les
lettres de cette capitale donnent aussi des détails
très-précis sur le coup d'Etat, qui doit être opéré
l'heure qu'il est, car la Gazette de Madrid du 15
devait publier les mesuresexceplionnelles préparées
par le ministère.
La Bourse de Paris poursuit son mouvement de
hausse, toujours dans la confiance que la Prusse et
l'Autriche feront cause commune avec la t rance et
l'Angleterre.
Le Times publie un article dont le début a une
importance capitale. Nous le reproduisons textuel
lement
Les gouvernements d'Angleterre et de France, dit-il,
ont résolu d'adresser l'empereur de Russie, une som
mation formelle exigeant qu'il donne endéans les six jours
de la réception de la dépêche, la promesse solennelle d'é
vacuer les Principautés danubiennes pour le 50 avril.
Les courriers, porteurs de cette dépêche, sont partis
hier matin (le 27) de Londres et de Paris. Ils passeront
par Berlin et Vienne, d'où il parait que des demandes
analogues seront formulées en même temps par les cabi
nets de Prusse et d'Autriche.
Le refus de la Russie de céder cette juste demande
ou de faire une réponse convenable sera regardé par les
puissances comme une déclaration de guerre.
On compte que cette communication arrivera
Saint-Pétersbourg dans 9 ou 10 jours.
Très-probablement l'empereur Nicolas ne se prévau
dra pas du délai de six jours qu'on lui accorde et sa ré
ponse ne peut être douteuse. Mais quoiqu'il en soit, dans
moins de trois semaines, «lie sera connue et les forces
alliées, qui sont déjà en route pour leurs destination»
respectives, seront alors en mesure de commencer im
médiatement les hostilités.
Aussitôt l'arrivée de l'esradrc de l'amiral Corry, qui
était hier en vue l'île dcW'ight et qui a dû celte heure
jeter l'ancre Spithend, sir Charles Napier, commandant
de la flotte, bissera son pavillon bord du Duc de. Wel
lington. La partie de la flotte qui est prête polir le service
se réunira bientôt dans, les Dunes et partira dans les pre
miers jours de mars pour le Categat, où elle atlendra
l'ouverture de la Baltique, qui est rarement acecssible
avant la fin du mois de-mars. De sorte que la présence de
In flolte dans ces parages coïncidera avec l'époque de la
réponse définitive du Tzar l'ultimatum de l'Europe.
Dans la suite de son article, le Times assure qiie
la Porte a accédé h la convention offensive et défen
sive proposée par l'Angleterre et la France, de sorte
qu'à leur arrivée sur le territoire turc, les troupes
auxiliaires seront reçues en vertu d'une clause for
melle de la dite convention.
Le Times annonce encore, mais ceci est plus dou
teux, que dans sa colère contre les deux puissances
du Nord, l'empereur de Russie a débaptisé deux
régiments qui portaient les noms des souverains
d'Autriche et de Prusse, et défendu aux officiers de
son armée de porter les décorations autrichiennes et
prussiennes.
Le Times publie en outre la réponse écrite adres
sée, au nom du Tzar, par M. de Nesselrode, aux trois
amis de la paix qui avaient fait le voyage de Sainl-
Péleisbuurg et qui -sont de relour Londres. Dans
celte réponse, l'Empereur proteste qu'il a horreur
de la guerre; qu'il en rejette la responsabilité sur
ceux qui prennent parti pour la Turquie; qu'il ne
veut pas s'agrandir aux dépens de cette puissance,
et qu'il ne demande qu'une chose; maintenir en
Orient l'influence que lui assurent les traités, ponr
améliorer sans cesse le sort de ses co-religioiinaires.
Nous avons, par voie de Trieste, des lettres de
Coiistautiriople en date du i3 février. Elles ne nous
apprennent rien de nouveau. Une lettre écrite de
Scbumla par le docteur Fauvel, annonce que la
santé d'Omer-Pacha, que l'on avait dit être mou
rantn*à" jamais été sérieusement compromise;
qu'elle s'est seulement ressentie des fatigues extra
ordinaires qu'il s'est imposées depuis le commen
cement de la guerre, et qu'il lui sera très-facile de
se rétablir s'il veut bien se soumettre au régime que
ses médecins lui ont ordonné.
On savait Conslantinople l'insuccès de la mis
sion du comte Orloff Vienne, et le départ de Paris
et de Londres de M. de Kisseleff et du baron Brun-
now. Comme on le pense bien, ces nouvelles avaient
été reçues avec une très-grande satisfaction.
Constantinople jouissait toujours de la tranquil
lité la plus profonde, et les flottes combinées étaient
encore Bi ïcos.
Les nouvelles de Madrid sont du a3. Les arresta
tions y continuaient, et il était question d'exiler
aux Philippines, plusieurs des rédacteurs des jour
naux de l'opposition, auxquels on en veut plus
particulièrement. C'est le sort réservé, disait-on,
Gonzalès-Bravo.
Le mouvement de Saragosse était toujours tenu
pour un fait isolé. Le général Concha y est-il entré
pour quelque chose On l'ignore encore. Les jour
naux annoncent qu'il est arri vé Bordeaux.
On se souvient qu'aux élections générales qui
suivirent en Piémont, la dissolution de la Chambre
des députés, le chef de la gauche radicale, M. Brof-
ierio, vil sa candidature échouer dans tous les col
lèges. Aux réélections qui ont eu lieu par suite des
nominations doubles, il a été réélu Gênes et
Cagliari.
Pou r se venger de son premier échec, M. Brofferîo
avait composé une comédie intitulée le Tartuffe
politique. Mais un décret, rendu sur le rapport du
ministre de l'intérieur, en a interdit la représenta-
lion. Le décret d'interdiction est motivé sur ce que
la pièce a pour luit évident de porter sur la scène
une discussion politique contre la tonne du gouver
nement constitutionnel, et qu'il y a des allusions
des puissances étrangères qui ne sont point admis
sibles sur la scène.
Tous les journaux français ne sont préoccupés
que de l'article du Times, et de la sommation qui va
être faite la Russie, d'évacuer les Principautés.
La Bourse de Pai is a commencé avant-hier, con
cevoir quelques inquiétudes devant cette démon
stration, et par suite aussi de la baisse aux Bourses
de V ion ne et d'Amsterdam.
Le maréchal Saint-Arnaud paraît destiné com
mander le corps expéditionnaire. C'est du moins
ce que donne entendre le Moniteur de VArmio%
qui tait connaître d'ailleurs les généraux désignés
pour commander sous ses ordres.