41* année.
14 Juillet 1881
6 FRANCS PAR AN.
JOURNAL D'YPRES ET DE L'ARRONDISSEMENT.
M. Jaosoo.
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Ypres, le 13 Juillet 1881.
Au moment où nous écrivons ces lignes, une
crise ministérielle est imminente les sept repré
sentants scissionnaires persistent, en effet, vou
loir voler contre la loi sur les députa lions perma
nentes et quoiqu'en disent certains journaux, ils
supporteront toute la responsabilité de la crise
qu'ils auront provoquée presque toute la presse
libérale du reste est d'accord pour flétrir leurs pro
cédés comme le dit fort bien un organe autorisé,
la réforme électorale n'est ici qu'un prétexte el les
opposants cherchent tout bonnement satisfaire les
uns leurs rancunes ou leurs haines et les autres
leur ambition on ne saurait expliquer sans cela
la persistance qu'ils mettent vouloir nous dot' r
du suffrage universel que l'on s'enthousiasme
pour tel ou tel principe, soit mais un systè
me électoral n'emplique pas des questions de prin
cipe; il n'est que le moyen le plus facile el le plus
propre les faire prévaloir or le suffrage univer
sel serait certes le régime le moins propre faire
triompher les principes libéraux nous aurions
combattie les jefkes et autres congréganistes de
toute espèce, qui sont la merci du clergé. Mais
nous dira-t-on, on ne demande que l'adjonction
des capacités c'est une grande erreur, on veut
pousser la réforme jusqu'à conférer les droits élec
toraux quiconque sait lire el écrire or une
semblable capacité est nos yeux dérisoire et
la réforme équivaudrait au suffrage universel.
Où irions-nous du reste, si sur chaque question
donnée, les membres dissidents de la majorité
allaient se coaliser avec leurs adversaires, pour
faire niche au ministère? Mais aucun gouvernement
ne serait plus possible; ainsi, il y a certes la
Chambre plus de sept anti-militaristes, eh bien, si
ceux-ci allaient dire plus d'armée ou bien nous
votons contre le ministère; celui-ci devrait-il
céder? L'odieux de ce procédé saule aux yeux et
si ceux qui s'en rendent coupables ne le sentent
point, c'est qu'ils cèdent non pas leurs convic
tions, mais leurs rancunes et leurs jalousies.
Depuis quand d'ailleurs la minorité pcul-clle
imposer la loi? Certes, si le corps électoral était
consulté, pas un électeur sur dix ne voterait la
réforme préconisée par M. Janson et cette réforme
nous paraît d'autant plus inopportune que les inté
ressés eux mêmes ne la réclament pas. Loin de là,
car si, au lieu d'étendre le droit de suffrage, on
consultait aujourd'hui tous les électeurs dix
francs, nous sommes convaincus que la plupart,
d'enlr'eux préféreraient ne point l'être.
Nous avons d'ailleurs vu fonctionner le suffrage
universel dans divers pays et nulle part nous ne
l'avons vu produire des résultats qui nous semblent
dignes d'envie.
D'après nos renseignements particuliers, un
arrangement interviendra la dernière heure.
Quelques députés présenteront une proposition
d ajournementlibellé de manière ce que la
majorité, l'opposition cl le ministère puissent s'y
rallier.
Tel est, il faut bien le dire, le vœu de tous les
libéraux.
Ou le gouvernement cédera sur l'heure, en pre-
uanl engagement qui fait l'objet de l'ultimatum de
M. Janson, ou il sera renversé, si le maintien du
ministère dépend de M. Janson el de ses amis.
C'est !e dilemme qui a été posé vendredi par le
leader de l'extrême gauche. 11 n'y a plus se
méprendre sur les intentions qui animent ce grou
pe de la majorité et sur le but qu'il poursuit. Si le
doute avait été possible jusqu'aujourd'hui, le nou
veau discours de M. Janson, dit VEcho du Parle
ment, ne laisserait plus debout la moindre
équi\oquc.
C'est la guerre déclarée au gouvernement, aux
ministres personnellement, car c'est la question
personnelle qui paraît ici jouer le rôle propondé-
ranl. Ce sont les ministres actuels que l'on vise;
ou ils se convertiront la religion nouvelle de la
substitution de la capacité au cens, ils suivront
M. Janson dans les aventures du suffrage universel,
ou ils s'en iront. 11 y a là un obstacle, M. Janson
et ses amis sont décidés le briser.
C' st par la menace qu'on procède.
Quant aux conséquences de la situation que l'on
crée aux membres du cabiuet, c'est peine si M.
Janson s'y arrête. La majorité libérale est de 16
voix, quoiqu'il arrive, que le cabinet reste ou qu'il
s'en aille, il y aura d'autres ministres,des ministres
qui proposeront une réforme électorale, daus le
sens des injonctions de M. Janson et de ses amis,
puis, voilà tout
Voici bien le bout de l'oreille qui perce. Déjà
jeudi il était aisé de comprendre par les interrup
tions de M. Janson qu'un changement de ministère
lui paraît la chose la plus simple du monde. N'est-
il pas là, au besoin, avec ses amis pour prendre le
pouvoir. C'est une éventualité qu'il ne paraît nulle
ment redouter et qu'il semble même accepter d'un
cœur léger.
Mais où est la majorité qui soutiendra le cabinet
radical.Cette majorité n'existe pas dans la Chambre,
telle qu'elle est actuellement composée. La majo
rité n'est pas radicale. Elle n'est pas révisionniste;
elle ne veut pas d'une réforme électorale qui dans
un avenir peu éloigné amènerait la révision de
notre pacte fondamental un ministère., qui se
constituerait pour satisfaire les aspirations de M.
Janson, et de ses amis, n'aurait qu'une existence
éphémère et si on prend le cabinet nouveau parmi
ceux qui sont hostiles au mouvement provoqué
par M. Janson tout se réduit un changement de
personnes, rien de plus, sans profil pour la réfor
me même que la gauche radicale veut enlever par
la force et sous l'empire de menaces justement
qualifiées de honteuses par M. le ministre des
affaires étrangères.
La situation, on le voit, ne s'éclaircit pas; elle
s'aggrave au contraire, dans des proportions telles
que les événements les plus redoutables pour le
parti libéral peuvent en résulter. Qui jubile en ce
moment, c'est le parti clérical pour lequel la levée
des boucliers de l'extrême gauche est une bonne
fortune inespérée.
Une vive émotion s'est emparée de la Chambre
après le discours de M. Janson. La plupart des
membres ont quitté leur siège; la Chambre ne
s'est plus trouvée en nombre pour voler un projet
de crédit qui avait été mis en délibération.
Au début de la séance la Chambre a repris le
vote de jeudi, elle a adopté par 58 voix contre 39
la proposition de M. le ministre de l'intérieur ten
dant renvoyer une commission spéciale l'examen
des projets de loi de délimitation de communes.
On lit dans le Journal de Gand
M. Janson a du mois le courage de ses opinions. lia
posé au gouvernement et la majorité un dilemme
devant lequel un homme politique eouscient de ses de
voirs eût reculé Ou bien, dit-il la gauche constitu
tionnelle, vous et le ministère ferez campagne avec
nous, ou bien nous voterons contre vous et le cabinet
sera renversé.
Il est vrai qu'avec une incroyable présomption et une
non moins incroyable légèreté, M. Janson ajoute: Nous
serions désoles de perdre le cabinet, tout ce que nous
désirons c'est le secouer pour le faire sortir de sa tor
peur. Nous voulons sauver le parti libéral et pour cela
les homme ne feront pas défaut, si le cabinet se retire.
Les amis de M. Janson avouaient depuis longtemps
que, parvenu la Chambre, il s'y montrerait bien
inférieur ce que l'on attendait de lui; mais, franche
ment, personne ne s'attendait trouver chez le député
qui, pour conquérir une popularité malsaine, s'obstine
dans une attitude aussi incorrecte, un tel manque de
sens commun et de prévision.
Il est clair que M. Janson ne comprend ni la situation
du parti libéral, ni les obligations des libéraux quelque
nuance qu'ils appartiennent il est tout ausi clair qu'il
ne se rend pas compte de la gravité des événements que,
d'un cœur léger, il se déclare prêt provoquer.
Cette coalition entre l'extrême gauche et la droite,
niée par M. Janson, est un fait attesté par les antécé
dents du parti catholique, par les témoignages de joie
immodérée qui nous trouvons dans la presse cléricale,
par l'appui donné au sein même de la Chambre aux
motions tapageuses de MM. Janson et Dëfuisseaux par
les organes les plus autorisés de la droite.
11 n'est personne qui puisse deviner de quels miracles
d'équilibre M. Janson attend le salut du parti libéral,
en débit de la crise si inopportunément provoquée. Si
les réformistes possèdent le moyen de conjurer la crise
après l'avoir fait naître plaisir, que ne nous initient-ils
leurs intentions, voies et moyens.
Nous sommes attachés sincèrement au cabinet actuel,