70. Jeudi,
48e ANNÉE
30 Août 1888.
JOURNAL D'YPRES ET DE L'ARRONDISSEMENT.
Chemin de fer.
Résumé politique.
A bas la calotte.
6 FRANCS PAR AN.
PARAISSANT LE JEUDI ET LE DIMANCHE.
Heures de départ cTYpres pour
Un nouveau sujet de polémique vient de sur
gir entre la France et l'Italie. Le Saint-Siège,
tout récemment, a adressé aux missions catholi
ques italiennes en Orient l'ordre de repousser,
comme par le passé, la protection des agents
italiens et de rester sous la protection de la
France. Cette mesure, qui s'explique par l'état
d'hostilité qui subsiste entre le Quirinal et le
Vatican, est vivement critiquée par la presse
officieuse italienne, qui trouve étrange le specta
cle du chef de l'Eglise confiant les intérêts des
missions italiennes un gouvernement radical
libre-penseur, anti-clérical par excellence com
me la France, et faisant cause commune avec
cette puissance qui dirige tous ses efforts contre
l'Italie.
Le fait est que l'on a dû être désagréablement
impressionné au Quirinal de voir le Vatican
avoir plus de confiance dans les agents français
que dans les agents du gouvernement royal
1 étranger. Ce manque de confiance du Vatican
a d'ailleurs une cause directe et toute récente. Il
y a quelque temps le gouvernement italien a fait
ouvrir une enquete sur les écoles italiennes con
fiées aux missionnaires en Orient et qui rece
vaient des subsides de l'Etat.
Cette enquête a, paraît-il, établi d'une manière
péremptoire qu'elles étaient organisées aussi mal
que possible. On n'y enseignait point la langue
italienne, et elles étaient dirigées dans un esprit
systématiquement hostile 1 Italie. Quant aux
résultats pratiques, ils étaient peu près nuls.
Dès lors, le gouvernement du roi songea sérieu
sement aux mesures prendre pour que l'argent
des contribuables ne fut pas dépensé sans un but
utile et pour qu'il ne servit pas répandre en
Orient des sentiments peu bienveillants envers
l'Italie.
C'est ainsi qu'une commission a été chargée
d'étudier la question des subsides donner aux
écoles italiennes l'étranger et sur les conclu
sions de cette commission, le gouvernement va
maintenant les réorganiser sans le concours du
clergé.
C'est donc en quelque sorte pour prendre sa
revanche que le Vatican vient d'adresser aux
missions la circulaire qui irrite la presse offi
cieuse.
Quant la réorganisation des écoles italiennes,
il paraît décidé que l'enseignement y sera pure
ment laïque désormais. M. Crispi aurait institué
du coup trois directions auxquelles ressortiront
ces écoles, créées ou créer. L'une aurait son
siège Constantinople, l'autre Alexandrie, la
troisième Tunis. On n'ajoute pas si M. Crispi a
également institué Rome un préfet de cette
propagande nouvelle.
A Paris on suit naturellement cette affaire
avec un très-vif intérêt, car ces écoles, en somme,
constituent un puissant moyen d'action en
Orient. Mais avant do s'émouvoir de cette me
sure, dit le Temps, et avant de se demander,
comme on le fait de certains côtés, ce que l'on
penserait Rome de la création par le gouver
nement de la République d'une direction des
écoles françaises sur le littoral de la mer Rouge
et en Abyssinie, Massouah, il conviendra d'at
tendre pour voir si ce décret existera autrement
que sur le papier, et s'il suffira M. Crispi de
frapper du pied pour faire sortir du sol les éco
les laïques italiennes en Orient.
Ypres, le 29 Août 1888.
A propos d'un projet de loi sur la révision
dans le sens religieux de la législation scolaire
en Néerlande, l'aimable Journal d'Ypres dans
son n° du 25 c' a trouvé l'occasion de donner
un coup de griffe au parti libéral en Belgique
et une égratignure nos écoles.
Le pivot de la grande politique chez nous,
dit la pieuse feuille c'est l'A bas la calotte.
Rien de plus, rien de moins.
Les journaux ultramontains se gardent de
discuter le libéralisme, ils trouvent plus avan
tageux de rechercher les défauts de la cuirasse,
d'attribuer ce grand parti national tous les
péchés d'Israël, d'en faire le bouc émissaire de
la société.
Il semble d'après l'organe des sacristains que
le libéralisme n'ait qu'une pensée exterminer
le prêtre un but détruire la religion.
Est-il un pays, où le piètre soit plus consi
déré, plus respecté, mieux rémunéré qu'en
Belgique? Il y a bien par-ci par-là quelques
vicaires qui ne roulent pas sur l'or, mais part
ces exceptions, est-ce que nos curés ne jouis
sent pas d'une large aisance, d'autant plus
large que n'ayant ni femme ni enfant ils n'ont
pourvoir qu'à leurs besoins personnels.
Est-ce qu'à leur mort tous nos doyens ne
laissent pas leurs héritiers de beaux écus que
les fidèles ont déposés dans leur escarcelle en
échange de bénédictions de toutes espèces
Les prêtres ne bénéficient-ils pas en Belgique
de toutes les libertés garanties aux Belges et
dont ils sont parfois les premiers abuser, ne
jouissent-ils pas de faveurs spéciales, ne leur
rend-on pas en toutes circonstances les hon
neurs dus leur position ne reconnaît-on pas
leurs mérites, leur dévouement, les services
qu'ils rendent la cause de l'humanité
Ah si le prêtre se renfermait toujours dans
sa mission apostolique, s'il se bornait remplir
son ministère de paix, s'il se contentait de
prêcher les beautés et les grandeurs de la reli
gion, s'il marchait toujours sur les traces du
divin maître dont le royaume n'est pas de ce
monde, quelles couronnes ne lui tresserait-on
pas
Mais point, le prêtre veut être Dieu et César;
il veut dominer l'église et l'hôtel-de—ville
et c'est là ce que les libéraux n'admettent pas.
C'est là le point litigieux entre le cléricalisme
qui est le parti politique des prêtres et le libé
ralisme qui est le parti des hommes indépen
dants qui ont la prétention d'être assez grands
garçons pour se gouverner eux-mêmes.
De là cette lutte implacable entre le clérica
lisme et le libéralisme, lutte qui tournera
infailliblement l'avantage du parti libéral car
le droit, la justice et la vérité doivent finir par
triompher.
La religion dans Fécole. Je le demande tout
homme sensé. Suffit-il que les ennemis de nos
écoles les taxent d'écoles d'impiété, d'écoles
sans Dieu pour leur ôter le caractère religieux
qui est l'essence propre de l'école.
Suffit-il que le prêtre refuse de pénétrer dans
l'école pour que l'Esprit de Dieu en soit chassé?
mais une pareille pensée est absolument con
traire l'esprit des évangiles; elle révolte la
raison tant elle est absurde, tant elle est con
traire la logique, au bon sens.
Ecoutons ce que dit ce sujet le pédagogue
allemand Diesterweg, un éducateur d'expé
rience
Enseignement religieux dans l'école neveut
pas dire que l'instituteur doive enseigner le ca
téchisme; la mission du maître est d'ouvrir
l'intelligence des élèves, de leur dévoiler les
vérités connues.
Toute vérité étant divine et tout ce qui est
divin étant religieux, quiconque enseigne la
vérité enseigne par là la religion.
Toutes choses venant de Dieu ramènent
Lui l'esprit qui cherche les connaître et les
expliquer toute vérité a par cela même un ca
ractère religieux.
En un mot la vérité a pour objet l'essence
des choses; cette essence réside en Dieu, toute
vérité est une loi de Dieu, les lois de l'univers
sont des oeuvres de la raison divine et quicon
que les fait connaître enseigne Dieu et la reli
gion.
Être pénétré de cette pensée que l'en
seignement doit servir la culture d'âmes
humaines, que tout ce qu'on enseigne l'école
sert faire connaître les œuvres du Créateur,
voilà le véritable enseignement religieux.
Mais nos bons cléricaux n'entendent pas les
choses de cette façon. Pour eux le sentiment
religieux est celui qui se traduit par des actes
ostensibles, des génuflexions hypocrites, des
promenades aux flambeaux, des litanies inter
minables, etc... mais il est écrit que ces gens
ont reçu leur récompense. Matthieu VI.
A bas la calotte. Est-ce au bon pasteur que
s'adresse cette apostrophe? Jamais.
Celui-là les libéraux l'admirent, le respec
tent, l'aiment.
A bas la calotte. C'est-à-dire bas le Drôtre
qui se fait courtier électoral, qui sort ae son
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