N° 1,344. 13" Année.
Dimanche, 19 Mari 1954.
JOlIftiML D'YPUES ET DE L'MltO\ DIS8EME1YL
Vires acquint euiido.
Les feuilles cléricales font grand bruit, depuis
quelque temps, de l'épuisement du trésor public
et du déficit constaté dans les ressources du
budget. Elles gémissent fendre le cœur sur
les malheureux contribuables qui vont devoir
subir de nouveaux impôts, et insinuent chari
tablement, que c'est la faute du libéralisme et
des libéraux. Comme on le voit, la mauvaise
foi est le vice favori de ces béais journaux épis—
copaux, car il n'y a que la mauvaise foi la plus
effrontée qui puisse leur faire publier que les
dettes sont le fait des libéraux, quand, au con
traire, ceux-ci ont réduit le déficit de 43
millions, (insuffisance constatée au départ du
ministère De Theux-Malou), 16 millions,
déficit existant l'époque de l'avènement tki
ministère actuel.
UNE NUIT EN BATEAU A VAPEUR.
INTERIEUR.
Chronique politique.
^ÎX==r^
ABONNEMENTS Ypres (franco), par trimestre, 5 francs 50 c. Provinces,4francs.
INSERTIONS Annonces, la ligne 15 centimes. Réclames, la ligne: 50 centimes.
Le Progrès paraît le Jeudi et le Dimanche. Tout ce qui concerne le journal doit
être adressé l'éditeur, Marché au Beurre. On ne reçoit que les lettres affranchies.
Yphes, 18 Mars.
Ainsi, loin de couvrir le déficit des dépenses
ordinaires par des emprunts ou des bons du trésor,
le cabinet libéral a lavé le linge sale de MM. les
grands financiers du parti clérical des écono
mies très-considérables ont été faites et poussées
même trop loin, d'après nous Mais le gaspil
lage avait iudigné l'opinion publique, qui vou
lait un terme ces abus. Maintenant les
gazettes cléricales ne pouvant nier les méfaits
financiers de leurs patrons, veulent discréditer
ceux qui ont redressé les erreurs de leurs de
vanciers catholiques. Aussi blâment-elles avec
onction, la gestion financière de M. Frère, qui a
eu la bonté de laisser un trésor rempli, en
quittant l'hôtel ministériel, et un équilibre réel
entre les recettes et les dépenses du budget.
Depuis, des crédits extraordinaires ont été votés
pour le département de la guerre dont le
budget a été augmenté de cinq millions annuel
lement, l'équilibre financier a été détruit par
suite de ces nouvelles charges; mais qui le
devons-nous? Ce nest pas au parti libéral qui
a voulu voler les fonds nécessaires, mais sans
prodigalité, tandis que l'opinion cléricale volait
tour de bras, même sans vouloir examiner le
plus ou moins d'opportunité des dépenses. Si
de nouvelles ressources doivent être créées, les
députés cléricaux devraient les voler deux
(suite).
IV.
Le 15 août 1853, il y avait dîner d'étiquette chez le
notaire Auvray. Le préfet de la Seine, le maire de l'ar
rondissement plusieurs députés et un aidc-dc-camp
même du roi des Français y assistaient.
Auvray depuis peu de joursavait la fois été nommé
colonel de sa légion nationale cl chevalier de cette autre
légion dite d'honneur, qui renfermera bientôt autant
d'enseignes rouges accrochées des habits qu'il y a
d'enseignes de toutes sortes accrochées aux portes des
maisons. C'était qui féliciterait le plus haut le notaire
dans ces circonstances: et chacun, comme conséquence
inévitable de ces brillants débuts, lui faisait entrevoir sa
prochaine députation. Les hommages ne manquaient pas
non plus la jeune maîtresse du lieu que les femmes du
monde, plus ignorantes encore que qui que ce soit des
peines qui ne sont pas les leurs, trouvaient l'cnvi la
plus heureuse et la plus digne d'être jalousée d entre elles.
Il est vrai que dans ce tourbillon d'éloges et de bonheur
vaniteux, et par conséquent factice, madame Auvray fai
sait d'incroyables efforts pour renfoncer en elle-même les
larmes, toujours sur le point de voiler le sourire exigé de
chacune de ses réponses. Hclas il en était d'elle comme
de tant d'autres le sourire était sur 6es lèvres, l'amertu
me était dans son cœur. Rien de ce qui l'entourait cl qui
mains, car les dépenses nouvelles allouées ont
eu de plus chauds et de plus nombreux parti
sans dans leur camp que dans le camp opposé.
Cependant que voyons-nous? Les feuilles épis-
copales, avec cet esprit de vérité et de justice,
dont elles se vantent d'être douées répudient
la responsabililé, au nom de leurs patrons, pour
la rejeter sur ceux qui ne doivent pas I assumer.
De nouveaux impôts sont indispensables par
suite des dépenses nouvelles sanctionnées par
les députés catholiques, et quand il s'agit de
les créer, ceux qui ont bien voulu desdépeuses,
reculent devant l'impopularité de voter de nou
veaux revenus. Bien plus, ils essayent de trom
per l'opinion publique en cherchant rejeter
sur autrui, l'odieux (le la perception de nouveaux
impôts tandis qu'en bonne justice, il doit re
tomber sur ceux qui les ont rendus nécessaires.
Aussi les journaux catholiquesaprès avoir
applaudi toutes les dépenses improductives
faites et volées par la droite, impriment de
grandes phrases en faveur de l'économie qu'on
devrait observer dans l'affectation des deniers
publics aux améliorations et dépenses faculta
tives. Sous prétexte que l Étal se mêle de tout,
il voudrait le réduire au rôle de gardien de
l'ordre public, lui défendant strictement de
donner une impulsion quelconque, quelque
bien qu'il dût en résulter.
Mardi, la Chambre des représentants a rejeté
la majorité de 35 voix contre 30, le crédit de
75,000 fr. proposé pour la distribution de la
chaux prix réduit dans le Luxembourg.
Elle a adopté l'unanimité et sans discussion,
le budget des dotations pour Tannée 1B55.
Mercredi, la Chambre des représentants a
volé le crédit de 170 mille francs demandé par
le gouvernement, pour l'extension donner
aux lignes télégraphiques.
Elle a décidé qu il n'y aurait pas de séance
publique aujourd'hui.
La séance s'est terminée par une motion
d'ordre de M. Verhaegen, sur une circulaire
éblouissait tant de personnes étrangères au deuil inté
rieur de sa maison n'était désormais capable de l'abuser.
Auvray, de minute en minute, n'oubliait pas de chercher
relever d'un de ces regards, comme vous en savez, le
courage toujours prêt chanceler de sa femme. 11 n'y
avait ce dîner que deux êtres la torture ceux-là
même qui se faisaient si pompeusement fêter. Le notaire,
i pour un œil qui aurait songé l'observer, eût certaine
ment trahi d'étranges préoccupations. De que H es sources
viennent-elles donc, quand son étoile, apparente du
moins, resplendit comme un soleil; lorsque tant de
monde suppose que s'il expirait dans ce moment, ce ne
pourrait être que de joie Ah c'est là le secret de Dieu,
ce sublime hasard, cet infatigable et inattendu contre
poids d'espoir et de désespoir c'est quand on semble
arrivé au dernier degré du bonheur ou de la douleur
selon les hommes, qu'il rapproche subitement ces deux
extrémités que tant de gens irréfléchis croient si oppo
sées, et qu'il vous renouvelle un lendemain tout rose des
rayons d'une brillante aurore, ou plus souvent encore un
'soir tout obscurci 4'un ténébreux crépuscule, présage
d'une nuit d'horreur. Pourquoi se plaindre trop néan
moins de cet inévitable changement dans une vie
d'épreuve, même pour ceux qui commettent l'imprudent
mensonge de se prétendre toujours heureux; pourquoi
s'en plaindre, puisque s'il est l'inquiétude de celui qui a
présentement le bonheur, il est aussi le soutien de celui
dont l'unique consolation est présentement l'espérance?
du département de l'intérieur, qui porterait
atteinte, selon lui, au droit de pétition.
Ordre de Léopold. Un arrêté royal du 16
février, porte
Voulant donner au colonel Jacqmin, un nou
veau témoignage de Notre bienveillance
Le colonel pensionné Jacqmin est nommé
officier de l'ordre de Léopold.
La section centrale chargée de l'examen des
conventions conclues avec la France a encore
eu hier une longue séance, dans laquelle elle a
discuté toutes les questions qui se rapportent
cet arrangement commercial. Six membres
étaient présents. Le projet de loi a été adopté
par 5 voix contre 1. M. l'abbé de Haerne a été
nommé rapporteur.
Du 16 Mars au 18 inclus.
Le gouvernement français a présenté avant-hier
le budget au Corps-Législatif, toujours en équilibre.
Les dépenses et les recettes dépassent quinze cents
millions.
M. Quinelte, ex-ministre de France Bruxelles,
destitué par Louis-Napoléon après le i décembre,
s'est rallié au gouvernement impérial, et vient d'ac
cepter une place de conseiller d'Etat.
Le discours de lord Palmerslon au banquet du
Refurm-Club a trouvé des désapprobateurs. La
Chambre des communes, séance du «3, a entendu
des observations sur ce sujet, bien autrement sévères
que les nôtres. Un de ses membres, M. Briglit, a dit
en propres termes J'ai lu le compte-rendu de ce
qui s'est passé, avec peine et j'en ai été humilié;
quand je songe aux horreurs de la guerre, je ne
sais comment justifier les misérables plaisanteries
auxquelless'est livré le noble dépulédeTiverton.
Lord Palmerslon a été fort blessé de l'apostrophe.
Eu y répondant, il a qualifié M. Briglit de reverend
gentleman, épilhèleque M. Cobden a relevée aussitôt,
en disant qu'elle était placée là dans une intention
offensante et constituait une injure imméritée. Mais
lord Palmerslon a continué et déclaré que l'opinion
de M. Bright sur sa conduite lui impoi tait peu, et
qu'il avait souvent repoussé ses sarcasmes avec
mépris.
Un toast était porté par le préfet la prospérité du
nouveau colonel de la garde nationale, quand une voix
se fit entendre au dehors de la salle du banquet
Je le verrai, disait celte voix, j'entrerai, dussent
les valets de ce parvenu d'hier être brisés l'un après
l'autre ou tous ensemble par moi.
A ces paroles, dont les derniers sons lui arrivaient
et qui lui paraissaient sortir d'un organe assez connu de
lui, Auvray pâlit; il se leva de table et s'élança la scr-
vielte la main, au-devant de la voix en refermant
derrière lui avec force la porte de la salle. Les convives,
y compris la femme du notaire, n'avaient pas très claire
ment entendu; mais il leur était arrivé suffisamment
d'éclats, pour qu'un grand froid succédât sur-le-champ
l'enthousiasme de tout l'heure.
Auvray entraîna dans son cabinet de travail celui
qui était venu troubler sa bienvenue honorifique d'une
manière si brutale et inopinée. C'était un personnage
plus accoutumé par sa liante position de fortune être
reçu chez les gens d'affaires avec empressement et même
avec une affectation de soins et d'égards, qu'à être em
pêché dans sa marche quand il daignait venir eux.
Je ne m'étonne pas, oonlinua-l-il, monsieur, que
vous soyez maintenant si difficile voir pour moi; quand
on a des comptes aussi sévères rendre que ceux que
j'ai vous demander, on est visible toute heure ou on
ue l'est jamais. Vous ne m'attendiez pas si tôt, je le com
prends, après la lettre au moins surprenante que voua