Letlre pastorale de Mgr Charles, évêque de
Montpellier, au clergé de son diocèse.
Et le clergé n'a été ni moins aggressif ni
moins violent dans notre arrondissement
le vieux thème que, les églises allaient être
fermées paraît abandonné sans doute qu'il
est usé, car on y a substitué les thèses les
plus exagérées et les plus excentriques de nos
enfants terribles.
Ici on prêchait avec le programme de M.
Goblet la main là on gesticulait avec la
Flandre libérale la plupart des prédicateurs
avouaient du reste qu'ils obéissaient un mot
d'ordre et presque tous les sermons débutaient
par cette question.
Le prêtre doit-il s'occuper d'élections
Autrefois, disait l'un de ces énergumènes,
que nous avons entendu j'aurai répondu
non, parce que détait inutile (la raison est
jolie n'est-ce pas) mais aujourd'hui c'est notre
devoir, pour défendre cette religion qu'on
veut persécuter et anéantir et si vous ne
voulez pas voir supprimer Dieu même, vous
aurez voter pour le candidat catholique
Voilà le ton sur lequel on s'adresse nos po
pulations fanatisées en menaçant bien entendu
ae l'enfer quiconque ne votera pas en faveur
du candidat clérical. Quelle influence exer
ceront ces violences sur les votes des électeurs
Le clergé n'a plus les billets marqués et c'est
beaucoup mais il a le confessionnal et reste
voir, si les électeurs ne comprendront pas
qu'ils peuvent émettre leur vote librement
sans devoir en rendre compte leur confesseur-
Cette conduite de notre clergé, contraste bien
vivement avec celle que les plus éminents
prélats de France ne cessent de recommander
leur clergé que nos lecteurs en juge par
les extraits suivants
indique assez qu'il n'entre dans l'intention de per
sonne de les supprimer
Mais la preuve que tous vos griefs sont chimé
riques et ne constituent que des machines de guer
res, c'est que depuis 1870. que vous êtes au pou
voir, vos hommes d'état n'ont jamais songé
modifier aucune des lois votées sous le régime lïbé- i
ral. Si ces lois avaient été si mauvaises, si elles
avaient porté atteinte votre conscience, votre de
voir était d'en demander l'abrogation. Vous n'en
avez rien fait, parce que vous savez fort bien que
toutes vos récriminations ne constituent qu'une
ignoble comédie.
.Mais gare, dit le Journal, si les élections du
Il Juin ne maintenaient pas le ministère calholi-
>j que! Eh bien, où serait le mal; depuis que
l'on a inauguré lere du soulagement universel,
nous ne respirons plus en liberté et nous voyons
tarir peu peu toutes les sources de la richesse pu
blique. Eh bien, si le ministère clérical venait
disparaître, nous verrions renaître une ère de liber
té d'aisance et de prospérité, comme nous avons
eu avant 1870.
Electeurs, choisissez le pays ses yeux sur
vous, il attend sa délivrance
Mais admirez cette logique! Voilà que nous vou
lons voir disparaître la religion et jusqu'à Dieu et
voulez-vous savoir pourquoi? Parce que nous vou
lons voir l'état ériger partout des écoles. Mais notre
Constitution le prescrit ainsi et est-ce une raison
pour que nous exigions que la religion fut exclue
de l'école vous nous calomniez pour nous signaler
la haine et la défiance des populations. Vous
nous prêtez des théories que nous répudions de
toutes nos forces, mais si nous voulons que le prê
tre enseigne les dogmes de la religion, nous ne
voulons pas qu'il pose comme condition de son
concours, qu'il sera le maître suprême de tout ce
qui touche l'école. Or. telle est sa prétention. Il
veut la domination là comme ailleurs, tandis que
nous voulons la liberté pour tout le monde. De
quoi donc se plaint-il
Mais ce n'est pas tout. Voici qu'on nous impute
un autre forfait. Nous voulons arracher les âmes
l'église. Mais Dieu nous en garde! Nous n'avons
pas charge d'âme et nous n'avons pas compétence
en cette matière, c'est assez dire que nous ne nous
en mêlons pas notre vœu le plus ardent est au
contraire de voir entrer au Ciel le plus dames
possible et nous reconnaissons que c'est là l'affaire
du clergé. Que voulez-vous de plus? Mais lorsque
ce même clergé sort de ses attributions pour s'im
miscer dans les affaires temporelles et vouloir tout
dominer et tout régenter, nous nous demandons
quels titres il a pour justifier ses prétentions et
nous le combattons.
Mais voyons qui sont ces petits vicaires qui ont
ia prétention de tout moriginer, si ce n'est pas pour
la plupart des jeunes gens de la campagne qui,
après avoir fait d'ordinaire des éludes fort incom
plètes, sont allés apprendre au séminaire balbu
tier un peu de latin et se figurent que le tricorne et
la soutane leur imposent la mission d'aller semer la
division et la discorde dans les villes, dans les villa
ges et jusque dans les familles.
Ils appellent cela combalre pour leur liberté.
Mais nous le demandons tous les hommes raison
nables, que devient alors la notre
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Sans doute, tant d'intrigues et de violences doi
vent affaiblir le sentiment religieux et porter at
teinte au respect dont était entouré jadis le prêtre.
Mais est-ce notre faute? Ne sachant quoi, ni
qui s'en prendre, nos adversaires prétendent que
le libéralisme est transformé. Erreur, ils voient la
paille dans l'œil d'autrui. et ne s'apperçoivent pas
qu'ils ont une poutre dans le leur.
Sans doute, il peut y avoir ci et là dans le camp
libéral et cela a été de tout tems des irréguliers
qui, froissés par les prétentions exorbitantes du
clergé, émettent leur tour quelque idée exagérée
et titre de représailles, s'attaquent même lui,
sur le terrain religieux mais la très grande majo
rité des libéraux reprouvent ces exagérations et
demandent purement et simplement que le prêtre
cesse de s'immiscer dans les affaires temporelles.
Ainsi, on croit nous écraser avec les program
mes qui ont paru ces derniers jours, celui de
M. Goblet, par exemple, qui n'a pas même trouvé
un seul défenseur parmi les membres libéraux de la
Chambre. Eh bien, ce programme est nos yeux
une œuvre de pure fantaisie, et loin de le défendre,
nous le désavouons de toutes nos forces. Nous ne
voulons en effet aucun prix
1° Ni de la révision de la Constitution,
2° Ni de la suppression du Sénat,
3° Ni de l'abolition de l'inamovibilité des juges,
4° Ni de la nomination des magistrats tous les
degrés par voie élective,
d° Ni de la suppression des traitements du cler
gé,
6° Ni de la substitution du protestantisme au
catholicisme.
Ce sont là des fantômes que M. Hynderick ré
pudie comme nous et qui n'ont pas plus de chance
d'être réalisés sous uu ministère libéral que sous
un ministère catholique. Quant nous, nous
serions des premiers combattre ces principes, si
on voulait les ériger sérieusement en programme.
Sans doute une transformation s'est opérée, de
puis une trentaine d'années, mais c'est dans le par
ti clérical; jadis, la plupart de nos catholiques et
même beaucoup de membres du clergé étaient de
l'école des Montalembert et des Lacordaire ils
voulaient la liberté en tout et pour tous cette
époque M. Malou était aussi ministre; il représen
tait alors la fraction la plus orthodoxe, pour ne pas
dire la plus exagérée de son parti et il avait si bien
le sentiment du danger que ses principes pou
vaient faire courir au pays, qu'il disait lui-même
que un cabinet de six Malous était impossible.
Depuis lors on a fait du chemin dans le camp clé
rical M. Malou est devenu le chef delà nuance
la plus modérée. Et prétendra-t-on que c'est lui
qui est changé Evidemment non, c'est son parti,
qui a vu condamner, par le Pape, toutes les liber
tés inscrites dans notre Constitution, et qui travaille
y substituer les principes de l'Encyclique et du
Syllabus.
Mais qu'est-ce que le Syllabus Nous le dirons
Samedi.
Hier, les voûtes de nos vieilles églises ont retenti
non pas des paroles de l'Evangile, mais d'impréca
tions électorales contre le libéralisme. Rien ne
peut donner une idée des violences delangage aux
quelles le clergé s'est livré. Nous savons que depuis
plus de trente ans, la veille de chaque élection,
on a recours ces moyens et on ne manque jamais
de prédire que si les libéraux l'emportent, les égli
ses seront fermées, les prêtres poursuivis et les
couvents supprimés. Ces mensonges, ces colomnies
ne trouvent plus de crédit chez les gens sensés c'est
tout au plus s'ils peuvent avoir du succès chez des
campagnards fanatisés. Et, en effet, comment faire
accroire des gens qui jugent par les yeux, du
corps et de l'esprit, que les libéraux persécutent la
religion et le clergé? Quand, iby a huit ans, ils
remirent le pouvoir aux cléricaux, il y avait près
de dix-huit ans qu'ils l'occupaient. Le temps ne
leur avait donc pas manqué pour mettre exécu
tion leurs sinistres projets. Eh bien, la slatisque
prouve que jamais le clergé n'avait été plus riche,
plus nombreux, et que le chiffre des couvents et
des religieux s'était accru dans une proportion
inouïe.C'est sous le ministère libéral que les traite
ments du clergé ont été augmentés et que les églises
ont été restaurées avec un luxe qui exclut toute
idée de les fermer ou de les démolir. Des Iraces de
persécution nulle part.
Le prêtre, a-l-on dit encore, hier, est banni des
écoles. Mensonge. C'est lui qui refuse de s'y ren
dre
On alarme la propriété.
Qui l'a frappée si ce ne sont ceux qui ont aug
menté tous les impôts, et particulièrement l'impôt
foncier?
Les gens véritablement religieux, souffrent de
voir la religion ainsi abaissée jusqu'au rôle d'instru
ment politique, manœuvrant l'église même, et ils
se disent que si la Foi était menacée, ce serait par
les excès de ceux qui oublient qu'elle doit avoir
pour compagne inséparable la Charité.
Mon royaume n'est pas de ce monde, a dit
le Christ. Aussi étaient-ils de véritables chrétiens
ces prêtres qui, au Congrès national, traçaient une
ligne de démarcation infranchissable entre le do
maine civil et le domaine religieux.
Voici, entre autres, ce qu'un brugeois.M. l'abbé
Defoer, directeur du couvent des Dames Anglaises
et représentant du pays, disaità ce sujet la Cham
bre, en 1840
Le pouvoir des érèques est limité aux commandements
de Dieuaux commandements de F Eglise et aux lois
canoniques. En dehors de ces lois, il n'exerceutplus aucune
autoritéaucun pouvoir. C'est par ce's lois que les
membres du clergé connaissent leurs devoirs et les évêques
leur pouvoir. S'il n'en était pâs ainsi, toutes lés actions
humaines, même les plus indifférentes, seraient livrées
F arbitraire et Va confusion les plus épouvantables.
Dans l'ordre ecclésiastique, comme dans l'ordre civil, ce
h sont les lois qui établissent les droits et les devoirs.
Or, IL N'EXISTE AUCUNE LOI ECCLÉSIASTIQUE QUI
ATTRIBUE AUX ÉVÊQUES D'INTERVENIR PAR VOIE
D'AUTORITÉ DANS LES ÉLECTIONS, ET AUCUNE LOI
QUI ORDONNE AUX CURÉS ET AUX FIDÈLES DE SUI-
VRE A CET EGARD LA PRESCRIPTION DES ÉVÊQUES.
Ainsi, c'est un véritable abus d'autorité que de
peser sur les consciences et de les alarmer pour les
questions politiques, les commandements de Dieu
et de l'Eglise ne parlant point élections et choix de
candidats.
Donc. Le bourgmestre l'hôtel-de—ville, le curé
l'église, et l'électeur libre dans son vole, désor
mais secret inviolable. Telle est la loi.
Journal de Bruges).
Les luîtes électorales, vous le savez sans doute,
M. le curé, vont recommencer au milieu de nous
elles seront ardentes, acharnées peut-être.