N°38I. Dimanche,
38e ANNÉE.
3 Mars 1878.
6 FRANCS PAR AN.
JOURNAL D'Y PRES ET DE L'ARRONDISSEMENT.
PARAISSANT LE JEUDI ET LE DIMANCHE.
BULLETIN POLITIQUE.
On écrit de Menin, 25 Février, Y Echo du
Parlement
LE
PROGRES
VlItES ACGUiniT EUNDO.
ABONNEMENT PAR AN: Pour l'arrondissement administratif et judiciaire d'Ypres. Ir. G-00
Idem Pour le restant du pays7-00
Tout ce qui concerne le journal doit être adressé l'éditeur, rue de Dixmude, 59.
INSERTIONS: Annonces la ligne ordinaire fr. 0-10 Réclames: la ligne fr. 0-23.
CHEMIN DE FER.
HEURES DE DEPART D'YPRES A
Poperinghe-Hazebrouck. 6-30. 12-07. 6-50.
Poperinghe. 6-30. 9-07. 12-07. 3-57. 6-50.
8-45. 9-50.
Courtrai. 5-34. - 9-46. - 11-20. - 2-35. - 5-25.
Roulers. 7-50. 12-25. 6-30.
Langhemarck-Ostende. 7-00. 12-06. 6-07.
Langhemarck, le samedi, 5-50.
A l'occasion du Carnaval le PROGRÈS ne
paraîtra pas» Jeudi prochain.
Les choses, en traînant en longueur en Orient,
se sont gâtées. La paix n'est toujours pas signée
entre les délégués russes et turcs; la réunion de
la conférence de Baden-Baden est remise en ques
tion, et qui pis est, l'entente est si loin d'être faite
au sujet des conditions de la paix, que le gouver
nement britannique a cru devoir désigner l'officier
qui aura le commandement en chef des armées
anglaises.'
C'eslla un symptôme grave, très grave, car géné
ralement on ne nomme pas un commandant en
chef pour une armée qui n'est pas prête entrer
en geurre. Le chancelier de l'Echiquier a déclaré,
il est vrais, la Chambre des Communes, que lord
Napier de Magdala et le colonel sir Wolseley étaient
seulement désignés pour commander l'armée, et
que leur nomination n'était pas encore un fait ac
compli.
La situation n'eu doit pas moins être fort tendue
pour que le gouvernement anglais^prenne une telle
décision et surtout la laisse publier. C'est particu
lièrement sur la condition relative la garantie de
l'indemnité de guerre par le tribut de l'Egypte, que
porte l'opposition de l'Angleterre.
La cession de la Bessarabie rencontre d'autre part
une opposition loul aussi vive Vienne, parce
qu'elle livrerait la Russie la rive gauche de Danu
be. La France. l'Italie et l'Angleterre, seraient,
dit-on, d'accord sur ce point avec le cabinet de
Vienne. La Russie s'inclinera-t-elle? Là est la
question.
Les déclarations faites la Chambre des com
munes par le chancelier de l'échiquier tendent
affirmer de plus en plus l'altitude énergique que
l'Angleterre est décidée prendre vis-à-vis de la
Russie.
SirStalTord Norlhcole a déclaré, aux applaudis
sements de la Chambre, que si les conditions de
paix, qui ne sont pas encore entièrement connues
jusqu'à présent, louchent d'une façon nuisible aux
intérêts anglais, le gouvernement fera les démar
ches nécessaires pour les défendre et les protéger.
11 a précisé en même temps la portée exacte de
la nomination de lord Napier et de sir Garnct Wol
seley. Ces derniers ont été nommés, il y a 10 ou
12 jours, a-t-il dit, non pas en vued'uneexpédilion
arrêtée, mais pour commander le corps expédition
naire que le gouvernement britannique enverrait
en cas de guerre,
Disons cepeudant que l'impression générale est
aujourd'hui un peu plus pacifique. On télégraphie
de Constantinople que la plupart des conditions de
paix sont adoptées et que la signature du traité est
attendue pour mardi.
C'est la délimitation delà Bulgarie, que les Rus
ses voudraient étendre jusqu'à Salonique et Dede-
agatch, qui arrête les négociations. La question de
la flotte aussi est encore régler.
Les pourparlers sont engagés de nouveau pour 5a
réunion, non plus d'un congrès cette fois, mais
d'une conférence. Cependant on commence se
demander quelle en sera l'utilité?
Lorsque l'Europe était peu près unanime
reconnaître un certain droit de gens, dit le Moni
teur universel, lorsque les puissances étailent d'ac
cord pour admettre certaines règles, certains prin
cipes consacrés par des traités auxquels l'Europe
tout entière avait donné sa sanction, l'utilité d'un
congrès ou d'une conférence était facile discerner.
Tout le monde acceptant en théorie les mêmes idées,
le même point de départ, il élait possible d'arriver
une solution acceptable pour tous. Il n'en est plus
ainsi aujourd'hui qu'il n'y a plus de droit politique
européen et que la force, comme aux époques les
plus barbares de l'histoire, est le seul arbitre recon
nu.
Quant au lieu de réunion de la conférence, le
prince Gortchakoff a proposé récemment Berlin au
lieu de Baden-Baden, afin que le prince de Bismark
pût en avoir la présidence.
On télégraphie de Vienne la Gazette de Co
logne que ce projet a échoué par suite de l'opposi
tion du comte Andrassy, d'abord, ensuite par la
déclaration du prince de Bismark que dans aucun
cas il n'assisterait un congrès où une conférence,
quel que fût l'endroit fixé pour sa réunion.
En tout cas on peut supposer qu'il ne sera sé
rieusement question de celle réunion qu'après si
gnature du traité lurco-russe, la Russie paraissant
décidée n'entrer en conférence qu'avec ce traité
en poche.
Dimanche prochain auront lieu en France dix-
sept élections législatives, l'effet de remplacer des
députés décédés ou invalidés. S'il faut eu croire
certains organes de la presse, les conservateurs
songent entrer en lutte. Ce qui est vrai, c'estque
leur parti s'organise, mais d'une manière qui n'est
peut être pas très favorable leur succès.
Madolena, 20 Février.
La santé du général Garibaldi est rétablie.
Il se seul si bien que, profitant des belles jour
nées, il va presque chaque jour àlapêche en canot.
La nouvelle que le général doive se rendre
Rome est conlrouvée.
Son fils Menolti le désirerait, mais le général n'a
pas le courage d'entreprendre ce voyage.
Des faits scandaleux se sont passés Menin, le
18 Février. C'était pendant l'enterrement du re
gretté M. Gomberl, ancien conseiller communal.
Le défunt faisait partie de la Société royale phil
harmonique, de l'Union libérale, et de la Société
de Guillaume-Tell, dont tous les membres avaient
voulu rendre les derniers devoirs l'ami perdu. La
musique, comme cela s'est toujours faitdepuis
vingt ans et plus, est entrée l'église en jouant
une marche funèbre et drapeau en tête. Je
narre fidèlement ce que j'ai vu, et ce que j'ai
entendu. Les musiciens arrivés près du chœur se
rangent pour faire place la famille Gombert.
Au même moment le doyen sort de fa sacristie
pour aller sous le grand portail recevoir le cercueil,
mais passant côté du porte-drapeau, il lire celui-
ci par la manche et lui dit grossièrement et tex
tuellement Den drapeau aan de deur, ce qui
veut dire Le drapeau la porteComme de
juste, on n'eut garde d'obéir cette injection au
moins impolie, même dans la bouche sacrée de
notre doyen.
Quelques moments après, le domestique, selon
l'habitude, cherche placer le drapeau de la mu
sique devant le cercueil, mais, ne trouvant pas le
trépied traditionnel, il le demande un desservant,
qui lui dit, de la part du doyen, que si le drapeau
ne quitte pas l'église il le fera emporter par la
force. Les musiciens, indignés, surent heureuse
ment se contenir. Ce n'était là qu'un commence
ment de scènes plus graves qui ont failli avoir une
fin tragique.
La plus grande partie de l'assistance, comme de
coutume, avait, après la première offrande, quitté
la maison de Dieu pour quelque café du voisinage.
Partout l'on causait de la grossièreté du doyen et
de son inqualifiable procédé. Le tètes s'échauffaient,
des altrouppements s'étaient formés devant l'église
et la Grand'Place. Car notez que ce jour-là les
fabriques d'Halluin chômaient cause du service
pontifical, plusieurs milliers d'ouvriers se prome
naient pour tuer le temps. L'on avait vu un valet
de l'église se diriger vers l'Hôtel-de-Ville l'éveil
était donné, on s'attendait des choses graves.
Le nouveau brigadier de police, escorté d'un
agent, traverse la Place ils se dirigent vers la rue
de Lille, suivis par au moins cinq ou six cents
personnes et entrent l'église par la petite porte
de derrière. A cette vue une foule immense se rue
par la grande porte et les portes latérales. Les mu
siciens au grand complet se tiennent un pas du
drapeau, tous les cœurs battent anxieusement.