JOURNAL D'YPRES ET DE L'ARRONDISSEMENT.
N° 1,546. 15e Année. Dimanche, 24 Février 1656.
Vires acquint eundo.
UNI! FATALITE.
i" A une femmemélodie chantée par M.
Bamateur (J. De Glintes.)
ABONNEMENTS Ypres (franco), par trimestre, 3 francs 30 c. Provinces, 4 francs. I Le Progrés paraît le Jeudi et le Dimanche. Tout ce qui concerne le journal doit
INSERTIONS Annonces, la ligne 15 centimes. Réclames, la ligne 50 centimes. être adressé l'éditeur, Rue au Beurre. On ne reçoit que les lettres affranchies.
Tpber, 22 Février.
La séance de Jeudi dernier de la Chambre des
représentants a été excessivement orageuse. Elle
a été suspendue, parce que le président ne pou
vait. par suite de l'effervescence de la droite,
maintenir l'ordre dans l'assemblée.
Une question de dignité nationale était cepen
dant en jeu et dans la discussion d'affaires de
cette espèce, les conservateurs devraient donner
l'exemple du calme, puisqu'ils s'attribuent aux
dépens de la gauche, le monopole de toutes les
vertus. Il ne semble pas qu'il en ait été ainsi
jeudi dernier, caria droite après avoir fait beau
coup de bruit, a fini par quitter l'enceinte par
lementaire, afin de rendre le vote nul, par suite
de l'absence préméditée de la majorité des mem
bres de la Chambre.
Nous avons dit que c'était une question de
dignité nationale qui avait mis en émoi les re
présentants. Nous devons ajouter qu'il s'agit de
comprendre l'assassinat, les tentatives d'assas
sinat, d'empoisonnement commis sur la per
sonne des souverains ou des membres de leur
famille, au nombre des motifs qui peuvent au
toriser l'extradition de l'auteur de ces crimes.
Mais il fallait éviter une difficulté, c'est de for
muler la loi en termes peu précis, de façon ce
que l'abus ou l'extension en devienne possible.
La droite qui est l'allié de tous les despo-
tismes, de toutes les tyrannies, voulait enlever
le vole, même sans permettre l'examen de la
question. La gauche voulait au contraire trou
ver une rédaction qui, tout en assimilant le
crime commis sur la personne d'un souverain
un crime puni par le droit commun, et par
conséquent impliquant l'extradition, évitait de
mettre eotre les mains du gouvernement une
arme dont il eut pu faire mauvais usage car
enfin, il eut été possible que la loi, écrite en
termes élastiques, eut fait naître des exigences
incompatibles avec les sentiments d'hospitalité
libre et généreuse qui sont dans les traditions
du pays.
XI.
(suite.)
Un éclat de sanglots que Piranese ne put comprimer
fit reculer Émilc de stupéfaction. Ah! mon Dieu!
dit-il les mains jointes, qu'as-tu donc, Piranese si ce
sont des pleurs de joie que tu verses, ils me contristent
comme des larmes de douleur... Parle, parle-moi, mon
ami.
Et il s'approcha de Giampolo, et saisit ses mains vive
ment, pour les détacher du front qu'elles voilaient.
Piranese céda, par lassitude, cette violence de l'ami
tié. 11 découvrit son visage, et laissa voir une pâleur de
cire sur des joues sillonnées par des pleurs. Sa poitrine
haletait comme après une course au vol de la base au
sommet d'une montagne il y avait, dans ce noble sein,
le volcan d'une passion qui fendait l'épiderme, pour s'ou
vrir un cratère ses yeux fixes épouvantaient Émilc,
comme des yeux vivants sous le front d'un cadavre gal
vanisé. Les mains des deux amis se serrèrent dans un
double élan spontané, les deux bouches mêlèrent leur
souffle. Un frémissement convulsif de Piranese annonça
qu'un suprême effort se faisait en lui pour une terrible
révélation il essaya ses lèvres aux premières syllabes de
la confidence; puis au moment de parler, il recula devant
la chose résolue, et transforma son discours.
Émilc, dit-il avec au acqpnt plein de mélancolie,
Nul (neTveut l'impunité du crime, mais la
gauche ne veut pas que sous'prétexte de ne pas
laisser le crime impuni, on puisse abuser de la
loi, pour enfreindre les lois de l'hospitalité. La
droite, elle, ne s'inquiète pas des abus qu'il faut
savoir prévenir; comme tout son système est
basé sur les privilèges et les abus, un de plus
ou de moins lui importe peu. Aussi la violence
de la droite a-t-elle fait explosion, par suite de
la résistance de la gauche, et la morale de la
séance|de Jeudi, peut se traduire en ces mots
vasselage du cléricalisme au despotisme étran-
ger !-
«■jisi u o eu—
C'est aujourd'hui que devait avoir lieu l'adju
dication de la construction de la nouvelle route
du hameau Luzerne Reninghe parZuydschote.
Nous ne connaissons pas le nombre des soumis
sions déposées, mais nous pouvons dire que les
travaux de celte nouvelle et importante voie pa
vée ont été adjugés M. Louis Vanden Broele,
pour la somme de 123-90Î) fr.
Nous donnons le programme dq la matinée
musicale qui aura lieu demain, Dimanche, dans
les salles de rHôtel-de-ville,|lé 24 Février 1856.
C'est avec satisfaction que nous pouvons con
stater le succès de plus en plus grand de ces
réunions qui, en hiver, remplacent avec avan
tage les concerts de l'été au jardin public. Les
résultats de ces fêtes ne sont pas dédaigner, et
chaque matinée musicale, il y a une recette
nette qui varie de vingt trente francs et même
cette somme a été dépassée.
Nous devons convenir que le succès de ces
réunionsdoitêtreattribué,pour une bonne part,
l'excellente musique du 2e régiment et son
habile chef d'orchestre M. Ailard, qui, non-
seulement est un excellent musicien, mais encore
un bon compositeur. Nous'avonsjtout lieu d'es
pérer que ces réunions continueront jouir de
la sympathie du public et que les indigents y
trouveront une source de consolation, qui ne se
tarira qu'à la fin de la rigoureuse saison.
Emile, mon bon ami, te rappelles-tu les paroles que tu
m'as apportées, un jour, dans les ruines du cirque d'An-
tonin?A cette époque, lu prenais souci de la gloire et
de l'honneur de ton ami tu trouvas dans ton esprit des
formes de reproches, couvertes d'un voile amical, pour
m'exciter courir auprès de Joachim Murât, et lu m'au
rais renié peut-être, si je me fusse lâchement enseveli
vivant sous les dentelles d'une femme tu t'en souviens?
Émile fit un signe de tête affirmatif.
Comment veux-tu donc qu'aujourd'hui je puisse te
voir sans être ému aux larmes, te voir, toi Émilc, quand
la patrie aiguise son épée, déserter l'ennemi, c'est-à-
dire la volupté déshonorante, oublier tes devoirs de
soldat, fermer l'oreille ce grand cri de guerre impérial
qui s'élève du golfe Juan? Et moi aussi j'ai une femme
charmante; j'ai une existence d'or, et tu me vois tout
absorbé par des préparatifs d'un départ qui sera peut-
être sans retour. Quelle douleur si j'étais obligé de laisser
mon compagnon d'armes sur son lit de roses, quand je
vais dormir sous la tente Oh mon émotion t'en dira
plus qu'un long discours, Émilc...
Piranese détourna la tête il était honteux de ce sub
terfuge il lui semblait que son visage n'était pas en
harmonie d'expression et de pensée avec ses paroles, et
que son abattement, son désespoir, ses larmes, attestant
une blessure trop profonde, allaient le trahir aux yeux
de son ami qui ne pourrait concilier la légèreté de là
faute avec la solennité de l'accusation. Il avait trop pré
sumé de la sagacité d'Émilc l'étourdi jeune homme
i" Ouverture de la Fête des Chasseurs (Reit-
meyer.)
3" Fantaisie de la Fille du régiment (Donizetti.)
4* Cavatine de la Favorite, chantée par M.
Bamateur (Donizetti.)
5* Fantaisie dojla Norma, par,VaiYCalck (Bel-
lini.)
6" La Cloche, valse (arrangée par M. Allard.)
Par arrêté royal du 19 février, la démission
du sieur J. Lamaire, de ses fonctions de juge-
de-paix du canton de Passcheudaeleest ac
ceptée.
Il est admis faire valoir ses droits la pen
sion.
Un arrêté royal de date récente a concédé au
sieur Thomas Green, de Londres, la concession
d'une voie ferrée qui prendra le nom de chemin
de fer international des Flandres. Celle nou
velle ligne, partant de Lichtervelde, station
centrale de la ligne de la Flandre occidentale,
ira aboutir Furnes, en passant par Corte-
inarck, Handzaeme, Wercken, Eessen et Dix-
mude. Elle se trouvera donc en communication
avec le port de Dunkerque par le canal de ce
port Furnes.
La Société de Rhétorique en cette ville de
kunst is ons vermaekdéjà très-nombreuse en
membres actifs, récemment reconstituée, s'est
fixée l'hôtel Fournier, où elle occupe la
grande et belle salle au premier, pour y donner
des scènes comiques et dramatiques et autres
divertissements dont elle promet doter ses mem
bres honoraires. L'habile pinceau de M. Bôhm,
en transformant lès décors d'une manière gra
cieuse, en a fait une belle salle de spectacle.
N'ayant pour but que de cultiver la littérature
flamande, d'encourager les arts et les sciences
basés sur des principes d'ordre et de morale,
elle ne négligera rien pour procurer ses mem
bres des soirées agréables, dans sa biblio-
ajouta foi la sincérité de ces reproches l'amitié souvent
est aveugle et confiante comme l'amour.
Mon cher Pira, dit-il avec calme et en souriant, il
est des circonstances rares, fort heureusement, où je
m'aperçois que nous appartenons, toi et moi, deux na
tions différentes. Chez nous, on ne traite pas si gravement
la guerre nous ferions l'amour entre deux batteries allu
mées nous signerions un cantrat de mariage sur l'affût
du canonNe sais-tu pas que notre brave général Joubert
se maria dans une maison de la Chausséc-d'Anlin Paris,
partit le lendemain de ses noces, en habit de bal, et se fit
tuer, quelques jours après, la bataille de Novi, au pre
mier quartier de sa lune de miel? 1 Que veut dire
eela? dit Giampolo d'un air consterné. Cela veut dire,
mon cher Pira, que j'épouse, et que je pars, et que je me
soucie d'une balle ou d'un boulet autrichien, comme
d'une bulle de savon. Si tu ne m'avais pas coupé la pa
role un peu brusquement, tu saurais déjà que je viens de
signifier absolument la même chose Félice Mattei il
me faisait des objections, il prétendait qu'il me serait
impossible de sortir d'Italie et de rejoindre la grande
armée. Seigneur Mattei, lui ai-je répondu, vous n'êtes
pas fort en stratégie. La grande armée est partout. Joachim
Murât est quelques lieues d'ici si je ne puis atteindre
l'empereur des Français, je me replierais sur le roi de
Naples c'est toujours le même drapeau. Et mon Mattei
m'a salué avec une politesse maligne, et il a disparu. Je
t'aurais conté tout cela, mon cher camarade, mais tu m'as
jeté dans les divagations tu me fais commencer mon