JOURNAL D'YPRES ET DE L'ARRONDISSEMENT.
Vires acquint euudo.
W 1,380. 14e Aimée.
Jeudi, «4 AoUI 1834.
L'EMANCIPATION
ET LE SUFFRAGE UNIVERSEL.
FEUILLETON DU PROGRÈS.
TII\DAG.- (suite.)
ABONNEMENTS YrtiM (frMretj), par trimestre, 3 francs 50c. Provinces,4francs. J Le Progrès paraît le Jeudi et le Dimanche. Tout ce qui concerne le journal doit
INSERTIONS: Annonces, la ligne 15 centimes. Réclames, la ligne: 50 centimes. être adressé l'éditeur, Rue au Beurre. On ne reçoit que les lettres affranchies.
IPBEi, SI Août.
La presse cléricale est saisie d'indignation
quand on ose accuser ses patrons el les chefs du
cléricalisme d'être les seuls vrais révolution
naires de l'Europe. Elle jette les hauts cris, se
démène comme un diable dans un bénitier, se
lord décoléré, mais, oublieuse comme une vieille
coquette, il lui arrive de laisser échapper des
aveux qui font éclater son hypocrisie.
VÉmancipationy rédigée par le sieur Coo-
mans. ancien rédacteur du Journal des Flandres
et du Journal de Bruxelleset en outre représen-
tantdeTurnhouten Campine, où l'on boil en son
honneur du vin de la comète, VÉmancipation,
disons-nous, vient, nous devons l'avoir vu pour
le croire, de réclamer éventuellement le suf
frage universel. Celte aspiration du pieux jour
nal doit paraître d autant plus singulière, que
celle feuille a été cédée au sieur Coomans, par
le prince de Chimay, Dumortier, Orban, Malou
et autrps personnages importants du parti clé
rical. Le sieur Coomans lui-même est un repré
sentant selon le cœur du clergé, non pas sans
•voir été mécréant dans un temps d'erreur, mais
enfin, brebis égarée, il est rentré au bercail. Il
est croire que, pour expier ses fautes passées,
il fait du zèle, car le repentir et le désir de
conquérir la confiance des matadors de la ré
action absolutiste, l'a tellement émoustillé, que
souvent il avance des faits ou taux qu erronés,
qu'il est obligé de retracter le lendemain.
J\ous nous montrerons peut-être de bonne
compositiondit l'Émancipation, lorsqu'il sera
question' de faire la part du peuple. Les libé
raux doctrinaires ont parlé nayuères dechariyer
la Constitution ou de nous abattre rioolulion-
nairernent Qu'ils y prennent yarde, dès qutls
auront proposé une modification la charte de
1831, nous en réclamerons une autre qui sera
l'établissement du suffrage universel. Mais, ajoute
benuitement l'ÉmancipationDieu nous yarde
de donner le siynal de la débâcle.
C'est, comme on voit, une aspiration bonne
noter. Le suffrage universel a été appliqué en
France el le despotisme en est sorti, lin prêtre,
M. De Genoude, rédacteur-propriétaire de la
Gazette de Francea été, chez nos voisins du
Une maladie longue et dangereuse, suivie d'une pénible convales
cence et d'un affaissement moral qui faisaitoraindre pour sa raison,
avait été pour Marie la suite de ses cruelles émotious.
Jean Fierin, quand il se vit sur le point de perdre son unique
eufant. le seul être qui lui inspirât une ailection véritable que la
vanité la soif de l'or, et ses habitude! de despotisme domestique
élaieut inhabiles étouffer, seutit fondre le triple airain qui en
tourait sou cœur. L'amour paternel triomphant des passionséguïa
tel. y éclata avec une incroyable puissauee.
A genoux près du lit de douleur oà la pauvre Marie, cette belle
et fraîche jeune fille devant qui s'uuvrait un long avenir d'amour et
de felieité, gissait maintenant pâle, inanimée, prête exhaler le
dernier soupir, il s'abandonnait un affreux désespoir. U comptait
avec d'inexpnmablca angoisses les faibles battements de ce cœur
plein dé douces affections, que la mort allait glacer. Il baisait ces
joues décolorées, ces mains amaigries, des larmes silenoienses cou-
laiant le long de ses joues ridées, des sanglots comprimés brisaient
(a poitrine
Tant que Marie fat en danger, il ne la quitta pas an instant. Le
jour, ta nuit, il était toujours ia, attentif a tnus ses mouvements,
devinant Ses moindres désirs, heureux de les satisfairr. Quand enfin
la jeans fille revint la vie, Jean Fierin sembla renaître avaa elle.
sud, un des plus ardents préconiseurs du suf
frage universel.
Comme en Belgique, l'abaissement du cens a
étendu l'empire du clergé sur un grand nombre
d'électeurs peu instrliits, on suppose que le suf
frage universel serait une machine révolution
naire qui marcherait, espère-t-on, au gré de
l'impulsion du clergé, et pour s'assurer la domi
nation reculerait-il devant une révolution
La fin ne juslifie-t-elle pas les moyens?
N étions-nous pas dans le vrai, quand souvent
nous disions que les chefs du parti clérical sont
de véritables artistes en révolutions? En France,
le catholicisme politique ou ce qui est la même
chose, la théocratie absolutiste, a été pour
beaucoup dans le cataclysme de 1848. Il sem
blait au clergé qu'il n'avait pas assez d'action
sur la politique et qu il devait absorber, sous pré
texte de liberté, l'enseignement public. Croyant
avoir un plus facile marché de l'anarchie il s'est
mis bénir les arbres de la liberté. En Espagne,
par contre, son influence était dominante et l'ab
solutisme a été si lyrannique, si immoial et si op
presseur, qu'il eu est sorti une révolution. En
Hollande, le clergé n'est pas libre ce qu il
prétend, ce qui veut dire qu'il ne peut pas per
sécuter les autres religions.£)ansce pays, il se fait
révolutionnaire. En Belgique, il est libre dans
ses attributions spirituelles, mais on veut em
pêcher son intrusion dans le domaine temporel
et, par l'organe de M. Coomans, le député
Campinois, on nous menace du suffrage uni
versel
Quoiqu'on fasse, l'expérience des trente der
nières années est concluante; il n'y a pas moyen
de contenter le clergé catholique, moins que
le pouvoir laïc abdique. Si le gouvernement ne
consent pas s'annuller devant la hiérarchie
romaine, elle inquiète las consciences sème la
discorde el, en suivant bien ses menées et ses al
lures,on se convaincra, qu'elleest pour beaucoup
dans les troubles qui remuent les nations.
Les pays constitutionnels surtout sont exposés
aux agitations suscitées par le cléricalisme, car,
ennemi caché de la liberté sous toutes les for
mes, il en abuse pour la faire délester et en
provoquer ainsi la suppression.
Il parait que partout la convention dite
d'Anvers reçoit un accueil peu encourageant
Ses tendrw caresses, ses élans si vrais d'amour paternel rachetaient
toute une vie (Tégoïsme et d'insensibilité.
Fendant sa longue convalescence, Marie dont tant de marques de
tendresse avaient appelé la confiance, apprit tout son père son
amour pour Michel et ce qu'elle avait soufiert. Jean Fierin dont les
sentiments avaient subi nue complété métamorphose, accueillit ces
aveux avec une touchante bouté; il promit solennellement Marie
que Michel serait son époux et qu'il bénirait leur union.
Vers la tin dn mois de Mai, la ville'd'âpres présentait un aspect
inaccoutumé. Les tisserands avaient quitté leur métiers, tous tra
vaillaient avec ardeur a mettre les fortifications en état. On reufor-
çait les palissades, on élargissait les fossés, on relevait les remparts
qui s étaient affaissés en plusieurs endroits; les femmes elles-oiémes
aidaient les travailleurs. Depuis quelques jours on avait reçu la nou
velle que la ville d'Y près aurait bientôt uu siège soutenir Toutes
les poudres rassemblées depuis longtemps, avaient été employées
Tannée précédente la bataille de Kooxebeke par les armées du loi
de France et dn comte de Flandre. Les arsenaux étaient vides. Le
magistrat avait envoyé Paris Henri Kantin pour aiheter tout le
salpêtre qu'il pourrait tiouver; il avait fait publi> r en outre par
toute la Flandre une ordonnance prescrivaut tout Yprois qui était
absent de rentrer dans sa patrie, et es tous peine de mort et de
confiseation de biens.
Le S du mois de Juin, vers le soir, la cloche du beffroi sonna tout
coup l'alarme, et le cri de guerre retentit dans tous les quartiers de
la fille. Les ennemis venaient de se présenter la porta an Beurre.
pour le ministère rie conciliation et rie modé
ration. On peut ajouter que le.-t exigences qui
ont surgi, en précisant mieux le parti que le
clergé voulait tirer de ce compromis, ont con
sidérablement accru les répugnances que les
termes vagues et équivoques de la convention
soulevaient.
A Bruxelles, la majorité-du conseil com
munal est décidée, d'après I Observateur, re
jeter cette œuvre de duperie. On nous assure
qu Furnes, où existe une école moyenne de
l étal, le bureau administratif, appelé se pro
noncer sur la convention d'Anvers, a émis l'avis,
que puisque l'institution était en voie de pros
périté, il n'y avait pas lieu délibérer.
Dimanche dernier, le convoi de Courtrai. ar
rivant vers midi en vue de la station d'Ypres,
s'est arrêté tout coup. On s'enquiei t de la
cause de celte balle insolite et on apprend qu'elle
a pour motif la présence d'une vache se pro
menant entre les rails. Le machiniste s'en étant
aperçu en temps utile, a arrêté le train. On a
chassé l'animal jusque dans la station d Ypres
et le convoi a suivi doucement, n'éprouvant
d'autre inconvénient, qu'un léger relard de dix
minutes.
On nous assure que les travaux de terras
sement de la roule d'Ypres Bailleul par Locre,
ainsi qu une partie du pavage ont été adjugés
au sieur Tacquenïer, pour la somme de 84 000
francs; 2,000 fr. de plus que le devis estimatif.
Il vient de paraître, sous le titre de Soutenir
du Cortège historique et de la Procession du 9
Août 18-54, une charmante gravure qui, au
mérite artistique, joint I avantage de perpétuer
très-exactement le souvenir d'un fait intéressant
de notre histoire locale, l'inauguration el la
bénédiction des statues des Halles.
Exécutée sur les dessins de M\l. Rôhm et
Ange Van Eeckhout, et gravée par celui-ci,
celte œuvre ne peut manquer d'avoir un grand
succès; toutes les personnes qui ont fait partie
ou dont les enfants ont figuré dans la procession
voudront en avoir une épreuve, ils pourront la
joindre la brochure française ou flamande qui
a été publiée l'occasion de nos fêtes, car il est
remarquer que l'éditeur a eu soin de mettre
mais le brave capitaine André Pa. l.ling veillait a la défense de c.
poste, el ils furent vigoureusement repoussés.
Eu un instaut toutes les mili. es Yproises furent réunies sur la
place, en face de la halle Les capila.nes firent ranger leurs compa
gnies eu bataille. Bieutât arrivèrent les confréries de S'« Barbe et de
S' Sébastien. Michel Vau Hart dout l'ordonnance des magistrats
avait bâté le retour, faisait partie de cette dernièie; il avait été un
des premier» prendre les armes. Jean Van Oullre fit avancer le*
capitaines et les rhef-bommes des oonfrèriaa, et leur fit jurer da
combattre vaillamment, tous prêtèrent ce serment avec enthou
siasme; tuus jurèrent parle corps du Christ de mourir plutôt quv de
se rendre. Le même serment fut repété par les bourgeois armés a
ui ou fit lecture d'une ordonnance portant que quiconque te con-
uir.it lâchement serait mis a mort par la maiu du bourreau.
Depuis oe jour lrsaltaques se suoeédèrent avec rapidité, mais tous
les efforts vinrent échouer contre la valeur des Yprois.'Michel se
distinguait eutre tous par son courage et son «angfroid. Marie était
fieie des éloges que l'on prodiguait a son fiancé. Un soir, si ma
mémoire rai fidele, c'était le 15' jour du mois, Michel, .près avoir
combattu toule la journée, était v. nu trouver Marie; les euueroi».
découragés sans doute, avaient cessé leurs attaques; lesoanooa étaient
muets, les flèches avaient cessé de pleuvoir sur la ville. Michel et
Marie se promenaient sur les borda de l'Y|«rlée, vers le château des
Comtes (Zaelhofj, .'entretenant de leur amour et de leurs espérances
de bonheur. La nuit était venue, les léuèbrw a'épaisvisaaient. Flu-
sieura fois Michel s'était retourné, il avait eru entendre les pas d'u.
homme qui semblait le* suivra; mais l'obecrité était telle qu'il m