Instruction de Mgr Sibour, Dans celle prévision, nous avons cru qu'il était de notre devoir de vous tracer d'avance la ligne de conduiteque vous avez suivre,et de laquelle nous désirons que vous ne sortez pas. Quelles que soient les opinions qui divisent le pays, les hommes qui les professent sont nos frères. Nous avons la charge de leurs âmes nous les chérissons tous dans les entrailles du Sauveur. Comme l'apôtre, nous n'oublions pas que nous sommes les débiteurs de tous, et que. comme lui encore.nous sommes tous tous pour les gagnertous J.-C. Ce que nous attendons de vous, Mle curé, ce que nous vous recommandons expressément dans celte circonstance, c'est une stricte et sévère neutralité cette neutralité, la sagesse de laquelle tous les partis, après le moment de la lutte et de la colère, sont obligés de rendre hommage, et que vous prescrivent également les saints intérêts de notre ministèrel'opinion de tous les hommes graves, et nous pourrions le dire, la conscience chrétienne en général. Ce n'est jamais sans danger que le prêtre descend dans l'arène de la politique la charité en souffre, la dignité du sacerdoce y perd, la sainteté de la parole divine est compromise. Une partie de son troupeau s'éloigne dd pastecr, et pleine contre lui de ne cesse de le poursuivre de ses accusations et de ses vengeances. Combien parmi vos collègues, M. le curé, qui ne peuvent attribuer qu'à une cause pareille les ennuis dont ils se plaignent, les embarras de toute espèce qu'on leur crée chaque instant De là des maux incalculables la reli gion rendue solidaire de l'imprudence de quelques- uns de ses ministres, notre mission divine mécon nue, et les âmes se perdant, parce quelles ne voient plus en nous les représentants seulement de J.-C. Ah! ne soyons jamais des hommes départi restons dans notre sanctuaire au pied de la croix, c'est là qu'il faut attendre nos frères, les appeler autour du divin maître, pour les apaiser, les réconcilier entre eux leur parler de Dieu et de leurs âmes, des destinées de ces âmes auprès des quelles les plus grandes choses cl ici-bas et les destinées même des empires, sont si peu de chose en réalité. Vous voudrez donc, M. le curé, pendant la lutte qui s'engagera bientôt, vous placer au-dessus de toutes les insinuations de quelque part qu'elles vous viennent, et demeurer entièrement neutre. Nous ne vous laisserons pas ignorer que tout ce qui serait fait par vous, contrairement aux pres criptions de notre présente circulaire, encourrait de notre part un blâme dautant plus sévère, que nous ne saurions jamais comprendre autre ment nos devoirs envers l'église et envers le Roi, auxquels nous lient d augustes et solennels serments, que nous devons et que nous voulons garder. archevêque de Paris, au clergé de son diocèse^ Il faut nécessairement, nos très-chers coopé- rateurs, que dans notre conduite, avec les fidèles, nous demeurions étrangers ces opinions, ces partis, quelles que soient d'ailleurs nos convictions et nos sympathies. Le prêtre qui, dans sa vie sociale, dans ses rapports officiels et 'journaliers avec le monde, se mêlerait aux débats passion nés de la politique celui surtout qui, dans l'accomplissement des devoirs de son saint mi nistère, et particulièrement dans la prédication de la parole divine, oubliant le respect dû la chaire chrétienne, la transformerait en une espèce de tribune, ou seidement s'y permettrait des allusions plus ou moins directes aux affai res politiques et ceux qui y prennent part, celui-là aurait bientôt compromis, avec son caractère de prêtre, les intérêts augustes de la religion celui-là, frappant lui-même sa fift et son zèle de stérilité, rendrait d'avance infruc tueuses toutes les œuvres de son sacerdose, au moins l'égard de ceux dont il aurait froissé les sentiments par ces démonstrations desprit de parti, démonstrations dès lors plus coupables encore qu intempestivesvéritablement crimi nelles aux yeux de DlEU comme aux yeux des hommes. On s'occupe beaucoup, tant en ville que dans les campagnes, de la situation plus qu'équivoque de Monsieur Surmont de Volsberghe, commissaire d arrondissement, membre de la députation perma nente, et en même temps candidat clérical. La fameuse circulaire de Monsieur Kervyn (Baro) sur l'abstention des fonctionnaires dans les luîtes élec torales serait-elle tombée en désuétudedepuis 1870? Serait-elle par hasard une lettre morte, quand ceux, vis-à-vis desquels elle trouve si bien son application, sont des cléricaux? On se dit avec raison, que, pour nommer le grand aigle? qui l'on veut faire une œuvre de charité ou dont on veut satisfaire l'ambition, il eut été beaucoup plus simple de faire une nomination définitive, sans passer par cet intérim de huit mois, qui ne peut s'expliquer, que par le désir de Mon sieur Surmont de se ménager un triomphe facile. Tous ceux, même de nos adversaires qui ont conservé quelques traditions de loyauté dans les luttes politiques, trouvent celte conduite, pour ne pas dire scandaleuse, du moins d'une indélicatesse, qui cadre parfaitement avec celle phrase mémorable du mandement de Monseigneur Malou que le choix des moyens légaux et honnêtes est une chose tout-à-fait accessoire. El dire que le gouvernement, qui connait offi ciellement celte candidature, pousse la complaisance jusqu'à laisser en place ce commissaire, qui est déjà légalement inhabile occuper cette fonction, que la loi déclare incompatible avec celle de membre de la députation permanente. Monsieur de Broglie et de Fourlou, de triste mémoire, n'eussent pas fait plus fort. Aussi pensons-nous, que, si,contre toute attente, M. Surmonl de Volsberghe, qui est le candidat et du clergé et du gouvernement et de la province obtenait la majorité des suffrages, qu'il aurait pu s'assurer ainsi par le plus scandaleux abus de pou- voirie premier devoir du Sénat serait d'examiner, si cette élection ne devrait pas être considérée comme le produit de la pression gouvernementale la plus éhonlée, qui se soit affirmée depuis 1830. Nous avons démontré, en invoquant des docu ments irrécusables, que le parti clérical, après avoir par une nécessité de circonstance adoré en 1830 ce qu'il excommuniait en 1815, abandonne insensiblement le culte des faux dieux pour fléchir le genou devant le seul véritable. En remontant plus haut dans l'histoire, il ne serait pas difficile de prouver que toujours il a fait la guerre au pou voir civil en se couvrant du manteau de la religion, et que les excommunications lui ont servi toutes les époques selon les besoins de sa domination politique.Cette fois encore, l'entendre,la religion est en péril il jette des cris d'alarme, et pour donner ses lamentations une apparence de fon dement, il invoque les opinions personnelles de l'un ou l'autre personnage, écrivain ou journal et, généralisant leur doctrine, il la transforme en spectre pour effrayer ou troubler ceux qui font sa force dans les luttes électorales, les simples et les ignorants. On ne peut pas pousser plus loin la mauvaise foi. En effet, le libéralisme, et c'est précisément ce qui le distingue du cléricalisme, veut la liberté de conscience, la liberté de tous les cultes et de toutes les opinions il laisse chacun le droit de suivre ou de pratiquer ce qui lui paraît le mieux assurer son bonheur dans le présent et son bonheur dans l'avenir. D'où suit que le jour où auraient disparu les diverses nuances qu'il embrasse, il aurait lui- même cessé de vivre car chez lui, le mouvement c'est la vie. Le cléricalisme, au contraire, c'est l'immobilité toute discussion est proscrite il trace avec la crosse un cercle autour de la cons cience humaine et il jette au bûcher ceux qui osent le franchir. A cause de cette intolérance spiri tuelle, il lui faut le glaive temporel pour mieux garder les limites imposées la pensée. Chez lui, le mouvement serait la mort. De là suit encore qu'au sein du libéralisme dont l'horizon ne connait pas de bornes, il se rencontre des hommes professant des opinions philosophiques ou religieuses pouvant parfois être plus ou moins incompatibles avec tel dogme ou tel culte déter miné mais cause de cette diversité même, la tolérance est de son essence comme l'exclusivisme est de l'essence du catholicisme. L'arme du pre mier, c'est la libre discussion et la persuasion l'arme du second, c'est le commandement accom pagné de foudres. De là celle autre conséquence que le culte catho lique étant celui de la grande majorité des Belges, les systèmes ou les nuances dont les opinions sont plus ou moins en opposition avec les principes qui forment la base de celle religion, n'ont guères de chances de succès dans notre pays. Au contraire, les nuances du parti libéral qui ne s'occupent pas de théories religieuses, mais qui les tolèrent tou tes qui séparent nettement la religion de la poli tique et bornent leur rôle principal appliquer loyalement et largement les principes sortis vain queurs de la lutte de 1830 eta combattre le despo tisme d'où qu il descende, du Vatican ou du Trône des Rois, de la tour des Eglises ou du haut des beffrois,celle fraction du libéralisme forme la véri table armée des soldats de la liberté, et elle serait invincible, si le parti clérical glanant dans ce champ si vaste et profilant de l'ignorance des masses, ne réussissait exploiter adroitement les inconsé quences de certains hommes politiques qui, tout en proclamant la nécessité de la séparation de l'E glise et de. l'Etat, descendent eux-mêmes sur le ter rain religieux pour résister l'envahissement du despotisme clérical. Lors donc que le clergé tonne en chaire contre les doctrines anti-catholiques au point de vue religieux, il ne fait que remplir son devoir, et il en a le droit en vertu même des prin cipes qui forment la base du libéralisme; il reste dans son rôle quand, sur ce terrain, il défend les vérités fondamentales delà religion; mais il se fait marchand lorsque, n'ayant en vue que les intérêts de son pouvoir temporel, il travestit les principes et les hommes en généralisant des opinions indivi duelles; lorsque sciemment et dans l'intérêt de la politique, il attribue des sentiments de haine contre l'Eglise les efforts de tant de courageux et honnêtes citoyens combattant uniquement pour échapper l'asservissement d'une caste qui, par tout où elle a dominé, n'a entraîné après elle que la honte et la misère. Aujourd'hui comme toujours, il recourt encore cette ruke deguerre.Le nom de M ,Gobletaccoléà celui de MLaurent retentit dans toutes les Eglises; les opi nions religieuses de ces 2 hommes sont, en croire les prédicateurs, le programme de tous les anti-cléri caux. Ils n'ignorent pas cependant que ces opinions n'engagent en rien le libéralisme qui plane libre ment au dessus de toutes les croyances; que nous ne reconnaissons pas parmi nous de pouvoir dog matique, et que chacun de nous garde son entière indépendance au point de vue de ses convictions religieuses. Mais ils savent tout aussi bien, que leur trône est fragile, qu'ils doivent l'élayer l'aide de mensonges et de travestissements, et que le jour où le peuple verrait plus clair, il se soulèverait indigné pour le détruire en marquant de la nouvelle croix les hommes d'ordre et de progrès qui, la Constitution la main, défendraient la liberté des luttes avec non moins de dévouement et d'abnéga tion que les prérogatives de l'autorité civile. Tous les amis de la langue flamande auront vu avec plaisir que l'ordre de Léopold venait d être décerné M. Blieck de Wervicq. M. Blieck est comme on sait un littérateur distingué et il a puis samment contribué faire rendre justice la lan gue flamande. colère. elle repousse son ministere sacré elle rà-.

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Le Progrès (1841-1914) | 1878 | | pagina 3