JOURNAL DTPRES ET DE L'ARRONDISSEMENT.
Vires acquirit eundo.
M* 1,377. 1#' Année.
Jeudi, 18 Juin 1836.
LES ÉLECTIONS.
ABONNEMENTS Ypres (franco), par trimestre, 3 francs 50 c. Provinces, 4 francs, f Le Progrès paraît le Jeudi et le Dimanche. Tout ce qui concerne lejournal doit
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adressé l'éditeur, Rue au Beurre. On ne reçoit que les lettres affranchies.
lia.
Mardi soir, nous avions déjà reçu des nou
velles du résultat des élections de Gand, de
Mons, de Tournai et d'Alh et nous savions que
le libéralisme y a été battu. Nous ne nous plai
gnons pas, nous constatons simplement que les
candidats libéraux ont échoué devant ces col
lèges électoraux.
Nous félicitons la Belgique de «e, trouver la
veille, par l'issue des élections, de sortir d'une
situation amphibie et énervante. Ce n'est pas le
moyen qu'à notre sens, les électeurs eussent dû
choisir. Faire un demi-tour vers l'ancien régime,
nous amènera dans un temps donné une se
cousse, qui sera peut-être douloureuse et qu'il
eut élé sage d'éviter en la prévoyant.
Mais les peuples comme les individussouffrent
quelquefois d'affections morbides et la nation
Belge est dans une de ces situations pleines
d'angoisses. Elle tourne le dos aux hommes qui
lui veulent du bien et qui en ont beaucoup fait,
pour se jeter entre les bras d'une fraction qui
la pressurera et l'exploitera sans merci et sans
pitié, comme .Tartufe, la plus grande gloire
de la religion.
Du reste, la Belgique est bien libre, si cela
lui sourit, de savourer les douceurs de la poli
tique réactionnaire. Cest une fantaisie qui
pourra lui coûter cher, mais enfin si c'est son
goût, elle peut se la procurer. Elle a bien le
droit de se laisser mystifier par des jongleurs
religieux qui tiendront liesse et bonne chère
ses dépens et si elle se plaint plus tard, elle
pourra se dire elle-même lu l'as voulu,
Georges Dandin
C'est une dégradation morale pour la cité
d'Artevelde et de Charles-Quint, que le résultat
des élections du 10 Juin 1856. Elire trois traî
tres, trois transfuges et quatre illustres incon
nus. quel soufflet donné la moralité publique!
soufflet d'autant plus caractéristique, que.c'est
le parti moral et honnête qui a manigancé ce
résultat, l'évêque en tête, commandant ses
bandes religieuses fanatisées dans les congréga
tions et les sociétés de S1 Vincent de Paul.
La ville de Gand, si elle ne parvient pas
secouer au plutôt le joug clérical, doit décliner
infailliblement. Là où le moine règne, le travail
s'enfuit et il ne reste place que pour la misère.
C'est elle voir, si elle veut déchoir de s.Qn
rang de ville industrielle, pour devenir une né
cropole peuplée de mendihnls.
IE NIEILLEFB A1II.
Le 15 octobre dernier,,un petit vieillard, couvert de
sueur et de poussière, entra précipitamment dans l'hôtel
des Quatre-Nations, vue Louis-le-Grand, 42.
Monsieur de Corvclles, demanda-t-il au maître de
l'hôtel.
- A cette question, le maître d'hôtel fixa sur le vieillard
un regard hébété que celui-ci, du reste, lui rendit avec
usure
Monsieur de Corvclles? répondit-il.
Puis se retournant vers sa femme, occupée en ce mo
ment porter quelques écritures sur son registre
Est-ce que ce n'est pas le jeune homme qui arrive
de Bordeaux Eh oui, sans doute, répondit l'hôtesse.
Eli bien, monsieur, reprit le maître de la maison,
Voyez l'escalier A, n* 8.
A ces mots, le vieillard fit un demi-tour, chercha des
yeux l'escalier A, et le franchit tout d'un# baleine jus
qu'au n° 8, situé, il est vrai, au premier. La porte étant
ouverte, il entra; mais l'appartement était vide; du
moins il ne s'y trouvàit que quelques valises et un do
mestique qui s'efforçait de mettre un peu d'ordre dans
les bagages de son mailre. v
t— Monsieur de Corvclles, demanda le "vieillard pour
la seconde fois. Monsieur, il vient de sortir. Com
ment! Il vient de sortir! 11 arrive l'instant même... Et,
tenez, tenez, voilà encore sa voiture dans la cour.
Nous reproduisons ici un remarquable article
du Jôurnal de Liègequi pourra servir de pro
gramme au gouvernement clérical pur, que les
nouvelles élections feront surgir. Les électeurs
qui ont eu la bonté de voler ea faveur de la
réaction, pourront pressentir le sort qui sera
fait la Belgique, s'ils n'ont pas eu la perspi
cacité de discerner les conséquences de leur
conduite.
Où allons-nous? Le vieux monde, qui s'est
écroulé dans l'épouvantable cataclysme du dernier
siècle, renaît de ses cendres. La société nouvelle qui
en est sortie, fière de son intelligence, fière de son
émancipation si laborieusement conquise, est me
nacée dans son existence par les débits du passé qui
se rassemblent et s'adjoignent des éléments nou
veaux. Elleétale encore avec orgueil son organisation
sociale, fondée sur l'égalité absolue des citoyens
devant la loi; son organisation politique, qui admet
toutes les libertés compatibles avec l'ordre public,
avec le respect des personnes et des propriétés; son
organisation judiciaire, qui repose sur des codes qui
sont enviés par toutes les nations du monde; son
organisation administrative qui a fait succéder l'or
dre au désordre, la clarté l'obscurité, la responsa
bilité de ses agens l'arbitraire vexatoire, la publi
cation aux secrètes menées.
Etcependant celte société toute-puissante encore
sent qu'elle est minée sourdement, que ses ennemis
conspirent contre elle. Elle avait fait prévaloir des
principes larges et féconds qui comportaient tous
les progrès, favorisaient l'éclosion de tous les-germes
de perfectibilité déposés dans le cerveau humain.
Ces principes sont attaqués comme mauvais, détes
tables; on exalte ceux qui fesaient la base de l*an-
C'est possible; mais peine descendu, M. do Corvelles a
passé un habit et envoyé chercher une citadine. Sa-
crédié! s'écria l'inconnu consterné de sa mauvaise chance.
Et il reàta un moment anéanti, sans prendre garde
même la sueur abondante qui ruisselait sur son front.
Enfin, après quelques minutes de recueillement
Monsieur de Corvelles tardera-t-il beaucoup ren
trer? Je ne sais pas, monsieur; il ne m'a rien dit.
Allons, c'est bien; je repasserai. Si monsieur veut me
dire son nom... C'est inutile; dites seulement M.
de Corvelles que son meilleur ami est venu pour le voir.
A peine le petit vieillard fut-il parti, que M. de Cor
vclles rentra dans son appartement.
Victor de Corvelles était un homme d'une trentaine
d'années. Maitre de sa fortune dès l'âge de vingt ans, il
l'avait eue bientôt absorbée dans les plaisirs ruineux que
là capitale offre aux jeunes gens privés de la tutelle et
des conseils de leur famille. Après avoir mangé son bien,
Victor fit comme tant d'éccrvelés, il se mit manger le
bien des autres, et emprunta des sommes énormes. Ces
dettes étaient', la vérité, justifiées en partie par l'espoir
qu'il avait d'hériter d'un oncle retiré du monde cianS
quelque bruyère de la Bourgogne; mais enfin cet oncle
n était pas môrt, et pouvait disposer de ses richesses en
vers toutautre que son trop confiant neveu. Ces réflexions
finirent bientôt par poursuivre tellement M. de Corvelles,
que; dans le but de se distraire, il forma le dessein de
voyager. Un beau matiD, il partit donc sans prévenir
cienne société. L'égalité civile est contraire aux droits
du clergé, qui doit intervenir dans le gouvernement
de la société, titre d'autorité, que l'on a injuste
ment exclu de l'administration de la bienfaisance,
de la direction de l'instruction publique; qui doit
non-seulement avoir l'autorité absolue dans les af
faires du culte, mais qui doit aussi être officiellement
consulté dans les affaires mixtes.La libertédeia presse
est une concession forcée due aux exigences de cir
constances malheureuses; la liberté des cultes doit
être entendue dans ce sens que !e culte de la majo
rité soit respecté, protégé au détriment des autres-
Nous avons unegrande fraction de nos chambres
législatives qui professe cette opinion sur les dangers
des institutions belges interprétées dans le sens des
idées modernes. Nous avons des électeurs oublieux
des bienfaits que ces institutions leur ont procuré»,
i et qui seraient tout disposés augmenter le nombre
de leurs adversaires.
Où allons-nous? Les grossières superstitions
populaires, disparues avec les corporations reli
gieuses qui les propagaienl, sont revenues avec elles.
Le clergé séculier, plus instruit, plus tolérant, parce
qu'il vit au milieu des populations dont l'affection
j aide l'exercice de son ministère sacré, voit ses
églises désertées, les aumônes diminuer, ses péni
tents assiéger les confessionnaux des jésuites, et il
doit suivre le torrent, s'il ne veut passer pour tiède,
pour mauvais pasteur, pour indifférent peut-être.
On envoiedesespions aux leçons des professeurs
de l'État pour surveiller leurs doctrines, inscrire un
mot malsonnant, un gesle, le mouvement des yeux,
le plissement des lèvres, pour noter tout et en dres
ser un acte d'accusation afin d'intimider le profes
seur et de discréditer l'établissement.
Un ministre de la justice, chargé de l'exécution
des lois, enlève aux administrations communales la
police des cimetières, que la loi leur attribue, et la
I transporte au ministre du culte qui n'y a aucun
droit. Sur la dénonciation de celui-ci, il ordonnera
de déterrer un cadavre et de le jeter la voirie.
Des représentants, dans une Chambre iégislativè,
gourmanderout un ministre parce qu'il voudra faire
payer des impôts des religieuses, qui exercent une
industrie, dont elles ont la communauté et les pro
fits, sous prétexte que l'égalité devant la loi n'existe
pas pour elles.
Le gouvernement propose une loi qui va désor
ganiser les administrations publiques de bienfai-
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personne et parcourut successivement les principaux états
de l'Europe. Deux ans après il rentrait eu France par les
Pyrénées. Barèges était en ce moment le centre de réu
nion d'un grand notnbrc d'étrangers; il en était venu de
tous les points du globe et notamment de Paris, ce grand
lac providentiel qui déborde chaque matin.au printemps,
et court retremper, au contact du bon goût et des bonnes
manières, les esprits naturellement arides et rétifs de la
province. Victor résolut d'y passer la saison des eaux;
mais, de tous les logements abandonnés par les habitants
aux hôtes que la goutte, la mode et le spleen leur avaient
envoyés cette année, il ne restait plus qu'une misérable
mansarde, située l'extrémité de la ville; néanmoins
notre voyageùr y fit monter un lit et s'en empara. Un
jour, pendant une de ses courses dans les Pyrénées, il
rencontra sur sa route deux promeneurs amenés sans
doute par Une curiosité semblable la sienne. L'un était
un homme d'une cinquantaine d'années; son œil dur et
profond témoignait d'une rigidité de principes toute
épreuve ses lèvres fines et pincées trahissaient ce carac
tère froid et réservé qui appartient en propre aux gens
versés dans les affaires d'argent ou dans les spéculations
commerciales; enfin ses grosses joues vermeilles et son
ventre rebondi annonçaient une opulence incontestable,
et il les portail avec ostentation, comme s'il se fût enor
gueilli des procédés qui les avaient bouffis;.c'était n'en
pas douter, un homme riche, un homme de commerce.
L'autre était une jeuno fille; en juger par la souplesse
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