Le feu est ouvert.
Élections communales.
Dans les grandes yilles mêmes, nos adver
saires engageront le combat, mais ce parti y
est tellement impopulaire, l'opinion publique
le condamne ce point, qu'il a honte de son
drapeau, il est obligé de le cacher, de le met
tre dans sa poche, et, couvert d'un masque, il
se présente au scrutin.
Voilà où est descendu ce parti les popula
tions intelligentes et éclairées ne veulent plus
en entendre parler, tant elles ont horreur des
manœuvres jésuitiques que l'on emploie, et il
suffirait un candidat d'arborer franchement
le drapeau clérical, pour qu'il soit certain d'é
chouer de la façon la plus misérable.
Dans les campagnes, les vexations du clergé
ont produit un etfet considérable et les faits
odieux la charge des prêtres, qu'a indiqués
l'enquête parlementaire, auront pour consé
quence d'engager les cultivateurs de mettre
un terme ce joug insupportable qui n'a que
trop longtemps déjà pesé sur eux.
Le Journal dYpres ouvre le feu... Il convie
tous ceux qui ont se plaindre se coali
ser, et quelque soit le résultat possible
{irotester par leur voteOn tentera donc la
utte mais en guise de protestation seulement,
moins que d'ici là Mgr de Bruges n'ordonne
de faire un suprême effort.
Ce qui semble du reste beaucoup déconcer
ter nôtre confrère, c'est qu'il n'a point réussi
souffler la division et la discorde entre
vieux et jeunes, entre ardents et encombrants»
il n'a pourtant rien négligé pour cela et, vrai
ment tant d'efforts étaient dignes d'une meil
leure réussite. Aussi les jeunes, que Bazile
a tant cajolés lorsqu'il voulait leur faire tirer
les marrons du feu, ne valent plus guères
mieux que les vieux, les uns et les autres
suivent en somme la même politique et font
tout autant de mal....
En somme, pour plaire Bazile, nous eus
sions dû nous chamailler et nous diviser afin
d'ouvrir une petite brèche, par où ses amis eus
sent pu s'installer l'Hôtel-de-Ville.
Avouez que c'eut été par trop godiche et nos
adversaires devraient savoir, par expérience,
que nous n'aimons pas le rôle de dupes. Bazile
se fait pourtant si humble et si petit écoutez
plutôt: Tout ce qu'il voudrait ce serait d'intro
duire dans le Conseil quelques voix discor-
r> dantes qui pourraient se faire entendre doù
tout contrôle est exclu. Ainsi ce n'est pas
la majorité .que nos adversaires demandent,
bien loin de là; mais une petite minorité pour
pouvoir exercer un petit contrôle.
Et dire que les électeurs ne lui accorderont
même pas cela
Mais si un Conseil Communal homogène est
une chose détestable s'il est désirable que
la minorité y soit représentée, pourquoi nos
adversaires ne s'empressent-ils pas de céder
quelques sièges aux libéraux àBruges.Courtrai
Koulers.Poperinghe,etcDans toutes ces villes,
les Conseils communaux sont homogènesau
cune voix discordante ne s'y fait entendre et
tout contrôle en est sévèrement exclu. Or,
loin de songer modifier cet état de choses,
M. de Cock, le Président de l'Association Clé
ricale de Bruges, demande ce que le Conseil
reste homogèneparce que intérêt général de
son opinion et la bonne administration le de
mandent ainsi. Et s'il en est ainsi, pour
quoi ce qui est bon et désirable dans l'intérêt
d'une bonne administration Bruges, Cour-
trai, etc., ne le serait-il pas Ypres Pourquoi
deux poids et deux mesures Espérons que le
Journal nous expliquera cela. Sa réponse
nous intrigue.
Bazile trouve aussi fort mauvais que la plu
part des services publics ne comptent que des
fidèles et il y voit les éléments constitutifs de
ce qu'on nomme une maison de verremat.
Prenez y garde Allez vous recommencer
vos lâches insinuationsnous ne deman
dons pas grâce, mais précisez vos accusations;
n'oubliez donc pas que vous avez échappé une
fois une condamnation, parce que vous n'en
valiez pas la peine; mais le proverbe dit qu'on
ne va pas deux fois Corinthe.
Et au fond, vos accusations ne sont pas
sérieuses; mieux que nous, vous savez qu'il
n'y a pas une ville en Belgique, où l'adminis
tration se fait plus régulièrement qu'à Ypres;
tout s'y passe au grand jour et tous les actes
de l'autorité communale peuvent passer tra
vers le crible de l'opinion publique. Que
vous, cléricaux, ne les approuviez pas, soit
nos amis ne sont pas au pouvoir pour faire
vos affaires, mais cela ne vous autorise pas
qualifier notre Hôtel-de-Ville de maison de
verre mat... c'est là, nous le répétons, une insi
nuation que nous vous défions de justifier.
Partout où le Conseil est composé exclusi
vement de cléricaux, nos adversaires préten
dent qu'il doit rester homogènetandis que là
où il est composé de libéraux, ils soutiennent
qu'il doit comprendre quelques cléricaux, dans
le but d'établir un contrôle.Cette contradiction
prouve que nos adversaires soutiennent le
pour et le contre, au gré de leurs intérêts
Gand et Ypres ils ne demandent que quel
ques voix discordantes pour établir un contrôle,
tandis qu'à Bruges le Président de l'Associa
tion cléricale veut que le Conseil reste homo-
gène, parce que l'intérêt général de l'opinion
cléricale et la bonne administration le de-
mandent.
Que le Journal dYpres veuille bien nous
expliquer comment ce qui serait bon et utile
Ypres serait mauvais Bruges et vice-versà.
En attendant un mot de réponse, nous pu
blions ci-après la circulaire de M. de Cock
Bruges, le 29 Septembre 1881.
Monsieur,
Je ne sais s'il la trouvera, balbutia le scbeik tout
troublé.
A ce mot, Doubat jette terre le cavalier en le désarmant,
puis il lui mil le canon de son fusil sur la poitrine, en lui en
joignant de ne plus bouger.
Les zouaves s'emparaient en même temps des deux jeunes
gens.
La trahison était évidente.
Les auteurs du complot avaient bien songé écrire une
fausse lettre au fort mais ils n'avaient pas pensé en fabri
quer une pour le scbeik.
A la vue de ce qui se passait, les guerriers de la tribu des
Beni-Allah accourent, entourant les zouaves d'un cercle de
Hissas menaçant.
Mais Doubat fil former un petit carré de son monde, et il
cria aux Arabes que, s'ils oe se dispersaieut immédiatement,
il ferait sauter le crâne leurs chefs.
Comme la tribu hésitait, il coucha le scheik en joue.
Celui-ci fit un sigoe. et les cavaliers s'éloignent hors de
portée de fusil en vociférant des menaces.
Doubat avisa la crête de la montagne un tombeau de
pierre isolé, comme les Arabes en élèvent souvent h l'honneur
de leur marabouts; il s'y rendit avec ses prisonniers et s'y re
trancha; puis, après avoir placé ses sentinelles, il alluma sa
pipe, s'assit Iranquillemeotdevaot son petit fort improvisé, et
fuma comme si toute une population hostile ne l'enveloppait
pas de toutes parts.
Il eut l'iocroyable sang-froid de se faire amener un mou
ton, des fruits, du miel, du café, tout ce dont il avait besoin
pour lui et ses hommes; amenant le scheik devant la porte de
ia couba et menaçaot sa tète chaque fois que l'on hésitait
lui obéir.
A la nuit, il mit le feu quatre bùcbers énormes qu'il avait
enjoint aux indigènes d'élever, et il posta sur chaque face du
tombeau une sentinelle, dont ia flamme du foyer facilitait la
surveillance.
Après avoir mangé le mouton des Arabes, les zouaves pri
rent le café leurs dépens, et, aussi en sûreré que dans le
fort Hamza, il se mirent chanter les refrains du bivac pour
narguer les indigènes, stupéfiés de tant d'audace et enragés
de leur impuissance.
Tout coup fers minuit, le canon retentit dans le lointain;
le camp de la colonne était attaqué par les indigènes.
Au village tout bruit cessa.
Au tombiau, l'on se tut.
On combat terrible était engagé, dont les Français et leurs
ennemis ignoraient l'issue.
Toute la nuit, les ravins furent ébranlés par l'écho des dé
tonations.
A l'aube, la poudre cessa de parler.
Les zouaves se demandaient qui avait vaincu.
Mais Doubat se dit qu'il le saurait bientôt.
Eu effet, il colla son oreille'a terre, et, au bout d'un cer
tain temps, il entendit les sens des clairons sonnant la diane
Evidemment l'ennemi était repoussé.
Doubat ordonna alors son clairon de jouer son tour la
fanfare du malin.
Le 25 Octobre prochain aura lieu Bruges une élec
tion communale pour le renouvellement du mandat de
douze de vos collègues; il est temps, il est urgent de
prendre des mesures pour assurer la réélection des
membres sortants ou de pourvoir au remplacement de
ceux qui seraient démissionnaires. Chacun de vous,
Messieurs, est intéressé ce que le conseil reste ho
mogène, l'intérêt général de notre opinion et
la bonne administration le demandent. Veuillez
donc vous réunir tous, Samedi prochain, 1' Octobre,
la Concorde, 7 heures du soir, afin de délibérer sur
la situation.
Votre présence est de toute nécessité, chacun doit
ses collègues cette marque de sympathie et d'estime en
ce moment solennel.
Agréez, Monsieur, mes salutations empressées.
Le Président de l'Association,
(Signé) Eug. de Cock.
---[lÉl-j—-«1r-
Une réflexion parfaitement juste de la Flandre libé
rale
Il est difficile, il est impossible, pour mieux dire,
d'administrer une grande ville, d'y faire de grands tra
vaux surtout, sans froisser, dans une certaine mesure,
un assez grand nombre de personnes. Daus bien des
circonstances, l'intérêt privé de quelques-uns se trouve
en conflit avec l'intérêt général; plus souvent encore,
bien des gens se croient lésés, sacrifiés dans leurs inté
rêts privés, par cela seul que des administrations vigi
lantes les empêchent de donner ces intérêts une satis
faction trop large au détriment de l'intérêt général. IL
est impossible une administration soucieuse de l'intérêt
général d'échapper l'opposition que font naître contre
elle tous ces petits froissements, toutes ces petites ran
cunes
C'est une justice rendre nos adversaires, que
jamais ils n'ont laissé échapper l'occassion d'exploiter,
dans un but purement politique, ce genre d'opposition,
si mesquine et si peu avouable même que fût celle-ci.
Il n'est pas une mesure que le parti libéral ait prise,
soit dans le gouvernement du pays, soit dans l'admi
nistration d'une grande ville, sans que les catholiques
se soient mis en campagne pour rechercher quels inté
rêts privés pouvaient être atteints, ou déçus, ou sim
plement alarmés par cette mesure, pour exciter l'oppo
sition et tirer parti de ces rancunes personnelles.
Et c'est ce que nous voyons en ce moment
Ypres. L'Administration Communale cédanton
peut le dire, aux vœux aussi bien des catholi
ques que des libéraux, s'est mise établir un nou
veau régime des eaux. Naturellement, on ne fait
pas un travail de cette importance, sans devoir éla-
II fit répéter six fois la sonnerie, puis il la fil suivre de la
marche du régiment et de l'appel aux colonels, qui est un
signal de détresse.
Le camp était éloigné mais le vent portail dans sa direction.
On y entendit le clairon.
Une heure après, deux escadrons de chasscms et un goum
allié nombreux débouchaient sur le plateau où la couba s'éle
vait le fameux Beauprétre était leur tête. Il n'était que lieu
tenant des bureaux arabes alors mais il avait déjà conquis
un immence prestige.
A la vue de Doubat, il pâlit.
Comment te trouves lu là demanda-l-il d'une voix que
l'émotion fait trembler.
Lisez! fit Doubat en tendant la lettre qu'il avait reçue.
Elle est fausse! s'écria Beauprétre. Mille tonnerres! Le
fort est prit
Il était devenu blanc comme le baïque arabe qu'il portait.
Tranquillisez-vous, lieutenant, dit Doubat, le fort est
toujours a nous.
Et il raconta ce qu'il avait fait...
Beauprétre l'implacable comme disaient les Arabes,
Beauprétre tête de lion pleurait de joie...
Doubat fut décoré.
Les prisonniers du fort, qui n'avaient pas touché aux ba
rils d'alcool, reçurent leur grâce et une ample distribution
d'eau-de-vje les Beni-Allah furent châtiés, et la révolte, qui
eût pris peûl-êlre des proportions formidables en cas de suc
cès du complot, fut rapidement étouffée.
Louis Noir.