N° 21. Jeudi,
17 Mars 1887
JOURNAL D'YPRES ET DE L'ARRONDISSEMENT.
Revue politique.
Le Charlatan du jour.
47e ANNÉE
6 FKANCS PAR AN.
PARAISSANT LE JEUDI ET LE DIMANCHE.
L'Assemblée des députés de France vogue
pleines voiles dans les eaux de la protection.
Elle a voté le droit de 5 francs les 100 kilos sur
les blés de provenance étrangère. Les produc
teurs ont une belle marge sren contenteront-
ils Mais tout est relatif et, comme on le disait
il y a quelques jours, tout se tient. L'agriculture
ne peut pas espérer que les industries non proté-
fées vont payer le nouveau droit sans se plaindre.
ie travail industriel réclamera donc son tour,
et quelles raisons aura-t-on d'écarter ses récla
mations après avoir satisfait celles du travail
agricole
Vous me faites payer le pain plus cher, dira-
t-il, il n'est que juste, puisque vous avez eu gain
de cause que, vous payiez votre tour plus cher
les outils et le travail que je vous fournis. Vous
ne pouvez pas être protégé sans que je ne le sois
aussi sinon, où serait la justice distributive Il
est énorme, ce droit que vous m'imposez et que
je devrai payer tous les jours vous aurez me
donner des compensations et j'y compte.
Les protectionnistes ont frappé au bon bout,
et la majorité ne tardera pas avoir conscience
de la faute qu'elle a commise. Il est même pro
bable, c'est au moins l'ordinaire, que le renché
rissement du produit dépassera la quotité du
droit.
La Chambre française paraît tenir beaucoup
au droit sur les céréales elle a voté le droit de 8
francs par quintal sur les farines étrangères
elle a fixé 3 francs le droit sur le biscuit de
mer, le gruau, les semoules et les fécules.
Ou l'on se trompe fort, ou l'on incline penser
qu'elle devait avoir son ordre du jour des
projets de lois plus urgents, sinon plus judici
eux. Voter des crédits pour les victimes des
tremblements de terre et du grisou, et, d'un
autre côté, établir des droits qui doivent dimi
nuer le salaire, il semble que cela implique
contradiction.
La Chambre a adopté, par 262 voix contre
254, un amendement autorisant le gouvernement
suspendre, par décret, en l'absence de la Cham
bre, la surtaxe sur le blé, si elle provoquait la
cherté du pain. La Chambre serait consultée
ensuite. L'ensemble de l'article 1er est adopté
par 317 voix contre 251
On fait remarquer, propos des projets de loi
sur les céréales, et de l'amendement adopté, qui
autorise le gouvernement suspendre par décret
le droit s'il détermine la cherté du pain, que
c'est là une faculté dont il pourra être embar
rassé, soit qu'il en use, soit qu'il n'en use pas.
Il lui sera difficile de n'en pas faire emploi la
moindre apparence de cherté, et quels seront
donc les importateurs assez hardis pour s'expo
ser au dommage qui en pourra résulter pour
eux
Deux élections sénatoriales qui ont eu lieu
hier en France, dans les départements de Saône-
et-Loire et de la Haute-Marne, ont amené la no
mination de M. Félix Martin, ancien opportu
niste, et de M. Danel Bernardin, député de
l'Union des gauches.
Le Sénat français a voté, l'unanimité, le cré
dit de un million cinquante mille francs pour les
victimes du tremblement de terre et de l'explo
sion de grisou Saint-Etienne.
Reprenant une idée dont il a déjà été question
il y a peu de temps, le Figaro raconte que le
Pape sur une demande officieuse venue de
Berlin étudie un projet de médiation qui
amènerait l'apaisement entre l'Allemagne et la
France et serait le prologue d'un désarmement
général.
Il s'agirait de constituer une sorte de fédéra
tion entre la Suisse, l'Alsace-Lorraine,le Luxem-
boug, la Belgique et la Hollande, avec l'assenti
ment et sous la protection de tous les autres
Etats européens, de façon créer une longue
zone de séparation entre la France et l'Alle
magne.
II est possible que le Pape rêve cette paix
universelle l'abbé de Saint-Pierre l'a fait avant
lui mais le Saint-Père pourrait bien n'avoir pas
plus de succès que le simple abbé.
Aucun journal n'a pris d'ailleurs au sérieux la
nouvelle du Figaro relative la neutralisation
des provinces rhénanes, etc.
La Régence bulgare a proposé la Porte un
arrangement que Riza-Bey a communiqué son
gouvernement. Les puissances vont en avoir
connaissance leur tour par l'intermédiaire de
leurs ambassadeurs. On ne désespère pas d'arri
ver une solution satisfaisante on ne dit pas
non plus sur quelles bases précises on négocie
mais on négocie, c'est certain.
Ypres, le 16 Mars 1887.
Le comte d'Oultremont a fait, au nom de la
Commission du travail, un rapport sur les éco
les ménagères. Après avoir dépeint le triste
état de la plupart des ménages de la classe ou
vrière et le défaut d'éducation de la femme, qui
ignore le plus souvent quels sont les devoirs
d'épouse et de mère, il indique, comme un des
remèdes, la création d'écoles ménagères où l'on
apprendrait aux jeunes filles tous les travaux
qu une bon ne femme de ménage doit connaître,
et il conclut comme suit
1° Le Gouvernement devrait engager les
communes adjoindre aux écoles communales
ou adoptées pour filles une section ménagère.
2° Lorsqu'elles quittent définitivement l'éco
le, il leur serait délivré, s'il y a lieu, un certi
ficat de capacité.
3° La section ménagère devrait avoir un
personnel spécial placé sous la surveillance de
la direction de l'école.
4° Les charges de la section ménagère de
vraient être supportées par la Commune, par
la Province et par l'Etal.
3° L'enseignement devrait y être gratuit.
Nous ignorons si M. le comte d'Oultremont a
visité l'école communale gratuite pour filles de
notre ville, mais ce qu'il propose y existe de
puis des années.
Une section ménagère fréquentée par 70
jeunes filles est annexée l'école.
Elles y apprennent tous les travaux manuels
que la femme doit connaître, y compris les no
tions indispensables de l'art culinaire, avec le
çons pratiques.
Elles suivent toutes un cours d'économie pra
tique.
Un certificat de capacité est donné aux plus
méritantes leur sortie de l'école.
L'enseignement est donné par un personnel
spécial sous la direction de l'Institutrice en
cnef.
Enfin, l'enseignement y est donné gratuite
ment et le produit du travail est au profit des
élèves.
Gomme on le voit, l'école ménagère de notre
ville réunit toutes les conditions signalées par
M. le Comte d'Oultremont et même au delà.
C'est une des premières créées dans le pays et
de divers points arrivent des visiteurs pour en
étudier et imiter l'organisation.
Seulement, depuis l'avènement du ministère
clérical, la Province a supprimé son subside
Convertir les fanatiques du suffrage univer
sel serait une entreprise puérile.
Pour ces Fakirs, le suffrage universel, c'est le
Droit avec un grand D et quand ils ont
dit c'est le Droit inutile d'insister la clôture
est prononcée.
Mais, force d'entendre répéter chaque jour
que le suffrage universel est l'instrument de
progrès par excellence, que seul il a la notion
de la vraie liberté, que seul il est capable de
résoudre ce grand problème de la misère qui
est le tourment de notre siècle, bien des hon
nêtes gens pourraient finir par le croire.
Or, l'idée nous est venue tout l'heure de
dresser le bilan du suffrage universel en France,
pour les deux derniers mois écoulés, et peut-
être ne sera-t-il pas inutile de le publier ici,
pour l'édification de beaucoup de nos lecteurs
qui, sans être des fanatiques du Droit avec
un grand D, auraient pu se laisser égarer
par les déclamations dont on leur assourdit in
cessamment les oreilles.
Prenons d'abord les questions clérico-libé-
rales.
Que de fois n'avons-nous pas lu dans la
presse radicale qu'avec le suffrage universel,
ces questions, qui traînent chez nous depuis
tant d'années, seraient résolues en un tour de
main
Que de fois n'avons-nous pas entendu pro
clamer superbement dans les meetings que le
suffrage universel ne ferait qu'une bouchée de
la question de la séparation de l'Eglise et de
l'Etat 1
Cependant le suffrage universel fonctionne
en France depuis bientôt quarante ans, et,
dans les conditions d'une absolue liberté, de
puis 1870. Ce tout-puissant réformateur a-t-il
Rrononcé la séparation de l'Eglise et de l'Etat
on. Pas plus tard que le 29 Janvier dernier,
la Chambre française rejetait, une majorité
écrasante 340 voix contre 180 la propo
sition de supprimer le budget des cultes.
Sans eompter ceci n'est qu'un détail
que peu de jours auparavant, le 20 Janvier, elle
LE PROGRES
VIRES ACQUIRIT EUNDO.
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Marché aux Herbes.