JOURNAL D YPRES ET DE L'ARRONDISSEMENT.
m1,964. 18e Année.
IM manche. 83 Avril 1884,
Vires acquint eundo.
l\\E SUIT ES BATEAU A VAPEUR.
Chronique locale.
Chronique politique.
ABONNEMENTS: ypres (franco), par trimestre, 5 francs 50c. provinces,4francs.
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le progrès parait le Jeudi et le Dimanche. Tout ce qui concerne le journal doit
être adressé l'éditeur, Marché au Beurre. On ne reçoit que les lettres affranchies.
Tpbes, 22 Avril.
Nous avons appris par le. Moniteur que le
haut clergé daignait accepter la convention dite
d'Anvers, pour base d'une transaction entre les
prétentions exorbitantes de la prélature et les
justes et légitimes droits de l'État en matière
d'enseignement moyen.
Mais plusieurs actes d'intolérance signalés par
la presse l'endroit de jeunes gens fréquentant
les institutions laïques, sont venus faire ombre
au tableau de conciliation et de modération.
On était près de se donner le baiser Lamou-
rette, et voilà que quelques zélés viennent avec
fracas briser les vitres et éveiller l'attention de
l'opinion publique.
Un jeune élève de l'athenée de Liège a été
renvoyé du confessionnal par un père jésuite,
parce qu'il ne voulait pas promettre d'aban
donner rétablissement où il recevait l'éducation.
Un fait semblable a été signalé Louvain
d'autres actes analogues oui été commis Soi-
gnies et ailleurs. Ces scandales divulgués coup
sur coup, témoignent qu'il existe une rancune
profonde de la part du clergé contre l'instruc
tion laïque et que la transaction conclue ris
quera d'être une immense duperie et une ab
sorption déguisée des droits de l'État.
Quoiqu'il en soit, on peut être certain que
les chefs du clergé sauront profiter de la con
vention dite d'Anvers, qu'on leur accorde, pour
conquérir ce qu'elles nomment Vhomogénéité
de renseignementen d'autres termes, pour
faire régner, dans les institutions de l'État, l'en
seignement de parti qui est la raison d être des
établissements sous le patronage du clergé.
L'Étal n'a qu'un but atteindre, en dirigeant
l'enseignement tous ses degrés, celui de faire
des citoyens instruits, probes, dévoués aux in
stitutions constitutionnelles et au maintien de
la nationalité Belge. Comme la liberté des
cultes est inscrite dans notre pacte fondamental,
l'Étatdans son enseignementpour placer
toutes les religions sur la même ligne, eut dû
(soit*).
ii.
Un soir que M. de Longueil revenait chez lui, il crut
apercevoir une femme voilée qui le suivait distance;
mais ne pouvant abandonner le bras de son épouse, il
fut obligé de rentrer sans avoir pu éclaircir les doutes
qu'avait fait naître en lui cette mystérieuse apparition.
Un autre soir encore qu'il était seul, il vit de nou
veau la même femme, toujours voilée, qui le suivait,
mais de plus près. 11 se retourne subitement.
Qui donc etes-vous Pourquoi me suivez-vous
ainsi, madame dcmanda-t-il.
Laissez-moi, répondit cette femme d'une voix
étouffée; cl en même temps elle saisissait d'une main
tremblante la main de M. de Longueil, et lui passait une
bague au doigt.
Puis elle s'échappa au détour d'une rue prochaine,
laissant de Longueil muet et immobile d'étonnemenl.
Celui-ci reconnut dans la bague qui venait de lui
être donnée d'une si singulière façon, celle qu'il avait
admirée naguère la main de madame de Saint-Eslève.
Le lendemain de grand matin, la femme voilée
reçut de lui le billet suivant, en retour de son anneau
Pourquoi m'avez-vous suivi hier? que voulez-vous
de moi? parlez: est-ce haine?... cst-cc amour
est-ce l'un et l'autre Parlez, rendez-moi le repos que
vous m'avez ravi... M'aimez-vous?
Une heure après, de Longueil reçut une réponse
écrite d'une main tremblante et sans signature
yoms me demandez si je vous aimeet vous ne me
jabandonner celle partie de l'éducation aux
Isoins de la famille, et c'était la seule voie sui
vre, si on avait voulu s'en tenir strictement
l'esprit de notre Constitution, dont le clérica
lisme vante beaucoup, mais qu'il ne prétend
appliquer que dans ses intérêts lui.
Dès présent, ces actes d'intolérance ont
produit une sensation peu favorable aux préten
tions cléricales. Aussi les journaux de celte
couleur ont essayé de révoquer en doute les
faits signalés, mais en vain, ils n'étaient que trop
réels. Une feuille qui se distingue par sa polé
mique épileplique, la Patriede Bruges, s'est
récriée contre ces révélations, en prétendant
qu'on violait le secret de la confession. Messieurs
les cléricaux ont une telle peur de voir porter
la lumière dans leurs trames souterraines, qu'ils
s'empressent d'invoquer les immunités du con
fessionnal, tout propos, pour cacher leurs in
trigues et leurs petits complots. Mais l'opinion
publique n'est pas dupe de toute celle mise en
scène elle se doute que le gouvernement a été
joué dans cet accord avec l épiscopatqui l'ex
ploitera avec une mauvaise foi cléricale et au
détriment des légitimes intérêts de la société
laïque.
Jeudi dernier, M. le ministre des travaux
publics est arrivé en notre ville, par un train
spécial et il a parcouru la ligne de Courlrai
jusqu'à Poperinghe avec le directeur du chemin
de fer, M. Cbaulrell, et les hauts fonctionnaires
de celle ligue concédée. M. Noël, directeur des
pontselchaussées accompagnait M. le ministre,
ainsique M. De Sermoise, l'ingénieur en chef de
la province. De retour de Poperinghe vers une
heure et demie, M. le ministre a pu juger par
lui-même du triste aspect qu'offre uotre ville,
par suite du démantèlement de nos remparts
séculaires.
M. le ministre et les fonctionnaires qui l'ac
compagnaient après avoir diné chez M Alph.
Vanden Peereboom, représentant et échevin de
la ville, avec MM. le bourgmestre, le capitaine
du génie, le commissairé d'arrondissement, le
directeur, du chemin de fer et d'autres notabi
lités, est parti par un convoi spécial cinq
heures et demie du soir. Pendant le banquet
la musique du corps des Sapeurs-Pompiers a
exécuté quelques beaux morceaux d'harmonie.
Le 18 de ce mois, un incendie a éclaté dans
une chaumière habitée par les nommés Bour
geois, Pierre, et la veuve Capoen, journaliers,
Beninghelst. Les deux habitations et le mo
bilier qu'elles contenaientont été réduits en
cendres.
La perle s'élève 700 fr.; rien n'était assuré.
dites pas si vous m'aimez. Eh comment voulez-vous
que je vous réponde Ce serait vraiment une chose
charmante, que je vous aimasse A quoi cela me ser-
virait-il n'avez-vous pas des devoirs remplir
n pouvez-vous... voulez-vous les oublier? Je ne vous
demande rien que vous importent les motifs qui
m'ont engagée vous suivre Je puis bien vous voir,
mais de loin, de loin seulement. Ne cherchez pas
obtenir d'autre réponse votre lettre; je ne le veux pas.
Je ne vous connaîtrai pas davantage, je m'ôterais
plutôt la vie.
Une heure s'était peine écoulée que m. de Lon
gueil était aux pieds de madame de Saint-EstèVe. La
conséquence découlait de la réponse.
Un mois se pa<sa durant lequel Longueil oublia
l'univers entier auprès de cette femme perfide, qu'il
voyait chaque jour, et qui avait l'art de donner l'appa-
ircnce du scrupule et du remords sa résistance calculée.
Ce fut en ce moment qu'un véritable abîme s'ouvrit
i devant les yeux de madame de Longueil; elle avait enfin
compris les chagrins de la jalousie la rongeaient; et, de
dépit et de haine, clic divulgua partout la conduite de
son mari, et quels en étaient les résultats. Elle étala aux
regards du public une famille sans chef, une femme
'délaissée, réduite dévorer son affront dons les larmes,
et malheureuse de ne pas trouver, comme l'homme, des
lois pour la défendre, des armes pour la venger. Elle ne
put s'accoutumer la pensée de sa disgrâce, elle en pâlit;
ses yeux devinrent caves, sa santé s'altéra sa raison
même en fut atteinte. Longueil, de son côté, avait besoin
de s'étourdir pour calmer ses remords; il appelait son
aide toute la vigueur, toute la souplessa de son amour
Du 20 Axril au 22 iuclua.
La destitution du gouverneur et du sous-gou
verneur de la banque de Saint-Ferdinand a fait
une grande sensation dans le public du commerce
et des affaires Madrid. En frappant ces deux fonc
tionnaires, le ministère espagnol a voulu faire en
tendre aux capitalistes qui se montrent générale
ment mécontents de ses actes politiques, qu'il ne
reculera pas devant leur mauvais vouloir. 11 espé
rait que la chute de MM. Santillan et Mier ferait
disparaître le système de résistance dans lequel la
Banque venait d'entrer mais les décrets de révo
cation n'ont pas produit l'effet qu'il en attendait.
Il y a eu des protestations la Banque; le nouveau
gouverneur a été mal accueilli par le conseil d'ad
ministration; des remboursements ont été deman
dés par des capitalistes, en assez grand nombre
pour que le gouvernement ail dû s'en émouvoir.
M. Liorente, le nouveau gouvernenr, inquiet du
mouvement qui s'est prononcé et ne voulant pas
encourir la responsabilité de ce qui pourrait s'en
suivre, a donné sa démission mais elle n'a pas été
acceptée.
Les nouvelles des hostilités sont nulles aujour-
d hui, et le télégraphe électrique ne nous apprend
qu'une chose intéressante: c'est que le iode ce moi»,
Gallipoli, où les premières troupes françaises ont
pour inventer quelque stratagème qui, tôt ou tard, bon
gré mal gré, pnt l'amener satisfaire sa folle passion.
Un jour, madame de Saint-Estèvc lui dit
Ami, si vous m'aimez, il faut que vous me fas
siez un grand sacrifice.
Lequel répondit-il.
Je ne puis vous adorer ici, aux yeux de toute
ma ville jiatalc; si vous voulez que nous nous apparte
nions l'un l'autre, il faut fuir ensemble et vers l'asilç
où il me plaira de vous guider.
Longueil frémit cette proposition inattendue; car
il savait que si l'homme compromet sa réputation en
commettant une faute, il en aggrave de beaucoup les
conséquences par la publicité.
Et vous hésitez demanda madame de Saint-
Eslçve.
kc malheureux n'hésitait pas; seulement il frisonnait
l'idée du crime dont il allait se rendre coupable.
Il faut vous décider, dit sa complice; je suis déjà
descendue assez bas pour vous dans l'opinion publique.
En retardant noire départ, vous ine perdez tout fait
et, du moins, je ne veux pas courir nia perte sans en
retirer quelques fruits. Ce n'est point moi seule qu'il
appartient de faire tous les sacrifices, il est bien temps
que vous daigniez en faire quelques-uns de votre côté.
Epouvanté la pensée de faire une veuve de son
épouse, un orphelin de son fils, Longueil essaya un
moment de changer les projets de sa dominatrice mais
voyant que sa résistance était inutile, il s'abandonna en
désespéré la passion qui l'entraînait.
On convint d'une nuit pour le départ, et de Longueil
acheva de se mettre tout fait la discrétion de madatae