I 00,000 FRANCS Supplément au journal le u Progrès du Dimanche 8 Mai 1887 L'AGENCE DE LA BARONNE. VILLE DE BRUXELLES EMPRUNT DE 1886 3 FRANCS PAR MOIS Mlle Leal. C'est faux. C'est 4 heures du soir. MUe Leal. Nous sommes parfaitement mariés. Fêtes du Sport et de l'Agriculture. LE DEVELOPPEMENT DE L'EPARGNE NATIONALE Capital 1.000.000 defr. pouvant être porté 10.000.000 de fr. VENTE A CRÉDIT DES OBLIGATIONS COMMUNALES CINQ FRANCS GROS LOT DE Jeudi, Paris, une affaire de marieuse tout fait épique a été jugée. Mm" Demortier, qui se faisait appeler baronne de Mortier et baronne de la Rochette, s'était associée avec un marieur nommé Lecourtois, pour exploiter les gogos l'aide de l'appât habituel des grosses dots. Des dames d'âge mûr jouaient le rôle de mère. Lecourtois faisait les pères nobles, les financiers et les oncles héritage. La fiancée, c'était toujours la même, une demoiselle Leal, d'origine anglaise ou américaine, soupçonnée d'avoir exercé la même industrie Baltimore, Boston et Bethléem (Etats-Unis) jolie fille, brune, svelte, élégante, mise la dernière mode. M"8 Leal a été présentée un nombre considérable de fiancés, de tout âge et de tout plumage, sous les noms et sous les qualifications les plus diverses. Elle soutirait le plus galamment du monde les petits cadeaux aux naïfs, et quand elle ne réussissait pas les éconduire après les avoir plumés, elle allait, s'il le fallait, jusqu'au mariage. On convolait en Angleterre, Londres, Quand la victime s'était convaincue de sa mésaventure, on lui tirait la ré vérence pour passer une autre dupe. Dans ces derniers temps, Mlle Léal s'était établie son compte avec une amie d'âge mûr, M™8 Leprou, qui a essayé de se suicider Mazas en avalant du verre pilé et en se coupant une veine au poignet gauche. M"8 Leal et Mme Leprou comparaissent devant le tribu nal M™8 Demortier et Lecourtois sont en fuite. M'" Leal répond l'interrogatoire avec un joli accent anglais, mais sans aucune pudeur britannique. D. Depuis combien de temps êtes-vous en France? R. Depuis trois ans. D. Comment viviez-vous en Angleterre? R. Dans ma famille. D. Pourquoi êtes-vous venue Paris? R. Pour m'y faire entretenir par un monsieur très riche, qui est parti. D. Et comment avez-vous connu Mm* Demortier? - R. J'avais été séduite moi-même par une annonce qu'elle faisait insérer dans les journaux il était question d'un monsieur très riche qui désirait épouser une jolie femme, sans dot. C'est ainsi que je suis devenue la cliente de Mme Demortier. D. Et bientôt sa complice. C'est vous qui jouiez les rôles de fiancée. R. Monsieur, les clients qui venaient chez nous ne cherchaient pas une femme légitime, mais une maîtresse. On me présentait, je me faisais offrir des parties de plaisir, des soupers fins ou des loges l'Opéra. C'est tout naturel. J'ai connu ainsi des gentlemen très connus, et si je voulais dire des noms... Le président. Vous vous êtes ensuite établie votre compte, rue Washington, avec Mme Leprou. Mme Leprou, interrogée, ne répond pas. Le président Est-ce que vous allez vous retrancher derrière le secret professionnel (Rires.) Voyons, vous présentiez Mlle Leal comme une riche héritière marier. Des millions, et toujours des millions Mlle Leal. Mais on a bien le droit de s'amuser. Nous ne cherchions pas des maris, mais des amants. C'est la vie parisienne, cela (Nouveaux rires). Les témoins entendus sont naturellement tous les pré tendus l'affût d'une dot et qui ont été si joliment refaits. Il en est venu de partout, même de Brives-la Gaillarde, et les professions les plus disparates se trouvent réunies dans ce cortège carnavalesque. La plupart des dépositions ré pètent les mêmes intrigues voici quelques-unes des plus amusantes. Lefèvre, de Limoges, petit employé J'ai lu dans un journal qu'on cherchait un jeune homme sans fortune pour une demoiselle ayant 1,200,000 francs, mais petite tâche. Rien verser d'avance. J'ai écrit. Mme Demortier m'a fait venir Paris parce que, disait- elle, la demoiselle voulait se décider d'après le physique. Me voilà parti. M1"8 Demortier me présenta d'abord la prétendue mère, une forte dame de cinquante cinquante- cinq ans. Le lendemain, je fus présenté sa fille, qui était Mlle Leal. M01» Demortier me fit acheter les cadeaux de noce. J'apportai 300 francs de bijoux. Mme Demortier me fit ob server que c'était bien peu pour une jeune fille qui m'ap portait 1,200,000 francs. Je retournai chez le bijoutier, j'en rachetai pour 4,000 francs. Le mariage était fixé au 15 Janvier 1886. Après les premiers pourparlers, M'"» Herluizon et sa fille étaient retournées Londres. Mme Demortier m'y emmena pour me présenter la famille. Pendant huit jours, elle me promena, mes frais, dans les hôtels et les théâtres les plus chers, et toute la société revint avec moi Paris, pour faire connaissance avec ma famille. J'avais fait venir de Limoges ma mère et ma tante. Ce fut celte dernière qui découvrit que j'étais abomina blement berné. Gomme elle faisait quelques questions Mlle Leal, celle-ci le prit de très-haut et lui dit, en tu toyant cette honorable dame qu'elle n'avait jamais vue Oh toi, tu sais, laisse moi tranquille, je n'ai affaire qu'à mon fiancé. Et nous sommes tous retournés Limoges. J'étais refait. Rires Mlle Leal. Allons donc, Monsieur n'a jamais été dupe. Est-ce qu'il a toujours eu avec moi une tenue con venable? Le témoin, vexé. Mademoiselle, je n'ai été que trop respectueux avec vous. Je le regrette bien maintenant. Ce serait toujours ça de pris. (Hilarité). M. Francis Boisseau, employé Lyon, M. Chapot, fa bricant de sièges Paris (qui voulait marier son fils), M. Tizerand, agriculteur, M. Tessier, clerc d'avoué Brives- la-Gaillarde, ont été victimes des mêmes escroqueries. M. Labsolu, coiffeur Paris, fait une déposition fan tastique J'ai trente ans. Je suis garçon. Mme Demortier, la quelle j'avais vendu des bijoux, m'avait conseillé plusieurs fois de me marier. J'ai votre affaire, me répétait-elle, un parti superbe Elle me fit d'abord verser 150 francs pour me présenter, dans une loge de l'Opéra, la nièce d'un général espagnol. Je ne plus pas, faute d'éducation, dit-elle. Alors, Mme Demortier me dit qu'elle connaissait Granville une jeune fille charmante, un modèle d'innocence, qui vivait avec sa mère veuve. Je lui donnai 400 francs pour qu'elle fit le voyage de Granville afin de s'entendre avec la famille. Quelques jours après, Mme Demortier me fit voir l'Opé- ra-Comique la jeune fille, qu'elle venait de rameuer de Granville, dit-elle. Mais comme cette jeune personne était seule dans une loge, la chose me parut surprenante, et je préférai ne pas conclure l'affaire. Sur quoi, Mme Demortier me dit qu'elle connaissait une autre héritière Marseille, la fille unique d'un marchand de savon. Je lui versai 800 francs pour qu'elle fit le voyage de Marseille. Elle reparut la semaine suivante et m'em mena rue Tiquenonne là elle me fit assister une soirée dans laquelle elle me fit apercevoir la prétendue jeune fille. Mais elle ajouta qu'elle était poitrinaire et qu'il fal lait presser les choses. Cela me dégoûta. J'ai compris que j'étais volé et j'ai arrêté les frais. Hilarité générale). Autres victimes, M. Harlry, sous-officier en retraite, 64 ans, M. Saunier, courtier en marchandises, M. Alfred Decq, coulissier celui-ci a écrit M018 Leprou, la suite d'une fugue Trouville, des lettres incendiaires, dont l'une commence par ces mots Charmante petite dia blesse aux surprises agréables Et il menaçait de se suicider si M™8 Leprou ne lui accordait sa fortune et sa main. Comme boursier, il promettait de faire prospérer la dot Mlle Leal (dédaigneusement). Monsieur nous avait toutes trois pour maîtresses, Mme Leprou, M"1' Vallès et moi. C'est nous qui avons été trompées Voici le témoin capital, M. Dauchot (Désiré), coulissier, qui a couru après son argent, et M"5 Leal a dû aller jus qu'au mariage. Mmt Demortier m'avait présenté mademoiselle comme la nièce d'un lord anglais, héritière de 400,000 francs. J'ai versé la petite commission, j'ai promené tout le monde au théâtre, et on m'a emmené jusqu'à Londres, où nous avons été mariés, M11' Leal et moi, devant un registrar. Le surlendemain, on m'a mis la porte et je suis revenu en France. Le président. A quelle heure vous êtes-vous marié R. A 11 heures du matin. Le témoin. Ma foi, c'est bien possible, je ne m'en souviens plus au juste. (Explosion de riresi. Le témoin. Oh non, c'est une blague Le président. Mlle Leal avait un enfant naturel, une petite fille née d'un père inconnu. Vous avez reconnu cette enfant comme la vôtre Le témoin (noblement). J'ai consenti ce sacrifice parce que je croyais la mère très-riche. (Rumeurs violen tes. Le témoin s'éloigne conspué de la barre). M. Barel, coiffeur Forcalquier J'ai versé 40 francs pour voir mademoiselle, que je croyais posséder 500,000 francs. M11* Leal. Taisez-vous donc, on vous les a rendus et on vous a rapatrié. Je vous ai lâché quand j'ai vu que vous vouliez me faire dîner au Bouillon Duval. (Hilarité prolongée). Le dernier témoin est un gentilhomme de Touraine, M. de le Marnière qui a pris sa mésaventure en riant Mme la baronne de Mortier, dépose-t-il, m'a fait payer une loge l'Opéra pour me présenterà une héritière. Pendant I'entr'acte, je fus mis en présence de l'objet si pur. Mais la demoiselle était accompagnée de deux ou trois gandins qui s'invitèrent tout seuls. Dites donc, baronne, demandai-je Mme Demortier, est-ce que vous vous fichez de moi Comment vous in stallez des rastaquouères dans une loge que j'ai payée, et vous me défendez d'y mettre les pieds La baronne a essayé de me tranquiliser. Mais quand elle m'eut dit que la "famille de la fiancée était très-pieuse, que la demande en mariage devait être fait par un respec table prêtre, et que cet ecclésiastique demandait 400 francs pour sa peine, j'ai compris que je n'étais qu'un jobard, et je suis rentré dans mes terres. Notez que pour me rendre la baronne favorable, je lui envoyais constamment du gibier de mes chasses de Touraine. C'était le coup du lapin (Hilarité générale). Le tribunal condamne, par défaut, M"8 Demortier trois ans de prison, Lecourtois un an Mme Leprou est ac quittée, faute d'éléments suffisants de culpabilité. M1" Leal s'offre une attaque de nerts. L'audience est levée au milieu des rires du public. DIMANCHE 8 Mai, 2 heures, 3e journée des Courses, organisée par la Société géné rale d'Encouragement. Valeur des prix 11,500 francs. DIMANCHE 8 et LUNDI 9 Mai. - Con tinuation du Grand concours annuel de che vaux de trait, organisée par la Société des Eleveurs belges, l'ancienne Plaine des ma nœuvres. Valeur totale des prix 25,000 francs. SAMEDI 14 Mai. Ouverture de la 6e Exposition internationale de races canines, l'ancienne Plaine des manœuvres, organisée par la Société royale Saint-Hubert. N. B. DIMANCHE 29 Mai. Pour la clôture des fêtes du Sport du printemps, Grand concours national, suivi de défilé, d'attelages pour voitures et véhicules de com merce de tous genres, organisé sous les aus pices de l'administration communale, par la Société Rruxelles-Attractions. La Société belge des Ingénieurs et des In dustriels a organisé, dans son local, au Palais de la Rourse, une Exposition de matériaux de construction de provenance belge (mé taux exceptés). Cette exposition restera ouverte au public tous les jours, sauf le Mercredi, de 10 4 heu res, jusqu'à fin Mai prochain. Entrée 50 centimes. SIÈGE SOCIAL BRUXELLES 5, BOULEVARD DU JARDIN BOTANIQUE, 5 Préaident du conseil M. le L'-génér»! DAUDENART, commandeur de l'Ordre de Ldopold Administrateur-délégué M. J. BREUER, chevalier de l'Ordre de Léopold; Aaministratear, clief dn contrôle de» titre* M. J.-B. BOGAERT, agent de change; Administrateurs MM. DE TIEGE, DE CODT, DE PREZ, DALEBROUX, BELLHFR01D: Commissaire M. N. TREMOURODX, chevalier de l'Ordre de Léopold. des villes de Bruxelles, Anvers, Liège, Gand, etc., etc. court delà Bourse de Bruxelles, augmenté des frais généraux, intérêt 6 p. o. pendant la durée du crédit accordé et une commission de banque. Ces obligations participent de nombreux tirages donnant droit des primes de 100,000 francs La Société Générale d'Épargne met en vente ces obliga tions moyennant nn premier acompte de cinq francs, un deuxième acompte de cinq francs (nn mois après) et des versements de 50,000 francs J 25,000 francs/ 10,000 francs 5,000 franc»/ 1,000 francs l 500 franc» I 250 franc»''* Dés qu'il a effectué le premier versement, l'acheteur participe TOUS LES TIRAGES son bénéfice exclusif. JLe» coupon» authentique» de» obligation» lui sont attribué» chaque échéance. Kn cas de mort par accident, l'obligation entièrement libérée est délivrée immédia tement ses héritiers, quel que soit le nombre de» versement» effectué». s s Moyennant l'envol d'un mandat-poste de par chaque obligation souscrite, tout S acheteur participera au tirage du AU TIRAGE DU 14 MAI PROCHAIN. (déposé.)

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Le Progrès (1841-1914) | 1887 | | pagina 5