Nouvelles des Arts. Congrès progressiste. Nous reproduisons, d'après la Gazette d* Char leroi, un article qui sera lu ici, avec un vif intérêt, par toutes les personnes qui connaissent cette famille d'artistes qui a nom SIMAR. CONCERT DE BIENFAISANCE. Audition des Œuvres de M. Julien SIMAR. Dimanche dernier le congrès progressiste a volé l'ordre du jour suivant Le congrès libéral progressiste, Considérant que le régime de la conscription et du remplacement, implanté dans le pays par la domination étrangère, est en opposition avec nos institutions et nos traditions nationales qu'il viole, au préjudice des plus pauvres, le principe constitutionnel de l'égalité des citoyens et qu il laisse l'indépendance de la Belgique exposée tous les périls Considérant que l'énorme force numérique des armées qui nous entourent ne permet d'assurer la résistance une agression éventuelle que par le concours patriotique de tous les citoyens ar més pour la défense du pays Considérant que, sous peine de ruiner le pays par l'interruption prolongée des travaux profes sionnels et par un énorme accroissement du budget de la guerre, il faut, pour pouvoir appe ler éventuellement tous les Belges valides sous les armes, que l'instruction militaire leur soit donnée dans leur commune ou a portée de leur résidence et qu'elle soit complétée et achevée dans de courtes périodes exclusivement consa crées aux exercices et aux manœuvres militaires; Considérant que cette constitution de l'armée fortifiée par des cadres permanents d'officiers et de sous-officiers et par un noyau de volontaires engagés dans les armes spéciales assurera la défense nationale une puissance qu'aucun autre régime ne pourrait atteindre Vu l'article 4 de son programme adopté le 30 Mai 1887 Proclame la nécessité 1° d'abolir l'inique ré gime de la conscription et du remplacement 2° De rendre les charges militaires personnel les et égales pour tous 3° De faciliter l'instruction par l'organisation d'exercices préparatoires 4° De réduire la durée des périodes de présence sous les armes au temps strictement nécessaire pour compléter et constater l'instruction mili taire des citoyens 5° De maintenir des cadres d'officiers et d'as surer des avantages sérieux aux volontaires et aux miliciens engagés dans les armes spéciales, ainsi qu'aux cadres permanents de sous-officiers, Décide Le parti libéral progressiste réclame du gou vernement de la Chambre des représentants et du Sénat des mesures assurant complètement la défense du pays par la réorganisation du sys tème militaire actuel conformément aux princi pes proclamés par le congrès, Et charge Le comité d'organiser dans les villes et les campagnes une énergique propagande en faveur de ces principes. Dans une assemblée de facteurs des postes de l'arrondissement tenue Dimanche dernier, il a été décidé de demander par la voie de nos repré sentants et de la presse, une augmentation de traitement qui permettrait ces fonctionnaires de supprimer le coup humiliant du calen drier d'étrer.nes. Les facteurs, dont les attributions deviennent chaque jour plus nombreuses, souffrent dans leur dignité de devoir, chaque renouvellement d'année, tendre la main comme des mendiants {>our trouver un supplément de traitement que e gouvernement fait entrer en ligne de. compte Cest sans contredit le plus important événement musical que les annales carolorégiennes aient jamais eu enregistrer, que le grand concert de bienfaisance d'hier. L'audition des œuvres du savant directeur de notre Académie de Musique avait en quelque sorte ré volutionné notre bassin de Charleroi. Aussi, en présence de ce public nombreux et choisi, du recueillement et de la profonde attention avec les quels chaque numéro du programme a été écouté, on peut dire que la preuve est faite du dilettantisme de nos populations industrielles, et il faut reconnaître l'évidence que l'art musical, quoiqu'on en dise, a con servé Charleroi et dans les environs de très nom breux et très fervents adeptes. Oui, grâce au courage,l'activité, la persévérance et surtout au talent remarquable de M. Simar, une fête grandiose, une manifestation essentiellement ar tistique a prouvé hier que notre Académie de Musique, sous la vaillante impulsion de son directeur, peut faire grand et bien, et que désormais cet établissement d'in struction et d'éducation musicale n'a plus rien envier aux institutions similaires de Belgique. Honneur donc M. Simar, l'artiste dévoué qui a si bien concilié l'art et la charité en donnant la première audition de ses œuvres chorales et instrumentales au bénéfice de l'Orphelinat de Charleroi. Nul doute, qu'encouragé par le brillant succès de cette première tentative, il ne nous donne l'avenir d'autres séances qui, l'instar des concerts populaires de Bruxelles, compléteront l'éducation musicale des élèves de son Académie et initieront le public carolorégien au grand répertoire des classiques de la symphonie et du chant. Le program me exclusivement composé d'œuvres inédites de M. Simar, nous a ainsi permis d'apprécier le maitre sous ses incarnations multiples; traitant tan tôt le genre magistral, grandiose de l'épopée guerrière, tantôt l'idylle, la rêverie, le sentiment, voire même le style léger et pimpant de l'art auquel préside Therp- sichore. Cloche Roland, avec ses chœurs, ses marches guer rières, ses chants de joie, ses prières,ses imprécations, ses appels aux armes, nous a donné l'occasion d'appré cier la souplesse de son talent aux multiples faces, sa grande connaissance des ressources de l'orchestre et la correction avec laquelle il sait écrire pour les voix. Une solennité semblable mérite certainement autre chose qu'un compte-rendu banal; aussi bien, en con viant le public l'audition de ses œuvres, un composi teur permet, encourage même en quelque sorte l'analyse critique ou élogieuse des compositions qu'il présente. Je me permets de résumer ici, aussi sincèrement qu'im- partialemeut, l'impression générale, et pour ce faire, au risque d'être peut-être un peu long, je reprends le programme en détail La Marche des Eburons, qui ouvrait le concert, mérite certainement une mention toute spéciale, pour son allure franche, ses mélodies épisodiques si expres sives et si bien enguirlandées de dessins aux contours fins et délicats détaillés par les violoncelles. Son final grandiosement conçu, très bien amené, n'a pas peu contribué soulever l'auditoire et celui-ci, immédiate ment empoigné, a fait au compositeur une ovation bien méritée. - - La rêverie pour deux voix de femmes est une œuvre de beaucoup moins d'importance, simplement mélodi que elle a été dite sans plSsùle prétention qu'elle n'en comporte par l'essaim des jeunes élèves de l'Académie en somme, un gentil petit morceau fort gentiment in terprété. L'Adieu de Musset est très bien et très poétique ment écrit, dans cette teinte vague et indéfinie qui sied si bien la poésie du maitre français. VAir de Conrad a paru un peu èfierèhé l'harmo nie en est très originale et contribuai .renf^ intéres sant ce fragment détaché d'un grand.opera. Minuit. .Têks 'fin, très délicat avec te dessin ryth mique de co?*sf profofigeant Ibjfini sur une fraîche et gracieuse méldtlie qu'interrompt A moment donné un joyeux épisode tfansant, où l'on croit voir gnomes et farfadet se jouant dans l'ombre tandis-que la cloche fait entendre ses heures lentes-et mon. nés. La Berceuse, avec ces deux dessins mélodiques si distincts et se mariant si bien. Violon et violoncelle tantôt chantent ensemble, tantôt alternent de la r ^on la plus heureuse avec la mélodie chantée. Toutefois, nous devons la vérité de dire que parfois dans ce morceau nous avons cru vaguement retrouver le sou venir d'un certain Noël de Bonoldi. Il est vrai qu'on a déjà tant traité le genre berceuse qu'une réminiscence, somme toute, ne prouve absolument rien. Ajoutons qu'ici M. Simar n'a pas seulement fait œuvre de musicien il est l'auteur des paroles de sa Berceuse et l'ovation que le morceau a provoquée, grâce la remarquable interprétation deMmeHiernaux- De Guffroy, doit avoir été particulièrement au cœur de notre concitoyen. Les airs de Ballet sont charmants, et la danse des Bannières avec son caractère guerrier, son allure mar tiale, forme bien le délicieux contraste après la sémil lante mazurka dite pas de deux. L'Andante, malgré le charmant dessin des flûtes et hautbois, nous a paru un peu traîné en longueur mais en revanche il y a lieu de louer sans réserve le Rondo final avec son scherzo endiablé suivi d'une gen tille pastorale que dialoguent hautbois et clarinette ce motif d'une grande fraîcheur est subitement interrompu par les trompettes ramenant, d'une façon aussi brusque qu'inattendue, la ronde finale. Les dames patronesses de l'Orphelinat ont eu la dé licate attention d'offrir une couronne celui qui ap portait un concours si précieux leur œuvre elles ont délégué cette fin M. Clément Lyon qui en a fait la re mise sur la scène, en quelques paroles bien senties, au moment où M. Simar montait au pupitre pour attaquer la Cloche Roland. La salle toute entière a applaudi. L'orchestre a entonné la Brabançonne et pendant quel ques minutes c'a été une douce émotion dans la salle. La cantate qui formait elle seule la deuxième partie du concert est une œuvre sur laquelle il serait bien té méraire de vouloir porter un jugement. Ecrites dans les conditions que l'on sait, en vue des concours dits de Rome, ces œuvres sont toujours presque des impro visations, étant données les conditions de temps impo sées par le règlement absurde de ces concours. En effet, peut-on exiger d'un compositeur, quel qu'il soit, d'avoir des idées jour et heure fixe line faut donc jamais chercher dans ces cantates dites du prix de Rome, la cohésion, le fini, la perfection qui doit caractériser toute œuvre longtemps méditée, tranquillement mûrie, complètement fouillée en tous ses détails. Cloche Roland de M. Simar n'en est pas moins une œuvre de valeur, une composition de grand style. Très bien venue l'entrée du récitant, très coquet aussi l'air du tisserand, rappelant bien la manière de Gounod avec son double motif mélodique. Bien expressive la phrase de la femme du tisserand nous disant ses angoisses et ses craintes. Le petit chœur si guilleret des jeunes filles, sur ces mots Semez pleines mains est aussi très fin et très coquet. Mais surtout avec quelle vérité de senti ment, avec quelle profondeur d'accent le compositeur a-t-il traduit le désespoir de cette mère pleurant le père de son enfant. C'est là une page essentiellement dramatique qu'on ne peut laisser passer sans la souli gner. La description de la Bat.- ille et la Marche triomphale sont deux pages du plus grand effet, quoique pourtant le final de la Bataille ait plus d'un point d'analogie avec le final des airs de ballet-lettre d, et la Marche avec celle des Eburons. --Toutefois l'effet de marche ne laisse pas de s'accen- 'uer lorsque les chœurs, s alliant l'orcheslie, rap pellent, en même temps que la marche résonne éclatante de sonorité, les grandes lignes caractéristi ques de la cantate. Toute la fin de la cantate est gran diose -it le public enthousiasmé a acclamé de grand cœur l'auteur ht ses vaillants interprêtes. Il faut rendre aux solistes un hommage bien mérité: Mme Hiernaux-De Guffroy a. été superbe d'accents dans la cantate surtout le récitant M. Bouchât, a une très joliq voix, suffisamment timbrée, et il a détaillé son ré cit avjc tout le calme et toute la correction voulue. M. î/ebartde a.eu #bss", des moments-très dramatiques et son interprétation intelligente n'a pas^pq^ contribué au succès de fexécution. Nos.plus chaleureux compliments l'orchestre que nous avions entendu il y a six mois au concours de l'Académie et qui depuis lors a progressé pas de géant. Un bon point aux chœurs, lesquels, part quelques défaillances, ont bravement fait leur devoir dans l'in terprétation d'une œuvre relativement difficile, qu'ils ont chantée avec beaucoup d'entrain et de brio. Les sopranis sont mettre hots pair, elles ont chanté la cantate d'une manière admirable, et comme franchise d'attaque, et comme précision et justesse. Nous ne pouvons terminer s ans rendre encore une fois justice au maître Simar il doit, être fier de son résultat, nous l'en félicitons de bon cœur et nous espé rons qu'encouragé par les succès qu'il a remportés hier, il continuera faire tous ses efforts pour mainte nir l'institution qui lui est confiée aussi haut qu'il est capable de le faire. Encore une fois, au nom de tous les auditeurs Bravo. Un auditeur. Pour les facteurs de poste.

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Le Progrès (1841-1914) | 1889 | | pagina 2