27' ANNÉE.
6 FRANCS PAR AN.
JOURNAL D'YPRES ET DE L'ARRONDISSEMENT,
Li ROSIERE DE LA DDE SAIBT DEHIS.
IV* 8,§OS. Dimanche,;
«9 NKars 1868
PARAISSANT LE JEUDI ET LE DIMANCHE.
LE PROGRÈS
VIBES ACQUIRIT ECNDO.
ABONNEMENT PAR AN Pour l'arrond'administratif et judiciaire d'Ypres. fr. 6-00
Idem Pour le restant du pays7-00
Tout ce qui concerne le journal doit être adressé l'éditeur, rue au Beurre, 83.
INSERTIONS Annonces la ligne ordinaire
Idem Réclames idem.
Les lettres et paquets doivent être affranchis.
fr. 0,15
0,30
ImtES, le 98 mars.
Société de l'Union libérale et Association
constitutionnelle de l'arrondissement
d'Ypres.
Dans un si grand revers que vous reste-t-il?
Moi,
Moi, dis-je, cl c'est assez.
Nous n'avons pas plus l'intention d'entrer
enpolémiqueavecrCI/rfnton que par le passé;
le scrutin du Samedi, 14 Mars, justifie une
fois de plus la confiance que nous avons tou
jours eue dans le bon sens de nos populations
jamais, en effet, association politique n'a pro
noncé un verdict plus spontanéplus libre
et plus unanime.
Le rédacteur de YOpinion cherche vainement
donner le change sur la signification de ce
verdict; en vain il s'attaque M. Carton
dont il n'aime ni la proseni les speehs
et cela pour cause mais en admettant
pour le moment que M. Carton ue soit
ni un écrivain, ni un orateur de la force
du rédacteur de l'Opinion, il n'a pas non
plus comme lui des scribes salariés pour
lécher sa prose et distiller ses injures et on
nepeut dire ni de sesdiscours, ni deses écrits,
Moi, qui sait qu'il les achète, je soutiens
qu'ils sont lui. Du reste, nous le répétons,
les élucuhralions du rédacteur de 1 Opinion
ne nous émeuvent guères et nous ne nous en
serions pas même occupé, si nous n'avions
tenu rectifier quelques circonstances que
l'on dénature dans le but évident d'égarer
l'opinion publique.
D'abord notre contradicteur prétend qu'il
y a calcul ou erreur de la part de M. Carton,
de s'être qualifié d'ancien secrétaire de l'Asso
ciation libérale, c'était, dit-ilpourtant bien
de l'Alliance qu'il fallait dire. Eh bien non,
PAR FRANCIS TESSON.
(Suite et fin.)
La nuit était complètement tombée les heures
s'envolaient rapidement.
Épuisée par les effroyables secousses qui l'assaillaient
depuis le matin, Fortunée avait fiui par s'accroupir
dans un coin de la chambre; ses prunelles, démesuré
ment dilatées, perçaient l'épaisseur des ténèbres et
jetaient des reflets sinistres comme les yeux des bêtes
fauves.
Une heure après minuit sonna une église du voi
sinage. En même temps la porte de la rue s'ouvrit avec
fracas et un bruit de voix confuses monta d'en bas.
Elle bondit
C'est lui gronda-t-elle.
Son coeur battait, non plus d'espoir, mais de colère.
Le bruit des voix et des pas se rapprocha.
Elle ouvrit et se trouva face face avec le concierge
de la maison, qui tenait un bougeoir la main.
Le concierge recula terrifié la vue du visage bou
leversé de celte femme, et s'empressa de s'effacer
contre le mur.
C'est ici, messieurs, dit-il.
Ces paroles s'adressaient deux agents de police en
ce n'était pas de l'Alliance qu'il fallait dire,
mais bien de l'Association libérale, dont M.
Carton a été secrétaire-fondateur. A l'Alliance,
M. Carton combattait les tendancesultra radica
les qui, dans les derniers temps, tendaient pré
valoir au sein de cette assemblée et il contri
bua faire la scission; en un mot, alors
comme aujourd'hui il appartenait cette
opinion la fois progressive et modérée qui
a doté la Belgique d'uue longue ère de bon
heur et de prospérité.
Le quantum mutatus ab illo que l'Opinion
lui adresse, ne lui est donc applicable sous
aucun rapport, tandisque nous pourrions en
faireunejuste application ceuxqui l'époque
de 1848, déployaient ouvertement le drapeau
socialiste et républicain et ne sont entrés,
d'après nous, i'Associatioo constitutionnelle
que dans l'espoir de mieux la renverser.
L'Opinion prétend avoir vu des personnes,
qui n'ont jamaisélé admises comme membres,
prendre part au vote; c'est là une conlrevé-
rité, émise de propos délibéré, pour atténuer
la signification du scrutin, car les noms de
tous les votants ont été régulièrement in
scrits fur et mesure de leur vole, et nous
affirmons qu'aucune personne étrangère
l'association n'a pris pari au scrutin.
Mais on a inscrit des personnesdit la
feuille radicale, sans qu'elles aient été admi
ses par le comité c'est une nouvelle erreur,
car l'admission de toutes les personnes qui
ont pris part au scrutin est constatée par les
procès-verbaux du comité.
L'Opinion continue une particularité
bien digne de remarque aussiest que tous
les billets étaient conçusde la même manière.
Nous en demandons bien pardon au confrère,
car jamais les bulletins n'ont été plus variés; il
uniforme, qui soutenaient ou plutôt qui portaient
Pierre Michon.
Voilà voire mari que ces messieurs vous ramè
nent, ma petite mère, dit le concierge, qui peu peu
reprenait courage.
La tète de Pierre vacillait en tous sens, et ses jam
bes, qui fléchissaient, refusaient de le porter.
Blessé? Mort, peut-être? s'écria la fleuriste dans
un dernier élan de tendresse pour l'homme auquel la
liait sa destinée.
Rassurez-vous, ma petite dame, ce ne sera riem
Votre mari a trop fêté ce soir la dive bouteille, voilà
tout; la nuit passée, il n'y paraîtra plus. Nous l'avons
trouvé dans la rue, titubant outre mesure; craignant
pour lui les voitures et les voleurs, nous l'allions con
duire au poste, mais son livret que voici nous a fait
connaître son domicile, et nous avons cru plus simple
de le ramener dans son lit. Sur ce, laissez-le dormir,
vous le morigénerez demain d'importance bonsoir.
Pendant le petit discours de l'agent, Fortunée im
mobile de stupeur, semblait changée en statue, ni plus
ni moins que la femme de Loth.
Mais quand elle Se trouva seule eu présence de
Pierre, ses idées lui revinrent.
Elle bondit vers l'ivrogne, le saisit la gorge, le
secoua vigoureusement et lui cria d'une roix terrible
n'y en avait pas quatre rédigés de la même
manière oi écrits de la même main, sauf toute
fois les quatre portant le nom de M. Caproo.
Et chose remarquable, M. Caproo et ses amis
votaient pour lui seul; ils voulaient doue éli
miner la majorité comme ils ont tenté du reste
de le faire chaque renouvellement partiel;
mais cette fois la majorité a pris sa revanche
et elle n'a fait que ce que M. Capron et ses
amis ont si souvent tenté. De quoi donc a-t-il
se plaindre PII a subi la loi du talion et voilà
tout.
Et celte prétention de constituer le comité
luiseul est chose précieuse constater,parce
qu'elle dépeint mieux que nous ne saurions
le faire, le caractère et les tendances du
rédacteur de l'Opinion.
Nous ne comprenons pas que l'élimination
de M. Capron puisse étonner personne le
comité d'une association politique n'a d'auto
rité, de force morale que sous condition
d'être l'expression de la majorité, et l'hono
rable M. Capron doit comprendre qu'après
la conduite qu'il a tenue l'élection du mois1
de Juin dernier, la majorité eut manqué sa
dignité, en renouvelant son mandat. Com
ment d'ailleurs pouvait-il l'espérer par
mi les 83 votants, 60 au moins ont été vili
pendés et baffoués par l'Opinion, or, quand
on a ainsi jeté pendant six ans l'injure et
l'outrage la face de tout ce qu'il y a d'hon
nête etde respectable dans un arrondissement,
il ne suffit pas de tendre une main hypocrite
pour reconquérir la confiance et regagner les
sympathies.
Le plaideur malheureux a vingt-quatre
heures pour maudire son juge. L'Opinion
Connaît, paraît-il, le proverbe, car elle le met
L'argent Qu'as-tu fait de l'argent?
Pierre Michon ouvrit moitié les yeux et eut un
rire hébété.
Quel argent fit-il.
Les deux cents francs que je t'avais confiés pour
payer le rachat de mon enfant.
Il essaya de résister. Elle le secoua plus fort.
Tu me fais mal, articulà-t-it.
Mais elle, n'écoutant rien, menaçant et grinçant des
dents
Oh 1 tu me répondras, gronda-t-elle.
L'ivrogne ricana.
Les deux cents francs je les ai joués, balbutia-
t-il.
Tu les as joués
Misérable cria-l-clle en reculant d'un pas puis
se rapprochant
Tu mens O dis-moi que tu as menti que lu te
plais follement torturer mon cœur, déchirer mes
entrailles de mère dis-moi que des amis t'ont entraîné
au cabaret, que tu t'es amusé, que lu as laissé passer
l'heure, pue lu n'osais plus rentrer, craignant mes re
proches mais qu'il est faux que tu aies perdu au jeu
le prix de mon enfant. Sur ta vie, sur ton salut, jure-
moi cela, Pierre, et je te pardonnerai.
Elle était effrayants voir mais l'ivrogne n'y pre-