JOURNAL D'YPRES ET DE L'ARRONDISSEMENT
I I Vires acquirit eunda.
11° 1,490. 14- Année. IMmancIie, 10 Décem«*re 1854.
L'HOTEL PIMODAN.
ABONNEMENTS Tfres (franco), par trimestre, 5 francs 50c. Provinces,4francs. J Le Progrès paraît le Jeudi et le Dimanche, -r- Teut ce qui concerne le journal doit
INSERTIONS Annonces, la ligne 15 centimes. Réclames, la ligne 50 centimes. être adressé l'éditeur, Rue au Beurre. On ne reçoit que les lettres affranchies.
True», 9 Décembre.
La presse cléricale ne sort pas de la jubilation
en laquelle l'a plongée le vole de l'Adresse.
Elle chante sur tous les tous la dissolution du
parti libéral, et voit son parti la veille de faire
peser son joug sur la société, non pas de Jésus,
mais Belge. Tout beau vos chefs et vos patrons
ont souvent cru saisir le but de l'ambition in
variable de la caste cléricale, celle de dominer
les peuples et les rois, celle d'exploiter les po
pulations au point de vue moral et intellectuel.
Mais au moment où ils se croyaient le plus près
de réaliser le rêve de tous les temps du cléri
calisme, des événemenls imprévus semblaient
le rejeter de nouveau dans les contingents
futuis. Aujourd'hui encore, par suite des folies
révolutionnaires de 1848, un revirement s'est
opéré dans les aspirations des peuples. Telle
nation qui ne se croyait pas dotée d'assez de
liberté, adore aujourd'hui le despotisme et
semble se complaire dans les jeux de la guerr.e.
C'est au mieux pour le moment au gré des
désirs du parti clérical qui n'a jamais été ennemi
du fracas de la guerre, car où il y a trouble, il
y fait bon de pêcher, et d'ailleurs, si les batail
les entraînent mort d'hommes et de grandes
dépenses, ce ne sont pas les chefs du clérica
lisme qui en pâtissent, comme ils ne payent pas
la grosse part des impôts.
Nous empruntons l'article qu'on va lire, au
Mémorial de Cou riraiparceque les diverses
cousidérations qui s'y trouvent développées
s'appliquent également notre ville. Nos lec
teurs y verront de nouveau la preuve que le
projet Delaveleye présente seul les immenses
avantages et les garanties supérieures que l'on
est en droit d'exiger d'un chemin de fer com
mercial.
Ce que le Mémorial dit du canal de Bossuyt
relativement la ville de Courtrai, s'applique
en tous points la ville d'Ypres qui, elle aussi,
éprouverait un grand préjudice de l'adoption
d'une ligne autre que la ligne directe.
le cabaret de la pohme-de-pin.
(suite.)
11 poussa alors le bouton d'une porte au bout de la
galerie, il la referma ensuite sur lui, etPompeo l'entendit
gratter la tapisserie jusqu'à trois fois. Un frottement
léger, pareil la fermeture d'une portière de damas,
l'avertit que le masque venait d'entrer. Pompco ne se
trompait pas, l'homme en question se trouvait alors
devant le cardinal de Richelieu. Le ministre était ren
versé, plutôt qu'sssis, dans un vaste fauteuil de damas
violet, dont la couleur sombre faisait encore mieux res
sortir son teint jaunâtre et plombé. En vérité, rien qu'à
le voir ainsi, pâle et défait, ses deux mains croisées sur
le dos de l'un de ses chats favoris, le corps roulé dans
une longue fourure d'hermine, entouré de fioles et de
papiers, on se sentait pris d'une invincible compassion.
Quelques mèches rares de cheveux gris s'échappaient de
la calotte; sa bouche était crispée par un mouvement
fébrile, ses yeux éteints et bordés d'un cercle noir. En
un mot, le cardinal avait plutôt l'air d'un moribond
engourdi par la souffrance que d'un ministre dont la
voix ferme commande, dont le bras et la tète peuvent,
agir. La chambre de travail où il se trouvait n'était guère
de nature dissiper la teinte mélancolique de set idées.
La tenture en était violette, et n'avait pour ornement
que le portrait de Louis XIII, et un cabinet d'Allemagne
Cette importante question, débattue depuis
si longtemps dans les principaux organes de la
presse de tout le paysa pris les proportions
d'une véritable question nationale. Aussi espé
rons-nous aujourd'hui que la décision du gou
vernement ne se fera plus attendre en présence
de l'immense supériorité du projet Delaveleye,
elle ne saurait plus être douteuse.
Yoici maintenant l'article du Mémorial:
Chemin de fer commercial de S'-Ghlalaln
Gand.
Nous ne pouvons assez engager le gouvernement
donner enfin une solution la question dujche-
min de fer entre le Borinage et les Flandres.
L'immense utilité publique de cette entreprise,
ne peut plus être contestée et a été hautement pro
clamée depuis longtemps. Reste donc décider
quel projet on donnera la préférence.
A nos yeux encore, et en cela, nous sommes d'ac
cord avec une foule de corps constitués et avec la
presse de tout le pays, aucune discussion ne peut
plus s'élever sur ce point, et le projet de MM.
Delaveleye et Moucheron peut seul donner satisfac
tion complète aux nombreux intérêts qui sont en
gagés dans cette importante question.
Cependant, on travaille des pieds et des mains
pour faire accorder la concession une autre ligne,
et pour avantager quelques intérêts privés aux dé
pens des intérêts publics et de la prospérité natio
nale. Faute de pouvoir détruire ici les raisons
supérieures qui militent en faveur de la ligne de
MM. Delaveleye et Moucheron, nous allons tâcher
de montrer, en quelques lignes, l'avantage qui doit
incontestablement résulter de son admission pour
la ville de Courtrai.
Courtrai, qui communique déjà par un excellent
pavé de cinq lieues avec Audeuaerde, et qui se
trouve relié par un chemin de fer Leuze, de ma
nière qu'il a déjà avec ces localités des relations assez
faciles, se trouvera encore mis en rapport avec un
vaste plateau agricole, qui comprend les cantons de
Flobecq, Nederbrakel, Sotteghem, Oosterzeele, où
l'on s'occupe activement de la culture du lin, des
céréales, etc.
La ligne directe lui donne ensuite des relations
nouvelles avec Everghem, Sleydinge, Waerschoot
et toute la Zélande, puisqu'elle se prolonge jusqu'à
Terneuzen.
dont chaque tiroir se trouvait alors ouvert. Un Christ
d'Annibal Carrache occupait le panneau du milieu; pour
tous sièges, il y avait des pliants. La table était couverte
de dépêches et de livres. Près de l'encrier en bronse
doré, soutenu par quatre syrènes, dormait un des chats
de Son Éminence, un autre reposait sur ses genoux, un
troisième aux pieds des chenèts fleurs de lys. Quand
l'homme eut passé le seuil, il porta la main son masque
comme pour l'ôter. Le cardinal laissa échapper un geste
de répugnance.
Restez ainsilui (fit-ilne nous connaissons-nous
pas, docteur
Le personnage en question remercia le cardinal d'une
voix mal assurée. Il q'avait pas remarqué sans un secret
déplaisir le ton aigre de Son Éminence, il pressentit une
tempête. Richelieu semblait absorbé, on eut dit que la
présence de cet homme le trouvait morne, insensible. Ce
visiteur nocturne portait une rhingrave de velours noir,
des hauts de chausse et des bas de même couleur. Un
rabat fané remplaçait choc lui la collerette guipures. Il
était de taille moyenne, et d'une maigreur qu'il crut
semblé vraiment qu'on eut pu voir le jour travers ses
mains osseuses. Il obéit au désir du ministre et garda son
masque. Ensuite il s'inclina deux fois devant le cardinal,
et s'assit sur un pliant qu'il roula près du fauteuil de
Richelieu. Ainsi établi, il releva de sa main gauche jus
qu'au poignet la manche de sa rhingrave, et de la droite
il s'apprêta tâter le pouls de Son Éminence. Par un
Nous pouvons même dire qu'elle raccorde notre
ville, du côté de la France, où nous expédions nos
toiles, la ligne de Saint-Quentin qui abrège, même
pour Courtrai, la dislance de Paris d'une trentaine
de kilomètres et lui ouvre, en même temps, par la
Champagne et par la voie la plus courte, le débou
ché de l'Est de la France.
Le projet de M. l'ingénieur Delaveleye ne lèse
aucun intérêt, il ne fait concurrence la navigation
qu'à Gand, et lui laisse tout le littoral du canal
d'Antoing et de l'Escaut, où il se transporte an
nuellement plus de z6o,ooo tonnes de charbon du
Borinage, sans compter une quantité innombrable
d'autres matières pondéreuses.
Le projet rival, au contraire, cotoie constamment
le canal d'Antoing jusqu'à Péruwelz, et plus loin,
durant cinq six lieues, l'Escaut, duquel, du reste,
il ne s'écarte jamais que d'une très-faible distance.
Il nuira donc sensiblement la navigation et mettra
ainsi obstacle ce que le canal de Bossuyt soit ac
cepté par des capitalistes, inconvénient des plus
graves pour notre ville, et que ne présente pas le
projet de M. Delaveleye.
Ensuite, le tarif de la ligne directe étant le moins
élevé, toutes les localités qu'elle desservira, ne
fût-ce que pour une partie, réaliseront un bénéfice
son exécution.
Et comme elle s'harmonise avec la ligne de M.
de Haussy, Courtrai recevra directement et un
prix notablement réduit, les charbons et les métaux
de Charleroi.
Nous ajouterons enfin que seule, la ligne de
S'-Ghislain présente de sérieuses garanties d'exécu
tion immédiate;de plus, son adoption sera favorable
au trésor puisqu'elle n'exige aucun minimum d'in
térêt, et ses capitaux étant prêts, il en résultera que
son admission aura pour effet de donner, par le
travaille bien-être nos classes ouvrières.
L'État est donc intéressé, comme le commerce et
l'industrie, accorder la préférence au projet de M.
Delaveleye. Aujourd'hui, tous les doutes doivent
être levés, et le gouvernement serait coupable s'il
remettait encore sa décision.
Mardi, la Chambre des représentants a dis
cuté le budget des voies et moyens. Elle en a
adopté l'ensemble, l'unanimité.
Mercredi, la Chambre des représentants a
mouvement subit, le cardinal repoussa son fauteuil
comme s'il eut craint le contact d'une couleuvre.
Arrière il s'agit bien de cela vraiment, docteur,
s'écria-t-il comme un homme qui sort d'un rêve. Lisez,
lisez cette lettre, elle prouve quel point vous négligez
mes commissions. Un avis pareil, un avis que je m'atten
dais ne devoir qu'à votre zèle! D'où venez-vous?
Parlez, que savez-vous pourquoi m'avoir fait attendre?
Cela est bon pour le roi, monsieur prenez-y gardejo
finirai par croire que vous aussi vous êtes du côté de
mes ennemis
Un accès de toux violent interrompit le cardinal, dont
les joues s'empourpraient du feu dé la colèredont la
respiration devenait plus brève, dont le regard brillait
d'une expression singulière de rage, de mépris et de
vengeance. Il souleva un lion doré sous lequel plusieurs
papiers reposaient, puis après avoir jeté un coup d'œil
rapide sur l'un de ces écrits, il le présenta au docteur...
Le médecin, après l'avoir parcouru quelques secondes,
réprima un léger trouble de satisfactionet se composant
un sourire hypocrite
Je puis maintenant, répondit-il, remercier Son
Éminence. Pourquoi demanda le ministre. Son
Éminence ignore de qui lui vient cet avis Entière
ment. Des lors, Son Éminence me force rompre
avec tout projet de modestie, cet avis lui vient de moi.
De vous reprit Richelieu.
Le cardinal demeurait surpris, il examina le docteur