M01,388. 14e Année.
Dimanche, iwit 1834.
JOURiYAL D'YPRES ET DE L'ARROXDISSEMENT.
Vires acquirit eund».
Kermesse d'Ypres,
ET CORTÈGE HISTORIQUE.
FEUILLETON DU PROGRÈS.
sp:
ABONNEMENTS: Y près (franco), par trimestre, 5 francs 50c. PnoviNces,4 francs. I Ls Progrès paraît le Jeudi elle Dimanche. Tout ce qui concerne le journal doit
INSERTIONS: Annonces, la ligne 15 centimes. Réclames, la ligne: 50 centimes. être adressé l'éditeur, Rue au Beurre. On ne reçoit que les lettres affranchies.
Ypre», 19 Août.
PROCESSION
(suite et pin.)
A la paroisse S' Martin revenait l'honneur de
clore ce long et brillant cortège; en voyant la
procession, organisée par le clergé de celte
paroisse, on ne pouvait s'empêcher de dire finis
coronat opus.
Eu tête de la procession marchait S4 Martin
revêtu d'un riche costume, il montait son tra
ditionnel cheval blanc, ses côtés se traînait le
pauvre estropié", un estropié pour de bon et qui,
chargeant uu peu son rôle, arrachait des larmes
tous.
Le groupe de S4 Martin était fort beau; celui
de la confrérie du S4 Sacré meut était magnifique.
Venait ensuite la statue de S* Sébastien, statue
fort belle, offerte par les aucieus archers et qui,
releguée dans un coin, semblait réservée de
venir la proie des insectes. La confrérie de S4
Sébastien a fait restaurer cet ancien mônument
qui a été porté, ainsi que les reliques du noble
chevalier S4 Sébastiendans la procession du
9. Les confrères, en veste bleue et chapeau d'uni
forme, escortaient leur saiut patrou, le chef-
homme et le roi, revêtus de leurs insignes,
suivaient et rappelaient, par leur présence, les
usages anciens des coufréries et ghildes qui ne
manquaient aucune procession ni cérémonie
publique.
Le groupe de S4e Barbe était d'une richesse
qui surpasse toute imagiualioa. Les artilleurs
de la Garde civique escortaient courtoisement
leur sainte patronne.
Fuis venaient trois châsses renfermant des
reliques la plus grande celle de S4 Maximiu
pensons-nous, est fort belle, les deux autres,
beaucoup plus antiques, sont des ebef-d'eeuvres
d'orfèvrerie.
Le sixième groupe, une procession de Notre-
Dame de Thuyne au dix-septième siècle, est
une représentation vivante d'une charmante
gravure due au burin dq^ Dulbiltgraveur
d'Ypres, et qui fit cette œuvre en 1610. Les
Récollets marchent après la croix, ils portent
l'image de Notre-Dame de Thuyne qui est dé
posée dans leur église, les chanoines du chapitre
de S4 Martin, en costume du temps, suivent la
vierge et puis vient l'évêque Masius (ftlaes); il
figures allégoriques, les arts, l'agriculture, le
commerce et l'industrie complètent la brillante
est suivi du magistrat m corpore, tunique uoire population de ce véhicule, qui a pour auto
boulons d'argent, manteau doublé de velours, medon un gentil page l'air mutin et au regard
chapeau plumes, épée l'espagnole, rien ne hardi et frondeur.
manque au costume, pas même les lisières j Le char était une des piècs capitales de la
garnies de vert, emblème glorieux du nom procession, il était dune coupe heureuse et
d'enfants d'Ypresque nos souverains, dans élégante, tous les ornements étaient exécutés
leur reconnaissance, donnèreul nos ancêtres;avec soin et dessinés avec goût; les armoiries
ce groupe est un des plus intéressants et des des ducs et duchesses faisaient le plus bel effet,
mieux caractérisés de toute la procession, il est en un mot, ce char fait honneur l'artiste qui
composé, en grande partie, d élèves du collège en est l'auteur, comme la procession civile fait
communal et de l'école moyenne; il a été beau-
TUMND AG. (suite.)
Marie s'abandonna aux soins deNses femmes, sans prononoer une
arole, sans jeter uu regard sur les riches habits dout ou la revêtait,
a toilette achevée, Jeau Fieriq vint la prendre allons, Marie, dit-
il, votre fui ur vous réclame, il est temps. La jeuue fille le suivit en
silence dans la grande salle où l'attendait une nombreuse et bril
lante assemblée. Outre les bourgeois de Gand, on y voyait la plupart
moyenne
coup admiré.
La musique et plusieurs pelotons de la Garde
civique précédaient l'image de Noire-Daine de
Thuyne entourée de vierges, de bannières,
représentant les épisodes du siège de 13113. Ce
dernier groupe était l'un des plus nombreux et
des mieux organisés du cortège.
Les Pères Carmes, le clergé, l'évêque et les
autorités communales suivaient la vierge. A ces
autorités s'étaient joints lVI. Dumonl, l'architecte
habile qui dirige les travaux de restauration de
la Halle et de I église h4 Martin, et M. Puyen-
broeck, l'auteur des statues que l'on admire
si juste titre.
Derrière les autorités et pour clore la pro
cession, marchait le char traîné par quatre
beaux coursiers.
Ce char, exécuté sur les dessins et sous la
direction de M De Bruck, artiste peintre en cette
ville, est un véritable chef-d'œuvre. Au point
culrainaut brillec est le mot, car elle était
couverte de diamants et de pierreries, brille,
disons-nous. Notre-Dame de Thuyne, entourée
d'anges et d'attributs, et un peu plus bas est
noblement assise la ville d Ypres appuyée d'une
main sur son glorieux blasou et leuaat de
lautre bien haut une oriflamme portant l'in
scription S. P. Q. Y.
Une tunique en drap d'argent, un manteau
de velours et une couronne constituent le riche
et brillant costume de la belle personnification
de la ville d'Ypres.
Aux pieds de la ville d'Ypres, est placé un
petit et charmant génieses côtés quatre
jeunes filles richement vêtues et portant l'image
dorée des tours des quatre églises de la ville,
représentent les paroisses de la cité; enfin des
itou futur et sou père étaient seuls cheval. Le cheval de la jeune
fille était blanc comme la neige; Pierre montait un destrier dont le
chevalier le plus noble eut été fier en uu jour de bataille.
Le cortège se mil en marche. L'air retentissait des acclamations
du peuple et des faufd res joyeuses des trompettes et des clairons,
toutes les cloches de l'église S1 Martin sonnaient graude volée.
Jamais, depuis le mariage du prinoe Moie Ag«moadus et de
Judith Moertuan, cérémonie nuptiale n'avait été célébrée Ypres
avec autant de faste et d éclat.
Étrangère tout ce qui se passait autour d'elle, incapable de suivre
des membies du magistrat d'Ypres, dont Jean Fierin faisait partie une idée, les yeux baissés vers la terre, Marie suivait le cortège,
celte année, les plus riches commerçants de la cité, les capitaines de Victime dévouée, elle marchait couronnée de fleurs l'autel où de-
la garde bourgeoise, les chefs-hommes des confréries Gilden de va*1 se consommer le sacrifice.
S! Sébastien et de Sle Barbe, en un molles habitants les plus hono-r a- D-
_*i -ii t»* j tu- .v
rables de la ville. Pierre de Winter s'approcha de sa iiancéc et,
lui prenant la main, qu'il sentit trembler dans la sienne, partons,
a'éoria-Uil. Les milices Gantoises qui avaient esoorté les voyageurs,
étaient rangées devant la maison de maître Fierin; trois compagnies
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Christophe de Dixmude, Préyôt de S1 Martin, entouré de tous les
chanoines réguliers, attendait les futurs époux l'entrée de la
basilique; après leur avoir donné uue première bénédiction, il les
précéda dans le temple.
Les bourgeois armés occupèrent la nef et refoulèrent dans les bas
honneur M. Bôhm qui a fourni les dessins de
la plupart des costumes et peint les drapeaux
et oriflammes qui ont été si légitimement
admirés.
Mais le char quitte la rue de Lille, il arrive
sur la place, ici se déroule un spectacle tout
nouveau que nulle plume ne peut décrire, que
nul pinceau ne peut retracer l'inauguration
des statues des ducs et duchesses et la béné
diction de l'image de Notre-Dame va avoir lieu
une foule immense peine contenue par de
vigoureux gendarmes, occupe les côtés de la
place, aux fenêtres des maisons, décorées avec
goût comme celles de la plupart des rues où le
cortège a passé, toutes les fenêtres, disons-
nous, se dressent des myriades de têtes char
mantes. Le milieu de la place est occupé par la
procession et le cortège historique; on dirait un
fleuve serpentant au milieu d'une riche vallée;
contre la tour du beffroi, aux pieds delaVierge,
se dresse une immease estrade dont Monseigneur
I evéque occupe le centre, l'autorité communale
la droite et le clergé la gauche. Après avoir
prononcé quelques paroles, M. le bourgmestre
déclare, au nom de la ville, inaugurées les sta
tues des ducs et duchesses, puis Monseigneur
l'évêque de Bruges bénit, suivant les cérémo
nies religieuses d'usage, l'image de Notre-Dame
de Thuyne.
Pendant cette cérémonie, le plus profond
silence régnait, mais dès qu'elle est achevée, les
voiles qui couvrent les statues sont enlevés,
toutes les musiques font entendre l'air d'Ypres,
si cher tous les Yprois, les tambours battent
aux champs, enfin la cloche du beffroi mêla sa
grosse voix aux 25.000 voix humaines qui
répétèrent cent fois Vivat Yper!
Ce moment était solennel et saisissant.
delà garde bourgeoise d'Ypres oommaudées par Audré Paelding, côtés la roule qui remplissait l'église. Les bourgeois de Gand et
Olivier Lap et Marrellus Floiitoone, occupé'eut l'autre côté de la d'Ypres, invités, se placèrent dans le eboeur où ils se trouvèrent
rue. Le cortège se mit en route. A la tête marchait la compagnie qui séparés de la foule et des milices, par le jubé. .1, Un large prie dieu
obéit anx ordres du brave Audré Paelding; le reste des milices (1) A cette époque le chœur de l'église S« Martin était séparé de
d'Ypres et de Gand formaient la haie aux côtés du cortège. Des la grande nef par un jubé de style gothique, de soi le que de l'église
détachements des confréries de S' Sébastien et de Ste Haibe fer- même un ne pouvait voir ce qui se passait dans le choeur. De pareils
ruaient la marche; tous marchaient drapeaux déployés. Au milieu dé jubés existent encore dans plusieurs églises, telles que l'église Saiut
ces bourgeois armés, avaient pris place les personnes invitées par Pierre a Louvaiu, l'église Saint Étieuue-du-Mont s Paris, etc., etc.
Jean Ficrinet par Pierreds Wimér. Tous marchaient A pied, Maria, Le jubé lia l'église S1 Martin a été démoli il y a peu d'années.
recouvert de velours cramoisi était placé dans le sanctuaire; Pierre
et Marie vinrent s'y agenouiller.
L'intérieur de I église de S1 Martin est sombre, le jour y pénètre A
peine A travers les vitraux coloriés reliés par des lames de plomb.
Les murs couverts de peintures A fresques, les nervures de voûtes
peintes de sombres couleurs, semblent absorber encore le peu de
lumière que le soleil y fait péuétrer. Les cierges nombreux qui
brillaient devant l'aute! et devant les images saintes, répandaient
partout oes demi-teintes mystérieuses qui semblent appeler le
recueillement et la méditation.
L orgue ohantait des airs de joie et de fête; les trompettes et les
clairons frappaient la voûte de leurs sons bruyants. Christophe de
Dixmude revêtu de superbes habits sacerdotaux de drap d'or, était
moulé A l'autella cérémonie commençait.
Marie, la vue du ministre dn seigneur, parut revenir a elle; elle
recueillit ses pensées, et fixa les yeux sur uue grande image de la
Mire de Dieu placée derrière l'autel. Elle priait avec ferveur, poor
Michel peut-être, oar, pour elle-même, il n'était plus d'espéranoe.
Tout A coup l'orgue cessa ses chants, les clairons devinrent muets;
le silence le plus profond succéda aux sons bruyants de la musique.
l.e Prévôt de S' Martin descendait lentement les marches d. l'autal,
se plaçant devant le prie-dieu.- Pierre deWiuter, dit-il d'une voix
solennelle et lente, conseulex-vous A prendre pour votre épouse légi
time, devant. Dieu et devant les hommes, Varie Florin, fille de
Jean?—Oui, répondit le bourgeois, d'un air insouciant. Dieu
voua soit en aide reprit Christophe ue Dixmude, Puis, ^'adressant
a Marie; Marie Fierin, fille de Jean, cMucutec-voua a pianire