N° 59. Jeudi,
47e ANNÉE.
28 Juillet 1887.
JOURNAL D'YPRES ET DE L'ARRONDISSEMENT.
VIRES ACQUIRIT EDNDO.
^3^ a
Droits et Devoirs.
6 FRANCS PAR AN.
PARAISSANT LE JEUDI ET LE DIMANCHE.
Depuis quelques semaines nous recevons assez
régulièrement, de la pari de quelques abonués,
avec prière d'insertion, des articles relatifs les
uns la politique générale, d'autres la politi
que locale.
Jusqu'à ce jour, uous n'avons pas cru devoir,
pour des motifs divers, donner suite ces de
mandes; mais, toute réflexion faite, nous ayons
l'honneur de prévenir uos honorables corres
pondants qu'à l'avenir nous accueillerons volon
tiers leurs communications pour autant
bien entendu, qu'elles ne s'écartent pas seusi-
bleineul de la politique sagement progressiste
que nous avons toujours pratiquée et qu'elles
n'aient pas pour objet des personnalités uié-
chautes pouvant nous exposer des désagréments.
Ypbbs, le 27 Juillet 1887.
11 faut bien revenir sur le vote émis la se
maine dernière, car il est gros de conséquences
bien graves. En rejetant le service person
nel, la majorité catholique de la Chambre a
signifié au pays qu'elle entendait maintenir les
privilèges, que la nation serait divisée en deux
parties d'un côté, ceux qui auraient tous les
droits de l'autre, ceux qui auraient tous les
devoirs. En définitive, nous nous trouvons en
présence de deux castes, et l'antagonisme est
saisissant. 11 frappe tous les yeux, parce qu'il
blesse toutes les consciences. Nous disons
Sue c'est alarmant, après les troubles de ces
eux dernières années, et la veille de la célé
bration du centenaire de la Révolution de 89,
qui se fit au nom des Droits de l'Homme. Y a-t-
il eu manque de clairvoyance de la part des
catholiques, ou si c'est parti pris de tendre la
situation et d'exaspérer les masses? nous ne
pouvons nous résoudre croire un program
me de réaction outrance. Un tel programme
serait trop bêtement criminel. A notre époque,
on ne gouverne pas longtemps contre la justice,
même main armée. Et l'on doit considérer
3ue, imprévoyance grande la force est la
isposition de ceux qui souffrent de cet état de
choses. Il y a donc aveuglement. Comme tou
jours, les privilégiés se cramponnent leurs
privilèges, ne comprenant pas que, faute de
jeter du lest propos-, un capitaine de navire
risque de sombrer corps et biens.
Pour nous, adoptant une proposition de La
Chroniqueet l'étendant, nous sommes d'avis
qu'en face du programme égoïste des catholi-
aues, il faut dresser un programme d'équité.
s veulent le droit exclusif de suffrage pour
ceux qui ne remplissent pas leurs devoirs en
vers la patrie. Demandons que ceux-là seuls
Sui rempliront leurs devoirs auront des droits,
u'à l'avenir, quiconque n'aura point été sol
dat, ne puisse pas être électeur. Celte disposi
tion, bien entendu, n'aurait pas d'effet rétroac
tif, et ceux qui auraient voté jusqu'ici, en
vertu du cens, continueraient voter. Mais
puisque les catholiques, par leur conduite cou
pable, ont fait tomber les dernières résistances
contre la revision de la Constitution, pourquoi
ne pas poser le programme électoral de telle
façon qu'il soit saisissable par l'esprit et le
cœur de tous Il faut un pays des formules
nettes, intelligibles, concises. Demandez aux
Belges Est-il juste que ceux qui ne veulent
fias assumer de devoirs jouissent des droits po-
itiques, et ne faudrait-il pas, au contraire, que
ceux-ci n'appartinssent qu'à ceux qui ne se
dérobent pas aux charges capitales La ré
ponse ne fait point de doute elle serait selon
l'équité, c'est-à-dire affirmative.
Il en est peut-être temps encore. On parle
d'un nouveau projet qui serait présenté par des
membres de la gauche. La droite doit réfléchir.
Le repousser sous n'importe quel prétexte, ce
serait jeter un défi au pays, qui le relèverait,
qui se hâterait de le relever. Les catholiques
craignent l'incorporation des séminaristes
Qu'ils prennent garde Il y a là une seconde
imprudence, de tant dire que le clergé est le
seul obstacle, tout au moins le principal, l'ap
plication d'une réforme juste. Toute la colère
pourrait bien se tourner contre l'Eglise.
Tout le dévouement que le parti clérical af
fiche pour les classes laborieuses n'est que pa
rade et comédie.
Les projets de loi, déposés la Chambre, et
les discours de la droite et du gouvernement,
èt les Congrès des sciences sociales, Liège et
ailleurs, tout cela, n'est que de simples trompe-
l'œil... qui ne trompent plus personne.
On a jugé l'œuvre nos grands démocrates
de sacristie et on a vu combien ils avaient sin
cèrement cœur de satisfaire aux justes aspi
rations de la classe ouvrière et d'améliorer son
sort, en détruisant les bonnes écoles commu
nales, en fermant les écoles d'adultes, en im
posant la viande, en attendant le pain et enfin
en rejetant le principe du service personnel,
de l'égalité de l'impôt de la milice.
Voilà les actions de Nos Maîtres Et ils font
hausser les épaules de rire de pitié leurs pro
pres partisans, quand ils font sonner haut leurs
intentions démocratiques. Laissez donc 1... On
vous juge par les iniquités que vous commettez
et non par les boniments sonores dont vous
remplissez vos journaux et vos assemblées.
On a dit que l'on conserverait les Commis
saires d'Arrondissement, mais qu'on leur ferait
beaucoup de loisirs en rognant de plus en plus
leurs attributions. Ce n'est pas ainsi
tend le Bien public, qui craint que ces
naires n'emploient leur temps
libéralisme.
Prenons garde, dit ce journal, de leur faire
trop de loisirs Là est le danger. Il est certain
que les commissaires libéraux c'est la majo
rité ne manqueraient pas d'en profiter pour
ue len-
fonction-
âire du
redoubler de zèle dans le travail de la pâte
électorale. Or, nous savons que sur cette ma
tière MM. les commissaires libéraux sont déjà
d'une jolie force.
Ainsi, il est bien avéré, que c'est parce qu'on
craint l'influence électorale des commissaires
d'arrondissement qu'on veut supprimer ce
rouage et qu'on le déclare inutile.
Ce sont ceux qui sont passés maîtres en fait
d'organisation politique qui ont peur d'une
cinquantaine de fonctionnaires disséminés sur
toute l'étendue du pays.
Ainsi, prenons pour type une commune ru
rale Le curé et son vicaire trônent au haut
de l'échelle ils parlent au nom du ciel. Vient
ensuite le bourgmestre, qui prend le mot d'or
dre la cure. Ce village bien pensant possède
un vieux médecin, ami de ses clients. 11 a vu
naître les enfants et mourir l'aïeul, mais il est
indépendant par caractère et suspect de libé
ralisme. Qu'à cela ne tienne. Il y a, Louvain,
une fabrique de médecins. On en expédie un
qui les caisses cléricales, toujours bien garnies,
assurent un traitement d'attente et dont la mis
sion est de drainer la clientèle du vieux prati -
cien.
Enfin, on remplace l'école communale par
un établissement congréganiste, chargé de
former les citoyens de l'avenir. Curé, bourg
mestre, médecin, maître d'école, notaire par
fois, c'est-à-dire toutes les forces surnaturelles,
intellectuelles et matérielles travaillant, tritu
rant la pâte électorale.
Avec ce groupement d'agents électoraux il
n'est pas difficile de se créer une majorité for
cée, qui ne représente pas la nation, sur la
quelle repose un gouvernement illusoire, qui
ne sait ni vouloir ni pouvoir.
Et dire que malgré ces efforts d'organisation,
il suffit d'un élan de la vérité, représentée par
le libéralisme, pour renverser cet édifice fra
gile et ces capuçins... de cartes.
Voici en quels termes la Belgique militaire
apprécie le vote de la Chambre sur la question
du service personnel
La majorité vient de commettre une de
ces fautes capitales qui aura des conséquences
graves pour la droite elle-même.
Si elle eût accepté la loi, elle pouvait
stipuler des garanties précises pour les immu
nités ecclésiastiques. Le sort et les flots sont
changeants les libéraux peuvent reconqué
rir le pouvoir, et, le cas échéant, ils s'empres
seront de décréter le service personnel sans
exemption pour les ministres du culte.
C'est M. Woeste qui l'aura voulu nous
l'avons déjà dit, c'est un symptôme d'abaisse
ment, une vraie calamité publique que, dans
un pays libre, une politique comme celle de
M. YVoeste puisse prévaloir au sein de la repré
sentation nationale.
Nous rechercherons ultérieurement la part
de responsabilité de chacun. Mais, dès pré
sent, nous croyons pouvoir dire que le gouver
nement n'est pas l'abri de tout reproche, qu'il
LE PROGRES
ABONNEMENT PAR AN: Pour l'arrondissement administratif et judiciaire d'Ypres, fr. 6-00.
Idem. Pour le restant du pays7-00.
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