JOUltiVAL DTPRES ET DE L'ARRONDISSEMENT.
H# 1,56f' Année.
Dimanche, 11 Mai 1656.
Vires acquint eundo.
GILBERT ET MATHILDE.
ABONNEMENTS Ypres (franco), par trimestre, 5 francs 30 c. —Provinces, 4francs.
INSERTIONS: Annonces, la ligne 13 centimes. RéclaIies, la ligne: 50 centimes.
Le Progrès parait le Jeudi et le Dimanche. Tout ce qui concerne le journal doit
être adressé l'éditeur, Riie au Beurre.. On ne reçoit que les lettres affranchies.
Yprf.s, 10 Mal.
C'est avec bonheur et fierté que nous repro
duisons l'analyse de l'interpellation de M. Orts
la séance de Mercredi de la Chambre des re
présentants, ainsi que la réponse uettc et éner
gique de M. le ministre des affaires étrangères.
Quoique le ministère actuel n'ait paà nos sym
pathies, nous lui rendons hautement justice.. Il
a été digne et vraiment Belge dans cette circon
stance et nous serions heureux, comptant sur
sa fermeté, de pouvoir encore lui donner notre
appui, comme nous le faisons avec joie dans
cette occurrence.
Chambre des représentants.
Séance du 7 Mai.
La séance est ouverte ..a heures. i/4, par l'appel
nominal, la lecture et l'adoption du procès-verbal
de la séance d'hier.
Il est donné lecture des pièces adressées l'as
semblée.
M. Coomans dépose un rapport supplémentaire
sur les projets de concession d'un certain nombre
de chemins de fer; ce rapport roule sur une pétition
du conseil communal de Dinant, demandant qoe
cette ville soit rattachée au réseau central des che
mins de fer; la section propose de prendre cette
demande en considération pour le cas où une com
pagnie se présenterait.
M. le président. La parole est M. Orts pour
des interpellations. (Vif mouvement 4'attention;
profond silence.)
M» Orts. Messieurs, ce serait nier l'évidence que
de contester l'émotion causée dans le pays par la
publication d'un document que chacun de vous
connaît. L'émotion avait une double cause. Des ac
cusations graves ont été portées contre la presse
belge elles étaient exagérées, et ont froissé le senti
ment national comme toute accusation injuste. A la
suite de ces accusations, un avenir plein de craintes
a été entrevu. Des paroles, dont nous nous exagérons
peut-être l'importance, out fait entendre des mena
ces contre une de nos institutions les plus saintes.
On a dit que la presse belge provoquait l'assas
sinat et la révolte, et que notre législation était
impuissante réprimer ces abus.
Je ne nie pas que quelques organes de la presse
n'aient substitué la liberté de la presse, l'abus de
la liberté, on employant une violence de langage
qui n'a pu être inspirée par un sentiment vraiment
belge. (Très-bien
EPISODE DU XI» SIÈCLE.
§1\
sous les murs d'antiociie (1097).
Parmi ces nombreux guerriers accourus en Orient
pour délivrér le tombeau du Christ, se trouvait Gilbert
Bccket, ou Beckie, suivant l'expression saxonne.
Enfant do la vieille Angleterre, berdeau de l'honneur,
aux yeux bleus, aux cheveux blonds, Gilbert avait Con
servé les signes caractéristiques de sa nation et ses traits
d'uue pureté comparable au type grec, se distinguaient
bien plus par l'expression de bonté et de douceur que les
sentiments habituels de son âme avaient, pour ainsi dire,
gravé sur sa figure; que par cette perfeelion frogile, pé
rissable, que l'on appelle beauté. Son adresse manier
un cheval, lancer une flèche, une javeline, fit que son
seigneur, de race normande, .brisa le colier de cuivre,
stygmate infâme des esclaves, pour affranchir Gilbert, le
mener dans les camps comme écuyer où peut-être la
gloire allait lui accorder une nouvelle pâlme.
Gilbert, sous ce rapport, était né sous une heureuse
étoile; il avait atteint insensiblement la haute position
qu'il occupait maintenant dans l'armée chrétienne. Et
Vf ,1 ififtpr, i r. 9 lultfi id
Mais ce que je conteste, c'est que ces attaques
aient un caractère tellement générai, qu'oq, ne
puisse les réprimer sans porter atteinte a la liberté
de la presse. Ce que je contçste, c'est que les atta
ques soient inspirées exclusivement par dés idées
anti-françaises.
Les écarts que les honnêtes geos doivent déplorér,
flétrir et condamner, sont une exception de ranes
organes ont commis les fautes qu'on impute tous,
et vous savez de quelle publicité disposent ces or
ganes et combien ils trouvent peu d'écho dans l'opi
nion publique.
Et l'impunité dont on parle, Ja trouve-t-oq dans
l'insuffisance de la loi? Les offenses contre les sou
verains étrangers sont punis chez nous par une loi
spéciale. Si des faits plus graves que des offenses se
commettaient, le gouvernement n'est pas encore
désarmé. Pousse-t-on la révolte, k l'assassinat?
notre Code pénal est là, et il p'y a pas de jury belge
qui hésitera condamner quand ces lois seront
réellement violées.
On a dit que ces attaques avaient pn caractère:
essentiellement hostile la France. Il eût été facile
de répondre si'la Belgique accusée avait été mise
même de se défendre. Mais l'a presse belge a-f-elle
été seule coupable de ce* attaques?
Ouvrez les journaux des autres pays, ne Ooti-
tienhent-ils pas des attaques bien plus violentes que
celles qui se trouvent dans quelque* rares organes
de là presse belge?
En définitive, cette législation qu'on dit insuffi
sante, la Belgique l'a acceptée pour la défense de
son. propre gouvernement, de son auguste squve-
rain, de ce Roi si justement révéré, dont noUs pops
apprêtons célébrer, après î5 années de règne^ le
glorieux et magnifique anniversaire. Je dis glorieux
et magnifique anniversaire, parce qu'il est aussi
pour moi l'augure de longues années de'bonheur
Iqui nous attendent sous ce Roi hônnête-bomme, si
justement aimé de son peuple. (Très-bien).
Celte connaissance imparfaite des faits, je:la com
prends de la part d'un diplomate étranger qui s»
trompe ou qu'on trompe peut-être; je la comprends
d'autant mieux, qu'on ne se contente pas ici de ne
rien faire pour faire mieux connaître la Belgique,
mais qu'on va jusqu'à prétendre que la presse ne
respecte ni les institutions, ni les personnes livrées
sans défense leurs attaques on va jusqu'à présen
ter aux yeux de l'étranger des extraits de journaiix
tellement infimes qu'on n'ose pas désigner leur
nom, et l'on ne craint pas de les présenter comme
un exemple de polémique habituelle de la géné
ralité de la presse belge. Voilà ce qu'on a fait, voilà
après s'être battu comme un lion au siège de Constanti-
nople, où le frère du roi de France s'était trouvé prison
nier, on lui avait donné les trois cOupl dé plat d'épée,
baptême simple mais expressif, qui l'admettait dans les
rangs de la chevalerie.
Maintenant que nous connaissons les antécédents ho
norables de notre jeune héros, transportons-nous sous
les murailles d'Antioche, au mois d'octobre de l'année
1097.
Le camp était enveloppé dans les voiles sombres de la
nuit, et le cri seul des sentinelles vigilantes venait de
rares intervalles troubler ce silence de mort.'
Deux tentes encore projetaient des clartés, mais la
garde qui en défendait les abords, on devinait qu'elles
appartenaient quelques croisés de distinction. L'unfe
était surmontée du gonfanon de Monferrat et réunissait
en ce moment quelques cbevaliers.
Des tentures de pourpre en décoraient l'intérieur, des
sièges coussins de velours entouraient une table recou
verte- d'un drap écarlate franges dorées, des lampes
d'argent exhalant les parfums d'une huilé odoriférante,
reproduisaient leur clarté étincelante sur les armures ci
selées des chefs chrétiens.
Et au milieu de cette loule dorée, Gilbert qui naguère
ce qu'il faut condamner hautement. (Mouvement
d'approbation.)
Je demanderai au gouvernement s'il été fait1
quelque chose pour faire connaître au gouverne
ment français ou aux autres gouvernements repré
sentés dans les conférences, les plus justes réclama
tions.de la Belgique contre les accusations dont elle
a été l'objet. On nous reproche de ne pas remplir
nos devoirs internationaux; on nous déclaré inca
pables de-le'faire. Et vous savez combien la Belgique
a fait preuve de son respect pour tout ce qui a pu lui
être iniposé litpe de devoir,ipternajtiona.1, Ejje lui
a fait des sacrifices qui ,ont fait saigner plus d'un
cœur et dont l'Europe devrait lui tenir compte. Eu
i83o, nous avons renoncé la tentation que nous
avions de pbftçr1 notre drapeau révolntiotinarré
triomphant jusqu'aux rives du Mofefdyk. Eh r&3g;
nous avons fait l'intérêt européen le sacrifice de
4oo,ooo de nos frères. Én!i8_48, noué afôns e'té1 la
barrière qui a arrêté le torrent révolutionnaire qui
menaçait de faire le tour du monde. -, i* o
:Voilà ce que nousavons fait .'.Que veut-on de nous?
Notre passé n'etstril pas la caution de notre- avenir?.
Veut-on une autre Belgique que Ja BeJgiquq indé
pendante et neutre? On a parlé de réformes indis
pensables au reposdeaÉtatseuropéexis Çea céjÇo.rqaes
quelles sont-elles? Je suis autorisé demany.-i' eu.
ministère, si un des gouvernements représentes la
Conférence de Paris fui a demandé d'introduire daij-
la Constitution uné réforme queïconqiie? Et, dans
le cas où une pareille demande serait faite, je prie le
ministère de dire, d'une minière précise^ qViefle Se
rait la réponse qu'il ferait, et s'il serait disposé
présenter aux Chambres un projet de loi dâns le sens
que je viens d'indiquer?
M; Vilain xiiii, ministre des affaires étrangères.
Je vais avoir l'honneur de répondre en très-rpeu de
mots aux trois interpellations que l'honorable M.
Orts vient de m'adresser. Il m'a demandé d'abord si
le gouvernement belge avait fait connaître au gou
vernement français, ou quelque autre des gouver
nements représentés la Conférence de Paris, les
réclamations de la Belgique contre les accusations
dont la presse belge a été l'objet au sein du Congrès.
Voici ma réportse Quand j'ai lu dans les jour-1
naux le protocole du 8 avrîî, j'ai cru que ce dQpu_
ment ne tarderait pas m'êlre notifié. Je me suis
occupé aussitôt, malgré lés douloureuses préoccupa
tions au milieu desquellesje me trouvais, préparer
une réponse que j'avais l'intention de communiquer
tous les gouvernements représentés Paris. Cette
lettre est terminée depuis quatre jours; elle est
prête, et s'il m'était permis d'en donner ici lecture,
encore serf ramassait les miettes au festift seigneurial,
jouait maintenant aux dés, vidait gaiement des coupes
de vin de Chio ou de Chypre, risquait aux chances incer
taines de la fortune, sa cuirasse richement damasquinée,
son coursier noir d'Arabifr, aux yeux flamboyans, la
crinière longue, ondoyante. Et tous faisaient ainsi; roi9,
chevaliers, simples hommes d'armes.
Pour mettre une digue cette licence effrenée, on pro
mulgua cette époque au son de la trompe une loi, dont
voici le lr article
,f Sachez qu'il est défendu toute personne de l'armée,
l'exception des chevaliers et des clerçs, de jouer de
m l'argent quelque jeu que ce soif.
Mais les clercs et les chevaliers pourront jouer jus
qu'à perdre vingt sous, et les rois joueront selon leur bon
plaisir.
Les lois en général frappaient le manant elles res
taient aveugles comme la justice devant les désordres de
la noblesse. S«us les hallucinations fantastiques de la
fumée enivrante des vins de Grèce, Gilbert restait plongé
dans ces rêves légers qui mettaient en relief son caractère
noble et généreux. Le vin est la pierre de touche de
l'homme.