JOURNAL D'YPRES ET DE L'ARRONDISSEMENT. Il* 1,423. 14e Année. Jeudi21 Décembre 1854. Home, les Jésuites et la société politique. L'HOTEL PIMODAN. ABONNEMENTS Ypres (franco), par trimestre, 5 francs 50c. Provinces,4 francs. Le Progrès parait le Jeudi et le Dimanche. Tout ce qui concerne le journal doit INSERTIONS: Annonces, la ligne 45 centimes. Réclames, la ligne: 50 centimes. être adressé l'éditeur, Rue au Beurre. On ne reçoit que les lettres affranchies. -1ii i Yphes, 20 Décembre. Depuis loDgtemps, on a pu s'apercevoir qu'un élément hétérogène s'était glissé parmi noire clergé séculier et que l'esprit qui l'anime au jourd'hui, n'est plus celui d'autrefois. Une ar deur militante semble l'inspirer non plus contre l'erreur, mais dans un but de domination poli tique. Aussi la religion est-elle maniée par les prêtres d'aujourd hui non plus comme une chose sainte et qui plane au-dessus des variations des affaires mondaines, mais comme un instrument de compression et d'intimidation. En somme, on n'ignore pas d'où viennent le vent et l'esprit qui soufflent sur notre clergé, et nul doute que les Jésuites qui ont absorbé la papauté, n'aient pris leurs mesures pour agir de concert avec les évêques qui leur sont affiliésafin d'em piéter sur les droits du pouvoir laïque et de gouverner les nations par des hommes d'affaires qui se sont mis leur service, au détriment de leurs concitoyens et dans le but de les exploiter au profil de leurs seigneurs et maîtres spirituels. L'Union libérale, de Verviers, vient de donner un article sur une circulaire de levêque de Liège, qui dévoile les ficelles mises en jeu, pour frapper les imaginations. Nous le reproduisons avec d'autant plus de plaisir, qu'il est aussi lo gique que bien écrit. Monseigneur l'évêque de Liège a adressé récemment au doyen et aux curés de cette ville une circulaire pour leur prescrire la conduite qu'ils devront tenir pour assu rer le succès du prochain jubilé. Un ecclésiastique que nous ne connaissons pas a remis notre bureau cette circulaire, il y avait joint une noie écrite avec une vivacité de langage qui n'est pas dans nos habitutes, mais qui témoignait de la profonde indignation qu'avait dû ressentir son auteur en présence du rôle que l'on veut faire jouer au clergé, et des moyens auxquels on a recours pour stimuler son zèle. Nous n'aimons pas nous occuper des questions de un ambitieux. (suite.) En ce moment, Mariette le regarda. Il y avait sans doute une prière tacite dans ce regard, Mariette suppliait, car le jeune homme se rassit et posa son chapeau sur le comptoir. Charles, reprit son père, en lui prenant la main l avec tristesse, tu ne m'aimes pas Vous ne nous aimez plus, ajouta la désolée Mariette. Elle fondit en larmes après ces paroles, car il y avait longtemps qu'elle contenait son chagrin; ses pleurs plus que ses paroles émurent le jeune homme. Pardonnez-moi, mon père, répondit-il, et vous aussi, Mariette, pardonnez-moi, je vous aime Mais dé puis quelques jours je ne me reconnais plus; depuis quelques jours, tout en vous aimant, je me hais! Vous vous haissez, et pourquoi? demanda Mariette. Aorais-tu donc rougir devant ton père? ajouta maître Philippe. Mon père, répondit le jeune homme avec orgueil, je n'ai rien me reprocher devant vous ou de vant Dieu. Seulement la vie m'est insupportable, je dois vous fuir! Me fuir? as-tu dit, oh! je ne le vois que trop, ce sont les méchants exemples qui te perdent. Qui t'a donné ce conseil, dis-le? Parle ici, voyons, est-ce l'argent qui te manque? Grâce vous, mon père, ce n'est pas l'argent qui m'occupe. Hier encore, vous m'en avez muni la poche assez largement, cet argent que j'ai encore... Non, ce n'est pas cela, reprit Charles avec un soupir. Alors tu es amoureux? J'y suis.., celte dame sous les fenêtres de laquelle on t'a trouvé près d'ici... discipline religieuse, non pas qu'elles ne donnent souvent lieu une juste et légitime critique; mais l'autorité en ces matières a tellement été absorbée par le clergé supé rieur, qu'un pauvre prêtre qui oserait se plaindre serait taxé de rébellion, tandis qu'à nous, profanes, on nous reproche notre indignité et que l'on commence par rendre suspect les motifs qui nous font agir. Les journalistes qui se sont emparés de la spécialité de défendre la religion, et qui l'exercent en resserrant de plus en plus les liens qui enchaînent le clergé inférieur, revendiquent, quoi que sans titre eux-mêmes, le droit exclusif de toucher l'arche sainte. Cependant ees questions occupent une trop grande part dans la presse cléricale, pour que nous puissions garder toujours un silence qui passerait la fin pour une adhésion ou de l'impuissance leur répondre. Cette recrudescence de polémique dans la presse, les efforts qu'elle fait pour réhabiliter les tristes époques où l'église triomphante faisait sentir si durement son joug, la transformation qui s'opère dans le culte, le retour aux vieilles formes, la multiplicité des cérémonies religieuses, leur caractère, tout indique qu'il s'opère aujourd'hui une révolution dans l'église catholique, et que Ceux qui la dirigent marchent vers un but dont il est nécessaire de se préoccuper. a Ces directeurs nouveaux, tout le monde le reconnaît, sont les jésuites; ils dominent Rome, ils,[s'emparent des évêchés l'évêque de Liège est une de leurs créa- turcs. Non-seulement leurs doctrines, mais les prin cipes sur lesquels ils ont de tout temps fondé leur puis sance, deviennent ta règle rie l'Église, sont imposés d'autorité tous les membres du clergé. Mais il ne faut pas s'effrayer outre mesure des projets qui recouvrent ces réformes extérieures du cuite, du bruit qui se fait autour de choses très-futiles en elles- mêmes. Les jésuites, tant fins qu'on les dise, ne sont pas très-riches en imagination; ce qu'ils font aujourd'hui, ils l'ont fait après la restauration des Bourbons en France, ce sont les mêmes procédés, les mêmes appas la foule ignorante et l'ambition peu scrupuleuse. Partout où jaillit un éclair de réaction, nous voyons renaître les corporations d'hommes et de femmes, les confréries, les congrégations c'est-à-dire, la fie ascétique substituée la vie laborieuse, l'abus des prières, des pra tiques religieuses; nous voyons le culte matérialisé, avec ses cérémonies pompeuses, plutôt destinées frapper les imaginations qu'à toucher les cœurs, réformer les mœurs; les miracles inventés pour agir sur le vulgaire et le fanatiser; les saints, ces êtres périssables et imparfaits Quelque comédienne, mon pauvre garçon! Ce sera Belle- rose qui t'en aura procuré la connaissance... Misérable pratique qui me paie en monnaie de tinge Je vais dres ser son état de compte, et dès demain... Mon père, objecta Charles, laisscz-là Bellerose, qui n'est pour rien dans ceci... Ne voyez-vous pas que vos suppositions augmentent le chagrin de Mariette? ajouta le jeune homme en baissant la voi Eh bien oui reprit maî tre Philippe en s'exaltant, tu es un ingrat, tu fais le désespoir de Mariette! Mon père... Ne t'excuse point, tu mentirais. Va, tu n'es pas digne de l'amour de celte enfant Quand je me prenais vous regarder tous deux si frais, si gentils, je me suis dit bien des fois voil| pourtant deux tourtereaux que j'élève là! Mariette n'a pas de fortune, c'est vrai encore, mais moi j'ai du bien -et si elle t'aime Enfin, ce n'est pas l'argent, comme on dit, qui fait le bonheur. Mais tu es ambitieux, tu lis des romans où des hallcbardicrs épousent des princesses! Tu vas courir le guet, et tu te morfonds sous les balcons! Charles, mon aini, tu n'es qu'un fou! Un fou cela est vrai, murmura le jeune homme avec tristesse. Vous avez raison, mon père, je ne dois aspirer rien dans ce monde, j'y dois vivre obscur, humilié, méconnu. Est-ce donc ma faute pourtant si je me sens né pour de grandes choses? Parce que je suis votre fils, suis-je condamné pour toujours aux rebuts et aux dédains? Qui donc a mis le premier en moi ces germes d'ambition, de révolte contre le monde? Qui m'a le premier donné des maîtres? Je suis las, sachez-le, d'une vie stérile et désœuvrée; moi aussi je veux être noble, je saurai me faire un nom! Un nom mais il me semble que le tien est assez beau Cela sonne, par Dieu, aussi bien qu'autre chose Charles comme nous, substitués, dans le culte, Dieu lui-même; les.pratiques extérieures multipliées dans le but de tenir la masse des fidèles toujours sous l'influence du^prètre qui les exalte, les passionne. Il en fut ainsi après la réforme: au lieu de supprimer tous les couvents qui avaient donné tant de scandales au monde, de mettre un frein celte fureur de s'enrichir et de dominer qui a toujours été la plaie de l'église, on tra vailla remettre neuf ces vieilles machines que les ré formateurs avaient démolies, tondre d<- plus près encore le petit troupeau qui n'àvait pas pu échapper l'autorité de ses pasteurs. Mais en réformant les couvents, on en augmenta le nombre; de chaque ordre on en fit plusieurs, celui qui était réformé et celui qui ne l'était pas, celui qui l'était d'une manière et celui qui l'était de l'autre. Des fran ciscains on fit des capucinsdes récollets des franciscains réformés et des franciscains déchauxcinq ordres au lieu d'un. La profonde ignorance des anciens moines avait été fatale l'église, on remédia ce mal en créant des ordres où l'instruction serait plus soignée les jésuitesles tliéatins, les barnabiles, les pères de somasques, les doc trinaires,i etc., etc., furent destinés Satisfaire ce be soin d'instruction qui se répandait partout. Les Etats catholiques virent s'aggraver le mal qui avait donné naissance la réforme; l'église multiplia les obligations des fidèles et veilla sévèrement leur accom plissement les tribunaux ecclésiastiques furent plus sé vères, la répression des délits religieux plus cruelle, la censure des livres s'exerça avec une rigueur inouïe, et lorsqu'on n'eût plus d'auteur ou d'hérétique brûler, on bruts des sorciers pour que la foule fût toujours frappée de la puissance de l'église. Et que devint le sentiment religieux avec ce système de compression, de torture et de bûchers? Il s'éteignit peu peu les jésuites, en qui se personnifiait ce système impie, furent chassés de tous les Etats, supprimés par la cour de Rome; mais il était trop tard, le mal qu'ils avaient fait était trop profond; ils entraînèrent dans leur chute toutes les corporations religieuses qui furent sup primées partout où l'opinion publique se fit entendre, et qui ailleurs restèrent comme une institution sur laquelle devaient s'exercer plus tard les vengeances populaires. La société croyait en avoir fini avec ces éternels en nemis de sa tranquillité et de sa prospérité, avec ces mauvais défenseurs de la religion qu'ils compromettaient en la rendant complice de leurs passions toutes terrestres. Mais la tourmente révolutionnaire finie, une lueur d'espoir renaissant en France, ils se sont remis l'œuvre. Une véritable réaction religieuse s'était manifestée au Gruyn! Trouve donc ailleurs un cabaret comme celui-ci! Quand je serai très-vieux, c'est toi que je prétends le donner. Tu feras repeindre mon enseigne, c'est tout ce que je t'engage alors faire. M. Saînt-Amant m'a promis deux vers, tu les mettras sur ma porte. Ce sont là des choses qui valent bien les armes, mon pauvre enfant. Vois plutôt! maître Leclerc, qui n'était que batelier, a voulu acheter une charge la cour, et on lui corne aux oreilles le proverbe du bon vieux roi, le père du nôtre la caque sent toujours le hureng! Le capitaiue La Ripaille dit qu'il descend des La Ripaille du temps des Croisa des; laisse donc! il descend du coche, et n'a pas de quoi me payer une friture Que viens-tu me dire avec (a noblesse? Tu peux aller partout le front levé. Est-ce celte belle daine qui ne te trouve pas assez noble? Voyons, regarde-toi, et demande Mariette, que tu affliges, si lu n'es pas bien tourné? A douze ans, on te regardait passer sur le quai des Onnes, et les voisin» se disaient Ce sera un fier garçon El tu désespères de toi, tu veux me quitter! Va, tes grandes dames sont des dépouilleuses elles te grugeront et te mettront après sur le pavé. Ne me donnes pas le chagrin de le rencon trer un jour avec une cape trouée et des chausses sur les talons. Mais c'est assez de morale, je te laisse avec Ma riette... C'est ta confidente, et je ne veux pas inarcher sur ses brisées. Elle aussi, quand elle se révolte, c'est un détnon allons, Charles, allons, Mariette, embrassez tous deux celui qui vous aime et vous confond dans son cœur. Vous êtes mes enfants, mes seuls enfants... les autres sont au roi et au cardinal... mais vous (La suite au prochain n\)

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