JOURNAL «D'YPRES ET DE L'ARRONDISSEMENT.
H° 1,616. 16° Année
Dimanche, 26 Octobre 1856.
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Ypres, Î5 Octobre.
Il est incroyable qu'au dix-neuvième siècle,
il existe des pays civilisés en Europe, où l'in
quisition, cette hideuse institution du fanatisme
théocratique, fonctionne encore. Est-il possible
de s'imaginer qu'en Italie, cet Eldorado d'après
les prêtres qui sucent la moëlle et le sang du
peuple italien, l'inquisition existe encore dans
toute sa splendeur! Les journaux viennent de
reproduire un édit général du S1 Office qui dé
peint l'administration des Etats-Romains. Cette
pièce curieuse paraît être un grimoire déterré
de l'époque de la barbarie, si elle n'était impri
mée en 1856, Pesaro. par Annesio Nobtli.
Le révérend Thomas-Vincent Àiraldi, inqui
siteur général, en exécution de la charge qu'il
occupe, ordonne et encourage la délation, sous
peine d'excommunication di lala sentenza,
l'endroit des hérétiques, suspects, sorciers, magi
ciens, nécromanciens, blasphémateurs, bigames,
écrivains satyriques, etC.
En prenant connaissance de ce document qui
ne peut être nié, on est étonné de l'imbécilité
de ces prêtres orgueilleux, moins que leur
fourberie ne soil égale leur perversité. Un
moine inquisiteur général, s'avise gravement de
poursuivre des gens sous prétexte de magie et
de nécromanciedans un édit émanant d'un
tribunal secret et dont la monstruosité n'a ja
mais pu être dissimulée, et un peuple se trouve
soumis de semblables pratiques de la part de
ses fonctionnaires - religieux Comment! des
prêtres qui sont censés avoir reçu de l'instruc
tion jusqu'à un certain point, disent croire la
magie et la nécromanciesérieusement et
sans rire
Ce trait seul démontre l'évidence le degré
de stupidité que gouvernants et gouvernés ont
atteints, moins toutefois que ce ne soit de la
part des premiers, une tactique où la fourberie
le dispute l'immoralité. Nous penchons
admettre l'exactitude de cette appréciation,car
il nous est impossible de croire que le pape et
les cardinaux soient affectés de crétinisme tel
point, qu'ils ajoutent encore croyance aux pra
tiques de la magie et de la nécromancie!
Lettre MM. le» évêques de Bruges et de
Gand, par nn homme qui les évêques
n'ont point ouvert la bonche, mais qni
lui-même a on vert les yeux sur leurs
œuvres.
Resté, jusqu'à co jour, spectateur attentif mais
silencieux devant la parole menaçante sortie de vos
bouches, l'aspect de vos bras armés des foudres
prêts tomber sur les institutions non soumises et
votre autorité, nous descendons dans l'arène où s'ac
complit la lutte, abri de mieux voir et peser de quel
côtédes combattants s'incline le sceptre delà justice.
Examinons d'abord, MM. les évêques, de quel
droit vous vous autorisez lancer des aualhèmes
sur ce qui n'est pas votre héritage.
Vous vous dîtes les ministres de Pierre exerçant
son pouvoir devant le peuple, l'instruisant de la
doctrine évangélique; vous vous dites seul et exclu
sivement autorisés exercer ce ministère; ceci,
MM., mérite que l'on s'arrête un instant. En effet,
Pierre fut établi ministre du Christ qui lui donna la
garde de sa vigne, la force de la terre, il en fut
nommé le gardien, c'est-à-dire le dragou; mais si
Pierre reçut la vigne, partie matérielle de la robe
de Joseph, niez-vous que Paul aussi fut établi mi
nistre de Jésus, non des choses matérielles mais des
choses de l'esprit? Car Paul fut établi chef de ses
frères,du peuple d'Israël, afin de les conduire et les
éclairer pendant leur esclavage en Babylone, c'est-
à-dire les hommes vivant selon l'esprit opprimés
par les hommes vivant selon la chair; les prophètes
jusqu'à ce q
leur de ses frères.
Vous n'ignorez pas, MM., que Pierre, évêque,.
c'est-à-dire roi léguant sur l'intelligence, évêque
de Babylone, reçut de son maître la (orce de la
droite, force du corps, le vin, la vigne partie maté
rielle du corps de J.-C.; le tronc dout la tête fut
tranchée; force figurée par Nabuchodonosor et sa
ville, cercle assis sur les eaux du savoir, sceptre
créé par Dieu pour vanner son peuple Israël, pour
le presser comme le raisin, afin que la terre rende
tout l'esprit qu'elle reuferine et que le peuple élu
soit régénéré sous ce sceptre formidable, cet arbre
vu par Daniel qui abrite les honnîtes, les oiseaux et
les bêtes sauvages. Nous savons que celte force doit
peser sur Israël jusqu'à ce que. Tobie vienne lui
ouvrir les yeux, jusqu'à ce que vienne Cyrus, la
vraie doctrine, le Messie attendu', fils de Joseph,
Christ spirituel, fond de la boîte de Pandore, dans
le sens parabolique et mystique de l'évangile, dont
l'interprétation matérielle mal que renferme la
boite,a enfanté l'Ante-Christ, la bête deux cornes
que nous enseigne la doctrine des jésuites, un Bac-
chus indien, non un Christ fils du ciel, émanation
du verbe conçu dans les prophètes, le fond des
paraboles, l'espérance de la boîte de Pandore; cet
époux qui apparaît dans une parabole, comme der
rière un treillis^avauçant les mains vers son épouse,
un Dieu que la matière- ne peut sentir, mais que
l'esprit conçoit.
Oui, MM., nous reconnaissons au pape de la terre,
c'est-à-dire au savant parmi les savants, le droit
d'exercer le pouvoir qu'il tient de la droite; oui,
nous reconnaissons Pierre en ses ministres les doc
teurs et savants enseignant la doctrine de Pierre
dans la force de la droite des planètes églises; mais
côté de Pierre marche Paul, la gauche est sa part,
c'est-à-dire qu'il continue l'œuvre d'Hermès, d'Ho
mère, de Virgile, d'Ovide, et surtout d'Horatius
Flaccus, il y infiltre cet esprit régénérateur qui tend
ouvrir les yeux, il continue cette œuvre en Dante,
Tasse, etc., et surtout en Cats, vrai voile du temple.
Mais prétendez-vous, MM. les docteurs en Baby
lone, que le peuple esclave, pour avoir demandé la
tête de Jean, c'est-à-dire la mort des prophètes et
des choses spirituelles, l'anéantissement d'une des
deux colonnes du temple, renie son Dieu et vous
suive? Voyez plutôt ce qu'ont fait les Ézéchiel, les
Daniel et autres Israélites semblables pendant que
la multitude adorait le roi en sa doctrine, sa statue
de bronze, ces hommes ne cessèrent d'enseigner
leurs frères, par une doctrine toute spirituelle, leur
montrant les mervelllesdu Dieu des visions célestes.
Puisque vous vous dites prêtres de Pierre, .nous
vous reconnaissons le droit d'enseigner sa doctrine,
d'ordonner au peuple des jeûnes, de lui prescrire
les mets aliments du corps; de lui donner baiser
vos mains comme vos reliques d'ossements de mort;
de lui donner des cilices, des cordes pour se frapper
le corps; de lui commander de se vêtir d'étoffes
grossières, de mettre une chaussure ou de n'en
point mettre, mais aux hommes de l'esprit laissez
les choses de l'esprit et si parmi eux quelques-uns
touchent votre arche, parce qu'ils ont faim de la
vérité, que criez-vous si fort, vous ne pouvez pas
iguorer ce que fil David lorsque la iaim le pressa;
mais vous êtes semblables aux Pharisiens qui ne
voulurent point que le peuple s'instruisàt.
Pourquoi ne donnez-vous de trêve cette guerre
d'extermination, tout ce qui ose lever la tête,
tout ce qui ne traîne point, le front courbé, dans la
poussière, rampant comme des reptiles Que de fils
ne donnâtes-vous Joseph! En pervertissant les
rangs de Juda, ou du inoins en attirant dans vos
pièges les circoncis selon la chair, non selon l'esprit,
vrais enfants de Ruben, qui vous tendaient la main
et leurs œuvres contre des pièces d'argent et une
couronne de béat, pourvu qu'ils boivent dans votre
coupe, pourvu qu'ils aident votre œuvre extermina
trice et l'élévation d'un Bacchus. indien, le Christ de
vos désirs.
Depuis le Dante et bien avant lui, le monde ne
vit-il pas les saints voués tous les tourments de
l'esprit que nul bûcher ou glàive tranchant ne peut
faire endurer? Si vous ne craignez la ruine de votre
temple mal affermi, qu'enviez-vous aux prêtres du
Christ-Esprit Vous avez des palais vous loger, ils
ne savent souvent où s'abriter; vous avez des appar
tements resplendissants, des lits moelleux, ils n'ont
souvent où reposer la tête; vous avez des chevaux,
des carosses, on vous salue dans le* rues, au festin
vous avez les premières place*.; eux soqL souvent la
risée du peuple, parce qu'ils lui font voir la voie du
salut.
MM., quoique vous fassiez, vous n'oterez rien 2
Paul, ni vous n'ajouterez rien Pierre. Paul a sa
croix et son baptême, Pierre a la sienne et son bap
tême. Le Christ de Paul est un bélier couvert de
laine, le Christ de Pierre est un houe couvert de
poils. La croix de Paul est une croix spirituelle et
son baptême est une vie d'un labeur féçond, dont
'■"s eaux vivifient l'âme; Pierre a sa croix de boi» et
les œuvres de la matière. Pierre se couvre d'un
cilice, Paul porte autour des reins la ceinture d'Ëlie,
couverte de caractères et d'énigmes. Pierre n'est
que matière, Paul est le voile du temple couvert de
léçonsde nioralesavammeut rassemblées en énigmes
paraboliques, données deviner au'peûple ami du
Nazaréen, qui donne une tunique celui qui sait
délier l'énigme.
Pierre a-t-il jamais méconnu la mission de Paul?
Loin de là, il a exalté sa science profonde dans les
choses mystérieuses. Si Pierre est le grand arbre,
Paul est cet aigle qui porte dans l'espace le lion de
Juda, pour lui montrer les merveilles de l'œuvre
du grand architecte. Oui, Pierre n'est que matière;
c'est de lui que parla Jean-feaptiste, lorsqu'il dit,
parlant du Messie Lui est d'en haut, moi je suis
d'en bas lui doit croître, moi je dois diminuer. Si
Pie i re doit décroître,pourquoi vous, qui vous dites
de Pierre, courez-vous sur toute la terre, frappant
de vos cornes comme le tison d'Esaii? Celui qui se
dit d'une torce, tait les œuvres de celte même force,
et vous vous faiLes les œuvres de Balthazar, car vous
buvez dans les vases et vous les profanez; touls
œuvre qui.n'est pas la vôtre, reçoit votre aualhème
depuis Hermès, Homère, jusqu'à Virgile, nul des
grands génies ne reçut de vous son salaire, jusqu'au
Deucalion d'Ovide, pour avoir euionfiance en la
hauteur de la montagne, des poètes contre les eaux
de l'abîme, fut compté au nombre des victimes prêts
périr dans la croisade récente que leur livrent le»
évêques.
Frappez, MM., de vos cornes tout ce qui vous
résiste, soil que vpus agissiez par ruse ou par hypo
crisie. Chloé vôus reconnaît S la forme de vos
oreilles; la peau qui vous couvre ne saura la sé
duire. Vous aurez la récompense de votre œuvre,
lorsque les deux amants seront réunis, qu'ils auront
ouvert les yeux et qu'ils seront guéris de leur lan
gueur, alors ils seront comme les deux colonnes du
temple ou comme Ruth et Booz. Alors dans votr»