un enfant terrible, le vaillant journal bat ses maîtres sans le savoir. Nous ignorons de quelle publicité jouit le grêle organe des clameurs ultramontaines de l'arrondissement, mais si sa voix porte assez loin pour être en tendue en haut lieu, que diront les principaux officiants de la confirmation en lisant dans le Journal cTYpres que l'embonpoint est un crime et que les ventripotents doivent être chassés du temple (Communiqué). La Chambre a abordé la discussion de l'article 46 de la loi relative aux fraudes électorales, auquel M. Frère-Orban propose, par amandement, de faire tomber sous l'application de la loi les abus de pou voir et d'autorité. Le but de cet amendement est d'atteindre le prêtre qui abuse des menaces du confessionnal pour extorquer de ses pénitents le secret de leur vole, et il est peu près certain que si cet amen dement est rejeté, la gauche ne votera pas le projet, ne pouvant pas consacrer par son adhésion un nouveau privilège en faveur du clergé. M. le ministre de la justice a néanmoins com battu l'amendement par diverses considérations qui ont ameué M.Tesch s'efforcer de faire disparaître toute équivoque. L'honorable membre de la gauche a supposé le cas d'un curé qui exige du pénitent la révélation du secret de son vote et a demandé au ministre comment il appréciai cet acte. Sur cette réponse audacieuse du ministre: C'est un acte de son ministère, un concert de protesta tions s'est élevé sur les bancs de la gauche, plu sieurs membres se sont levés, le tumulte a été tel qu'il devint impossible de saisir un mot. Enfin M. Guillery a pris la parole et a fait entendre une chaleureuse protestation contre la doctrine que révélé le mol du ministre. On veut faire du confessionnal un comptoir électoral et des curés des agents d'un parti politique, on prostitue les choses saintes, et l'on a l'audace de l'avouer, de le proclamer publiquement L'indignation de la gauche allait croissant pen dant tout ce discours, et M. Frère a caratérisé la situation avec une implacable logique, déclarant en terminant que jamais la gauche ne donnerait son approbation une pareille loi, ce qui a provo qué les applaudissements de cette fraction de la Chambre. L'assemblée s'est un peu calmée en entendant MM. Dohel et Kervyn traiter la question au point de vue théorique. M. Bara. envisageant le côté juridique, a établi ensuite que si les menaces du confessionnal ne tombent pas sous l'application de l'article 46 de la loi en discussion, l'article 66 du code pénal, qui reproduit les mêmes termes, ne pourra également plus être appliqué au prêtre poussant au crime, l'assassinat. L'impunité du prêtre, cette énormilé avouée par l'organe du gouvernement, aura dans le pays un retentissement profond, car ainsi le masque est tombé, et on voit enfin où veut en venir le parti clérical. En terminaut son discours qui a montré tontes les conséquences d'une pareille énormité, M. Bara avertit les membres du gouvernement que la gauche ne les considérera plus comme des adversaires loyaux, et que, s'ils persistent dans leur attitude inconstitutionnelle, il faudra recourir d'autre mo yens. La droite ayant réclamé la clôture, M. Janson s'y est opposé énergiquement en protestant contre le privilège insensé qu'on veut conférer au prêtre. Malgré tout, la clôture a été prononcée et la droite a rejeté l'amendement de M. Frère. Elle a adopté ensuite l'article 46 avec cette interprétation que les menaces politique du confessionnal ne sont que des menaces spirituelles et ne tombent par sous l'application de la loi. La loi contenant cet article aura beau être votée par la droite, nous ne craignons pas de nous trom per en disant qu'elles ne sera jamais promulguée. M. Nolhomb a fait appel la loyauté de la presse pour rétablir la vérité des faits au sujet d'une parole mal placée qui lui est échappée dans la séance de mardi. Voici exactement ce qui s'est passé d'après nos souvenirs personnels. M. Frère-Orban, citant un article du journal La Croixlisait ceci Nos institutions signifient la liberté des cultes, la liberté de la presse, la liberté d'enseignement et la libertéd'association, toutes choses pour lesquel les on ne pourrait avoir assez d'horreur... C'est ce point de la citation que M. Nolhomb interrompant s'est écrié: C'est un maniaque ou d'un maniaque. Et M. Frère, terminant sa phrase, a ajouté selon la parole du vicaire de Jésus-Christ. Aux Annales parlementairesla phrase est complétée avant l'interruption, et là se trouve l'erreur. La vérité est que M. Nolhomb croyait adresser son épithète au journal, ne s'apercevant pas que celui-ci citait les paroles même du Pape, et qu'il se trouva très penaud après que M. Frère-Orban eût complété la phrase interrompue. C'est sur ce point qu'eût dû porter l'explication qui a eu lieu hier entre MM. Frère et Nolhomb pour qu'ils se pussent mettre complètement d'accord. Nous avons sous les yeux le texte de la conven tion du 1er juin conclue entre le gouvernement et la Société anonyme de Construction de chemins de fer et qui vient d'être soumise la Chambre. Son objet essentiel est de supprimer la part variable en la déterminant, tant en ce qui concerne les lignes déjà livrées que celles construire encore. Le gouvernement a cru pouvoir, sans s'écarter des règles de l'équité, fixer le prix kilométrique des lignes restant construire 9,800 francs cl le revenu servir en échange des parts variables émises, uu chiffre progressif de fr. 1-50 fr. 2-50. équivalent un revenu moyen de fr. 2-30. Et même pour arriver ce chiffre, il a dû exiger un remaniement considérable du réseau restant* construire. Les combinaisons adoptées, dit l'exposé, mettent la Société de construction même de désintéresser les porteurs des obligations garanties au moyen des gages constitués en leur faveur, et lui permettront d'appliquer toutes les ressources que lui offre l'article 44 de la convention du 25 avril 1870 modifiée par le nouvel arrangement, l'exécution dés chemins de fer restant construire et au paie ment de ses autres charges. L'annonce de l'interpellation de M. Frère-Orban avait attiré une foule énorme aux portes de la Chambre, et les dames ont livré un véritable assaut aux huissiers pour tâcher de pénétrer dans n'importe quelle tribune. Avant midi, la queue, l'entrée des tribunes publique et ré servée, était telle que dès cette heure il y avait plus de monde que les tribunes n'en peuvent contenir. M. Frère-Orban prit la parole au milieu du plus pro fond silence et motiva son interpellation sur un ensem ble de faits qui doivent avoir pour conséquence de compromettre nos relations avec l'étranger et de jeter le trouble dans notre situation l'intérieur. On lui avait dit précédamment, dans une interruption partie des bancs de la droite, que le patriotisme ne consistait pas révéler pareille situation. Mais M. Frère-Orban ne fait pas de la politique d'autruche qui croit éviter le chasseur en se cachant la tête pour se soustraire sa vue. Il a donc rappelé que la presse libérale avait recom mandé de ne point troubler les fêtes anniversaires de Pie IX parce qu'on disait qu'elles n'auraient point de caractère politique, et il a établi ensuite que les ultra- montains leur avaient immédiatement donné ce carac tère en organisant la manifestation des zouaves pontifi caux Oostacker en l'honneur du pape-roi, par les discours prononcés au banquet de Gand, puis par ceux qu'on a prêtés au nonee du Pape. Il a cité l'appui les publications de la Croix absolument menaçantes pour nos institutions nationales ainsi que celles d'autres journaux ultramontains, en disant qu'il voulait porter ce langage la tribune pour en faire justice. En terminant son exorde, il a déclaré qu'il voulait bien admettre qu'au moment du danger MM. Woeste et Jacobs se rangeraient du côté de nos institutions pour les défendre, comme ils l'ont dit antérieurement, mais il s'est plaint de voir dès aujourd'hui la droite soutenir au contraire ceux qui attaquent ces institutions. Ayant ensuite cité les paroles attribuées au nonce en soulignant les attaques qu'elles contiennent l'adresse du gouvernement et leurs menaces l'adresse du roi, l'éminent orateur s'est étonné que ces paroles n'aient point provoqué la moindre protestation de la part de la presse ministérielle. Il a exprimé l'avis que toutes ces manifestations étaient, au plus haut point, compromet tantes pour le pays, condamnables au premier chef, et il a dit que c'était un devoir impérieux pour le gouverne ment de s'expliquer nettement sur les actes dénoncés, de les désavouer sous peine d'en être rendu responsable. Enfin, il a demandé si le discours du nonce avait pro voqué des représentations de la part du gouvernement, ajoutant qu'il aurait exprimer le regret qu'il eût atten du, pour s'en émouvoir, l'annonce d'une interpellation. Immédiatement le ministre des affaires étrangères s'est levé, non pas pour répondre au discaurs de M. Frère, mais pour lire une courte note dans laquelle il est déclaré que le nonce n'a autorisé personne reproduire ses paroles prononcées dans l'intimité et qui.n'ont eu ni le sens ni la portée qu'on leur a attribuées, qu'il n'a pas provoqué ni eu l'intention de provoquer une prise d'ar mes. C'était un désaveu net et ferme du discours de M. le sénateur Casier et des récits de la presse ultramontaine, comme l'a constaté M. Frère. Mais il a ajouté que la manifestation des ex-zouaves pouvait donner lieu des représentations de l'étranger et il s'est écrié que le cabinet avait le devoir de désavouer aussi cette parade, qu'il y était obligé. Le chef du cabinet, M. Malou, s'est levé alors pour jurer ses grands dieux que tout le passé de son parti protestait contre les tendances de la presse ultramon taine et les manifestations incriminées, et, pressé par une interpellation de M. Frère-Orban, il a déclaré qu'il les désavouerait dix mille fois si on le jugeait nécessaire. M. Bara, son tour, a protesté avec énergie en sou tenant que la manifestation des zouaves tombait sous l'application du code pénal et en appelant toutes les sé vérités de la justice sur ceux qui l'ont organisée. M. Janson est intervenu en ce moment pour dévelop per avec sévérité un ordre du jour interdisant au cabinet de s'engager dans des négociations en faveur du réta blissement du pouvoir temporel du Pape. Mais M. Frère, voulant rendre possible le vote una nime de la Chambre, a conclu du débat que le cabinet désavouait tout, discours, presse et manifestation, et il a proposé son tour l'ordre du jour suivapt auquel M. Malou s'est rallié en déclarant qu'il répondait sa pen sée, sa conscience fet.à son serment La Chambre, vu les explications et les déclarations du gouvernement,' passe l'ordre du jour. M. Jacobs, ayant réclamé la priorité pour l'ordre du jour de M. Janson, M. Orts a vivement engagé celui-ci se rallier celui de M. Frère, afin de déjouer la tacti que de M. Jacobs qui aurait voulu sans doute exploiter le rejet éventuel du premier ordre du jour. M, Janson persistait en invoquent les plus hautes considérations. Il voulait que la Chambre se pronon çai dès maintenant contre toute tentative du gouverne ment de prendre part des négociations en faveur du rétablissement du pouvoir temporel du Pape. Mais MM. Orts et Frère, le premier se portant garant du pa triotisme de M. Janson, sont parvenus lui persuader qu'après les déclarations du gouvernement on pouvait se contenter de l'ordre du jour accepté par celui-ci, et M. Janson a cédé. Ainsi l'ordre du jour de M. Frère a été adopté par 108 voix et 6 abstentions de la droite (MM. Cruyt De Clercq, E. de Kerckhove, Janssens, Kervyn de Letten- houe et Struye). Ainsi sont désavouées et condamnées par le cabinet et par la Chambre toutes les manifestations dont notre pays offre depuis trop longtemps le spectacle, et il faut espérer que tout le monde s'en souviendra, depuis le nonce jusqu'aux journaux qui le font parler ou parlent en son nom. Ce vote aura du retentissement en Europe. Voici le texte de la déclaration faite par M. lé ministre des affaires étrangères Le nonce, je puis le déclarer, n'a autorisé personne publier les paroles qu'il a prononcées sans prépara tion, dans son hôtel, en quelque sorte dans l'intimité. j> Il ne reconnaît nullement l'exactitude de celles qu'on lui prête, ni le sens qu'on y a attaché. Il n'a ni provoqué, ni eu la pensée de provoquer une prise d'armes des anciens zouaves pontificaux. Il n'a pas davantage reproché au gouvernement du Roi d'avoir oublié ses devoirs envers le saint-siége.

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Le Progrès (1841-1914) | 1877 | | pagina 2