28* ANNÉE.
6 FRANCS PAR AN.
JOURNAL D'YPRES ET DE L'ARRONDISSEMENT,
PARAISSANT LE JEUDI ET LE DINANCHE.
Chronique politique.
LE BUREAU »E POSTE
Yphes, le 5 Août.
M' - Jeudi,
e Août 1*0*.
LE PROGRES
tires acocirit eundo.
ABONNEMENT PAR AN Pour l'arrond* administratif et judiciaire d'Ypres. fr. 6-00
Idem Pour ie restant du pays
Tout ce qui concerne le journal doit être adressé l'éditeur, rue au Beurre, 83.
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Idem Réclames idem.
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On assurait hier que le conseil des ministres de
Fiance, avait fixé dans la séance tenue le matin,
sous la présidence de l'impératrice, la date et le
taux de l'émission de l'emprunt de 429 millions.
On ajoutait que la souscription publique sera ou
verte peu de jours après la promulgation de la loi,
et que cette formalité sera accomplie aujourd'hui.
Du reste, les bureaux du ministère d'Etat ont dû
expédier avant-hier le texte et la formule exécu
toire de la loi.
D'une circulaire adressée par le prince Gort-
chakoff aux ambassades et légations impériales de
Russie, sous la date du i j Juillet dernier, il résulte
que le cabinet de Berlin, en acceptant le principe
d'un protocole pour l'exclusion des balles explo-
sibles, témoigne le désir qu'il lui soit donné le
plus d'extension possible, en l'appliquant tous
les moyens de destruction que les progrès de la
sciencç mettent la disposition de l'art militaire
et qui dépasseraient les limites que, dans un in
térêt d'humanité, les puissances sont d'accord pour
poser aux exigences de la guerre. Celte extension
proposée par la Prusse la proposition de la
Russie, sera certainement accueillie avec faveur
par tous les amis de l'humauiié.
Un journal suisse, le Franc Rhétien, publie au
sujet de l'armement de la Suisse, une note où nous
voyons qu'à la fin de l'anoée, ia Suisse sera en
possession de 142,000 fusils se chargeant parla
culasse, dont 90,000 de petit calibre, et 80,000
fusils répétition suffiront pour compléter sou
armement, y compris celui de la landwehr.
On télégraphie de Constantinople que Midhat-
Pachacommandant des troupes ottomanes en
Bulgarie, a capturé les débris des bandes bulgares
réfugiées dans les Balkans, et que la tranquillité la
plus parfaite règuedans les provinces danubienne».
S'il faut en croire le Nord, le télégraphe a né
gligé de mentionner un incident qui a accompagné
l'exécution des 14 condamnés mort de Belgrade.
L'officier qui commandait l'exécution, s'élant trop
approché de l'un des poteaux auxquels les con
damnés étaient attachés été frappé d'une balle
qui faisant ricochet sur ce poteau, l'a atteint au
front et l'a tué sur le coup.
DE SAINT-SYLVAIN.
Depuis ce jour, M. Martizzi considéra sa situation
avec une profonde horreur. La haine de sa femme, la
froideur craintive de sa fille entouraient son foyer
d'une ombre sinistre et d'un silence hostile qui ef
frayaient et assombrissaient son imagination. Puis
Pimage de cet enfant qu'il ne pouvait plus écarter de
sa mémoire, lui apparaissait sans cesse comme une
menace de la vengeance divine.
Il avait cru que le repentir et la honte de la faute
qu'il lui attribuait, lui ramèneraient sa femme vaincue
et prête reprendre son joug, et, quant lui, il était
persuadé qu'il serait plus fort que le remords. Le
contraire était arrivé. Le sentiment de son innocence
avait fortifié l'énergie morale de M™" Martizzi et si,
par quelque imprudence de conduite, elle avait sa part
de responsabilité dans la mort de son mari, elle en
était absoute par l'intarissable amour qui remplissait
soq âme, et elle laissait tout le poids du meurtre re-
On dit que l'archevêque de Cantorbery va
entreprendre un voyage sur le continent; il est
considéré par le monde catholique comme syant
une grande importance. Le prélat.irait en France,
en Suisse et en Italie.
On assure qu'un comité se forme pour décider
les candidatures du parti légitimiste dit libéral. M.
Berryer est président de ce comité, dans le per
sonnel figurent MM. Albert Gigot, Léopold de
Gaillard, Paul Andral, Henri Moreau, etc.
La réception faite notre Roi bien-aimé,
le 3 de ce mois, par les administrations et les
populations de la ville et de l'arrondissement,
a été spleodide.
Dès la veille les décorations des rues
étaient terminées et, nous le constatons avec
satisfaction, l'aspect de nos rues et de nos
places publiques était des plus pittoresques
et des plus élégants on ne voyait que grands
mats vénitiens pavoises et ornés d'écusson»
de diverses formes, aux armes du royaume,
de la province, de la ville des sapins ver
doyants, des inscriptions et surtout des dra
peaux aux couleurs nationales qui font un si
bel effet et qui sont le couronnement de
toutes les décorations patriotiques. Notre
imposant beffroi où flottaient aussi des
bauderolles et des oriflammes aux trois cou
leurs belges, dominait le tout et annonçait
au loiD que la ville d'Ypres était en liesse.
Le 3, dès le matin, les populations des
communes rurales arrivaieut en ville et un
peu plus tard, les traius du chemiu de fer
versaient dans notre vieille cité des flots
d'excellents et vrais Belgesauxquels se mê
laient des Fraoçais en grand nombre tous
venaient acclamer notre Roi constitutionnel
et populaire. Nos rues étaient trop étroites,
nos places étaient trop petites pour contenir
l'aise nos innombrables visiteurs. La popu
lation d'Ypres était décuplée.
tomber sur le meurtrier. Aussi sa préseoce était comme
un anathème vivant auquel son mari ne pouvait se
soustraire. Bientôt la raison de ce malheureux s'é
branla il lui fut impossible de contenir plus long
temps le secret de ses souffrances morales des mots
lugubres les trahissaient.
Il n'avait souvent d'autre distraction chez lui, ses
pénibles pensées, que de suivre d'un regard machinal
les mouvements de sa femme, tandis qu'elle accom
plissait son travail domestique. Un jour, qu'accroupie
devant le foyer, elle balayait l'âtre avec soin, il s'irrita
tout coup contre cette occupation. Il lui arracha le
balai des mains et le brisa en le lançant terre.
Que signifie toute cette propreté, dit-il, n'avons-
nous pas la pourriture du sang
Vous vous repentez donc enfin! s'écria M ""Martizzi.
Il garda le silence.
Quelque temps après, la petite Elise devant s'ab
senter pour une demi-journée, sa mère l'engagea
aller embrasser son père. II y avait longtemps que
M"* Martizzi avait perdu l'habitude de ces sortes de
recommandations affectueuses. Celle qu'elle faisait en
Nous ne ferons pas aujourd'hui la descrip
tion de nos fêtes, le temps nous mauque, et
d'ailleurs, il serait bien difficile d'écrire tout
ce que nous avons vu et surtout de redire
toutes les douces et patriotiques émotions que
nous avons éprouvées. Les grands journaux
qui ont envoyé lundi des correspondants
Ypres, donneront un compte-rendu de nos
fêles, nous le reproduirons volontiers, il sera
en tous cas moins suspect que le nôtre d'être
influencé par l'esprit de clocher. Nous nous
bornerons donc donner quelques indications
la hâte et nous sommes disposés rectifier
toutes les erreurs et réparer les omissions
qu'on voudra bien nous signaler.
Le Roi avec sa suite est arrivé vers 11 h. 45
minutes, les ministres de la justice, des af
faires étrangères et de la guerre, le grand
maiécbal du palais, le chef du cabinet du
Roi, M. le gouverneur de la province et
d'autres grauds personnages se trouvaient
dans le train royal.
Sa Majestéa été reçue la gare par M. Beke,
bourgmestre, entouré des membres du col
lège et du conseil, ainsi que d'autres auto
rités civiles et militaires. De formidables et
unanimes cris de Vive le Roi ont accueilli
S. M. L'enthousiasme de la garde civique et
du corps de Pompiers était surtout extrême.
Après avoir passé en revue nos milices
citoyennes et les troupes dé la garnison le
Roi, précédé par M. le Bourgmestre, a fait
son eDtrée en ville et cette entrée a été triom
phale-, nous renonçons décrire l'attitude de
nos populations qui semblaient n'avoir qu'un
cœur et qui n'avaient sur leurs lèvres qu'un
cri, celui de Vive le Roi
M. le sénateur baron Mazeman deCouthove
a reçu la porte de son hôtel, S. M. qui s'est
empressée de serrer affectueusement la main
de a son ancien collègue du Sénat.
Après le déjeuner offert au Roi par M. le
sénateur et auquel avaient été conviés, outre
ce moment lui était évidemment inspirée par un com
mencement de pitié, car elle ne pouvait s'empêcher de
constater les souffrances du coupable. L'obéissante
petite Elise s'approcha de son père.
Pourquoi lui apprendre cette hypocrisie dit
celui-ci elle ne m'aime pas le poussin gratte comme
sa mère. Puis il ajouta avec un accent dans lequel
il y avait encore plus de colère que de regret Il a
laissé un fils, lui, et moi je n'ai pas même une fille
La haine de M" Martizzi ne tint point contre ces
plaintes ni contre le spectacle de cette désorganisation
morale et physique les larmes de la pitié en éteigni
rent le feu. Elle essaya de montrer plus de douceur
son mari; mais il la repoussa avec, un orgueil
farouche. Alors ils furent aussi malheureux, aussi tor
turés l'un que l'autre.
L'intensité de celte vie fiévreuse causée par l'eial-
tatioo des remords ou des regrets, les mina sourde
ment. Le plus fort succomba le premier. N'ayant point
fait l'apprentissage de la douleur, il lui offrait moins
de résistance.
M. Martizzi mourut au mois le juillet 1856, trois