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JOURNAL D'YPRES ET DE L'ARRONDISSEMENT.
N0' 1,844-1,845. - 18e Année.
Jeudi, 6 Janvier 1859
Vires acquirit eundo.
UN HERITAGE.
Chronique politique.
LE PIOCIES
«T"
A BONNEMEHTS Y en es (franco), par trimestre, 5 francs SOc. Provinces, 4 francs. Le Progrès paraît le Jeudi et le Dimanche. Tout ce qui concerne le journal doit
INSER TIONS Annonces, la ligne 15 centimes. Réclames, la ligne 50 centimes. être adressé l'éditeur, Rue au Beurre. On ne reçoit que les lettres affranchies.
Tract, 5 Janvier.
Les obsèques de M. De Patin ont eu lieu
Jeudi dernier, au milieu d'un immense con
cours de personnes, qui de tous les points de
l'arrondissement d'Ypres, sont venues rendre
un dernier hommage au magistrat intègre,
l'homme probe et loyal, au fonctionnaire actif
et zélé. Parmi les assistants, on comptait tous
les bourgmestres, tous les notaires, tous les
notables de nos environs. M. De Page, premier
président de la Cour d'appel, dont l'amitié pour
le défunt avait pris naissance sur les bancs de
l'école de droit de Bruxellesassistait cette
triste cérémonie.
Let coins du poêle étaient portés par M.
Biebuyck, président du tribunal, M. Ivveins,
substitut, M. Carpenlier, avocat, membre de
la commission administrative de l'Institution
royale de Messines, et M. Mulle, marguillier de
la collégiale de S1 Martin.
La vaste nef de notre belle église pouvait
peine contenir tous les assistants. L'offrande a
duré plus d'une demi heure, et après l'absoute,
le cortège s'est reformé pour conduire les dé
pouilles mortelles de M. De Patin au champ du
repos éternel.
Après le beau-fils, M. Vercruysse, qui con
duisait le deuil, venaient les membres du tri
bunal, du barreau, la commission de l'Hospice
de Messines, et une quantité de personnes de
la ville et de l'arrondissement qui avaient tenu
témoigner par leur présence, combien était re
grettable la perte douloureuse qu'on venait de
faire.
Au cimetière, au moment de descendre le
cercueil dans le caveau de la famille De Patin,
des discours ont été prononcés qui tous étaient
.l'expression du sentiment public, en déplorant,
en très-bons termes, la fin prématurée de M.
De Patin. M. le juge Sartel s'est exprimé au nom
du Tribunal, M. le substitut Iweins, au nom
du parquet, M. le représentant Alph. Yanden
Peereboom, au nom de la commission de l'Insli-
IX. SP1EGEL A FRANZ BUtLER.
(Suite.)
Mullcr, qui d'abord s'était réjoui de l'arrivée de Fré
déric, et ne voyait en lui qu'un joyeux compagnon
capable de distraire sa femme et d'amuser ses enfants,
avait fini par s'alarmer de ses visites fréquentes et pro
longées. A toutes les tortures qu'il endurait était venu
s'ajouter le supplice de la jalousie. Étonné, honteux des
sourdes inquiétudes qui l'agitaient, n'osant s'avouer
lui-même la nature de ses souffrances, n'osant donner
un nom au trouble de son cœur, sa douleur était d'au
tant plus vive, d'autant plus cuisante, qu'il la contenait,
qu'il la cachait avec plus d'obstination. Pouvait-ilsans
folie, la laisser éclater? Quel reproche adresser Édith,
dont la sérénité défiait tous les soupçons, Frédéric,
dont l'attitude était tout simplement affectueuse La
jalousie ne savait où se prendre, et pourtant Muller était
jaloux. Son humeur s'aigrissait de plus en plus. A l'heure
même où, pour conjurer le danger, il aurait dû redou
bler de prévenance, d'affabilité, de tendresse, il se mon
trait sombre, et parfois même bourru. Aveuglé par
l'inquiétude que la raison condamnait, laquelle son
faible cœur obéissait en esclave, il faisait de sa conduite
un perpétuel contre-sens. Plus d'une fois, il s'était dé
cidé éconduirc Frédéric, le congédier, lui fermer
tulion royale de Messines, M. l'avocat Bossaerl,
au nom du barreau. Enfin un élève de l'aca
démie de dessin, au nom de ses compagnons a
dit un dernier adieu M. De Patin, qui était
un des zélés prolecteurs de celte institution.
Samedi, !i l'occasion du renouvellement de l'an
née, Sa Majesté et l.L. AA. RII. II. Monseigneur le
duc de Brabant et Madame la duchesse de Bra-
bant, et S. A. R. Monseigneur le comte de Flandre
ont reçu successivement le corps diplomatique,
les députations du Sénat et de la Chambre des
représentants, la Cour de cassation, la Cour des
comptes, la Cour d'appel, la Cdnr militaire, le Con
seil des mines, l'Académie royale des sciences, des
lettres et des beaux-arts, l'Académie royale de mé
decine, les fonctionnaires supérieurs des ministères
de l'intérieur, de la justice, des affaires étrangères,
des finances et des travaux publics, le gouverneur
et les directeurs de la Banque nationale, les direc
teurs de la Société Générale pour favoriser l'in
dustrie nationale, le gouverneur du Brabant, la
députation permanente de la province et le com
missaire d'arrondissement, le tribunal de première
instance, la commission médicale de la province, le
bourgmestre et le Conseil communal de Bruxelles,
le tribunal de commerce, le^ lergé catholique de
Bruxelles, le consistoire de l'église évangelique, le
grand rabbin et le consistoire israélile, le Conseil
général de l'administration des Hospices et Secours,
la chambre de commerce, le directeur et les admi
nistrateurs de la Banque de Belgique, le Conseil
d'administration de l'Université de Bruxelles, la
société royale de Philanthropie, la société centrale
d'agriculture, les états-majors et les officiers de la
garde civique et de l'armée.
MM. les ministres et les grands officiers de la
maison royale, les officiers des maisons de LL. AA.
RR. assistaient la réception.
A a heures et demie ont été reçues les personnes
présentées. (Moniteur.)
On 30 Décembre an 5 Janvier inclus.
Le pays apprendra avec bonheur que Mm° la du
chesse de Brabant se trouve dans un état qui donne
de nouvelles espérances pour l'avenir de notre dy
nastie.
sa porte; mais de quel prétexte s'autoriser pour se
porter cette extrémité N'était-ce pas outrager Edith
Mieux valait cent fois mourir en silence. D'ailleurs, Fré
déric une fois congédié, Muller eût-il retrouvé le repos?
Cet hôte funeste n'était-il pas établi au château ehez ses
tantes Ne tenait-il pas de la volonté du comte Sigis-
mond le droit de traverser selon sa fantaisie le parc et le
domaine d'Hildeshcim Ne pouvaient-ils pas, elle et lui,
se rencontrer tous les jours, toute heure se rencon
trer dans la campagne, l'ombre des forêts Pour im
poser silence au démon de la jalousie, ne faudrait-il pas
bientôt défendre Edith de franchir le seuil de sa
porte A la seule pensée d'une telle défense, le cœur
de l'infortuné se soulevait et retombait dans toutes ses
perplexités.
Ainsi tout s'assombrissait autour de Franz, tout sem
blait conspirer autour de lui. Les Bildmann et les Slol-
zcnfels se montraient plus impertinents que jamais. En
abattant la baie des deux enclos, Muller n'avait rien
gagné. Chaque fois qu'un rayon de soleil venait égayer
l'horizon, s'il lui prenait fantaisie de descendre au parc,
il était sûr de rencontrer le major, Dorothée, Isaac ou
les vieilles filles. Il en élait regretter les deux enclos
qu'il avait détruits et qui du moins dérobaient sa vue
ces hôtes importuns. Frédéric, toujours assidu, passait
près d'Edith la meilleure partie de son temps. Ulrique et
Edwig, loin de se sentir blessées dans leur orgueil en
voyant leur neveu hanter ces petites gens, éclairées par
Les nouvelles politiques aujourd'hui sont insi
gnifiantes. Aucun incident ne «'est produit dans les
événements de Servie.
On se borne dire que la révolution accompliedana
ce pays est ratifiée par l'enthousiasme populaire,
et que très-probablement la diplomatie ne changera
rien ce qui a été décidé par l'assemblée nationale.
Des dépêches ont été expédiées le a4 du départe
ment de la guerre, Vienne, au comte Coronini,
commandant en chef des forces autrichiennes dans
la Carinthie et le Temeswar, pour lui prescrire
d'exercer la plus rigoureuse surveillance sur les
frontières de la Servie et de repousser par la force
toute tentative que les habitants pourraient faire
pour les franchir.
La situation continue d'être fort troublée dans
les régions officielles Constantinople. Les ministres
ont entre eux dans le sein du Divan, les discussions
les pins violentes. Chacun d'eux est le partisan de
l'une ou l'autre puissance européenne, et le temps
qui échappe aux querelles d'influences est consacré
la recherche des moyens de payer les dettes de la
Cour. Une pareille situation, aggravée par les désor
dres de tous genres qui éclatent aux quatre coins de
l'Empire, est de moins en moins rassurante pour
l'Earope.
La Presse d'Orient contient une correspondance
de Smyrne assez singulière. Quelques chefs arabes
s'étaient révoltés en Syrie. On les a pris et tués.
Leurs têtes ont été envoyées au pacha turc, propre
ment empaquetlées et conservées dans du sel.
Le Congrès des députés d'Espagne a terminé la
discussion de l'Adresse en réponse au discours du
Trône, qui a été votée par 186 voix contre 32.
On sait qu'un soulèvement éclaté parmi les
peuplades arabes de l'Algérie. On assure que ce
mouvement a pris des proportions très-sérieuses et
qu'il a été fomenté par le Maroc. Si nos renseigne
ments sont exacts cette révolte ne serait pas désa
gréable au gouvernement français, qui y verrait un
excellent emploi pour l'enthousiasme belliqueux de
de ses troupes, que des excitations de tout genre
ont porté un degré extraordinaire.
La Chambre des députés du grand-duché de
Luxembourg est en guerre ouverte avec les ministres
la réflexion ou plutôt par l'instinct de la méchanceté,
sans lui demander ses projets, l'encourageaient dans son
entreprise. Ne pouvant supposer qu'il fût sérieusement
épris, elles s'offorçnicnt d'irriter sa vanité elles lui re
présentaient combien il serait humiliant pour un officier
de si bonne mine de ne pas triompher d'une petite bour
geoise dont la vertu ne s'était pas toujours montrée si
farouche. Enfin, pour justifier les soupçons injurieux
qu'elles avaient accrédités dans le pays, elles auraient vu
avec joie Frédéric réussir auprès d'Edith la perdre dans
l'opinion, la perdre sans retour, sans espoir de réhabili
tation, élait leur vœu le plus cher, le rêve de toutes
leurs journées, le sujet de tous leurs entretiens.
Pourtant, dans les moments que j'appellerai lucides,
MuHer reprenait courage et se disait que ses inquiétudes
n'auraient qu'un temps et sans doute touchaient leur
terme. Frédéric ne resterait pas toujours au château, son
régiment s'éloignerait le printemps venu, Édith quit
terait Hildcshcim et retournerait Munich. Là, pendant
les trois mois qu'ils passeraient près de Spicgel, ils re
trouveraient leur sérénité. Tous ces maudits procès, qui
se multipliaient, s'enchevêtraient l'un dans l'autre, de
vaient s'évanouir devant une volonté énergique. Et puis,
les Stolzenfels et les Bildmann n'étaient pas éternels le
château, une fois délivré do ces hôtes tracassiers, serait
pour Hernrann et Marguerite un magnifique héritage.
Alors se réveillaient dans l'âme de Muller toutes les espé
rances, tous les rêves qu'il avait caressés pendant si