Charles Rogier.
POPERINGHE.
Un peu de tout.
Le monde catholique est dépuis quelques jours
dans la plus grande agitation et dans le Cercle on
s'attend un grave événement...?
M. Va l'air content tandisque M. R
semble bigrement contrarié....? et M. Félix, dont le
cœur entre les deux balance, a beau se gratter le
nez, il y perd le peu de latin que jamais il est par
venu faire entrer sans sa tête.
Mais la cause de tout cela....? c'est ça qui sera
curieux.
Un deuxième article, arrivé trop tard, sera inséré
dans un de nos prochains N".
Le Journal d'Ypres constate avec tristesse que,
le Saint Jour de la Pentecôte, on a vu des ou-
vriers travailler la toiture de la caserne d'infan-
terie.Nous ignorons, ajoute-t-il, qui doit remon-
ter la responsabilité de ce fait, mais nous nous
permettons de dire que, d'où qu'il vienne, c'est là
un véritable scandale.
Admettons que le fait soit exact et joignons au
besoin nos regrets ceux de notre confrère.
Mais que dira celui-ci du nouveau scandale de
Bruges, où l'on a vu également le Saint Jour de la
Pentecôte et sous l'administration du doux illu
miné qui a nomVandenpeereboom, une légion d'ou
vriers travailler la construction de la nouvelle
gare.
C'est le cas ou jamais de répéter en chœur O Van-
denpeereboom!
11 y a trois ou quatre semaines le même Journal
annonçait bravement ses crédules lecteurs que la
police avait défendu un nommé Soenen, un chef de
file du parti clérical semble-t-il, de crier ses
journaux, De Vlaming et autres ejusdem farinse.
Nous avons remarqué que,depuis lors,le dit Soe
nen crie comme un sourd, ce qui fait supposer que
la police n'a jamais signifié aucune défense au ven
deur de journaux catholiques et que le Journal en a
de nouveau imposé au public.
Péché d'habitude, quoi
Le Journal (encore lui) revient encore sur la confé
rence de M. Sabbe.
Nous avons dit qu'en accusant un fonctionnaire,
un professeur, de s'être chargé de la vilaine be-
sogne de détruire chez les jeunes gens tout senti-
ment religieux, et d'enflammer en eux toutes les
mauvaises passions le Journal, dont aucun re
porter n'a assisté la susdite conférence, mentait.
Le Journal ne répond pas ce reproche.
Qui ne dit mot consent, dit le proverbe.
Le silence du Journal vaut consentement. Soit l
Le même Journal (toujours lui) se réjouit fort de
ce qu'un nommé Schultz, directeur de l'orphelinat
laïcisé d'Hambourg, ait pu commettre, en sept
ans, de 1878 1885, plus de deux cents crimes
abominables l'égard des enfants remis ses
soins!
Ce sentiment part d'un bon naturel
Nous nous sommes maintes fois expliqué ce
sujet et en aucune circonstance nous n'avons manqué
de témoigner la répulsion profonde que nous éprou
vons pour ces malpropres personnages quel-
qu'ils soient et d'où qu'ils viennent.
Mais que le Journal nous permette de lui répéter
encore une fois que les laïques livrent ces brebis
galeuses la Justice en particulier, tandis que les
prêtres en général, et les supérieurs des petits
frères, s'entendent comme larrons en foire pour
soustraire sodomistes et pédérastes la vindicte
publique, les cacher dans un couvent quelconque
sous un faux nom quelconque et les faire, au besoin,
passer en Amérique.
Que notre confrère en soit bien convaincu: Si
Schultz après l'expiration de sa peine, rentre jamais
dans l'enseignement,ce sera dans une école de petits
frères qu'il faudra le chercher et sous un faux nom.
Des maîtres avec foi, mais sans morale, délivrez
nous Seigneur
m
Au moment où Maître Pleurnichard dépose sur le
Bureau de la Chambre le rapport de M. Jacobs sur
les événements du 7 Septembre, il n'est pas sans
intérêt de rappeler la composition des bandes sou
doyées qui ont envahi (Bruxelles pendant cette mé
morable journée.
Le grand patriote qui a pris une si large part la fon
dation de notre indépendance et laconsolidation de no
tre nationalité s'est éteint doucement, sans agonie, mer
credi, deux heures et demie de l'après-midi, dans
une petite chambre de derrière, au premier étage du
n* 12 de la rue Galilée.
La triste nouvelle s'est répandue promptement dans
la ville, et de nombreuses dépêches l'ont portée sur
l'heure dans tout le pays.
Elle est arrivée la Chambre des représentants vers
3 heures, et aussitôt la séance a été levée, en signe de
deuil.
Il est né Saint-Quentin, le 17 Août 1800, son père
Firmin-Noël Rogier, a longtemps habité Cambrai, où il
a même exercé des fonctions municipales.
Il fut nommé, en 1792, lieutenant-colonel du batail
lon de volontaires du district de Cambrai, chargé de
contribuer, avec l'armée du Nord, au renversement de
la domination autrichienne dans les Pays-Bas. La cam
pagne terminée, le colonel Rogier, dont la santé s'était
gravement ressentie des fatigues de la guerre, quitta le
service actif pour entrer dans l'état-major des places.
C'est ainsi qu'il commanda successivement la place de
Doulens, le fort de Ham et la place de Saint-Quentin,
où il alla s'établir en 1796.
Charles Rogier fit ses premières études an collège
d'Avesnes et venait d'atteindre sa onzième année
quand Napoléon I" adressa un appel tous les anciens
militaires au moment d'entreprendre sa grande épopée
européenne. Le père Rogier fut des premiers répon
dre cet appel. Il avait eu sous ses ordres, en 1792,
comme lieutenant dans le bataillon des volontaires de
Cambrai, un jeune officier qui était, depuis, devenu le
maréchal Mortier. Le maréchal fit entrer son ancien
chef dans la direction de l'intendance. C'est en cette
qualité que le colonel Rogier suivit l'armée impériale
en Russie, où il mourut.
Quand la nouvelle de sa mort arriva Avesnes, en
1812, sa veuve quitta la France pour aller rejoindre
Liège son fils aîné, Firmin Rogier, qui était alors pro
fesseur au lycée impérial de cette ville. C'est dans ce
lycée, et sous la direction de son frère, que le jeune
Charles Rogier continua ses études, pour les achever
ensuite au Gymnase, quand cette institution prit la pla
ce du lycée impérial.
En 1817, il terminait sa rhétorique en remportant les
quatre premiers prix.
La mort du père Firmin Rogier, avait enlevé la
famille sa principale, pour ne pas dire son unique res
source. Quelque désir qu'il eût de continuer ses études
en se faisant inscrire l'université que venait de fonder
le roi Guillaume I" des Pays-Bas, Charles Rogier fut
obligé de chercher d'abord se créer des ressources
personnelles et assurer son existence matérielle en
donnant des leçons particulières.
Les premières fonctions dont il fut investi furent des
fonctions littéraires, la Société libre d'Emulation l'ayant
nommé secrétaire de son comité de littérature.
Le jeune Rogier poursuivit son rêve d'arriver aux
études universitaires. Il voulait devenir avocat et le
devint, en effet, peine reçu docteur en droit, une nou
velle vocation se manifesta en lui et on le vit aban
donner le barreau pour se lancer dans la carrière du
journalisme.
Il fallait du courage pour se faire journaliste cette
époque.
En 1830, Charles Rogier était un des chefs les plus
populaires du parti constitutionnel Liège.
Dès qu'on apprit dans cette ville les troubles précur
seurs de la révolution, il se mit la tète d'un corps de
volontaires liégeois, dont il conduisit un détachement
Bruxelles. Il y entra le 7 Septembre et fut reçu avec
enthousiasme. Il organisa la résistence avec MM. Van-
der Linden, d'Booghvorst, Jolly, ancien officier du gé
nie, et de Coppin. Le commandement des t forces acti
ves fut confié au colonel don Juan van Halen.
Le 26 Septembre, le gouvernement provisoire fut
institué il se composait, outre MM. d'Hooghvorst,
Rogier, Jolly et de Coppin, de MM. Félix de Mérode,
Al. Gendebien, Sylvain Van de "Weyer, J. Vander Lin
den et J. Nicolaï, auxquels fut adjoint, deux jours plus
tard, M. De Potter.
Le 21 Octobre 1830 il fut envoyé dans le Hainaut en
qualité de commissaire délégué du gouvernement pro
visoire pour calmer les houilleurs soulevés et rétablir
l'ordre compromis. En moins de quatre jours, il avait
accompli sa mission; le 26. il partit pour Anvers, où il
entra pendant le bombardement, et le 28 il approuva,
au nom du gouvernement provisoire, la suspension
d'armes négociée par MM. Chazal et Ch. Dubois, avec
le général Chassé.
Elu le A Novembre député au Congrès national par le
district de Liège, il présida le 12 Novembre la première
séance de cette assemblée constituante, et le 17 il pro
clamait l'indépendance de la Belgique.
Ses collègues le chargèrent de diverses missions dont
l'accomplissement l'empêcha de prendre une part très
active aux débats du Congrès. Il y fit adopter un décret
instituant la garde-civique, et proposa pour la nomina.
tion des sénateurs le mode d'élection qui a prévalu.
Sous la Régence, il fut tour h tour aide-de-camp du
régent et administratéur de la sûreté publique.
Rogier a tour tour représenté la législature les ar
rondissements de Turnhout, Anvers Bruxelles et Tour
nai.
Il a successivement dirigé quatre départements mi
nistériels. Sa carrière parlementaire, aussi longue
que bien remplie, compte cinquante-trois ans. Rogier a
occupé pendant près de vingt ans des fonctions minis-
térielles.
Un des titres vraiment glorieux du patriote qui vient
de disparaître c'est la part prépondérante qu'il prit
l'établissement du premier chemin de fer belge, le pre
mier du continent.
La loi décrétant l'établissement d'un réseau ferré fut
promulguée le 1" Mai 1834.
Rogier fit partie du cabinet Lebeau qui tomba en 1841
la suite d'une adresse réactionnaire du Sénat deman
dant la démission des ministres. Rogier devint alors le
chef du parti libéral et lutta pendant six ans pour faire
prévaloir les idées de ce qu'on appelait alors la politique
nouvelle.
En 1847, il revint au pouvoir et constitua un cabinet
dans lequel entra M. Frère-Orban. Le pays traversa
sans encombre la crise de 1848, grâce quelques me
sures destinées venir en aide aux classes laborieuses.
En 1863, Rogier apposa son nom sur les traités qui
consacrent la libération de l'Escaut.
En 1868, il quitta le pouvoir, qu'il avait occupé pen
dant près de vingt ans.
Dans ces derniers temps, Rogier ne prit plus une part
active la vie politique.
On peut dire que Rogier a assisté son apothéose.
Lorsque nous célébrions, en 1880, la cinquantième an-
niveasaire de notre indépendance, il était présent la
féte de l'inauguration de l'exposition, et le peuple qui
couvrait la plaine des manœuvres lui fit une de ces ova
lions inoubliables, que peu d'hommes ont su mériter.
Une de ses plus éminentes qualités était le désintéres
sement. Après avoir exercé pendant tant d'années le
pouvoir, après avoir occupé les plus hautes dignités de
l'Etat, il meurt pauvre, ne laissant guère pour fortune
que sa petite maison de la rue Galilée, 12, où il est mort
et que le pays, reconnaissant les services rendus, lui
ofirit en cadeau, et par souscription nationale.
H'-'8 "m..