In nouveau bienfait militariste l'horizon.
La Police réciproque.
La Belgique l'Exposition Universelle de
1878.
Après Tournai, après Louvain. des scènes scan
daleuses viennent d'avoir lieu hier Anvers,
l'enterrement civil de M. Louis Spaepen.
Un groupe de jeunes congrégatiislcs qui venaient
en ligne droite de l'église des Uedemptorislcs s'est
mis un moment donné la tète du cortège funè
bre dans le but manifeste de troubler l'ordre et de
rendre les mesures de police impossibles. A la
sortie du corps, ce groupe l'a accueilli par des huées
et des sifflets, et ce n'est que grâce l'intervention
de la police quia opéré sur le champ deux arresta
tions, qu'une bagarre générale pu être évitée.
A ce moment, les meneurs cléricaux essayèrent
de faire une diversion du côté de l'Eglise des Au-
gustins, d'où était également sortie une bande nom
breuse de congréganistes, mais la police ne prit pas
le change et resta autour du cercueil dont 011 cher
chait l'écarter. Au Palais de Justice, le chef de
la bande, dont on avait remarqué les menées inso
lentes devant la maison mortuaire, essaya de provo
quer du désordre. L'indignation du public était telle
qu'il eut pu courir des dangers sérieux, si la police
ne l'eût arrêté Là encore deux arrestations ont été
opérées.
Cette scène scandaleuse avait provoqué dans la
ville entière un sentiment profondd'indignalion ce
sentiment s'est traduit le soir par de formidables
huées qui ont accueilli les XVare Signoren au retour
de leur excursion batailleuse Louvain. On eût
probablement fait un mauvais parti ces stokslae-
gers anversois si la police n'était Intervenue et ne
les eût protégés jusqu'au Cercle catholique place
de Meir, où ces fiers-à-bras se sont réfugiés en at
tendant que la foule qui les avait suivis fut disper
sée.
Cette altitude de nos ennemis est grave, dit la
Flandre libéralemais elle ne nous étonne point:
elle est la conséquence logique de leurs principes
et de leurs croyances. Us se trompent toutefois s'ils
croient que leurs bandes armées parviendront
imposer silence l'opinion libérale. Celle-ci conti
nuera d'affirmer ses convictions comme il luiplait,
parce qu'elle a le droit et la légalité de son côté.
Elle défend laConstitution et les libertés nationales
ce titre, le ministère lui-même ne peut lui refuser
la protection qu'elle réclame. Nous aurons la guerre
civile si l'on veut, mais le pouvoir sera nécessaire
ment avec nous et nous attendons avec confiance
l'issue de la lutte.
Lors des élections législatives de 1874, les feuil
les cléricales, pour détourner l'attention publique
de l'aggravation des charges militaires, votée par la
droite, attribuèrent au libéralisme l'intention de
constituer une réserve pour l'armée, réserve
prendre dans la garde civique.
Le fait était vrai, mais ceque cachaient soigneu
sement les honnêtes feuilles, c'est que leurs amis
du pouvoir avaient les mêmes intentions, et qu'ils
les avaient plusieurs fois exprimées.
Il parait que le gouvernement depuis a quelque
peu modifié sa manière de voir ce ne sont pas les
miliciens qui s'en féliciteront.
Les éléments de la réserve seront empruntés aux
anciennes classes de milice, et au premier ban de
la garde civique.
Et si demain, Dieu ne plaise! des craintes
venaient assombrir notre horizon politique, le gou
vernement ne se générait pas pour rappeler les
anciennes classes de milice, pour avoir le nombre
d'hommes qu'il croit nécessaires la défense du
pays.
Voici les paroles prononcés par M. le ministre
de la guerre au Sénat et répétées la semaine passée
la Chambre
Quant la réserve, c'est une erreur de croire qu'elle
n'existe pas. Le gouvernement peut, iTaprès la loi de
milice, rappeler sous les armes autant de classes de
milice congédiées qu'il le juge convenable.
A la vérité, cette faculté n'existe que jusqu'en 1880.
Mais d'ici cette époque, le gouvernement aura s'oc
cuper sérieusement de la question de l'organisation de
la réserve nationale.
.M. le ministre ajoutait la Chambre
Eli bien! quand vous vous serez prononcés sur le con
cours qu'apportera la garde civique la défense natio
nale, le gouvernement avisera aux moyens de porter la
réserve nationale 30,000 hommes, chiffre reconnu
indispensable par toutes les commissions qui se sont
occupées de la défense du pays.
Dans ces conditions, si la guerre menaçait nos
frontières, l'éventualité n'est pas, hélas! chimé
rique, les anciens soldats paieraient cher la négli
gence de nos cléricaux organiser la réserve. Ils
seraient rappelés jusqu'à concurrence de trente
mille hommes.
Un calcul qui a été présenté la Chamhre cl
qui n'a pas été contesté, fait remonter jusqu'à la
classe de 1860, la dernière qui serait rappeleesous
les drapeaux.
Ainsi, il n'aurait pas suffi au gouvernement
d'avoir passé huit ans au service ou pourrait et
ou devrait encore plusieurs années après, alors
qu'on a peut-être femme et enfants, reprendre le
chemin du camp. Tel est le sort du milicien actuel
lement.
Autaut dire que toute sa vie il dépend du dépar
tement de la guerre, et qu'il ne lui est guère per
mis d'espérer sa complète libération.
Quoi! après son terme de huit ans, il doit rester
sur le qui-vive, et être, pendant de longues années
encore, prêt partir du jour au lendemain!
C'est la combinaisou de nos cléricaux, de nos
soi-disants anti-militaristes; c'est celle qui serait
appliquée si la guerre éclatait, et que les Chambres
auront plus tard discuter.
Il nous semble qu'il serait plus juste, plus
humain, s'il faut absolument une réserve, de la for
mer avec des éléments qui n'ont pas personnelle
ment payé leur dette la patrie, nous voulons dire
avec les jeunes gens composant le premier ban de
la garde civique,de ceux qui ont pris un bon numéro
de la milice, ou qui se sont fait remplacer.
Mais nos cléricaux, parti aristocratique, aiment
mieux faire retomber toutes les charges sur les
petits
11 faut régénérer la Belgique dans un bain de
sang.
Le parti clérical, qui porte la responsabilité de
cette parole infâme, croit sans doute le moment
venu de mettre ses projets exécution et de don
ner le signal de la guerre civile qu'il préparedepuis
tant d'années.
La Patrie, de Bruges, qui déclarait l'an dernier
qu'on devrait mener les libéraux coups de fusil,
estime que l'heure a sonné ou l'autorité civile doit
disparaître pour laisser le champ libre au gourdin
du stockslaeger et au couteau du xavérien.
Après avoir raconté la manière cléricale, c'est-
à-dire en accumulant mensonges sur mensonges,
les scènes qui se sont passées Dimanche Tournai,
le journal pieux s'écrie:
Que l'autorité, tous les degrés, ouvre enfin
les yeux il est plus que temps.
Nous marchons la guerre civile grands pas.
Les catholiques n'entendent plus et ne veulent
plus q .e la loi reste une lettre morte pour leurs
adversaires. Ils n'entendent plus cl ne veulent plus
être traités en parias dans un pays où ils ont tou
jours été en grande majorité, et sous un gouverne
ment de leur choix. Ils sauront se proléger eux-
mêmes si celui-ci est impuissant les faire proléger
par des autorités subalternes, contemptrices des
lois et du droit.
Les faits dont Tournai a été Dimanche le théâ
tre, emportent leur leçon avec eux: dès que le
pouvoir abdique sa plus noble et sa plus impérieuse
mission, celle de prévenir et au moins de
réprimer l'outrage public notre culte et la mo
rale, nous entendons faire nous-mêmes cette police,
quoi qu'il doive nous en coûter et quoi qu'il doive
en advenir. La responsabilité des actes de violence
sera supportée tout entière par ceux-là qui les
auront rendus nécessaires, inévitables.
Le Bien public ne se dissimule pas la gravité
du langage, tenu par la Patrie; mais la vérité
l'oblige reconnaître que ce langage répond aux
sentiments de tous les catholiques, du moment
que l'autorité se fait la complice de la crapule
libérale
Nous nous félicitons même de voir se produire
ces symptômes de résistance. Ils prouvent que,
grâce Dieu, le pays n'est pas assez mùr ou, pour
mieux dire, assez pourri pour subir le joug que le
libéralisme voudrait lui imposer.
Ainsi donc, ditl 'Economie, voilà qui est décidé:
les cléricaux feront désormais la police eux-mêmes
là où bon leur semblera.
De leur côté, les libéraux, ayant encore, vu le
malheur des temps, les mêmes droits que les cléri
caux, rendront œil pour œil et dent pour dent et se
chargeront, eux aussi, de policer leurs contempo
rains.
Ils auront l'œil ouvert sur tous les excès, sur
toutes les provocations, sur tous les scandales dont
leurs adversaires se rendent chaque instant cou
pables.
Et quand les émules desMainbode, desMédision,
des Plutarque, des Vincent, des Kneipp, des Fier-
lefin, des Morrien, recommenceront leurs ignobles
exploits et trouveront aide et protection dans les
rangs du parti clérical; quand des capucins iront,
comme Belœil, traiter les libéraux de misérables,
de bandits et de pourris; quand des prédicateurs
proclameront en pleine ville, commeà Anvers, que
les écoles laïques sont des lupanars et leurs
élèves du bétail de prostitution, les libéraux,
outragés dans leur honneur, dans leurs enfants,
auront, eux aussi, le droit de dire, comme la Pa
trie, comme le Bien public: Dès que l'autorité
religieuse abdique sa plus noble et sa plus impé-
rieuse mission, celle de prévenir ou au moins de
réprimer l'outrage public aux citoyens et la
morale, nous entendons faire nous-mêmes la
police, quoi qu'il doive nous en coûter et quoi
qu'il doive en advenir.
Et les libéraux poticeront les capucins, les petits-
frères et leurs souteneurs, comme Messieurs les
cléricaux affichent aujourd'hui la prétention de
policer la crapule libérale.
Ce sera un bien joli régime, et la Belgique de
viendra un véritable pays de Cocagne.
ii
Voici en quels termes un de nos confrères pari
siens, XIndustrie progressive, apprécie la partici
pation de notre pays l'Exposition de 1878:
La section belge, dont nous n'avons pas encore
parlé, mérite cependant, tous égards, d'attirer
l'attention car l'exposition de celte puissance occu
pera une place considérable dans le concours uni
versel qui se prépare.
La Belgique dispose, dans le haut du Champ-
de-Mars, d'un vaste espace de soixante mètres de
façade qui s'étend de la galerie des beaux-arts
jusqu'en bordure sur l'avenue de Suffren. Son
chantier est l'un de ceux qui occupent le plusgrand
nombre d'ouvriers cinquante environ, dont trente-
sept sont de nationalité belge. Ces ouvriers ne sont
point réunis en corporation comme les ouvriers
chinois, les Japonais et les Suédois. Us vivent par
groupes ou séparément, si bon leur semble, et
reçoivent un salaire raison de tant l'heure, tout
comme nos ouvriers français.
Ajoutons que l'architecte, l'entrepreneur et le
conducteur des travaux sont également belges. Les
belges ont voulu jouir, sans partage, de l'honneur