JOURNAL D'YPRES ET DE L'ARRONDISSEMENT.
J*° 1,988. - 19' Année.
Dimanche, 27 Novembre 1859.
Vires acquiritcundo.
UN HEUREUX ACCIDENT.
PROCRES,
"*tf
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1NSER flONS Annonces, la ligne 15 centimes. Réclames, la ligne 30 centimes. être adressé l'éditeur, Rue au Beurre. On ne reçoit que les lettres affranchies.
Tpkes, 36 Novembre.
Plusieurs amis de M. le colonel De Bruyn,
et il en a beaucoup, ont résolu de lui offrir un
banquet, en témoignage d'estime et de recon
naissance pour tout le bien qu'il a fait la ville
d Ypres, pendant le temps qu'il en a été le
commandant d'armes et en même temps pour
constater, par une manifestation publique, com
bien M. De Bruyn jouissait de la sympathie
générale, aequise par un caractère bienveillant
et une équité bien reconnue.
Le rage de la presse cléricale est poussée
son comble par le vote de la commission qui
conclut l'annulation des élections de Louvain.
Ce résultat est déplorable pour ce parti et sur
tout pour ses journaux, qui depuis plus d'un
mois ont cherché s'emparer de l'opinion pu
blique, la fausser, en donnant de faux pro
cès-verbaux des séances, en tronquant les dépo
sitions des témoins et en poussant l'impudeur
jusqu'à préjuger le jugement de la majorité, ce
jugement devant, quels que soient les données
de l'instruction, condamner les élus de Louvain.
Il faut avoir, on en conviendra, bien peu de
confiance dans la justice de sa cause; il faut
être bien persuadé que la corruption et la fraude
sont patentes pour recourir des moyens aussi
indignes.
Quoiqu'il en soit, la Chambre aura bientôt
se prononcer sur le rapport de la commission
d'enquête; la discussion sera vive si la droite
apporte sur le terrain parlementaire les passions
de sa presse.
Si les faits de corruption sont évidents, la
Chambre, en rejetant les membres élus, fera
un acte de sévère justice, qui rendra plus évi
dente encore la nécessité d'une réforme électo
rale; car il ne serait pas bon que des faits sem
blables ceux dont la commission a eu con
naître, se renouvelassent souvent, il vaut mieux
les empêcher, les rendre impossibles que d avoir
les réprimer. Journal de Bruget.)
Il y a quelque temps, nous mettions sous les
yeux de nos lecteurs un document pontifical
concernant la béatification de Benoit-Joseph
Labre qui vivait, au siècle dernier, aux environs
d'Arras. Sans intervenir dans une question de
culte laquelle la presse politique doit rester
étrangère, nous nous bornâmes mettre en
relief les passages de ce document où il était
dit que Labre devait être rangé au nombre des
saints, parce qu'il avait pratiqué la mendicité et
donné dans celle profession toute spéciale
l'exemple des plus grandes vertus par l'abjec
tion même de l'existence qu'il avait adoptée.
Nous trouvons aujourd'hui dans Y U nivers quel
ques lignes que nous croyons utile de citer,
parce qu'elles montrent quelles contradictions
la presse ultramonlaine s'expose en faisant la
guerre, sous prétexte de religion, la qualité
la plusmorale et la plus vivifiante rie notre épo
que, l'amour du travail. Voici ce que uous
lisons dans Y Univers
On nous écrit de Rome: Les préparatifs de la
héatification solennelle du vénérable Benoît-Joseph
Labre se poursuivent avec activité. La fêle en est
fixée par le Saint-Père au 16 avril, jour de la mort
du Bi enheureux. Elle sera obligatoire pour Rome et
pour Arras, peut-être aussi pour Loretta. L'oraison
propre est déjà composée par la Congrégation des
Rites.
Le mois prochain on doit faire l'ouverture de
la tombe. U»e relique insigne et majeure sera réser
vée pour l'églised'Arras.
Quant aux préparatifs de la grande solennité
Saint-Pierre, déjà tous les arts s'empressent d'y
concourir. On trace des projets de décoration les
architectes, les peintres rivalisent d'ardeur et de ta
lent. On veut y mettre d'autant plus de magnificence
qu'il s'agit de célébrer des vertus tout extraordinai
res, les plus l'oppcsédu luxe.
a D'un autre côté on grave dea images, on frappe
des médailles, et l'on prépare tout avec abondance
pour satisfaite la dévotion privée.
On nous concédera que voilà une façon bizare
de glorifier la mendicité et le caractère sordide
de la vie de l'homme qui est déclaré bienheu-
Feiiilleton du Progrès*
(Suite et fin.)
Je guéris trop vite au gré de mes désirs, et je sus
bientôt me promener, portant mon bras en écliarpe.
J'étais en état de me transporter partoutet n'avais plus
nulle excuse pour rester l'hôte de M' X...
Mais comment m'arraclier cette existence, la plus
heureuse que j'eusse connue La société de Sonhic m'é
tait devenue une nécessité. Quand elle était près de moi,
tout rayonnait de bonheur mes yeux. Quand elle était
absente, les mêmes objets réapparaissaient comme re
couverts d'un sombre voile et portaient dans mon esprit
des pensées de la plus mélancolique tristesse.
Si je n'avais pas encore déclaré ouvertement mes sen
timents, je- n'en étais pins douter que Sophie ne me
payât d'un doux retour. Ces controverses plaisantes et
souvent moqueuses, ces silences ces caprices, celte
sympathie cachée qui m'était révélée son insu par sa
tendre et incessante sollicitude; tout ne me disait-il pas
que j'étais aimé
Nous nous promenions souvent seuls. J'avais gardé les
privilèges de mon état de malade arec une persistante
ténacité.
Bonne Sophie, lui dis-je un jour, je souffre encore;
il faudrait rcplncer le bandage.
Quelle idée 11 y a peine une heure qu'il a été
remis.
Vous ne l'aurez pas bien posé, basardai-je en sou
riant.
Alors il est inutile que je recommence.
Oh ce n'est pas par ignorance, ajoutai-je.
Et puis, continua-t-elle j'ai de forts soupçons que
votre bras est entièrement guéri. Si vous alliez me trom
per, monsieur?
Voilà une méchante accusation! Mais venez voir.
Elle s'approche et pendant qu'elle est-là, mon bras
enlace sa taille.... Elle veut en vain s'échapper.
Je ne vous ai pas encore dit.charmante Sophie,
comment je fus blessé et ce qui en était la cause.
N'était-ce pas par accident demanda-t-clle en rou
gissant uri peu.
Non, répondis-je; par jalousie.... et pour vous,
ajoutai-je. Je lui narrai ensuite le petit draine dont j'avais
été la fuis le héros et la victime.
Que pensez-vous de cet événement demandai-je.
Je pense, dit-elle, que vous avez été puni d'une
mauvaise passion.
Mais la jalousie est l'essence même d'un ardent
amour, comme la fleur est l'essence de l'arbuste. Point
reut. Certes, il y a un peu de luxe dans le con
cours de toutes les magnificences dont on nous
parle. Et quand on voit les artistes de tout
genre rivaliser ainsi d'ardeur et de (aient pour
irehausser l'éclat d'une cérémonie dans la capi
tale du monde catholique, on peut douter que
la mendicité et la fainéantise soient des vertus
bonnes suivre. (Écho du parlement.)
M Frère a dit la Chambre qu'il avait donné
des instructions aux directeurs des contribu
tions, pour que les écoles dentellières qui se
trouvent dans les conditions voulues^par la loi
pour être exemptes de la patente, ne soient pas
soumises ce droit. Il faut croire que le nom
bre de ces établissements est très-restreint, car
la Patrie, au lieu d'accueillir avec reconnais
sance la déclaration de M. le ministre, fait un
nouvel appel la résistance de la part des cou
vents-manufactures, elle injurié dè nouveau le
gouvernement, et prédit que les établissements
du clergé seront assez adroits pour échapper au
droit de patente. M. le ministre des finances,
dit-elleaura donc donné un nouveau coup
d'épée dans l'eau et le pistolet qu'il a dirigé
sur le cœur des établissements charitables
aura une seconde fois raté.
Quel effet prodigieux fait cette figure de rhé
torique, M. Frère tenant d'une main lepée
de l'impôt qu'il plonge dans l'eau! de l'autre,
le pistolet fiscal qui rate sur le cœur de 663
écoles-manufactures! Quel revolver que ce pis
tolet Et dire que c'est pour une petite question
d'argent, un petit droit de patenté qVe paie sans
murmurer le plus petit industriel laïcqu'on
prodigue d'aussi brillantes fleurs de rhétorique!
M. Frère, ajoute la Patrie, veut essayer de
prélever un impôt sur le pain de l'ouvrier.
Il est certain que si nous étions législateur, nous
bou leverserions complètement ce genre d'impôt;
car nous croyons qu'il serait plus juste de le
faire payera l'oisiveté qu'au travail. Mais comme
la loi existe et qu'elle doit être la même pour
tousnous ne voyous pas pourquoi les fabri-
de fleur sans plante point de jalousie sans amour Oh
vous ne pouvez me condamner.
Elle baissa les yeux et nous restâmes longtemps silen
cieux, nos cœurs unissant leurs battements dans un muet
et délicieux langage.
Holà Par tous les diables
Nous nous levons aussitôt et nous trouvons en face de
maître Léon.
Diantre! qu'est-ce que cela? dcraanda-t-il et ses
traits tne parurent empreints d'une expression mena
çante.
Chut! fis-je en allant lui, et, lui saisissant les
deux mains Elle est moi! £iie consent in'épouser
Elle....
La figure de Léon se rasséréna comme par enchan
tement; il m'interrompit par un formidable bravo! et,
jetant son chapeau en l'air en signe d'allégresse il cou
rut embrasser s» sœur. ^uts....
Mais je ne veux pas rapporter toutes ses extravagances
ni les miennes.
Mr X..., qui je demandai le jour même la main de sa
fille, me l'accorde en ces termes
Un accident heureux vous a ouvert le cœur de ma
fille. Je vous en félicite sincèrementcar il en «st de
l'amour comme de bien d'autres choses que les plus raé-