NEUVE-EGLISE.
La situation.
Mais s'il commit avec un naïf aplomb des ab
surdités inavouables, rendons lui cette justice
qu'il ne le fit qu'en guise de récréation et pour
se reposer de la besogne aride laquelle il avait
voué son être immense.
Organiser une opposition, et lui donner la co
hésion et la force nécessaires pour abattre la
gueuserie locale, tel était le rêve sublime que son
ame ardente avait carressé dans sa sereine can
deur (Bossuet).
Car, il faut se le rappeler, l'époque où Mon
seigneur de Bruges nous envoya Pierre, un
grand constructeur et démolisseur devant l'Éter
nel dans le parti catholique, hommes et
choses, tout allait la débandade et vivait dans
une confusion étrange, sans égale depuis la tour
de Babel, et le sentiment du martyre était si près
de s'éteindre qu'au jour fatal des élections, les
victimes régimbaient et escamotaient ainsi aux
affreux libéraux la satisfaction de les coiffer d'un
cylindre bien conditionné, calibre tunnel.
Mais Pierre, toujours le même Pierre, le célè
bre, l'unique, le véritable, Pierre-le-Grand enfin,
savait ce qu'il devait Dieu, la patrie et
Neuve-Eglise
Dans quelques sermons politiques préparatoi-
le vote libéral, puis fonder successivement les
écoles, le Meeting et le Patronage avec les écus
d'autrui, telle fut sa première besogne
Corvée divine, vraiment digne du Dieu de
bonté et de paix qu'il représente.... Neuve-
Eglise, gratifié de beaux appointements (venant
du Ciel sans doute? Ou de fa caisse Belge
Trêve de plaisanteries
Car elle est là debout, son œuvre Elle reste,
vit et se développe Peu importe son auteur
que ce soient des nullités qui la composent et la
soutiennent, et sans doute il se fait tacitement
l'aveu que c'est la nullité même de ses adeptes
qu'il doit les maigres succès obtenus jusqu'ici
Et puis, n'est-il pas là, lui qui a de l'esprit
pour tous, pour en former quelque chose, des in
finiment petits, soit, mais néanmoins quelque
chose D ailleurs, une popularité naissante ne
nuirait-elle pas son ambition politique qui est
sa qualité maîtresse et n'exposerait-elle pas son
parti connaître un jour ces déboires que cau
sent les morts prématurées
Car nous les avons vus, nous, ces vides qu'on
tente en vain de remplir Nous les avons eus,
nos deux grands morts
Enlevé trop jeune, l'homme aux convictions
solides, inébranlables, ayant leur source dans la
science, le grand travailleur, le reviseur ponc
tuel de nos listes électorales
Trop tôt ravi, cet autre, le continuateur d'une
famille riche et respectée, le compagnon affable,
l'ami de l'ouvrier, le bienfaiteur du pauvre, le
citoyen aux sympathies universelles
Ils ne sont plus là, hélas pour nous guider
mais nous du moins qui sommes jeunes, jurons
de respecter et de suivre le testament politique
qu'ils nous ont laissé chaque acte de leur vie
publique En avant pour la Vérité et la Jus
tice En avant pour le Droit et la Raison
Repos ailleurs
Quelque lecteur sincère me demandera peut-
être Le libéralisme Neuve-Eglisois éprouvé
qu'a-t-il tenté contre la réaction disciplinée,
qu'a-t-il fait pour assurer sa suprématie l'ave
nir
Je tâcherai de répondre cette question avec
franchise et sincérité.
Nous n'avons plus l'heure qu'il est formu
ler les mêmes griefs contre les libéraux qu'au
lendemain des élections communales.
Des Judas ont été mis l'arrière-plan et sont
par cela même dans l'impossibilité de nous nuire
en catamini. Cette épuration, préparée par ceux
Sui avaient tout intérêt Février, présente le
ouble avantage de procurer ceux-ci la liberté
pleine et entière de s'attaquer directement nous
et la bonne partie du libéralisme une satisfac
tion qu'ils étaient en droit d'espérer depuis long
temps.
Que les traîtres agissent donc, qu'ils s'en
donnent cœur joie, ad majorem Tartufi gloriam
Ensuite, une école gardienne a été fondée qui
sera, espérons-le, un jour plus confortablement
aménagée et pourra faire une concurrence sé
rieuse aux tendres sœurs de l'Institut S1* Elisa
beth directrice M1,e Van Compernolle en
religion Moeder Marie. (Vous voyez, nous tail
lons ici, gratis en passant, une bonne réclame
En outre, l'ouverture prochaine d'un cours
d'adultes, comblera une lacune déjà souvent
signalée.
Enfin nous nous plaisons rendre hommage
ceux de nos chefs hélas rari nantesqui
s'occupent avec activité de la confection de nos
listes électorales, du recrutement des nouveaux
électeurs, et qui par les visites qu'ils font nos
écoles, témoignent de leur sollicitude éclairée
pour notre enseignement communal.
Mais un défaut capital subsiste toujours, et si
je dois m'en rapporter aux plaintes nombreuses
que j'ai entendu formuler, il menace de devenir
nn danger réel pour notre parti.
J'entends parler ici du manque de solidarité
entre les partisans d'un même principe, entre
les soldats qui combattent pour une même cause.
Ah nous ne sommes pas de ceux qui pren
draient l'initiative d'une croisade en faveur de
l'exclusivisme et nous déclarons hautement re
grettable que dans une localité comme la nôtre
qui ne compte guère au-delà de deux mille cinq
cents âmes, où les ressources de transaction sont
donc forcément restreintes, il y ait deux groupes
nettement tranchés qui semblent avoir brisé
jusqu'au dernier lien qui les unissait
Mais en présence de l'obstination du clergé et
de ses partisans fuir nos amis comme on fuit
des pestiférés; dénoncer nos échopes, nos ma
gasins, nos ateliersnos auberges comme on
dénonce les mauvais lieux; libéraux, que voulez-
vous faire
Irez-vous encore quand l'entretien de vos mé
nages nécessitera des dépenses nouvelles faire
part égale entre adversaires et amis et porter
une belle moitié de votre argent là où s'accumule
déjà tout l'or de la coterie cléricale, cet or qui
servira nous combattre
Allez-vous encore vous aliéner les sympathies
solides que vous possédez pour tâcher vainement
d'en acquérir de nouvelles
Est-il nécessaire d'insister Sur tout ce que pa
reille conduite a d'absurde et d'indigne
Et dans le même ordre d'idées, ce n'est pas
nous non plus qui établirons des patronages ou
des conférences laïques où des jeunes gens en
âge de faire leur entrée dans le monde et de se
faire aux us et coutumes des bonnes sociétés sont
retenus, au grand détriment des aubergistes de
la localité, le seul jour de la semaine qu'ils
aient consacrer la récréation
Non, nous ne voulons pas que nos fils soient et
restent de grands niais, et ce n'est pas ainsi que
nous entendons rétablir la solidarité compro
mise.
Ce que nous voulons, c'est qu'une entente fra
ternelle règne désormais entre libéraux et que
les marques de sympathie des chefs, matérielles
et autres, aillent tous les leurs indistinctement.
Ce que nous désirons, ce n'est pas singer bê
tement nos adversaires, et dresser, comme eux,
nos amis la férule mais c'est imiter leur orga
nisation, dans ce qu'elle a de bon pour nous
maintenir dans des conditions égales et faire
mieux qu'eux; ce que nous désirons c'est que
notre parti se groupe sans léser les intérêts d'au
cun de ses membres et qu'il ne néglige plus désor
mais les moyens de propagande dont il dispose.
Alors, aux grands jours des scrutins, au lieu
de trouver un corps indiscipliné, des haines fra
ternelles des susceptibilités froissées sinon
l'énervement général, nous irons de nouvelles
et brillantes victoires Un Neuve-Eglisois.
■«a»a5lSce«*-
POPERINGHE,
le 17 Août 1888.
Les enterrements Poperinghe.
Au mois de Février 1881, vint mourir un
homme des plus respectables, ayant passé, tant
comme architecte que comme professeur l'Aca
démie de dessin, plus de quarante années de sa
vie au service de la ville.
Il fut enlevé l'affection des siens et de ses
nombreux amis dans la nuit du Jeudi au Ven
dredi et ses enfants éplorés, afin de pouvoir uti
lement prévenir leurs parents, dont plusieurs
habitaient l'étranger, allaient demander M.
Vanden Berghe, échevinde l'état-civil, l'autori
sation de pouvoir conserver le corps j usqu'au
Lundi suivant, les enterrements ne se faisant pas
Poperinghe le Dimanche.
Un refus net accueillit cette demande et M.
Purgos les envoya promener, sans que, ni leurs
supplications ni leurs larmes pussent attendrir
l'inexorable échevin.
C'était dùr pour la famille qui dut se résigner,
mais le refus était, disait-on, l'application d'un
règlement voté par le Conseil. Pour éviter les
abus, on allait l'appliquer dans tous les cas qui
se seraient présentes l'avenir.
Quelle ne fut donc pas la surprise de ceux qui
avaient été éconduits quand, quelque temps
après, ils apprirent qu'une demoiselle, en villé
giature chez un de ses proches parents, étant
venu mourir, le fameux règlement n'allait pas
être appliqué. En effet, pour être agréable la
famille de la défunte et en particulier pour ré
compenser l'apostasie d'un de ses proches parents
qui venait d'abjurer ses opinions politiques, on
allait faire une exception.
Le corps de Mlle X morte le Vendredi, resta
jusqu'au Lundi suivant dans la maison de ses
parents, puis, on le porta l'hôpital où il fut
solennellement exposé dans l'église jusqu'au
Mardi, et enfin on le transporta en France
Il en fut de même pour la Dame d'un Conseil
ler, autrefois libéral, mais devenu catholique
ardent. Le règlement fut violé une fois de plus
et il se passa près d'une semaine avant qu'on
procéda l'enterrement de la défunte.
Mais voici qui est plus fort encore Il s'agit
cette fois d'un vieux curé.
Le brave homme meurt le Jeudi, 9 Août et,
après l'avoir conservé et exposé plusieurs jours
dans sa maison, on procède ses funérailles le
Lundi suivant. La cérémonie funèbre terminée,
après l'avoir promené autour d'une partie de la
ville, on le conserva jusqu'au Mardi dans la
chapelle de l'hôpital, d'où il fut transporté jus
qu'à Beveren, lieu de sa sépulture.
On fut inexorable pour la famille du regretté
Maertens parce qu'il était libéral, mais depuis,
on n'a eu que des complaisances pour les famil
les catholiques quand ils perdaient leurs pro
ches.
Nous n'en finirions pas si nous citions touB les
cas qui se sont présentés dans ces dernières an
nées et dans lesquels le règlement invoqué par
l'échevin Vanden Berghe n'a pas été respecte.
Il est vrai qu'il s'agissait des amis du clergé,
et nos édiles qui sont sous la domination des
prêtres ne peuvent rien refuser leurs maîtres.
Quand enfin sera-t-il donné aux Poperinghois
de pouvoir gagner leur logis sans se trouver ex-
Çosés faire des chutes quelquefois mortelles.
out le monde se souvient qu'il y a quelques
années, un respectable octogénaire M. Den
rentrant le soir tomba, au moment d'atteindre
sa demeure. Il s'était heurté contre un baquet
d'immondices, se trouvant dans une complète
obscurité, au milieu de la rue en attendant que
les employés de la ferme des boues vinssent l'en
lever.
La conséquence de cette chute fut la mort de
cet honorable citoyen.
Samedi dernier, M. Ven rentrant le
soir chez lui est tombé de la même façon et tout
en sang il dût être transporté sa demeure où
il se trouve alité.
Nous faisons les vœux les plus sincères pour
que cet honorable vieillard, qui, jusqu'au mo
ment où cet accident lui est arrive par suite de
la négligence coupable de nos édiles, était des
mieux portants, puisse, grâce sa robuste con
stitution, être conservé encore de longues années,
l'affection de ses nombreux amis.
Allons, maître Purgos et vous Félix, le busé,
vous qui dilapidez si sottement les finances de
la ville, continuerez-vous encore longtemps
exposer la vie de vos administrés pour économi
ser quelques litres de pétrole
(Suite et fin.)