N<> 1,083. Jeudi.
45e ANNÉE.
21 Mai 1885.
6 FRANCS PAR AN.
JOURNAL D'YPRES ET DE L'ARRONDISSEMENT.
L'enseignement normal.
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Heures de départ gTYpres
Ypres, le 20 Mai 1885.
Il faut donc que nous ayons le caractère
bien mal fait pour ne pas aimer et adorer la
loi maudite Une si belle loi Une loi qui per
met aux communes de faire tout ce qu'elles
veulent, qui les autorise même, si tel est leur
bon plaisir, créer des écoles athées Car il
n'y a pas le méconnaître. Le sentiment de la
liberté, est si profond chez nos maîtres qu'ils
veulent le respecter toujours et quand même
L'école sera avec ou sans religion, avec ou
sans morale elle servira aux enseignements
les plus anarchiques elle sera un foyer
d'impiété ou de fanatisme, d'athéisme ou de
matérialisme, peu importe. C'est la liberté et
la liberté d'autant plus digne et respectable
qu'elle est entre les mains des communes.
Les communes feront tout ce qu'elles vou
dront. Et nous ne sommes pas satisfait! Voilà
le reproche plaisant que l'on nous adresse.Eh
bien, oui, parlons-en de la commune maîtres
se de l'enseignement. C'est joli ce qu'elle en
fait. La liberté de la commune, c'est la sup
pression du service de l'enseignement partout
où il y a une majorité cléricale. C'est l'anéan
tissement des résultats obtenus en cinquante
années de luttes et d'efforts de toute nature.
C'est le pays rejeté d'un demi-siècle. Nous re
voici au point où nous étions après 1830. A
cette époque-là aussi, on avait proclamé la li
berté pour les communes c'était elles qu'au
nom de la liberté on avait laissé le soin de
veiller aux intérêts de l'enseignement popu
laire, Au bout de quelques années, il n'y avait
plus d'écoles que dans les villes et les commu
nes de quelque importance.
Ailleurs tout avait disparu. De ci de là, des
écoles de petits-frères, puis des écoles de reli
gieuses venant s'établir là où il y avait quel
que argent gagner. Jamais situation plus
lamentable ne se produisit. On nous ramène
pas de géants vers cet état de choses.Encore
quelques années du régime actuel et il ne
restera plus rien du service de l'enseignement
public.Les communes sont invitées se désin
téresser de plus en plus. Tout les y convie.On
les prend de toutes les façons possibles. On
leur coupe les vivres. On les met dans la né
cessité de s'imposer pour équilibrer leur bud
get nombre d'entre elles refuseront de recou
rir cette extrémité;même dans les communes
où l'on comprend la nécessité de l'instruction,
on laissera tomber les écoles, faute de res
sources sufîsantes; dans les autres,ça ira tout
seul, ça va déjà bien.
Le nombre des écoles supprimées jusqu'à ce
jour atteint un chiffre considérable.Et ce n'est
encore que le commencement, car les difficul
tés financières n'ont pas encore pris une forme
tagible. Les budgets communaux sont encore
l'instruction. On marche sur le provisoire.
On est dans l'attente. On va toujours, eomme
si l'on pouvait compter sur les recettes des an
nées précédentes. Mais il n'en est rien. Les
budgets devront être taillés et remaniés, et si,
malgré tout, il n'y a pas de fonds pour payer
les dépenses, il faudra bien, la fin de l'an
née, s'incliner devant la nécessité. On devra
fermer les écoles lorsqu'il n'y aura plus d'ar
gent dans la caisse. On ne peut juger encore
de l'étendue des désastres qu'occasionnera la
loi maudite, et Dieu sait comment on pourra
jamais les réparer.
Et dire qu'il n'y a,dans cette guerre infâme
faite l'enseignement, qu'un vile, qu'un misé
rable intérêt de boutique
Car l'expérience est faite maintenant.
La loi de 1879 s'applique avec le concours du
clergé dans un certain nombre de communes.
L'enseignement y reste ce qu'il était sous l'em
pire de la loi de 1879. Rien, mais rien, n'a
été modifié. Livres, méthodes, programme,
personnel, tout est resté ce qu'ils étaient. Et le
clergé applique la disposition de l'article 4.
Ailleurs, comme Bruges, il fait mieux. Il
juge inutile de se rendre l'école. Il demande
que les élèves soient conduits l'église, qu'il
donne l'enseignement religieux. Que devien
nent, dès lors, les anathèmes contre la loi de
1879?
Ce n'était donc qu'une indigne comédie que
l'opposition haineuse et diffamatoire qui a été
faite cette loi.Ce n'était donc que pour obéir
des mobiles inavouables que l'on a déchaîné
la guerre, jeté la discorde dans les familles,
porté le trouble jusque dans les plus infimes
bourgades. Et maintenant on jouit du triom
phe. L'enseignement public tombe morceaux
par morceaux. Chaque jour des écoles se fer
ment.
Les écoles qui restent debout se dépeuplent,
car nul ne s'inquiète plus de pourvoir leur
recrutement. Partout, c'est le découragement
et l'indifférence; mais n'est-ce pas la liberté?
et c'est elle que les malfaiteurs publics osent
invoquer pour justifier leurs crimes contre la
prospérité morale et matérielle du pays
Les écoles primaires d'abord, dit XAvenir, les
écoles normales viendront ensuite, on leur a déjà
porté un bon coup, il faut faire le reste, c'est-à-dire
le vide autour d'elles et en elles.
A quoi bon, l'enseignement normal d'ailleurs? Un
semblant pour les niais et pour la masse qui se con
tente d'une étiquette, suffit amplement. Si vous vous
imaginez qu'il faut savoir enseigner pour faire classe
dans les écoles libres, détrompez-vous Bruxelles
même, l'école catholique de la rue de la Braie
un exemple entre tous les classes qui ont 95
100 élèves, sont confiées des filettes de 15 46
ans, sans éducation pédagogique naturellement, et
qui l'on donne 700 francs de traitement. Dans une
autre école libre de Bruxelles, c'est un ex-receveur
de tram qui dirige la 2e division. Ce quoi l'on
veut arriver, le but réel qu'il faut atteindre, c'est
refaire l'école primaire l'ancienne garderie d'enfants.
Voilà l'avenir
Que viendrait faire l'enseignement normal dans
tout cela Les quelques années de liberté qu'on a
laissées, de 1879 1884, aux établissements épis-
LE PROGRES
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