JOURNAL D YPRES ET DE L'ARRONDISSEMENT.
N* 1,381. 14* Année.
Jeudi, VS Juillet 1854
Vires acijuirit eundo.
FEUILLETON DU PROGRÈS.
tulxdacr. (suite.)
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Ypbeii, 26 Juillet.
COUR D'APPEL DE GAND.
MAIN-MORTE. ACTES FRAUDULEUX ET NULS.
Ou se rappellera qu'un notaire de l'arrondisr
sement judiciaire d'Ypres a été poursuivi pour
avoir prêté son ministère la directrice d'une
congrégation religieuse, stipulant dans un acte
de vente, non pour les sœurs actuelles, mais
pour toutes les associées perpétuité. Renvoyé
delà plainte en première instance, le notaire dont
il s'agit, vient de perdre son procès en appel.
Voici comment le Messager de Gand rend
compte de cette décision d'une extrême impor
tance
Les communautés religieuses noû recon
nues légalement comme personnes civiles, sont
incapables d'acquérir des biens en Belgique.
En conséquenceest radicalement nul
comme fait dans un but frauduleux, l'acte par
lequel la directrice d'une congrégation reli
gieuse fait l'acquisition de certains biens non
pour compte des sœurs faisant actuellement
partie de la congrégationmais pour compte de
toutes celles qui perpétuité pourront y être
admises.
Il y a lieu de prononcer la peine de la
censure contre le notaire qui a'prêté son minis
tère pour un acte de cette nature.
Ces différentes questions viennent d'être
résolues dans le sens que nous indiquons, par
un arrêt de la cour d'appel de cette ville, Ie
chambre, rendu le 14 juillet dernier, sous la
présidence de M. Roels, premier président, et
sur le réquisitoire conforme de M. l'avocat-
général Keymolen.
Ceux qui ont suivi le débat entre M. Frère
et Mgr. Malou, sur la mainmorte, verront aisé
ment la haute importance de celte décision.
M. Frère a dénoncé comme frauduleux les
actes du genre de celui qui faisait l'objet des
poursuites du parquet de la cour d'appel de
Gand. Il a montré qu'ils avaient pour effet de
rétablir la mainmorte par une voie détournée,
de soustraire les biens au commerce, de mé
connaître les droits des héritiers, et d'affranchir
les possesseurs des biens ainsi acquisde toute
charge publique en éludant les droits de muta
tion et de décès.
Mgr Malou a écrit sa brochure la Charité
libredans le but principal d'établir que l'article
JeanVanWerhem conduisit l'étranger dans ta plus belle chambre
qui donnait sur la place; il fit ensuite joncher la roe de fieurs et de
feuilles odorantes et veiller ce que des cierges de cire jaune fassent
«Humés et placés sur de grands ohandeliers en bois sculpté.
Ces préparatifs étaient peine achevés qu' un bruit sourd et le tin
tement lointain des clochettes annonça l'approche de la procession
qui en effet parut bientôt.
a la tète marchait an frère récollet portant un immense crucifix
d'une structure grossière; cbaoun des bras de la Croix pendaient
les instruments de la passion de Notre Seigneur. Il était suivi par
les corps de métiers précédésde leurs bannières et dont les principaux
membres portaient les images de leurs saints patrons. Entre autres
corporations ou remarquait celles des Cordonniers, des Serruriers,
des Tisserands, des Teinturieis, des Porteurs de bière, des Charpen
tiers, des Tailleurs de pierres, etc.. etc. Venaient ensuite les compa
gnies de la garde bourgeoise, les confréries de S' Sébastien et de
Barbe les drapeaux déchirés par les flèches ne oonservaient
plus que quelques glorieux lambeaux. A la suite de leurs soldats
venaient les capitaines, parmi lesquels on remarquait Marrellus
Florisone.Valentin Cornette, Baudouin Camerlynck, MichelVande
'Wynckcl, Éloi Delà Kuwiere, Pierre Schoonaert, Jean Vanden
Bussche, Lambrecht Moermau, Jacob Volbout. André Paelding,
Jean Van Becelaere, Olivier Lapallart, Beaugrand, Victor Dubois;
Joos Van Coslenoble et Wouter. a ces capitaines des milices bour-
20 de la constitution, en permettant la liberté
d'association, donnait aux congrégations reli
gieuses le droit d'acquérir comme les particu
liers. La constitution en a fait, dit-il, des corps
moraux libres. Sont-ils encore libres si vous ne
leur reconnaissez ni le droit d'acquérir ni celui
de posséder
La cour de Gand avait choisir entre les
deux systèmes, qui ont été développés et défen
dus devant elle avec un égal talentpar M.
Keymolen pour la partie publique, et par Me
Ballin, portant la parole au nom du notaire
poursuivi et dans l'intérêt des congrégations
religieuses.
Cette nouvelle épreuve judiciaire que le
système des congrégations religieuses a eu
subir, ne lui a point été plus heureuse que celle
qu'il a subie devant la cour suprême,il y a peu
de jours, dans le procès des jésuites de Nivelles
au sujet des legs de M. Sébille d'Amprez.
Ainsi, en moins d'un an, la question de la
main-morte déguisée, établie en fraude de la
loi s'est produite trois fois (levant trois diffé
rents tribunaux de Belgique, et a reçu, chaque
reprise, une solution contraire aux prétentions
des moines et des évêques belges. Les deux pre
mières décisions sont émanées de la cour d'appel
de Bruxelles, dans le procès des R. P. Roone et
Franqueville, et de la cour de cassation; la troi
sième, qui n'est ni moins nette, ni moins tran
chée que la première est de la cour de Gand.
Voicidu resteles faits de ce dernier
procès
La directrice d'une congrégation religieuse
de l'arrondissement d'Ypres, achète des biens
pour l'association en stipulant dans l'acte, qu'elle
fait cette acquisition non pour ses associées
actuellesmais pour toutes les sœurs qui
perpétuité, seraient admises au couvent.
C'était là évidemment un moyen détourné
d'acquérir pour compte du couvent, établisse
ment de main-morte non légalement reconnu,
et partant incapable.
Le notaire, qui a passé cet acte irrégulier,
a été poursuivi; et le tribunal d'Ypres a pro
noncé le jugement qui suit
a Attendu que le notaire X, est poursuivi de trois
chefs: i° pour avoir passé, sans l'autorisation du
juge-de-paix, le t4 Janvier 1853, un acte de partage
d'une succession mobilière, où le fils mineur de la
geoises, s'étaient joints les seigneurs envoyés Ypre» par le Comte
Louis de Maie, au moment du siège; c'était le chevalier Pierre
Vander Zype, les seigneursd'Isegkem et Rulleghem, Jean de Moor-
slede. seigneur de Staden, Gyselbrecht de Masmines, seigneur
d'Hollebeke, Jean Vander Zype, Jean Blaukaeit, Jean Flauvreel,
Nicolas François et Joris Belle.
Ces hommes de guerre étaient suivis par les moines et les reli
gieuses de divers monastères et couvents; tous portaient le costume
de leur ordre on voyait entre autres les chanoines réguliers de S1
Martin, les moines de l'abbaye de Zonoebeke, les RR. PP. Augus-
tins, les RR. PP. Dominicains, les religieuses dites riches Claires et
un nombre oonsidérabte de béguines.
Tous les assistants que nous venons de nommer marchaient en
deux rangs qui occupaient chacun un des eôtés de la rue par où
passait la procession; ils chantaient des psaumes, et réoitaieut des
chapelets.
Au milieu de cette double baie de pieux Yprois, s'avançaient les
pénitents. Ils étaient couverts de ciiices serrés autour du corps par
de grosses cordes ou de lourdes chaînes et marchaient pieds nus. Les
uns portaient sur lenrs épaules des barres de fer ou de lourdes pou-
i 1res, d'autres s'avançaient, tenant dorant le temps de la procession
leurs bras en croix, plusieurs enfin se frappaient a grands coups de
j discipline au point que le sang ruisselait le long de leur corps. Après
les pénitents veuaieut un certain nombre de bourgeois représentant
des scènes de la vie de la S» Vierge telles que l'aunonciation, la
viaitalion, les noces de Cana, etc., etc. Ils récitaient haute voix des
passages de l'écriture mis en vers pour cette circonstance.
On voyait ensuite l'image de la Vierge Marieprolectrice de la
veuve de Louis-François Louwagie était intéressé;
2* pour avoir passé le six Décembre de la même
année,un acte de vented'une maison entre les époux
Van Belle et Marie-Madeleine Verbiest, Reninghe,
dans quel acte Marie Verbiest déclare, en sa qualité
de supérieure de l'école des pauvres de Reninghe,
acheter cette maison pour elle et ses sœurs présentes
et futures, sans y mentionner les noms et prénoms
des dites sœurs 3* pour avoir prêté son ministère
au même acte comme contraire la loi, pareeque
ia dite école des pauvres de Reninghe n'est pas re
connue comme personne civile.
Quant au premier fait
Attendu que l'article 9 de la loi du 12 Juin
i3i6, prescrit formellement et sans distinction de
succession mobilière ou immobilière, l'intervention
du juge-de-paix tout acte de partage où des mi
neurs sont intéressés, que cette intervention n'est
non-seulement réclamée par les termes de la loi,
mais encore par son esprit, car dans l'un comme
dans l'autre cas, l'intérêt des mineurs est le même.
Attendu néanmoins que le notaire X, jusqu'ores
ne s'est jamais écarté des prescriptions de la loi.
Quant au second fait
Attendu que l'art. i3 de la loi sur le notariat ne
prescrit a ux notaires d'insérer dans leurs actes, q ue les
noms et prénoms des parties auxquelles ils veulent
que lecture en soit donnée
Attendu que par cette disposition, on ne peut
considérer comme partie dans l'acte que celui qui y
comparaît, qui s'y oblige, qui le notaire peut
donner lecture au moment de la passation, mais non
les sœurs présentes et futures de Marie Verbiest,
qui n'y ont point comparu, dont le notaire eut pu
difficilement constater avec authenticité les noms et
prénoms des premières, et certes impossible de»
dernières, qui du reste ne sont nullement obligée»
par cet acte. (Arrêt de la cour de cassation du 7
Décembre 1847.
Relativement au troisième chef de contraven
tion
Attendu que la vente et l'achat de la maison
dont s'agit entre les époux Van 3elle d'une part et
Marie-Madeleine Verbiest d'autre part, sont vala
bles et obligent respectivement les partie»; que le
notaire en prêtant son ministère pour constater pa
reille convention n'a contrevenu aucune loi. En
effet, aucune disposition de la loi ne défend Marie
Verbiest de déclarer, qu'en sa qualité de supérieure
de l'école, elle achète la dite maison pour elle et se»
sœurs, ni au notaire d'insérer dans l'acte cette dé
claration puisque malgré cette déclaration, Mari*
Verbiest reste personnellement obligée et qu'à son
égard l'acte reste valable, ainsi qu'à l'égard de»
vendeurs.
TÎIle; elle paraissait assise sur un rempart et était entourée d'une
petite palissade faite dans le même genre que celle qui avait si
puissamment contribué, l'année précédente, la défense de notre
cité. Cette circonstance a fait donner cette statue de la Vierge le
nom de Aotre Dame de Tuyne, nom qu'elle a conservé jusqu'à ce
jour. Autour de cette statue portée par les Récollets, se pressaient
grand nombre de boiteux, d'estropiés, d'aveugles conduits par des
ohiens, et d'impotents de toute espèce; (Il enfin, entouré de thuri
féraires et d'un nombreux clergé, venait le S' Sacrement porté par
Christophe de Dixmude, prévost de S1 Martin, qui s'était rendu,
durant le siège, au camp de l'Évéque de Noordwyck en qualité
de négociateur. Derrière le dais marchaient pieusement Jean Van
Oultre, vicomte d'Ypres, suivi des Yprois, qui, l'année précédente
faisaient partie du magistrat et parmi lesquels on remarquait Chris-
tiaen Latin, Rartholomé Damman, Godeu Goussin, Pierre Jugghe-
voet, Jean Fierin, père de la belle Marie, Jean Cabilleau, Jean
Bodery, Nicolas Van Ackere, Michel Bourgois, Jean Van Pror'ya et
plusieurs autres.
Enfin une foule immense fermait la procession en récitant des
chapelets et en psalmodiant des psaumes.
Jean Van Werhem et le chevalier de Jnmont quittèrent la fenê
tre où ils étaient restés longtemps agenouillés ils se mêlèrent la
(1) Après la levée du siège ces malheureux voulurent payer aussi
le tribut de leur reconnaissance; ils se réunirent en confrérie. Au
■oyen d'aumônes ils parvinrent faire sculpter une statue de la
Vierge, et la donnèrent au couvent des Récollets. C'est cette même
statue que l'on porte enoore actuellement en procession au jour de
la Tuindag.