27* ANNÉE.
6 FRANCS PAR AN.
JOURNAL D'YPRES ET DE L'ARRONDISSEMENT,
Chronique politique.
LA ROSIÈRE DE LA RUE SAINT-DENIS.
Société «le l'Union libérale
W 8,8U8. - Jeudi,
19 Mars 1868,
PARAISSANT LE JEUDI ET LE DIMANCHE.
IE PROGRES
- 1 t W*r- r" 1 r
VIA ES ACQU1RIT ECNBO.
ABONNEMENT PAR AN Pour l'arrond" administratif et judiciaire d'Ypres. fr. 6-00
Idem Pour le restant du pays7-00
Tout ce qui concerne le journal doit être adressé l'éditeur, rue au Beurre, 83.
INSERTIONS: Annonces: la ligne ordinairefr. 0,15
Idem Réclames idem. 0,30
Les lettres et paquêts doivent être affranchis.
Le Corps-Législatif, continuant la discussion du
projet de loi sur la presse, a rejeté la majorité de 134
Toi* contre 72, l'article 12, relatif la privation de
l'exercice des droits électoraux en cas de récidive pour
tout individu condamné pour délit de presse, et adopté
l'art. 14 concernant l'exécution provisoire des juge
ments de presse par 181 voix contre 38.
Avant-hier a eu lieu au Chatelet la première repré
sentation du drame le Vengeur. On assure que plu
sieurs arrestations ont été faites la porte du théâtre.
Le projet d'emprunt sera présenté aujourd'hui ou
•demain au Corps-Législatif. L'examen par le conseil
d'État de ce projet est peu près terminé. Le chiffre
•de *40 millions, indiqué dans le rapport du ministre
des finances, est maintenu, et le mode adopté serait,
si nous sommes bien renseignés, une émission de rente
3 par voie de souscription.
Le sort des porteurs d'obligations mexicaines a dû
«être fixe samedi çn première instance par le conseil
d'État. Nous disons en première instance, parce que la
question aura ensuite subir les épreuves de la com
mission des finances du Corps-Législatif et de la Cham
bre elle-mèine.
Si nos renseignements sont exacts, le chiffre des
«rentes allouées figurerait dans le budget.
Si nous sommes bien informés, la section des finances
«au conseil d'État norait entendu, avant-hier, samedi,
M. de Germioy, sénateur, président de la commission
■des finances du Mexique, MM. le vicomte de la Gué-
ronnièrele baron Bcrniersénateurs. Josseau et
Nogent-Saint-Laurens, députés au Corps-Législatif,
représentant le comité des porteurs d'obligations mexi
caines, et M. Pinard, au nom du syndicat des banquiers
•qui ont souscrit l'emprunt.
Le Conseil de la Confédération du Nord a tenu sa
première séance, qui a été consacrée la nomination
des commissions et la présentation des projets que le
Conseil aura discuter avant qu'ils ne soient présentés
au Parlement fédéral. Ces communications se com
posent de la convention conclue avec les Étals-Unis au
«sujet de la naturalisation, d'un projet de loi concernant
le secours accorder aux familles des remplaçants de
PAR FRANCIS TESSON.
III Suite.
Quand Fortunée vit emporter par des mains mer
cenaires ces chers souvenirs d'autrefois, il lui sembla
qu'une portion d'ellc-niêuie s'en allait avec eux.
Et puis, les meubles heurtés et choqués contre
l'angle du mur rendaient des sons si tristes qu'on eût
dit qu'ils avaient une âme, qu'ils comprenaient le
malheur, qu'ils se plaignaient de icur brusque enlè
vement cl qu'ils se lamentaient d'être impuissants et
passifs.
Pierre Michon dissimula et garda devers lui une
partie de l'argent retiré de cette vente.
Il alla jouer cet argent.
Un immense vertige tourmentait l'esprit du misé
rable. Il essayait de se persuader qu'avec la maigre
-somme qu'il dérobait la misère, il allait regagner
fabuleusement, en une fois, tout ce qu'il avait perdu
depuis des années.
Il se servait de cette-espérance illusoire pour im-
j»oser silence ses remords.
la réserve, d'un projet de loi relatif aux Indemnités
accorder aux Compagnies de chemins de fer pour le
transport de troupes d'un projet de loi réglant les
pensions accorder aux officiers de l'ancienne armée
du Schleswig-Holstein enfin d'une proposition ten
dant accorder une subvention au musée germanique
de Nuremberg, et d'autres affaires d'uu intérêt tout
aussi secondaire.
Dans sa séance d'avant-hier, la délégation du Reichs-
rath autrichien a approuvé le crédit de 990,000 florins
que le ministre de ia guerre demandait pour les forti
fications. La commission avait proposé de'réduire cette
allocation d'un tiers.
DE L'ARRONDISSEMENT D'YPRES.
OH©K&
Le Comité de l'Association a l'honneur de vous
informer, qu'une assemblée générale de tous les mem
bres de la société est convoquée pour Samedi, 14
IHara 1868, trois heures très-précises, l'effet de
procéder au renouvellement du mandat des membres du
Comité.
Ypres, le 9 Mars 1868.
TOUR LE COMITÉ
LE PRÉSIDENT,
En». IHF.KGHELYNCK.
Y pue», le 11 Mars.
Le parti moral et honnêteautrement dit
clérical, a de singulières façons d'affirmer sa
moralité et son honnêteté. Les cours de jus
tice ont bien de la peine rendre celle mora
lité et cette honnêteté évidentes. S'agit-il de
certains faits que la pudeur nous empêche de
détailler, nous trouvons dans les archives ju
diciaires des monuments de démoralisation et
de corruption et il est rare que des actes aussi
monstrueux soient imputés des gens qui ne
jouissent pas de la confiance de l'église. Les
coupables appartiennent souvent des ordres
«Une voix intérieure lui criait
Tu vas commettre là une action' vile et infâme
Mais lui, plus haut, les dents serrées, il répétait
impérieusement
Si je gagne et je gagnerai, car le sort est las
enfin de me poursuivre je rendrai cet argent au
centuple. J'apporterai l'aisance et la santé au logis.
J'achèterai un lit moelleux, un feu clair flambant, une
nourriture succulente la mère un berceau capi
tonné et des langes brodés pour l'enfant qui naîtra.
Ces idées lui cachaient l'odieux de la dilapidation
qu'il allait faire d'une somme minime par elle-même,
mais si précieuse en un moment aussi critique.
Il joua et perdit derechef.
Le linge et les effets d'habillement suivirent de près
le mobilier dans l'exil.
Chose affreuse dire Pierre joua et perdit une
partie du prix des hardes comme il avait joué et perdu
le prix des meubles.
Le jour où Fortunée accoucha d'un gros garçon
joufflu et rose, il ne restait plus au pauvre ménage
qu'une ressource unique l'anneau nuptial.
On l'engagea au moal-de-piété, et les cinq six
religieux et nous soupçonnons que bien de»
faits repréheosibles échappent l'investiga
tion de l'autorité judiciaire, par suite du sys
tème de réticence et de dissimulation très en
vogue en certaines régions.
Nous ne pouvons approuver la manière
d'agir de certaines gens qui revendiquent le
monopole des bonnes mœurs et de la sainteté,
quand il s'agit d'étouffer ce qu'ils qualifient
de scandale. Médisants et hargneux, ces
saints personnages aiment bien gloser sur
le compte de ceux qui ne veulent pas subir le
jpugde l'église, mais ils se fâchent tout rouge,
quand des faits odieux sont punis par la jus
tice et que les oints du Seigneur ont maille
partir avec elle.
Oh! alors, au nom de la religion, le silence
est recommandé comme une des vertus théo
logales. Il n'en est pas ainsi toutefois, quand
il s'agit de diffamer sans fondement un ad
versaire politique; alors toute la ruche bour
donne avec zèle et l'unisson.
Un autre genre de difficultés qui fait res
sortir la moralité immaculée et l'honnêteté
brillante du cléricalisme résulte de sa
lutte avec le fisc, au point de vue des dona
tions et testaments et surtout eu matière de
biens de main-morte. Les puritains radicau*
et les économistes trouvent que ce sont des
misères et proclament emphatiquement, que
ces fraudes sont inoffensives et ne servent que
de prétexte blâmer ces honnêtes catholiques
si aimables leur endroit.
Toutefois, comme nous sommes des mé
créants et des hérétiques, il ne nous convient
pas de trouver très-moral, qu'on fraude le
fisc, car si un contribuable ne paie pas l'impôt
que la loi lui impose, d'autres seront obligés
de le faire pour lui. Mais, vrai dire, cela
n'est pas de la haute moralité catholique et
ces principes ne peuvent convenir qu'aux
doctrinaires, espèce d'individus qui n'admel-
francs qu'on en retira servirent payer quelques mé
dicaments indispensables la malade.
Aller quêter un sceours aux bureaux de bienfai
sance du quartier, Pierre n'en eût pas le courage. Ses
camarades d'atelier n'étaient guère mieux traités que
lui par le sort il était donc inutile pour le moins
d'aller frapper leur porte.
La jeune mère épuisée de fatigue et de privations
manquait du lait nécessaire l'alimentation de la frêle
créature qui venait de naître. Une nourrice coule gros
et se paye d'avance il u'y failhjt pas songer.
La mansarde était sombre et nue.
Le vent d'hiver sifflait travers les ais mal joints
des portes et les lézardes du plafond.
Il faisait froid.
Il faisait faim.
C'est alors que Pierre Michon, désespéré, bout de
ressources, songea mettre son nouveau-né aux
enfants trouvés.
Vous dire les pleurs, les supplications, les résis
tances de Fortunée serait chose impossible.
Mais force lui fut do se rendre l'cvidence.
Garder l'enfant dans un pareil dcuâm.:nt, c était