LA MANIFESTATION
Bruxelles.
A la Chambre.
Scandales administratifs.
Nouvelles locales.
Signalons en passant qu'il n'est pas vrai qu'un
garde de la 3* compagnie, patronné par le
cadre des officiers, se soit mis, l'année passée,
en opposition contre son capitaine. Bah I pour
le Journal d'Ypres, un démenti de plus ou de
moins 1....
Et le Major Vandenbogaerde qui fut nommé
son grade sans faire partie de la Garde? Voilà
une bouffonnerie 11! fallait bien, en ce moment,
nommer un major hors de la Garde, puisque la
Garde n'existait pas encore
Ce que nous avons reproché M. Werbrouck,
c'est d'avoir souscrit des conditions incom
patibles avec la discipline, d'avoir sacrifié le
principe de l'institution son ambition per
sonnelle.
Le Journal d'Ypres nous défie de montrer le
programme de l'élu du 2 Juin. Nous le lui
avons fait connaître, ce programme, et nous le
maintenons dans toute son intégrité. Si le cha
leureux défenseur de M. Werbrouck désire
être plus amplement renseigné, qu'il s'adresse
I homme qui ne mâche pas toujours ses mots
et qui a la franchise de les dire visage décou
vert celui-ci lui fera connaître dans quelle
circonstance il a accepté les conditions qui lui
ont été imposées et lèvera ainsi tout doute dans
l'esprit de notre contradicteur.
Par une tactique peu loyale et qui lui est
familière, le Journal d'Ypres intervertit les
rôles et nous accuse de faire un scandaleux
appel l'insubordination.
Le terme insubordination dont il se sert, et
dont il semble ignorer la valeur, tout puriste
ou styliste qu'il soit, a trait au service. En
dehors du service il n'y a plus de subordination
ou d'insubordination, il n'y a que des relations
de camarade camarade, comme nous avons
dit.
Disons, pour terminer, que les coups d'en
censoir l'adresse du chef de la Garde, les
railleries mordantes dont le petit Monsieur
semble avoir le monopole, ses sarcasmes mé
chants ses insinuations malveillantes, ne
détruiront pas le caractère subversif de l'élec
tion du 2 Juin. M. Fraipont restera l'officier
consciencieux, aimé et estimé de tous, et M.
Werbrouck ne sortira pas de la réprobation
qu'il s'est attirée par sa conduite injustifiable.
Le piédestal que lui dresse son défenseur ne le
grandira pas d'une ligne dans l'estime du corps
d'officiers.
Jamais l'on n'a vu foule semblable. Aux
abords de l'Hôtel continental les fiacres ne peu
vent plus circuler. Le service des tramways est
interrompu. Des bousculades se produisent
dans tous les coins. On crie, on chante.
Des ouvriers décorent avec des lanternes vé
nitiennes les fenêtres du local de l'Association.
Au balcon d'une des maisons de la place De
Brouckere, un immense transparent sur lequel
on lit Hurrahl pour la pacification libérale.
Vive la Ligue! Vive l'Association!
De toutes parts arrivent des drapeaux de
jeunes gardes des faubourgs.
L'arrivée de chaque groupe provoque des
manifestations enthousiastes.
La formation du cortège se fait avec diffi
culté.
Et la foule augmente toujours I...
Un roulement de tambour: c'est le signal du
départ. Impossible de se frayer un chemin par
mi les rangs serrés des curieux.
On se bouscule ferme.
Enfin, on parvient passer, mais un acci
dent se produit. Le cortège se divise.
Une fraction, la plus importante, enfile le
boulevard Anspach, où elle est acclamée avec
un enthousiasme qui lient du délire.
L'autre fraction, voyant qu'elle n'est pas
suivie, passe derrière le Continental et rattrape
la première partie du cortège un peu plus loin.
En route, peu ou pas d'incidents.
On chante, on crie.
Vers 9 h. 3/4 les manifestants sont arrivés
chez M. Graux, avenue Louise.
Une délégation a pénétré l'intérieur de
l'hôtel aux félicitations qui lui ont été adres
sées, M. Graux a répondu que le scrutin de
cette journée prouvait que la représentation
bruxelloise était fictive et que le moment était
proche où l'opinion libérale aurait reconquis
son prestige.
M. Graux a été appelé au dehors par les ac
clamations d'une foule immense.
Il vient se poser sur le perron de son hôtel et
prononce un discours où il parle de la nécessité
pour le parti libéral de maintenir et de consoli
der l'union.
Des acclamations formidables accueillent ces
paroles.
La division d'artillerie, sous le commande
ment du capitaine Betrams, occupait partir
de 6 heures le Waux-Hall et l'école moyenne
de l'impasse du Parc.
M. Philippe Flon, l'excellent chef des concerts
du Waux-Hall, qui fait partie de la division, a
tenu cœur de faire son service comme ses
camarades.
A différentes reprises, sans qu'on sache au
juste pourquoi, l'artillerie ou les pompiers ont
barré la rue Royale, hauteur de la Monlagne-
du-Parc et de la rue de la Loi.
Une foule nombreuse accompagne la mani
festation, qui se rend chez MM. Janson, Graux,
Buis et Feron.
La joie est débordante. Depuis longtemps, on
n'a assisté Bruxelles pareille explosion d'al
légresse.
On ne rencontre personne qui ne porte la
boutonnière ie bouquet de bluets, qui traduit
pour tous le triomphe de la journée.
Si le candidat clérical avait triomphé, la ville
serait restée calme et morne.
Ce soir, au contraire, la joie est sur tous les
visages et on entend retentir partout le cri de
Vivent les libéraux Vive Janson
Aucun incident.
On espérait la première de M. Janson, qui
n'est pas venu.
L'entrée des ministres a produit dans les tri
bunes un mouvement de curiosité.
M. Devolder qui, ce matin encore, disait
qui voulait l'entendre que les cléricaux allaient
remporter quinze cents voix de majorité au
moins, n'est pas vehii la séance. 11 aura eu
peine se remettre de son émotion.
Léonard Beernaerl-Pourbaix avait un air
grave, compassé. Son nez s'était terriblement
allongé.
Il n'est guère resté sur son banc; il a eu de
longues conversations avec la plupart des droi
tiers et les entretiens de ces gens ne parais
saient pas empreints d'une gaîté folâtre.
La Chambre a voté sans discussion le budget
du ministère de la guerre et des modifications
la législation postale et a repris la discussion du
projet de loi sur les conseils des prud'hommes
amendé par le Sénat. Le principal amendement
supprime les contre maîtres comme électeurs
et éligibles,
M. De Bruyn a défendu cet amendement, qui
a fourni l'occasion divers droitiers de peu
d'importance l'occasion de bafouiller d'incom
préhensibles harangues.
M. de Kerchove s'est opposé cet amende
ment que rien ne justifie, et la séance a été
levée cinq heures.
"O-oG^Ooo
Le Moniteur a publié Dimanche un arrêté
royal portant que les élections générales pour
le renouvellement intégral des cadres dans les
gardes civiques non actives auront lieu, pour
les grades de caporal, sous-officier et officier
subalterne, le Dimanche, 14 Juillet; pour les
majors, médecins et médecins adjoints, le Di
manche, 28 Juillet.
11 sera procédé le Dimanche 11 Août la for
mation des listes de candidats aux grades de
lieutenant adjudant-major et de lieutenant
quartier-maître.
Les officiers élus ou nommés prêteront ser
ment le 13 Octobre et entreront le même jour
en fonctions aux lieu et place des titulaires
actuels.
On sait le bruit que la presse conservatrice a
fait propos de l'affaire du Bureau de bienfai
sance d'Anvers. Cette même presse n'a garde
d'annoncer la condamnation 3 ans de prison
d'une des fortes têtes du parti catholique de
Menin, le sieur Vandaele, receveur de la Ville
et du Bureau de bienfaisance. Le coupable avait
volé 16,000 francs la Ville et 9,000 au Bureau
de bienfaisance. Les plus graves irrégularités
ont été relevées dans tes livres de la commune.
Il faut croire que ceux-ci n'étaient jamais
vérifiés.
La condamnation dont nous parlons a été pro
noncée Mercredi par le tribunal correctionnel
de Courtrai.
Samedi matin la chambre du conseil du tribu
nal de Mons a confirmé le mandat d'arrêt
décerné, le 10 Mai dernier, contre Léonard
Pourbaix, imprimeur, La Louvière, né
Haine-Saint-Paul
Pourbaix est accusé d'avoir, La Louvière
ou ailleurs dans l'arrondissement, au cours de
l'année 1888, commis un attentat dans le but,
soit de détruire, soit de changer la forme du
gouvernement ou l'ordre de successibilité au
trône, soit de faire prendre les armes aux
citoyens et aux habitants contre l'autorité
royale, les Chambres législatives ou l'une
d'elles, soit pour avoir coopéré directement
son exécution par l'un des moyens indiqués
dans l'article 66 du code pénal.
Pourbaix était assisté de ses défenseurs, Mes
Foccroule et Stamanne du barreau de Mons,
ui ont immédiatemeut interjeté appel de la
écision.
Dans la même journée, les avocats défenseurs
du grand complot se sont réunis Mons où ils
ont fait prendre leur portrait photographique
en groupe.
Au bas de la photographie sera placée l'ins
cription suivante
En souvenir de la défense victorieusement
soutenue par eux devant la Cour d'assises du
Hainaut, durant trois semaines de Mai en l'an
1889, dans un unique et çuissant sentiment de
justice et de confraternité pour faire respecter
la liberté d'association, la liberté d'opinion et
les droits de leurs frères ouvriers, dix-neuf
avocats des barreaux de Mons, de Bruxelles, de
Charleroi, ci-dessous dénommés par rang d'an
cienneté, se sont distribué ce fragile mais pré
cieux témoignage de leurs efforts, de leur union
et de leur amitié. (Suivent les noms des défen
seurs).
Comme de règle, après une excursion au
château d'Havré, un banquet a réuni, le soir, les
dix-neuf avocats l'hôtel de l'Espérance.
Dimanche soir, vers dix heures, la ville était
mise en émoi le tocsin avait annoncé un incen
die. En moins de dix minutes, tout le corps des
Chez M. Oraux.
LA SOIREE.
Séance du 11 Juin.
Fausse alerte.