JOURNAL D'YPRES ET DE L'ARRONDISSEMENT.
N* 1,509. 10e Année.
Vires acquiriteundo.
§1'.
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Le Progrès parait le Jeudi et le Dimanche. Tout ce qui concerne le journal doit
être adressé l'éditeur, Rue au Beurre. On ne reçoit que les lettres affranchies.
Tpres, 14 Mal.
Les débats de l'adresse la Reine au Parlement
anglais et la discussion de la motion concernant
le traité de Paris la Chambre piémontaise ont
jelé du jour sur le fameux protocole dans lequel
il était question de la Belgique et de la presse
qu'on a qualifiée de belge. Si un courant d'ab
solutisme ne travaillait pas actuellement l'Eu
rope, le manifeste de M. Walewski, l'endroit
de la nation belge, eut été accueilli par un éclat
de rire; car qu'on nous permette de le dire,
après avoir terminé, par un traité, une guerre
qui menaçait, parses proportions, de durer bien
plus longtemps, s'occuper de quelques feuilles
perdues dans l'opinion publique, sans autorité
et nous pouvons même ajouter presque sans
lecteurs, c'est faire beaucoup de bruit pour
rien
Mais tout tend prouver que la presse n'est
que le prétexte de la querelle d'allemand qu'on
nous suscite. La Belgique a le tort, aux yeux
de certains individus, d'être entichée du parle
mentarisme et d'y trouver le moyen d'être gou
vernée avec équité, sous l'empire dès lois, tout
en permettantàla nation d'exercer une influence
prépondérante sûr ses destinées.
Ensuite, en pesant les allégations de M. Wa
lewski, on s'aperçoit bientôt que ses plaintes
mêmes n'ont pas leur raison d'être. Des lois
existent qui sont très-sévères, ainsi que l'a dit
un orateur anglais, en comparant la législation
belge celle qui régit la presse anglaise. La loi
du 20 Décembre 1052, punit d'un emprisonne
ment de trois mois deux ans et d'une amende
de 100 2,000 fr., celui qui,se rendra coupable
d'offenses envers la personne des souverains ou
chefs des gouvernements étrangers. Par l'art. 3,
la poursuite n'aura lieu que sur la demande du
représentant du souverain qui se croira offensé
et cette demande ne sera pas jointe aux pièces
du procès. Il faut ajouter, que suivant l'article
GILBERT ET MATHILDE.
ÉPISODE DU XI* SIÈCLE.
sous les murs d'antiocbe (1097).
(suite.)
Ici la scène change.
Ce n'est plus une mêlée, une boucherie, où l'arme
heurte l'arme, où le vainqueur tombe avec le vaincu, où
parfois au milieu du tumulte des armes, le Sarrasin
frappe le Sarrasin, le Croisé le Croisé, où le sang des
mourants rougit les pieds. Ce n'est plus une mêlée; c'est
une lutte distincte entre chaque homme, ce sont deux
corps qui s'étreignent sur les parapets, ce sont les étin
celles de deux épées qui cherchent doux cœurs où le
fort accable le faible sans craindre la vengeance de son
frère d'armes, où souvent tous deux vont rouler dans le
fossé qui défend la ville, l'imprécation la bouche, se
mesurant encore du regard pour disparaître tous deux
dans l'onde aussi perfide que leur haine.
Et non loin de là les cadavres amoncelés rendaient les
échelles inutiles. Un Sarrasin d'une taille et d'une force
extraordinaires défiait les chrétiens. Malheur l'impru
dent qui affrontait sa colère un quartier de roc lancé
avec force le précipitait dans le gouffre. Les plus valeu
reux avaient succombé; le reste, en proie la terreur la
plus vive, s'abandonnait déjà au découragement le plus
sombre, quand un homme accourt sa vue a ranimé les
plus craintifs.
98 de la Constitution, ce délit doit être jugé
par le jury, comme tous les délits de presse.
Comment se fait-il qu'avant de se plaindre
en Congrès, le gouvernement français n'ait pas
requis l'application de la loi C'était la marche
suivre, d'autant plus qu'une loi identique
existe en Piémontet nous croyons que c'est
également le jury qui doit en connaître. Or,
l'ambassadeur français, M. le duc de Grammont,
a plusieurs fois requis la poursuite d^journaux
qui étaient prévenus du délit d'offense et nous
croyons qu'il eut été sage, avant de menacer,
d'adopter la même ligne de conduite en Bel-
gique.
Mais il y a encore un côté de la question qui
n'a pas été mis en lumière. Le gouvernement
français se plaint de ce que la presse belge ex
cite les passions en France et cependant aucun
des journaux dont la polémique est incriminée,
ne pénètre en France. Aussi toutes les feuilles pa
risiennes qui ne sont pas inspirées par le pou
voir, ont pu répondre avec beaucoup de sens,
que les récriminations contre la presse belge
pouvaient être fondées, mais qu'elles ne pou-i
vaient s'en assurer, puisque l'entrée en France
de ces journaux est prohibée. IL est constant
que de toutes les feuilles qui s'impriment en
Belgique, il n'y en a que trois qui circulent
librement en France le Nord, l'Indépendance
et l'Émancipation.
Voilà donc un gouvernement qui se plaint
d'un état de choses qui ne peut avoir aucune
portée en France, puisque tous les écrits sont
sévèrement repoussés la frontière. Cela ne
ressemble pas mal un pouvoir qui, sous pré
texte qu'il ne veut pas laisser consommer une
marchandise sur son territoire, défendrait
une nation de la fabriquer.
Un gouvernement qui ne trouve appui que
dans la force, est toujours tenté, par la loi
même de son existence, étendre outre mesure
le principe sur lequel il est fondé; c'est un
Déjà sur le mur il défie ce terrible ennemi, et les deux
armées, comme si une force inconnue avait paralisé leurs
bras voués au carnage, cessent de s'entretuer. Elles veulent
être témoins d'une lutte entre deux hommes que l'un et
l'autre parti revendique avec orgueil.
Les infidèles se réjouissent d'une victoire certaine. Les
chrétiens, au contraire, tremblent que leur champion ne
suceombe dans cette épreuve.
L'aheille de son dard aigu blesse le lion dont la colère
est impuissante contre elle. Ainsi fait Gilbert.
Le jeune chrétien reçoit en ce moment, un coup de
cimiterrc avec tant de force, que sa bonne cuirasse de
Milan le sauve seule du trépas. 11 est blessé, et le sang
vient rougir le cuivre étincelant. A cette vue le Sarrasin
est transporté d'pne fureur comme en éprouve le tau
reau^ lorsqu'il voit la banderole écarlatc du tauréador. Il
s'élance, et de ses bras nerveux l'étreignant vivement
Gilbert va succomber.
Un cri de'joie et de douleur frappe l'air. Les chrétiens
se préparent secourir leur frère; quand le Sarrasin et
Gilbert roulent terre. Un seul se relève; l'autre a cessé
de vivre; et Gilbert victorieux, brandit le poignard encore
teint de sang, que le Sarrasin avait reçu dans la gorge
au moment où il croyait remporter la victoire.
Tous les croisés montent aux échelles, plantent la ban
nière du duc de Bouillon en signe de conquête. Mais le
vainqueur, dans l'enivrement du triomphe, oublie la
magnanimité, en étouffant dans son cœur tout sentiment
de miséricorde. De faibles vieillards, de petits enfants,
périssent par le glaive, et ceux qui n'avaient voulu que
se venger des oppresseurs de pieux pélerias, ceux-là
malheur pour les nations, et en somme, un sys
tème de compression, malgré la prospérité ma
térielle, n'a jamais rendu un peuple satisfait.
NousBelgesnous avons été très-heureux
d'être délivrés, après 1815, du règne glorieux
et héroïque, mais oppressif de Napoléon I.
Il paraît que l'estimable M. Coomans, direc
teur de XÉmancipation, continue jouer le
rôle qu'il s'est donné, d'exciter l'empire français
contre sa patrie. Il a même trouvé dans le ré
dacteur de la Patrie de Bruges un aide et un
appui.
C'est une vilaine mission que ces deux nobles
champions du cléricalisme accomplissent avec
une ferveur digne d'un plus beau succès, car jus
qu'ici ils n'ont recueilli que le mépris public et
une flétrissure en plein parlement.
M. Coomans a bien essayé de se régimber
contre la mercuriale de M. Orts, mais il a fait
un fiasco complétai! s'est trouvé applali par les
réponses qui lui ont été faites. D'ordinaire ce
pendant, M. Coomans possède assez d'effron
terie, pour ne pas reculer devant une mauvaise
cause, mais, trahir son pays au profit de l'étran
ger, est une infamie telle,qu'on ne peut l'assu
mer sans plier sous le faix.
M. Coomans est un prôneur de l'ancien régime
et du bon vieux temps. A l'époque brillante des
Flandres, l'époque de la lutte des communes
contre la France, nous avions aussi des traitres
au pays qui venaient en aide l'étranger. On
les stigmatisait de la qualification de Leliaerts,
et ici Ypres même, treize échevins ont été jetés
du haut du Beffroi sur les piques des milices
communales, pour avoir trahi leur devoir. Si
le bon vieux temps pouvait revenir, ainsi que
le désirent les Coomans et les De Mérode, qui
pourrait dire qu'un semblable sort n'atteindrait
pas ces traitres, qui aujourd'hui en sont quittes
pour être conspués.
-a-ai
étaient maintenant les bourreaux des victimes qui n'avaient
pour défense que des larmes.
Une nuée innombrable de Sarrasins cerne tout-à-coup
Antioche; et la faim, spectre livide et décharné, vient
bientôt de ses membres osseux, étreindre les assiégés. Plus
de nobles maintenant, plus de vilains; la nécessité les a
rendus frères.
Dans sa détresse, l'armée invoquait en aide tous ces
grands noms qui d'ordinaire enchaînaient la victoire.
Godefroid de Bouillon! Pierre l'hermite:
Gilbert Becket
Chose inouïe, le nom d'un serf anglais se mêlait ces
cris déchirants.
Mais que pouvait le puissant général sans argent et
sans chevaux? Sa main défaillante n'écartait plus déjà le
froid suaire qui peut-être les envelopperait tous.
Le prêtre, la tête prosternée dans la poussière, couvert
d'un cilice, tâchait par la mortification et la prière,
d'adoucir le châtiment rigoureux du ciel.
Gilbert, seul, persuadé que son sang engendrèra de
nouveaux dévouements, s'avance vers une des portes de
la ville, la fait ouvrir. Que le Seigneur se lève, dit-il, et
que ses ennemis se dispersent, et comme le Siroco, il
vole dans la plaine.
Dieu permet la victoire après l'expiation, mais pour
quoi faut-il que parfois il y ait une larme dans le sourire?
un ver rongeur dans le bouton de rote?
Le Sarrasin fuyait, il est vrai, mais avec lui Gilbert,
qu'une généreuse valeur avait entraîné au milieu de» en
nemis, ou accablé sons le nombre et les blessures, de
vient captif des enfants de Mahomet.