299. Dimanche,
37e ANNÉE.
11 Novembre 1877.
6 FRANCS PAR AN.
JOURNAL D'APRES ET DE L'ARRONDISSEMENT
PARAISSANT LE JEUDI ET LE DIMANCHE.
BULLETIN POLITIQUE.
L'impudence cléricale.
C'est en Belgique que s'est passée l'affaire.
Un curé est dénoncé pour faits d'immoralité
commis sur de petites filles; il passe devant le tri
bunal de Furnes, qui le condamne quatre années
d'emprisonnement.
Vous pensez bien que ce n'est pas là ce qui
m'étonne. Je n'aurais pas pris la plume pour signa
ler d'une façon spéciale un fait que nous voyons
souvent se reproduire.
Nous avons été familiarisés par la lecture delà
Gazette des Tribunaux avec ces abominations,
qui, pour fréquentes qu'elle soient, n'entachent en
rien l'honneur du clergé français. Une corporation
n'en est pas moins respectable, si grand que soit le
nombre de ses brebis galeuses.
Ce qui est inouï, c'est que le clergé, au lieu de
retrancher résolument les membres gangrenés dont
la présence lui fait un si sensible tort, au lieu de
répudier avec une indignation sincère les infamies
dont ils se sont rendus coupables, s'obstine le plus
souvent les niers, ou s'ingénie les couvrir de sa
robe vénérée. Oui, il est arrivé sans cesse, il ar
rive tous les jours que le clergé, en ne voulant
point rompre avec des prêtres indignes, se rend en
quelque façon solidaire des actes qui les ont amenés
devant les juges.
Nous avons un exemple bien curieux de cette
disposition d'esprit dans l'affaire qui nous occupe.
Le prêtre n'avait pas été plutôt condamné qu'une
feuille cléricale, la Patrie de Bruges, insérail la
note suivante
VIRES ACtfL'IKn EliNDO
ABONNEMENT PAR AN: Pour'l'arrondUsement administratif et judiciaire d'Apres. Ir. 6-00
Idem Pour le restant du pays7-00
Tout ce qui.concerne le journal doit être adressé l'éditeur, rue de Dixmude, 30.
INSERTIONS: Annonces la ligne ordinaire fr. 0-10 Réclames la ligne fr. 0-2d.
La majorité sénatoriale n'a su échapper sa destinée
en France. Après avoir amèrement déploré le vote de la
dissolution qui a seul permis au 16 mai d'établir six mois
durant un pouvoir quasi dictatorial, elle se rend, contrai
rement la volonté nettement et itérativenient formulée
du pays, de nouveau solidaire de. la politique de combat.
Elle en relève le drapeau qui gisait terre. A la suite
d'une démarche faite jeudi 9 h. du soir, par les délégués
de tous les groupes de la droite sénatoriale, le maréchal
Canrobert, MM. Depeyre, Bocher, Daru et de Kerdrel,
qui ont été porté au maréchal deMac-Mahonl'assurance
formelle qu'il pouvait compter sur la majorité du Sénat
pour la défense énergique du pays et de la société, le
maréchal a répondu
La démarche que vous faites auprès de moi me
prouve que j'avais avec raison compté sur l'appui du
Sénat pour la politique conservatrice qui, est comme
vous savez, la seule que je puisse servir.
Au lieu de réparer dans la mesure du possible la faute
commise le 22 juin, la majorité sénatoriale la renouvel
le en l'aggravant. Elle pouvait dénouer la crise sans se
cousse en suivant la première impulsion si sage et si
patriotique du centre droit; au lieu de cela elle a entraî
né dé nouveau celui-ci dans une lutte pleine de dangers,
et elle provoque non seulement la Chambre nouvelle
ment issue de suffrage universel, mais le pays tout entier.
Pendant que le Sénat comprend et pratique ainsi
d'une étrange façon son rôle de modérateur, la Chambre
ne se laisse entraîner aucune parole, aucun acte
irréfléchi. Elle a hate de se constituer cet effet, elle a
encore tenu une séance du soir qui doit avoir d'autant
plus avancé la vérification des pouvoirs qu'il avait été
décidé indirectement, la demande de M. Brisson, dans
la séance du jour, que l'on ajournerait toute élection
entâchée de candidature officielle.
Cela ne veut nullement dire qu'il y aura des invalida
tions en masse, mais la majorité saura faire acte d'éner
gie. On cite, parmi les élections menacées d'être cas
sées, celles de Vaucluse toutes les quatre celle de M.
Baragnon Uzès, de M. Amigues Cambrai, de M.
'Delafosse Vire, de M. Rabier du Villars Castellane,
de M. Cadillan Arles, de M. Gelcen Prades.
Le comité dirigeant de dix membres, dont nous avons
parlé hier, a été nommé en réunion plénière des gauches.
Il a reçu des pleins pouvoirs pour garder ses délibéra
tions secrètes.
Ces précautions ne sont pas superflues. Le moment
est grave et la crise est l'état aigu.
La situation est trouble au point que les aspects varient
d'heure en heure. Le bruit de la démission du Prési
dent était en effet, tellement accrédité, un instant,
Paris, que les Tablettes un journal gouverne
mental, l'avaient enregistré sans observation. Depuis le
vent a absolument tourné; il souffle du côté de la ré
sistance.
En parlant de l'allocution du doyen d'âge, M. Dessaux
la Chambre, le Soleil dit qu'il y a eu, au passage rela
tif la défense éventuelle des institutions républicaines,
comme un frémissement sur tous les bancs de la gauche
et du centre, dont les applaudissements prolongés et
soutenus équivalaient presque un nouveau serment
du Jeiu de Paume.
Un télégramme officiel de Kurukdéré, en date du 6
novembre, et transmis de Saint-Pétersbourg, 8, annonce
que les colonnes réunies des généraux Heimann et Ter-
gukassoff ont battu le4, dans un combat qui a duré neuf
heures, sur la position fortifiée de Devi-Boyen, les trou
pes de Ghazi-Moukhtar et d'Ismaïl pacha.
Les Turcs ont fui en désordre, abandonnant le camp,
les prévisions et les armes.
Les pertes sont inconnues.
Des dépêches de Moukhtar pacha confirment cette
nouvelle déroute (voir théâtre de la guerre; amenée par
l'insuffisance des forces que le mouchir avait opposer
l'agresseur, lequel, une première foisbattu, est revenu
la charge, appuyé de renforts et a enfoncé le centre et
remporté la. victoire. Moukhtar pacha est Erzeroum,
Si Chefket est mis dans l'impossibilité de venir au
secours d'Osman pacha, Plevna est au moins aussi me
nacé que Kars et Erzeroum, et peut-être davantage
encore, moins que Mehemet-Ali ne réussisse ras
sembler des troupes suffisantes et parvienne faire une
trouée. Reouf pacha, ne peut quitter son poste l'entrée
du défilé de Schipka, où il occupe de fortes positions.
Biep qu'il ait reçu un renfort de 4,0000 hommes, il est
trop faible pour attaquer les positions russes.
La diplomatie européenne est retombée dans l'inaction
absolue. Elle laisse venir elle les événements.
Elle n'a fait que cela depuis le commencement de la
guerre russo-turque. Lorsque la Russie dictera la paix
la Turquie vaincue, la diplomatie reconnaîtra trop tard
que l'abstention équivaut en certaines situations l'ab
dication.
11 résulte de la réponse faite par le ministre du com
merce de l'Empire au Reichsrath autrichien, une
interpellation relative la rupture du traité de commer
ce avec l'Allemagne, que le gouvernement austro-hon
grois au lieudelaprolongation du traité encore existant,
offerte de Berlin, a demandé la conclusion d'un traité
de commerce sur la base des nations les plus favorisées.
En attendant le compromis austra-hongrois a fait un
grand pas. La Ghambre des députés Pesth, a adopté
par 210 voix contre 409 le projet de loi de la Banque
austro-hongroise comme base de la délibération spé
ciale.
La session législative s'est ouverte hier Versailles.
Il n'en s'est rien passé de bien remarquable. Les minis
tres du 16 mai étaimt présents la séance du Sénat,
mais n'ont pas prononcé une parole. A la Ghambres des
députés, le doyen d'âie a prononcé l'éloge de M. Thiers,
puis M. Grévy a été réélu président par 290 voix contre
170 bulletins blancs. On va s'occuper dès aujourd'hui
des validations des pouvoirs.
On remarquera que le ministère n'a pas demandé au
Sénat un bill d'indemnité ni un vote de confiance. On
croit que s'il le demandait, il ne l'obtiendrait pas.
Gomme d'autre pa 't il est certain que le maréchal
ne consentira aucun prix gouverner avec un minis
tère de gauche, on s'attend généralement ce qu'il
donne sa démission. D'après le correspondant du Times,
on s'attendait même ce qu'elle fût officiellement com
muniquée dès hier.
Aujourd'hui vendredi, le tribunal de Ie instance de
notre ville s'est occupé de l'accusation portée contre M.
Van den Bogaerde, curé de Rousbrugge, poursuivi du
chef d'attentats commis sur quatre petites filles, au cours
de l'annee 1875. M. Van den Bogaerde a été condamné
par défaut. La peine prononcée contre lui est de quatre
années d'emprisonnement, avec ordre d'arrestation im
médiate.
M. Van den Bogaerde est âgé de 56 ans. C'est un des
hommes les mieux connus et les plus considérés de l'ar
rondissement entier. Jamais, danssa carrière sacerdotale
déjà longue, ni Ypres, ni Oostduynkerke, où il exerça
le saint ministère jusqu'en 1873, jamais et nulle part le
moindre soupçon ne s'éleva contre la parfaite honorabi
lité de ce prêtre. Aussi la sentence du tribunal a-t-elle
été accueillie en ville avec stupeur.
Aux yeux des libéraux d'Ypres et de Proven, M. Van
den Bogaerde a eu le tort d'être une de leurs plus redou
tables adversaires; le tort surtout de s'être constitué
l'intrépide défenseur de M. le vicaire de Lancker et
d'avoir plus que personne contribué faire triompher
celui-ci des étreintes de la cour d'appel.
En 1875. M. le curé de Rousbrugge fut obligé de faire
certains parents des réprésentations sévères sur la
conduite de quelques premières communiantes. De là,
paraît-il, l'accusation contre laquelle nos lois, naturelle
ment, ont été impuissantes défendre l'innocence de
l'accusé.
En 1875, M. le curé de Rousbrugge fut obligé
de faire certains parents des représentations sé
vères sur la conduite de quelques premières com
muniantes.... De là, paraît-il, l'accusation, etc, etc