Nouvelles locales.
millionnaire, les capitaux de ceux de ses administrés qui
avaient eu confiance en lui
Attendu que, si les faits ainsi insinués étaient vrais, ils
exposeraient le demandeur des poursuites criminelles ou
correctionnelles, et, coup sûr, au mépris de ses conci
toyens;
Attendu que ces insinuations qui, dans l'esprit de l'auteur
de l'article, font allusion k la chuie du comptoir-général,
Bruxelles, dont le demandeur était l'un des gérants respon
sables, sont d'autant plus odieuses qu elles ont paru dans le
numéro du Progrès d'Ypres, du vingt-deux Mars mil
huit cent quatre-vingt-cinq, alors que la Cour d'Appel de
Bruxelles, venait, par son arrêt du seize Février mil huit
cent quatre-vingt cinq, de décider le maintien du concor
dat préventif la faillite, après des débats solennels et ré
quisitoire aussi complet qu'énergique, de Monsieur le Pre
mier Avocat-Général Van Sehoor, publiés, tout au moins
d'une manière sommaire, dans tous les grands journaux du
pays, et qu'il résulte des renseignements fournis au procès,
que, dès avant le huit Février mil huit cent quatre-vingt-
cinq, le défendeur connaissait le sens et la portée du réqui
sitoire du ministère public;
Attendu que cet arrêt et ce réquisitoire se fondent, sur
le passé sans tâche et le renom d'honneur et de probité
dont avaient joui les gérants responsables du comptoir
général jusqu'au désastre sur ce que ce désastre a été le
résultat d'événements extraordinaires et imprévus qui ne
leur sont pas imputables, sur la bonne foi des gérants, ca
ractérisée, par ce premier fait, qu'ils avaient, dès l'abord,
exposé leurs fortunes considérables, comme garantie, pour
les actionnaires; et par ce second fait, que, lorsqu'ils ont vu
la société menacée, ils n'ont pas hésité k hypothéquer tous
leurs biens dans l'espoir de la sauver! Sur ce que les sépa
rations de biens des épouses des gérants, et tout spéciale
ment celle de la Marquise d'Ennetières, ont été prononcées
dans des circonstances irréprochables, tempore non sus-
pecto et enfin, sur ce fait que les familles des gérants, et
particulièrement Madame la Marquise d Ennetières, loin de
bénéficier, au préjudice du comptoir, se sont engagées
faire, si le concordat était maintenu, des sacrifices impor
tants;
Attendu qu'il suit de ce qui précède que les passages in
criminés, de l'article du vingt-deux Mars, sont hautement
calomnieux ou injurieux, et de nature porter une grave
atteinte l'honneur et k la réputation de probité et de déli
catesse du demandeur et qu'une réparation lui est dite;
Attendu qu'il est manifeste que le dommage souffert est
surtout moral, qu'il n'est même pas allégué de préjudice
pécuniaire, et que, dès lors, la réparation sera obtenue par
une publicité du jugement de condamnation, en rapport
avec le degré de publicité de l'offense;
Attendu que le journal Le Progrès d'Ypres, est assez
peu répandu, et que le demandeur ne fournit pas la preuve
que l'article incriminé ait été reproduit dans divers jour
naux grande publicité;
Attendu qu'il semble dès lors qu'il doive suffire de la
publication du présent jugement dans trois journaux autres
que celui du défendeur, au choix du demandeur, et, en
outre, k deux reprises, dans le journal Le Progrès
d'Ypres, sans que le coût de ces publications puisse dépas
ser la somme de mille francs, pour les journaux étrangers;
et celle de trois cents francs pour le journal propre du dé
fendeur.
Par ces motifs.
Le Tribunal, sans s'arrêter l'incident soulevé par le dé
fendeur quant la détermination du ressort, et réservant, k
cet égard, tous les droits du défendeur, déclare calomnieux
ou injurieux et dommageable, le fragment incriminé de
l'article du numéro du vingt deux Mars mil huit cent quatre-
vingt-cinq, du journal Le Progrès d'Ypres, intitulé:
Un peu de tout commençant par ces mots Nous li-
sons dans un journal français et finissant par les sui
vants: t Voilà comment le clergé et la noblesse continuent
l'œuvre d'apaisement que le ministère de la tolérance na-
tionale a inaugurée chez nos voisins.
Par suite, condamne le défendeur: Primo, payer au de
mandeur la somme de mille francs ou toute autre somme
moindre suffisante employer k une insertion du présent
jugement sous le titre Réparation judiciaire dans trois
journaux, autres que celui du défendeur, au choix du de
mandeur; Secundo, k insérer le même jugement, dans
son propre journal Le Progrès sous le même titre Ré
paration jud iciaire k la première page et dans les quinze
jours de la signification du présent jugement, k deux repri
ses différentes, sans que le coût de ces insertions puisse
dépasser la somme de trois cents francs; dit qu'à défaut,par
le défendeur, d'insérer le dit jugement dans le journal Le
I'rogi es d'Ypres, endèans la quinzaine de la signification,
il sera condamné payer au demandeur la somme de trois
cenis f anes destinée k faire faire, dans le prédit journal,les
insertions ci-dessus.
Dit q e les frais des publications dont s'agit seront récu
pérable-. charge du défendeur, sur le vu des quittances
des journaux où les insertions auront eu lieu, jusqu'à con
çu: encc de mille francs et de trois cents francs;
Ordonne l'exécution provisoire du présent jugement no
nobstant appel et sans caution.
Condamm le défendeur aux dépens liquidés, pour la par
tie demande esse, k la somme de nonante francs, vingt-huit
centimes, et pour la partie défenderesse k la somme de
quarante sept francs, quatre-vingt-cinq centimes, non com
pris les frais d'expédition, de signification et de mise
exécution du présent jugement.
Ainsi fait et prononcé en audience publique civile du
Tribunal de première instance, séant Ypres. Flandre-
Occidentale, le vingt-quatre Juillet mil huit cent quatre-
vingt-cinq.
Présents: Messieurs Iweins, Président, Dusiilion et OHe-
vier, Juges, de Rorman, Procureur du Roi et Tybergheiii,
Greffier.
(Signé) J. Iweins et Alfred Tyberghein.
Mandons et ordonnons k tous huissiers ce requis de
mettre le présent jugement k exécution;
A nos procureurs généraux, et nos procureurs près les
Tribunaux de première instance, d'y tenir la main, et
tous commandants et officiers de la force publique, d'y prê
ter main forte lorsqu'ils en seront légalement requis;
En foi de quoi le présent jugement a été signé et scellé
du sceau du Tribunal.
Pour Expédition
Délivrée k Maître Colaert avoué du demandeur.
Le Greffier du Tiibunal A. Tyberghein.
Enregistré quatorze rôles deux renvois Ypres, le dix
Novembre 1800 quatre-vingt-cinq, vol. 114, fol. 22, case
4 Reçu pour droit d'enregistrement vingt-sept francs quatre-
vingt onze centimes et pour droit de greffe vingt-trois francs
vingt centimes. Le Receveur,
A. Bocaeht.
Nous n'avons pu, par suite d'un malentendu,parler,dans
notre dernier numéro du banquets qui, Dimanche 15 de
ce mois, a réuni la Tète de Bronze les sous-officiers
de la Garde civique de notre ville.
Nous réparons bien volontiers celte erreur.
La commission avait invité k prendre part k la fête les
sous-oifieiers du corps des Sapeurs-Pompiers communaux.
Tous avaient accepté de gr and cœur, et l'un d'eux, M A.
Swekels, s'était chargé de l'ornementation de la salle il
s'est acquitté de cette mission d'une façon brillante et digne
de tous nos éloges.
La table d'honneur était présidée par M. Is. Ducorney,
adjudant-sous-officiér du corps des Pompiers, entouré de
Mit. G Rumon et J. Onraet, respectivement président et
vice-président de la société des sous-officiers, et des mem
bres de la commission.
Inutile de dire que le dîner étant excellent, et le vin
encore meilleur, gardes et pompiers s'en sont donnés
cœur joie: le verre eu main on a scellé k nouveau le pacte
de franche et cordiale amitié qui existe depuis tant d'années
entre les deux corps de miiicc citoyenne de notre ville.
M. Is. i ucorney venait k peine de porter en termes excel
lents le toast au Roi. que M. Dusiilion. chef de la Garde.
M. A. Brunfaut, capitaine commandant des Pompiers, M.
Smeysters, capitaine au lr de ligne et instructeur de la
Garde, accompagnés des officiers des deux corps, font leur
entrée dans la salle: un triple hurrah les accueille, et M.
Dumon leur souhaite la bienvenue.
Le sympathique major remercie, en termes aussi bien
dits que bien pensés, les sous officiers de leur brillant
accueil, et se déclare enchanté dé voir i'accoid qui règne
entre Pompiers et Gardes cet accord est surtout dû, dit-
il, k l'aménité et la loyauté bien connues du caractère de
M. le commandant Brunfaut.
M. Smeysters reçoit k son tour les remerciements cha
leureux des sous-olficiers pour le zèle et le dévouement
qu il apporte leur instruction militaire.
La partie officielle de la fôte est terminée la parole est
au Champagne. Nous ne croyons pas commettre d'indiscré
tion en disant que jusqu'à 1 heure de la séparation, venue
trop tôt peut-être, officiers et sous-officiers, gardes et pom
piers se sont admirablement amusés et se promettent bien
de recommencer encore.
On annonce que M. Smeysters a l'intention de donner un
tir la carabine pour les sous-officiers des Pompiers et de
la Garde civique.
Au \Villemn-Fontls.
C'est, comme nous l'avions annoncé, M. Jules Sabbe qui
a ouvert la seconde série des conférences organisées par la
Section yproise du Willeras-Fonds.
Nos lecteurs connaissent tous le talent de l'orateur bru-
geois; nous ne nous attarderons donc pas k faire de lui un
éloge, qui est dans toutes les bouches. D'ailleurs l aperçu
3ue nous donnerons de la conférence que nous avons eiiten-
ue Dimanche 15 c', plaidera mieux pour son auteur que
toutes" les louanges du monde. Aussi bien le sujet en était
admirablement choisi et se prêtait k de beaux et instructifs
développements.
L'étude de notre histoire nationale est aujourd'hui trop
négligée et pourtant rien n'est plus instructif que l'histoire
si belle et si tragique de nos provinces, que la connaissance
des institutions du passé, de leurs progrès merveilleux et de
leur triste décadence. Le tableau que les écrivains nous en
ont tracé doit nous inspirer un respect profond pour nos
ancêtres, une juste fierté de l'héritage moral que nous en
avons reçu Le 14e siècle et la splendeur de nos communes,
le 15' siècle avec ses luttes contre le despotisme naissant
des ducs de Bourgogne, le 16* enfin, tout plein des efforts
snrhurniains de nos provinces pour constituer la liberté
religieuse et le système représeiilaiif.inontreiil que la liberté
a été le vœu, le bui constant de notre peuple, le bien su-
P'èjiue qu il a sans cesse poursuivi, qu'il a failli atteindre
-vaut toutes les autres nations de l'Europe.
Getie lutte homérique que nos ancêtres soutinrent, com
prend deuv phases bien distinctes: la première, pour la
libellé individuelle, se termine k l'avènement de Marie de
Bourgogne qui confirma solennellement tous les privilèges
des communes la seconde, pour la liberté de conscience,
occupe toute l'hisioire du 16" siècle et aboutit k la fatale
séparation qui détruisit k jamais l'unité de notre peuple.
Ce sont ces deux périodes, grandes entie toutes, que M.
Sabbe a fait revivre devant nous,en nous en faisant connaître
deux épisodes qui les résument en quelque sorte: ce sont la
bataille de Wettroosebeke, k laquelle on peut rattacher le
siège d'Ypres de 1383, et le siege d'Anvers par Alexandre
Farnèse.
L'une des principales prérogatives de nos communes,
était de ne devoir aucun impôt, moins que celui ci n'eut
été consenti au piéalable. Notre pays était landvanbede,
selon l'énergique expression flamande et il fallait que le
prince se résignât k demander k ses sujets les subsides dont
il avait besoin. Ce fut une de ces demandes qui, quelque
temps après la mort de Jacques Van Artevelde. provoqua
un soulèvement de la ville de Gand contre le comte Louis
de Maies. Une guerre terrible mais indécise s'ensuivit.
Enfin en 1382.les communes flamandes dirigées par Philip
pe Van Artevelde parvinrent expulser de la Flandre le
comte et ses partisans Ceux-ci allèrent demander secours
au roi de France, qui envahit le pays flamand k la tète
d'une aruiée composée de toute la chevalerie de France, de
Savoieet.de Lorraine; des barons allemands et brabançons
se joignirent elle.
Il est curieux tout ensemble et triste d'observer l'attitude
de la bourgeoisie des pays circonvoisins en présence du
formidable duel qui allait se combattre dans notre pays: le
sort de la démocratie allait s'y décider et Van Artevelde
resta seul en face de l'ennemi commun. Les communes
brabançonnes et liégeoises se contentèrent d'exprimer leurs
sympathies; les métiers anglais venaient d'être abattus et le
peuple de Paris, sur le conseil de Nicolas le Flamand, vou
lut attendre l'issue de la lutte. Cette issue on la connaît: la
bataille de Roosebeke fut perdue par les métiers. La Flan
dre y perdit ses généraux et ses meilleurs soldats: par la
suite elle résista encore au despotisme du pouvoir central,
niais elle ne retrouva plus jamais son ancienne énergie.
Il ne faut pas croire que les ennemis de la Flandre se
trouvassent tous l'extérieur: le clergé d'alors, tout autant
que la noblesse, était opposé l'extension des franchises
communales qui devaient fatalement aboutir, comme elles
aboutirent, en effet, l'exclusion du prêtre des questions
d'intérêt politique. Aussi personne plus que le clergé ne se
montra-t il enchanté du résultat de la lutte: partout on
entonna des actions de grâce, partout on remercia la Vierge,
k l'inteivention de laquelle était due, disait on, la victoire
de l'étranger.
Nous passons volontiers condamnation sur ces actes inspi
rés par la p tssion politique du moment et par un intérêt de
conservation; mais que dire du clergé d'aujourd'hui osant
encore célébrer par ses actes et par ses écrits cette date
néfaste; que dire d un prêtre traitant dans un écrit récent
l'armée française d'armée du Seigneur que dire d'un
clergé offrant encore de nos jours k la vénération publique
le fil miraculeux qui aurait protégé l'ennemi que dire
enfin d'un peuple allant tous les ans en pèlerinage remer
cier le Très-Haut de la mort de VanArteVelde et de l'écrase
ment de la liberté dans nos Flandres?
Ce n'est malheureusement pas le seul exemple que nous
puissions relever du mépris du clergé pour tout ce qui re
garde les dates les plus glorieuses ou les plus tristes de
notre histoire.
Il est certain que le triomphe de la Réforme eut vu le
gouvernement libre s'établir dans noire pays en même temps
que la liberté de conscience. Et k quel degré de splendeur
et de puissance la liberté n'eut-elle pas permis aux Pays-
Bas de s élever! Avant la scission, les provinces méridiona
les étaient les plus libres, les plus éclairées, les plus civi
lisées. Après la séparation, on voit les provinces du Nord
prendre un essor superbe et donner au monde le spectacle
d'un pays, petit par l'étendue du territoire et par le nombre
de ses habitants, arrivant par l'intelligence et le patriotisme
traiter d'égal k égal avec les Etats les plus formidables,
être un des centres les plus admirables de pensée, de
science, d'art, de commerce que le monde ait vus! Et cepen
dant, quel est le sort de nos provinces infortunées Livrées
au double et affreux despotisme de l'Espagne et de l'Eglise,
elles perdent toute activité, toute vie intellectuelle. Elles
s'endorment lentement, obscurément, dans une léthargie
mortelle et honteuse, et un historien a pu écrire que les 17'
et 18° siècles furent pour elles deux siècles de longue
agonie.
Sa longue et héroïque lutte pour la liberté de conscience,
qui porte dans l'histoire le nom de guerre de 80 ans. fut